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REVUE SPIRITE - JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1860 > Octobre
Octobre
Réponse de M. Allan Kardec à la Gazette de Lyon Sous le titre de Une séance chez les Spirites, la Gazette de Lyon a publié dans son n° du 2 août 1860, l'article suivant, auquel M. Allan Kardec, pendant son séjour à Lyon, a fait la réponse qu'on trouvera ci-après, mais que ce journal n'a pas encore jugé à propos de reproduire.
« On appelle Spirites certains hallucinés qui, ayant rompu avec toutes les croyances religieuses de leur époque et de leur pays, font néanmoins profession de se croire en rapport avec les Esprits.
Enfanté par les tables tournantes, le Spiritisme n'est cependant qu'une des mille formes de cet état pathologique dans lequel le cerveau humain peut tomber, lorsqu'il se laisse aller à ces mille aberrations dont l'antiquité, le moyen âge et les temps actuels n'ont donné que trop d'exemples.
Condamnées prudemment par l'Eglise catholique, toutes ces recherches mystérieuses qui sortent du domaine des faits positifs, n'ont d'autre résultat que de produire la folie chez ceux qui s'en occupent, en supposant que cet état de folie ne soit pas déjà passé à l'état chronique dans le cerveau des adeptes, ce qui est loin d'être démontré.
Les Spirites ont un journal à Paris, et il suffit d'en lire quelques passages pour s'assurer que nous n'exagérons rien. L'ineptie des questions adressées aux Esprits qu'on évoque n'a d'égale que l'ineptie de leurs réponses, et l'on peut leur dire avec raison que ce n'est pas la peine de revenir de l'autre monde pour dire tant de niaiseries.
Bref, cette folie nouvelle, renouvelée des anciens, vient de s'abattre sur notre ville. Lyon possède des Spirites, et c'est chez de simples canus que les Esprits daignent se manifester.
L'antre de Trophonius est située (sic) dans un atelier, le grand-prêtre du lieu est un ouvrier en soie, et la sibylle est son épouse ; les adeptes sont généralement des ouvriers, car on n'y reçoit pas facilement ceux qui, par leur extérieur, annoncent trop d'intelligence : les Esprits ne daignant se manifester qu'aux simples. C'est probablement ce qui nous a valu d'y être admis.
Invité à assister à une des réunions hebdomadaires des Spirites lyonnais, nous avons pénétré dans un atelier renfermant quatre métiers, dont un se trouvait dépourvu de travail. C'est là, entre ces quatre potences que la sibylle a pris place en face d'une table carrée, sur laquelle s'étalait un cahier flanqué d'une plume d'oie. Remarquez bien que nous disons une plume d'oie et non une plume métallique, les Esprits ayant horreur des métaux.
Vingt à vingt-cinq personnes des deux sexes, en y comprenant votre serviteur, faisaient cercle autour de la table.
Après un petit speech du grand-prêtre sur la nature des Esprits, le tout débité en style qui devait charmer les Esprits à cause de sa… simplicité, les questions commencèrent.
Un jeune homme s'approche et demande à la sibylle pourquoi huit jours avant les combats, soit en Crimée soit en Italie, il s'était toujours vu appelé autre part.
L'inspirée (c'est le nom qu'on lui donne) prenant la plume d'oie, la promène un instant sur le papier, où elle trace des signes cabalistiques, puis elle prononce cette formule : « Mon Dieu, faites-moi la grâce de nous éclairer dans cette affaire ! » Ensuite elle ajoute « Je lis la réponse suivante : C'est que vous êtes destiné à vivre pour instruire et éclairer vos frères. »
C'est un adepte influent que l'on veut gagner à la cause évidemment ; de plus il a été soldat, c'est peut-être un ex-zouave, n'allons pas nous faire une mauvaise affaire et passons.
Un autre jeune homme s'approche à son tour et demande : Si l'Esprit de son père l'a accompagné et protégé dans les combats ?
Réponse : Oui.
