RÉSUMÉ DE LA LOI DES PHÉNOMÈNES SPIRITES

Allan Kardec

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RÉSUMÉ DE LA LOI DES PHÉNOMÈNES SPIRITES

Les personnes étrangères au Spiritisme, n'en comprenant ni le but ni les moyens, s'en font presque toujours une idée complètement fausse. Ce qui leur manque surtout, c'est la connaissance du principe, la clef première des phénomènes; faute de cela, ce qu'elles voient et ce qu'elles entendent est sans profit, et même sans inlérôt pour elles. Il est un fait acquis à l'expérience, c'est que la vue seule ou le récit des phénomènes ne suffit point pour convaincre. Celui même qui est témoin de faits capables de le confondre est plus étonné que convaincu; plus l'effet lui semble extraordinaire, plus il le suspecte. Une élude préalable sérieuse peut seule amener la conviction; souvent même elle suffit pour changer entièrement le cours des idées. Dans tous les cas, elle est indispensable pour l'intehigence des phénomènes lea plus simples. A défaut d'une instruction complète, un résumé succinct de la loi qui régit les manifestations suffira pour faire envisager la chose sous son véritable jour par les personnes qui n'y sont point encore initiées. C'est ce premier jalon que nous donnons dans la petite instruction ci-après.

Celte instruction est surtout faite en vue des personnes qui ne possèdent aucune notion du Spiritisme. Dans les groupes ou réunions spirites, où se souvent des assistants novices, elle peut utilement servir de préambule aux séances, selon les besoins.





1. Le Spiritisme est à la fois une science d'observation et une doctrine philosophique. Comme science pratique, il consiste dans les relations que l'on peut établir avec les Esprits; comme philosophie, il comprend toutes lus consé- quences morales qui découlent de ces relations.

2. Les Esprits ne sont point, comme on se le figure souvent, des êtres à part dans la création; ce sont les âmes de ceux qui ont vécu sur la terre ou dans d'autres mondes. Les âmes ou Esprits sont donc une seule et même chose; d'où il suit que quiconque croit à l'existence de l'âme croit, par cela même, à celle des Esprits. Nier les Esprits serait nier l'âme.

3. On se fait généralement une idée irès-fausse de l'état des Esprits; ce ne sont point, comme quelques-uns le croient, des êtres vagues et indéGnis, ni desflammescomme les feux follets, ni des fantômes comme dans les contes de revenants. Ce sont des êtres semblables à nous, ayant un corps comme le nôtre, maisfluidiqueet invisible dans l'état normal.

4. Lorsque l'âme es» unie au corps pendant la vie, elle a une double enveloppe : l'une lourde, grossière et des- tructible qui est le corps; l'autre fluidique, légère et indestructible appelée périsprit. Le périsprit est le lien qui unit l'âme et le corps; c'est par son intermédiaire que l'âme fait agir le corps, et qu'elle perçoit les sensations éprouvées par le corps.

L'union de l'âme, du périsprit et du corps matériel constitue l'homme; l'âme et le périsprit séparés du corps constituent l'être appelé Esprit.

5. La mort est la destruction de l'enveloppe corporelle; l'âme abandonne cette enveloppe, comme on quitte un vêtement usé, ou comme le papillon quitte sa chrysalide; mais elle conserve son corps fluidique ou périsprit.

La mort du corps débarrasse l'Esprit de l'enveloppe qui l'attachait à la terre et le faisait souffrir; une fois délivré de ce fardeau, il n'a plus que son corps éthéré qui lui permet de parcourir l'espace et de franchir les distances avec la rapidité de la pensée.

6. Les Esprits peuplent l'espace ; ils constituent le monde invisible qui nous entoure, au milieu duquel nous vivons, et avec lequel nous sommes sans cesse en contact.

7. Les Esprits ont toutes les perceptions qu'ils avaient sur la terre, mais à un plus haut degré, parce que leurs facultés ne sont pas amorties par la matière ; ils ont des sensations qui nous sont inconnues; ils voient et entendent des choses que nos sens limités ne nous permettent ni de voir ni d'entendre. Pour eux il n'y a point d'obscurité, sauf ceux dont la punition est d'être temporairement dans les ténèbres. Toutes nos pensées se répercutent en eux, et ils y lisent comme dans un livre ouvert; de sorte que ce que nous pouvions cacher à quelqu'un de son vivant, nous ne le pouvons plus dès qu'il est Esprit.

8. Les Esprits conservent les affections sérieuses qu'ils avaient sur la terre; ils se plaisent à revenir yers ceux qu'ils ont aimés, surtout lorsqu'ils y sont attirés par la pensée et les sentiments affectueux qu'on leur porte, tandis qu'ils sont indifférents pour ceux qui n'ont pour eux que de l'indifférence.

9. Une idée à peu près générale chez les personnes qui ne connaissent pas le Spiritisme est de croire que les Esprits, par cela seul qu'ils sont dégagés de la matière, doivent tout savoir et posséder la souveraine sagesse. C'est là une erreur grave.

Les Esprits n'étant que les âmes des hommes, celles-ci n'ont point acquis la perfection en quittant leur enveloppe terrestre. Le progrès de l'Esprit ne s'accomplit qu'avec le temps, et ce n'est que successivement qu'il se dépouille de ses imperfections, qu'il acquiert les connaissances qui lui manquent. Il serait aussi illogique d'admettre que l'Esprit d'un sauvage ou d'un criminel devient tout à coup savant et vertueux, qu'il serait contraire à la justice de Dieu de penser qu'il restera perpétuellement dans son infériorité.

Comme il y a des hommes de tous les degrés de savoir et d'ignorance, de bonté et de méchanceté, il en est de même des Esprits. Il y en a qui ne sont que légers et espiègles, d'autres sont menteurs, fourbes, hypocrites, méchants, vindicatifs; d'autres, au contraire, possèdent les vertus les plus sublimes et le savoir à un degré inconnu sur la terre. Cette diversité dans la qualité des Esprits est un des points les plus importants à considérer, car elle explique la nature bonne ou mauvaise des communications que l'on reçoit; c'est à les distinguer qu'il faut surtout s'attacher. (Livre des Esprits} IQQ, Échelle spivile.—Livre
des Médiums, chap. xxiv.



10. Les Esprits peuvent se manifester de bien des manières différentes : par la vue, par l'audition, par le toucher, par des bruits, le mouvement des corps, l'écriture, le dessin, la musique, etc. Ils se manifestent par l'intermédiaire de personnes douées d'une aptitude spéciale pour chaque genre de manifestation, et que l'on distingue sous le nom de médiums. C'est ainsi qu'on dislingue les médiums voyants, parlants, auditifs, sensilifs, à effets physiques, dessinateurs, typteurs, écrivains, etc. Parmi les médiums écrivains il y a des variétés nombreuses, selon la nature des communications qu'ils sont aptes h recevoir.

11. Le fluide qui compose le péri s prit pénètre tous les corps et les traverse comme la lumière traverse les corps transparents; aucune matière ne lui fait obstacle. C'est pour cela que les Esprits pénètrent partout, dans les endroits le plus hermétiquement clos ; c'est une idée ridicule de croire qu'ils s'introduisent par une petite ouverture, comme le trou d'une serrure ou le tuyau de la cheminée.

12. Le périsprit, quoique invisible pour nous dans l'étar normal, n'en est pas moins une matière élhérée. L'Esprit peut, dans certains cas, lui faire subir une sorte de modification moléculaire qui le rende visible et même tangible; c'est ainsi que se produisent les apparitions. Ce phénomène n'est pas plus extraordinaire que celui de la vapeur qui est invisible quand elle est très-raréfiée, et qui devient visible quand elle est condensée.

Les Esprits qui se rendent visibles se présentent presque toujours sous les apparences qu'ils avaient de leur vivant, et qui peut les faire reconnaître.

13. C'est à l'aide de son périsprit que l'Esprit agissait sur son corps vivant; c'est encore avec ce même fluide qu'il se manifeste en agissant sur la matière inerte, qu'il produit les bruits, les mouvements de tables et autres objets qu'il soulève, renverse ou transporte. Ce phénomène n'a rien de surprenant si l'on considère que, parmi nous, les plus puissants moteurs se trouvent dans les fluides les plus raréfiés et môme impondérables, comme l'air, la va- peur et l'électricité.

C'est également à l'aide de son périsprit qre l'Esprit fait écrire, parler ou dessiner les médiums; n'ayant pas de corps tangible pour agir ostensiblement quand il veut se manifester, il se sert du corps du médium dont il emprunte les organes qu'il fait agir comme si c'était son propre corps, et cela par l'effluve fluidique qu'il déverse sur lui.