Nous avons pris à part ce jeune homme, et nous lui avons demandé depuis quelle époque son père était mort.
- Mon père n'est pas mort, nous a-t-il répondu.
Un vieillard se présente ensuite et demande, notez bien la finesse de la question, renouvelée de Tarquin l'Ancien, si c'est ce qu'il pense qui est la cause que son père lui a donné le nom de Jean ?
Réponse : Oui.
Un vieux soldat du premier empire demande ensuite si les Esprits des soldats du vieil empire n'ont pas accompagné nos jeunes soldats en Crimée et en Italie ?
- Réponse : Oui.
La superstitieuse question suivante est faite après cela par une jeune femme : Pourquoi le vendredi est un mauvais jour ?
La réponse ne se fit pas attendre, et certes elle mérite qu'on y prenne garde, à cause de plusieurs obscurités historiques qu'elle fait disparaître. - C'est, répondit l'inspirée, parce que Moïse, Salomon et Jésus-Christ sont morts ce jour-là.
Un jeune ouvrier lyonnais, comme nous en avons pu juger à son accent, demande à être éclairé sur un fait merveilleux. Un soir, dit-il, ma mère a senti une joue qui touchait la sienne ; elle éveille mon père et moi, nous cherchons partout et nous ne trouvons rien ; mais tout à coup un de nos métiers se met à battre, nous nous approchons et il s'arrête ; mais un autre se met à battre à l'extrémité de l'atelier : nous étions terrifiés, et ça a bien été pis quand nous les avons vus tous travailler en même temps sans que nous vissions personne.
- C'est, répond la sibylle, votre grand-père qui venait demander des prières.
A quoi le jeune homme répondit d'un air qui devait lui donner un facile accès dans le sanctuaire : C'est bien ça, le pauvre vieux, on lui avait promis des messes qu'on ne lui a pas données.
Un autre ouvrier demande pourquoi, à plusieurs reprises, le fléau de sa balance s'est élevé tout seul ?
- C'est un Esprit frappeur, répond l'inspirée, qui a produit ce phénomène.
- Très bien, répond l'ouvrier, mais j'ai arrêté le prodige en mettant un morceau de plomb dans le plateau le plus faible.
- C'est tout simple, reprend la devineresse, les Esprits ont horreur du plomb à cause du mirage.
Chacun veut avoir l'explication du mot mirage.
Là on voit s'arrêter le pouvoir de la sibylle : Dieu ne veut pas, dit-elle expliquer cela, pas même à moi !
C'était une raison majeure devant laquelle tout le monde s'inclina.
Le grand prêtre alors, prévoyant des objections intérieures, prit la parole et dit : - Sur cette question, messieurs, il faut s'abstenir, parce que nous serions entraînés dans des questions scientifiques qu'il nous est défendu de résoudre.
A ce moment les questions se multiplièrent et se croisèrent :
Si les signes qui nous apparaissent dans le ciel depuis quelque temps (les comètes) sont ceux dont parle l'Apocalyse.
- Réponse : Oui, et dans cent quarante ans ce monde n'existera plus.
- Pourquoi Jésus-Christ a dit qu'il y aurait toujours des pauvres ?
- Réponse : Jésus-Christ a voulu parler des pauvres d'esprit ; pour ceux-là Dieu vient de préparer un globe spécial.
Nous ne ferons point remarquer toute l'importance d'une pareille réponse ; qui ne comprend combien nos descendants seront heureux quand ils n'auront plus à craindre de se trouver en contact avec des pauvres d'esprit. Quant aux autres, la réponse de la sibylle laisse heureusement supposer que leur règne est fini ; bonne nouvelle pour les économistes que la question du paupérisme empêche de dormir.
Pour en finir, une femme de 45 à 50 ans s'approche et demande si son Esprit a déjà été incarné et combien de fois ?