14. Dans le phénomène désigné sous le nom de tables mouvantes ou parlantes, c'est par le même moyen que l'Esprit agit sur la table, soit pour la faire mouvoir sans signification déterminée, soit pour lui faire frapper des coups intelligents indiquant les lettres de l'alphabet, pour former des mots et des phrases, phénomène désigné sous le nom de typtologie. La table n'est ici qu'un instrument dont il se sert, comme il le fait du crayon pour écrire; il lui donne une vitalité momentanée par lefluidedont il la pénètre, mais il ne s'identiGe point avec elle. Les personnes qui, dans leur émotion, en voyant se manifester un être qui leur est cher, embrassent la table, font un acte ridicule, car c'est absolument comme si elles embrassaient le bâton dont un ami se sert pour frappei des coups. Il en est de même de celles qui adressent la parole à la table, comme si l'Esprit était enfermé dans le bois, ou comme si le bois était devenu Esprit.

Lorsque des communications ont lieu par ce moyen, il faut se représenter l'Esprit, non dans la table, mais à côté, tel qu'il était de son vivant, et tel qu'on le verrait si, à ce moment, il pouvait se rendre visible. La mémo chose a lieu dans les communications par récriture; on verrait l'Esprit à côté du médium, dirigeant sa main, ou lui transmettant sa pensée par un courant fluidique.

15. Lorsque la table se détache du sol etflottedans l'es pace sans point d'appui, l'Esprit ne la soulève pas à foro. de bras, mais l'enveloppe et la pénètre d'uLe sorte d'atmo- sphère fluidique qui neutralise l'effet de la gravitation, comme le fait l'air pour les ballons et les cerfs-volants. Le fluide dont elle est pénétrée lui donne momentanément une légèreté spécifique plus grande. Lorsqu'elle est clouée au sol, elle est dans un cas analogue à celui de la cloche pneumatique sous laquelle on fait le vide. Ce ne sont ici que des comparaisons pour montrer l'analogie des effets, et non la similitude absolue des causes.

On comprend, d'après cela, qu'il n'est pas plus difficile à l'Esprit d'enlever une personne que d'enlever une table, de transporter un objet d'un endroit à un autre, ou de le lancer quelque part ; ces phénomènes se produisent par la même loi.

Lorsque la table poursuit quelqu'un, ce n'est pas l'Esprit qui court, car il peut rester tranquillement à la môme place, mais qui lui donne l'impulsion par un courant flui- dique à l'aide duquel il la fait mouvoir à son gré.

Lorsque des coups se font entendre dans la table ou ail- leurs, l'Esprit ne frappe ni avec sa main, ni avec un objet quelconque; il dirige sur le point d'où part le bruit, un jet defluidequi produit l'effet d'un choc électrique. Il modifie le bruit, comme on peut modifier les sons produits par l'air.

16. L'obscurflé nécessaire à la production de certains effets physiques prête sans doute à la suspicion et à la fraude, mais ne prouve rien contre la possibilité du fait. On sait qu'en chimie il est des combinaisons qui ne peuvent s'opérer à la lumière; que des compositions et des décompositions ont lieu sous l'action du fluide lumineux; or, tous les phénomènes spirites étant le résultat de la combinaison des fluides propres de l'Esprit et du médium, et ces fluides étant de la matière, il n'y a rien d'étonnant à ce que, dans certains cas, le fluide lumineux soit contraire à cette com- binaison.

17.Les Esprits'supérieurs ne s'occupent que des communi- cations intelligentes en vue de notre instruction; les manifestations physiques ou purement iaiérielles sont plus spécialement dans les attributions des Esprits inférieurs, vulgairement désignés sous le nom d'Esprits frappeurs, comme, parmi nous, les tours de force sont le fait des saltimbanques et non des savants.

18. Les Esprits sont libres; ils se manifestent quand ils veulent, à qui il leur convient, et aussi quand ils le peuvent, car ils n'en ont pas toujours la possibilité. Ils ne sont ans ordres et au caprice de qui que ce soil, et il n'est donné à personne de les faire venir contre leur gré, ni de leur faire dire ce qu'ils veulent taire; de sorte que nul ne peut affirmer qu'un Esprit quelconque viendra à son appel à un moment déterminé, ou répondra à telle ou telle question. Dire le contraire, c'est prouver l'ignorance absolue des principes les plus élémentaires du Spiritisme; le charlatanisme seul a des sources infaillibles.


19. Il est des personnes qui obtiennent régulièrement et en quelque sorte à volonté la production de certains phé- nomènes; mais il est à remarquer que ce sont toujours des effets purement physiques, plus curieux qu'instructifs, et qui se produisent constamment dans des conditions analogues. Les circonstances dans lesquelles ils s'obtien- nent sont de nature à inspirer des doutes d'autant plus légitimes sur leur réalité qu'ils sont généralement l'objet d'une exploitation, et qu'il est souvent difficile de distinguer la médiumnité réelle de la prestidigitation. Des phénomè- nes de ce genre peuvent cependant être le produitd'une médiumnité véritable, car il se peut que des Esprits de bas étage, qui peut-être ont fait ce métier de leur vivant, se complaisent à ces sortes d'exhibitions; mais il serait absurde de penser que des Esprits tant soit peu élevés s'amusent à faire la parade.

Ceci n'infirme nullement le principe de la liberté des Esprits, ceux qui viennent ainsi le font parce que cela leur platt, mais non parce qu'ils y sont contraints, et du moment où il ne leur conviendrait pas de venir, si l'individu est vraiment médium, aucun effet ne se produira. Les plus puissants médiums à effets physiques ou autres, ont des temps d'interruption indépendants de leur volonté; les charlatans n'en ont jamais.

Du reste, ces phénomènes, en les supposant réels, ne sont qu'une application très-partielle de la loi qui régit les rapports du monde corporel avec le monde spirituel, mais ne constituent pas le spiritisme; de sorte que leur négation n'infirmerait en rien les principes généraux de la doctrine.

20. Certaines manifestations spirites se prêtent assez facilement à une imitation plus ou moins grossière; mais de ce qu'elles ont pu être exploitées, comme tant d'autres phénomènes, par la jonglerie et la prestidigitation, il serait absurde d'en conclure qu'elles n'existent pas. Pour celui qui a étudié et qui connaît les conditions normales dans les- quelles elles peuvent se produire, il est aisé de distinguer l'imitation de la réalité; l'imitation, du reste, ne saurait ja- mais être complète et ne peut abuser que l'ignorant inca- pable de saisir les nuances caractéristiques du phénomène véritable.

21. Les manifestations qu'il est le plus facile d'imiter sont certains effets physiques, et les effets intelligents vul- gaires, tels que les mouvements, les coups frappés, les apports, l'écriture directe, les réponses banales, etc.; il n'en est pas de môme des communications intelligentes d'une haute portée ou de la révélation de choses notoirement inconnues du médium; pour imiter les premiers, il ne faut que de l'adresse; pour simuler les autres, il faudrait presque tou- jours une instruction peu commune, une supériorité intellectuelle hors ligne et une faculté d'improvisation pour ainsi dire universelle, ou le don de la divination.

22. Les productions de spectres sur les théâtres ont été présentées à tort comme ayant des rapports avec l'appari- tion des Esprits, dont elles ne sont qu'une grossière et imparfaite imitation. Il faut ignorer les premiers éléments du Spiritisme pour y voir la moindre analogie, et croire que c'est à cela qu'on s'occupe dans les réunions spirites. Les Esprits ne se rendent visibles au commandement de personne, mais de leur propre volonté, et dans des conditions spéciales qu'il n'est au pouvoir de qui que ce soit de pro- voquer.

23. Les évocations spirites ne consistent point, comme quelques-uns se le figurent, à faire revenir les morts avec l'appareil lugubre de la tombe. Ce n'est que dans les ro • mans, dans les contes fantastiques de revenants et au théâtre qu'on voit les morls décharger sortir de leurs sépulcres, affublés de linceuls et faisant claquer leurs os. Le Spiritisme, qui n'a jamais fait de miracles, n'a pas plus fait celui-là que d'autres, et jamais il n'a fait revivre un corps mort; quand le corps est dans la fosse, il y est bien définitivement; mais l'être spirituel,fluidique,intelligent n'y a point été mis avec son enveloppe grossière; il s'en est séparé au mo- ment de la mort, et une fois la séparation opérée il n'a plus rien de commun avec elle.