Vous eussiez été fort embarrassé pour répondre et moi aussi ; mais les Esprits ont réponse à tout :
- Oui, répond la plume d'oie, il l'a été trois fois : la première, comme fille naturelle d'une respectable princesse russe (ce mot respectable, rapproché du précédent, m'intrigue) ; la deuxième, comme fille légitime d'un chiffonnier de Bohême, et la troisième, elle le sait…
Cet échantillon d'une séance de Spirites lyonnais doit suffire, nous l'espérons, pour démontrer que les Esprits de Lyon valent bien ceux de Paris.
Mais nous demandons s'il ne serait pas bien d'empêcher de pauvres fous de le devenir encore davantage ?
Autrefois, l'Eglise était assez puissante pour imposer silence à de pareilles divagations ; elle frappait peut-être trop fort, c'est vrai, mais elle arrêtait le mal. Aujourd'hui, puisque l'autorité religieuse est impuissante, puisque le bon sens n'a pas assez d'empire pour faire justice de telles hallucinations, l'autre autorité ne devrait-elle pas intervenir en ce cas, et mettre fin à des pratiques dont le moindre inconvénient est de rendre ridicules ceux qui s'en occupent ?C. M. »
« On appelle Spirites certains hallucinés qui, ayant rompu avec toutes les croyances religieuses de leur époque et de leur pays, font néanmoins profession de se croire en rapport avec les Esprits.
Enfanté par les tables tournantes, le Spiritisme n'est cependant qu'une des mille formes de cet état pathologique dans lequel le cerveau humain peut tomber, lorsqu'il se laisse aller à ces mille aberrations dont l'antiquité, le moyen âge et les temps actuels n'ont donné que trop d'exemples.
Condamnées prudemment par l'Eglise catholique, toutes ces recherches mystérieuses qui sortent du domaine des faits positifs, n'ont d'autre résultat que de produire la folie chez ceux qui s'en occupent, en supposant que cet état de folie ne soit pas déjà passé à l'état chronique dans le cerveau des adeptes, ce qui est loin d'être démontré.
Les Spirites ont un journal à Paris, et il suffit d'en lire quelques passages pour s'assurer que nous n'exagérons rien. L'ineptie des questions adressées aux Esprits qu'on évoque n'a d'égale que l'ineptie de leurs réponses, et l'on peut leur dire avec raison que ce n'est pas la peine de revenir de l'autre monde pour dire tant de niaiseries.
Bref, cette folie nouvelle, renouvelée des anciens, vient de s'abattre sur notre ville. Lyon possède des Spirites, et c'est chez de simples canus que les Esprits daignent se manifester.
L'antre de Trophonius est située (sic) dans un atelier, le grand-prêtre du lieu est un ouvrier en soie, et la sibylle est son épouse ; les adeptes sont généralement des ouvriers, car on n'y reçoit pas facilement ceux qui, par leur extérieur, annoncent trop d'intelligence : les Esprits ne daignant se manifester qu'aux simples. C'est probablement ce qui nous a valu d'y être admis.
Invité à assister à une des réunions hebdomadaires des Spirites lyonnais, nous avons pénétré dans un atelier renfermant quatre métiers, dont un se trouvait dépourvu de travail. C'est là, entre ces quatre potences que la sibylle a pris place en face d'une table carrée, sur laquelle s'étalait un cahier flanqué d'une plume d'oie. Remarquez bien que nous disons une plume d'oie et non une plume métallique, les Esprits ayant horreur des métaux.
Vingt à vingt-cinq personnes des deux sexes, en y comprenant votre serviteur, faisaient cercle autour de la table.
Après un petit speech du grand-prêtre sur la nature des Esprits, le tout débité en style qui devait charmer les Esprits à cause de sa… simplicité, les questions commencèrent.
Un jeune homme s'approche et demande à la sibylle pourquoi huit jours avant les combats, soit en Crimée soit en Italie, il s'était toujours vu appelé autre part.