24. La critique malveillante s'est plu à représenter les communications spirites comme entourées des pratiques ridicules et superstitieuses de la magie et de la nécromancie. Nous dirons simplement qu'il n'y a, pour communiquer avec les Esprits, ni jours, ni heures, ni lieux plus propices les uns que les autres; qu'il ne faut, pour les évoquer, ni formules, ni paroles sacramentelles ou cabalistiques; qu'il n'est besoin d'aucune préparation ni d'aucune initiation ; que l'emploi de tout signe ou objet matériel, soit pour les attirer, soit pour les repousser, est sans effet et que la pensée suffit; enfin que les médiums reçoivent leurs communications aussi simplement et aussi naturellement que si elles étaient dictées par une personne vivante sans sortir de l'état normal. Le charlatanisme seul pourrait affecter des ma- nières excentriques et ajouter des accessoires ridicules.

L'appel des Esprits se fait au nom de Dieu, avec respect recueillement; c'est la seule chose qui soit recommandée aux gens sérieux qui veulent avoir des rapports avec des Esprits sérieux.

25. Les communications intelligentes que l'on reçoit des Esprits peuvent être bonnes ou mauvaises, justes ou faus- Bes, profondes ou légères, selon la nature des Esprits qui se manifestent. Ceux qui prouvent de la sagesse et du savoir sont des Esprits avancés qui ont progressé; ceux qui prou- vent de l'ignorance et de mauvaises qualités sont des Esprits encore arriérés, mais chez qui le progrès se fera avec le temps.

Les Esprits ne peuvent répondre que sur ce qu'ils savent, selon leur avancement, et, de plus, sur ce qu'il leur est permis de dire, car il est des choses qu'ils ne doivent pas ré- véler, parce qu'il n'est pas encora donné aux hommes de toutconnaltre.

26. De la diversité dans Tes qualités et les aptitudes des Espiits, il résulte qu'il ne suffit pas de s'adresser à un Esprit quelconque pour avoir une réponse juste h toute question, car, sur beaucoup de choses, il ne peut donner que son opinion personnelle, qui peut être juste ou fausse. S'il est sage, il avouera son ignorance sur ce qu'il ne sait pas ; s'il est léger ou menteur, il répondra sur tout sans se soucier de la vérité; s'il est orgueilleux, il donnera son idée comme une vérité absolue. Il y aurait donc imprudence et légèreté à accepter sans contrôle tout ce qui vient des Es- prits. C'est pourquoi il est essentiel d'être édifié sur la nature de ceux auxquels on a affaire. (Livre des Médium, n"267.)

27. On reconnaît la qualité des Esprits à leur langage; celui des Esprits vraiment bons et supérieurs est toujours digne, noble, logique, exempt de contradiction; il respire la sagesse, la bienveillance, la modeslie et la morale la plus pure; il est«concis et sans paroles inutiles. Chez les Esprits inférieurs, ignorants ou orgueilleux, le vide des idées est presque toujours compensé par l'abondance des paroles. Toute pensée évidemment fausse, toute maxime contraire à la saine morale, tout conseil ridicule, toute expression grossière, triviale ou simplement frivole, enfin toute marque de malveillance, de présomption ou d'arrogance sont des signes incontestables d'infériorité chez un Esprit.

28. Le but providentiel des manifestations est de convaincre les incrédules que tout ne finit pas pour l'homme avec la vie terrestre, et de donner aux croyant? des idées plus justes sur l'avenir. Les bous Esprits viennent nous instruire en vue de notre amélioration et de notre avancement, et non pour nous révéler ce que nous ne devons pas encore savoir, ou ce que nous ne devons apprendre que par notre travail. S'il suffisait d'interroger les Esprits pour obtenir la solution de toutes les difficultés scientifiques, ou pour faire des découvertes et des inventions lucratives, tout ignorant pourrait devenir savant à bon marché, et tout paresseux pourrait s'enrichir sans peine; c'est ce que Dieu ne veut pas. Les Esprits aident l'homme de génie par l'inspiration occulte, mais ne l'exemptent ni du travail, ni des recherches, afin de lui en laisser le mérite.

29. Ce serait avoir une idée bien fausse des Esprits que de voir en eux les auxiliaires des diseurs de bonne aventure ; les Esprits sérieux refusent de s'occuper des choses futiles; les Esprits légers et moqueurs s'occupent de tout, répondent à tout, prédisent tout ce qu'on veut, sans s'inquiéter de la vérité, et se font un malin plaisir de mystifier les gens trop crédules ; c'est pourquoi il est essentiel d'être parfaitement fixé sur la nature des questions qu'on peut adresser aux Esprits. {Livre des Médiums, n° 286 : Questions qu'on peut adresser aux Esprits.)

30. Les manifestations ne sont donc point destinées à servir les intérêts matériels, dont le soin est laissé à l'intelligence, au jugement et à l'activité de l'homme. Ce serait en vain qu'on tenterait de les employer pour connaître l'avenir, découvrir des trésors cachés, recouvrer des héritages, ou trouver des moyens de s'enrichir. Leur utilité est dans les conséquences morales qui en découlent ; mais n'eusseut-elles pour résultat que de faire connaître une nouvelle loi de la nature, de démontrer matériellement l'existence de l'âme et son immortalité, ce serait déjà beaucoup, car ce serait une large voie nouvelle ouverte à la philosophie.

31. On peut voir, par ce peu de mots, que les manifesta- tions spiriles, de quelque nature qu'elles soient, n'ont rien de surnaturel ni de merveilleux. Ce sont des phénomènes qui se produisent en vertu de la loi qui régit les rapports du monde corporel et du monde spirituel, loi tout aussi naturelle que celle de l'électricité, de la gravitation, etc. Le Spiritisme est la science qui nous fait connaître cette loi, comme la mécanique nous fait connaître la loi du mouvement, l'optique celle de la lumière. Les manifestations spirites, étant dans la nature, se sont produites à toutes les époques; la loi qui les régit étant connue nous explique une foule de problèmes regardés comme insolubles ; c'est la clef d'une multitude de phénomènes exploités et amplifiés par la superstition.

32. Le merveilleux étant complètement écarté, ces phé- nomènes n'ont plus rien qui répugne à la raison, car ils viennent prendre place à côté des autres phénomènes naturels. Dans les temps d'ignorance, tous les effets dont on ne connaissait pas la cause étaient réputés surnaturels; les découvertes de la science ont successivement restreint le cercle du merveilleux; la connaissance de cette nouvelle loi vient le réduire à néant. Ceux donc qui accusent le Spiritisme de ressusciter le merveilleux prouvent par cela même qu'ils parlent d'une chose qu'ils ne connaissent pas.




33. Le médium ne possède que la faculté de communi- quer, mais la communication effective dépend de la volonté des Esprits. Si les Esprits ne veulent pas se manifester, le médium n'obtient rien; il est comme un instrument sans musicien.

34. La facilité des communications dépend du degré d'affinité qui existe entre les fluides du médium et de l'Es- prit. Chaque médium est ainsi plus ou moins apte à recevoir l'impression ou impulsion de la pensée de tel ou tel Esprit; il peut être un bon instrument pour l'un et un mauvais pour un autre. Il en résulte que, deux médiums également bien doués étant à côté l'un de l'autre, un Esprit pourra se manifester par l'un et non par l'autre.

C'est donc une erreur de croire qu'il suffit d'être médium pour recevoir avec une égale facilité des communications de tout Esprit. Il n'existe pas de médiums universels. Les Esprits recherchent de préférence les instruments qui vibrent à leur unisson.

Sans l'harmonie, qui seule peut amener l'assimilation fluidique, les communications sont impossibles, incomplètes ou fausses. Elles peuvent être fausses, parce qu'à défaut de l'Esprit désiré il n'en manque pas d'autres prêts a saisir l'occasion de se manifester, et qui se soucient fort peu de dire la vérité.

35. Un des plus grands écueils de la médiumnité, c'est l'obsession, c'est-à-dire l'empire que certains Esprits peu- vent exercer sur les médiums, en s'imposant à eux sous les noms apocryphes et en les empochant de communiquer avec d'autres Esprits.

36. Ce qui constitue le médium proprement dit, c'est la faculté; sous ce rapport, il peut être plus ou moins formé, plus ou moins développé. Ce qui constitue le médium sûr, celui qu'on peut véritablement qualifier de bon médium, c'est l'application de la faculté, l'aptitude à servir d'inter- prète aux bons Esprits. (Livre des Médiums, chap. XXIII.)

37. La médiumnité est une faculté essentiellement mo- bile et fugitive, par la raison qu'elle est subordonnée à la volonté des Esprits; c'est pour cela qu'elle est sujette à des intermittences. Ce motif, et le principe même d'après lequel s'établit la communication, sont des obstacles à ce qu'elle devienne une profession lucrative, puisqu'elle ne saurait être ni permanente, ni applicable à tous les Esprits, et qu'elle peut faire défaut au moment où l'on en aurait be- soin. Il n'est pas rationnel d'ailleurs d'admettre que des Esprits sérieux se mettent à la disposition du premier venu qui voudrait les exploiter.

38. La propension des incrédules est généralement de suspecter la bonne foi des médiums, et de supposer l'emploi de moyens frauduleux. Outre qu'à l'égard de certaines personnes cette supposition est injurieuse, il faut avant tout se demander quel intérêt elles pourraient avoir à tromper et à jouer ou faire jouer la comédie. La meilleu-e garantie de sincérité est dans le désintéressement absolu, car là où il n'y a rien à gagner le charlatanisme n'a pas de raison d'être.

Quant à la réalité des phénomènes, chacun peut la constater, si l'on se place dans les conditions favorables, et si l'on apporte à l'observation des faits la patience, la persévérance et l'impartialité nécessaires.



39. Les Esprits sont attirés par la sympathie, la similitude des goûts et des caractères, l'intention qui fait désirer leur présence. Les Esprits supérieurs ne vont pas plus dans les réunions futiles qu'un savant de la terre n'irait dans une assemblée de jeunes étourdis. Le simple bon sens dit qu'il n'en peut être autrement; ou, s'ils y vont parfois, c'est pour donner un conseil salutaire, combattre les vices, tâcher de ramener dans la bonne voie; s'ils ne sont pas écoutés, ils se retirent. Ce serait avoir une idée complètement fausse de croire que des Esprits sérieux puissent se complaire à répondre à des futilités, à des questions oiseuses qui ne prouvent ni attachement ni respect pour eux, ni désir réel de s'instruire, et encore moins qu'ils puissent venir se mettre en spectacle pour l'amusement des curieux. Ils ne l'eussent pas fait de leur vivant, ils ne peuvent le faire après leur mort.

40. La frivolité des réunions a pour résultat d'attirer les Esprits légers qui ne cherchent que les occasions de tromper et de mystifier. Par la même raison que les hommes graves et sérieux ne vont pas dans les assemblées légères, tes Esprits sérieux ne vont que dans les réunions sérieuses dont le but est l'instruction et non la curiosité; c'est dans les réunions de ce genro que les Esprits supérieurs se plaisent à donner leurs enseignements.

41. De ce qui précède il résulte que toute réunion spirite, pour être profitable, doit, comme première condition, être sérieuse et recueillie; que tout doit s'y passer respectueusement, religieusement et avec dignité, si l'on veut obtenir le concours habituels des bons Esprits. Il ne faut pas oublier que, si ces mêmes Esprits s'y fussent présenté! de leur vivant, on aurait eu pour eux des égards auxquels ils ont encore plus de droit après leur mort.

42. En vain allègue-t-on l'utilité de certaines expériences curieuses, frivoles et amusantes, pour convaincre les incrédules : c'est à un résultat tout opposé qu'on arrive. L'incrédule, déjà porté à se railler des croyances les plus sacrées, ne peut voir une chose sérieuse dans ce dont on fait une plaisanterie; il ne peut être porté à respecter ce qui ne iui est pas présenté d'une manière respectable; aussi des réunions futiles et légères, de celles où il n'y a ni ordre, ni gravité, ni recueillement, il emporte toujours une mauvaise impression. Ce qui peut surtout le convaincre, c'est la preuve de la présence d'êtres dont la mémoire lui est chère; c'est devant leurs paroles graves et solennelles, c'est devant les révélations intimes qu'on le voit s'émouvoir et pâlir. Mais, par cela même qu'il a plus de respect, de vénération, d'attachement pour la personne dont l'âme se présente à lui, il est choqué, scandalisé de la voir venir dans une assemblée irrespectueuse, au milieu des tables qui dansent et des lazzis des Esprits légers; tout incrédule qu'il est, sa conscience repousse cette alliance du sérieux et du frivole, du religieux et du profane, c'est pourquoi il taxe tout cela de jonglerie, et sort souvent moins convaincu qu'il n'était entré.

Les réunions de cette nature font toujours plus de mal que de bien, car elles éloignent de la doctrine plus de personnes qu'elles n'y en amènent , sans compter qu'elles prêtent leflancà la critique détracteurs qui y trouvent des motifs fondés de raillerie.



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