L'inspirée (c'est le nom qu'on lui donne) prenant la plume d'oie, la promène un instant sur le papier, où elle trace des signes cabalistiques, puis elle prononce cette formule : « Mon Dieu, faites-moi la grâce de nous éclairer dans cette affaire ! » Ensuite elle ajoute « Je lis la réponse suivante : C'est que vous êtes destiné à vivre pour instruire et éclairer vos frères. »
C'est un adepte influent que l'on veut gagner à la cause évidemment ; de plus il a été soldat, c'est peut-être un ex-zouave, n'allons pas nous faire une mauvaise affaire et passons.
Un autre jeune homme s'approche à son tour et demande : Si l'Esprit de son père l'a accompagné et protégé dans les combats ?
Réponse : Oui.
Nous avons pris à part ce jeune homme, et nous lui avons demandé depuis quelle époque son père était mort.
- Mon père n'est pas mort, nous a-t-il répondu.
Un vieillard se présente ensuite et demande, notez bien la finesse de la question, renouvelée de Tarquin l'Ancien, si c'est ce qu'il pense qui est la cause que son père lui a donné le nom de Jean ?
Réponse : Oui.
Un vieux soldat du premier empire demande ensuite si les Esprits des soldats du vieil empire n'ont pas accompagné nos jeunes soldats en Crimée et en Italie ?
- Réponse : Oui.
La superstitieuse question suivante est faite après cela par une jeune femme : Pourquoi le vendredi est un mauvais jour ?
La réponse ne se fit pas attendre, et certes elle mérite qu'on y prenne garde, à cause de plusieurs obscurités historiques qu'elle fait disparaître. - C'est, répondit l'inspirée, parce que Moïse, Salomon et Jésus-Christ sont morts ce jour-là.
Un jeune ouvrier lyonnais, comme nous en avons pu juger à son accent, demande à être éclairé sur un fait merveilleux. Un soir, dit-il, ma mère a senti une joue qui touchait la sienne ; elle éveille mon père et moi, nous cherchons partout et nous ne trouvons rien ; mais tout à coup un de nos métiers se met à battre, nous nous approchons et il s'arrête ; mais un autre se met à battre à l'extrémité de l'atelier : nous étions terrifiés, et ça a bien été pis quand nous les avons vus tous travailler en même temps sans que nous vissions personne.
- C'est, répond la sibylle, votre grand-père qui venait demander des prières.
A quoi le jeune homme répondit d'un air qui devait lui donner un facile accès dans le sanctuaire : C'est bien ça, le pauvre vieux, on lui avait promis des messes qu'on ne lui a pas données.
Un autre ouvrier demande pourquoi, à plusieurs reprises, le fléau de sa balance s'est élevé tout seul ?
- C'est un Esprit frappeur, répond l'inspirée, qui a produit ce phénomène.
- Très bien, répond l'ouvrier, mais j'ai arrêté le prodige en mettant un morceau de plomb dans le plateau le plus faible.
- C'est tout simple, reprend la devineresse, les Esprits ont horreur du plomb à cause du mirage.
Chacun veut avoir l'explication du mot mirage.
Là on voit s'arrêter le pouvoir de la sibylle : Dieu ne veut pas, dit-elle expliquer cela, pas même à moi !
C'était une raison majeure devant laquelle tout le monde s'inclina.
Le grand prêtre alors, prévoyant des objections intérieures, prit la parole et dit : - Sur cette question, messieurs, il faut s'abstenir, parce que nous serions entraînés dans des questions scientifiques qu'il nous est défendu de résoudre.
A ce moment les questions se multiplièrent et se croisèrent :
Si les signes qui nous apparaissent dans le ciel depuis quelque temps (les comètes) sont ceux dont parle l'Apocalyse.
- Réponse : Oui, et dans cent quarante ans ce monde n'existera plus.
- Pourquoi Jésus-Christ a dit qu'il y aurait toujours des pauvres ?
- Réponse : Jésus-Christ a voulu parler des pauvres d'esprit ; pour ceux-là Dieu vient de préparer un globe spécial.
Nous ne ferons point remarquer toute l'importance d'une pareille réponse ; qui ne comprend combien nos descendants seront heureux quand ils n'auront plus à craindre de se trouver en contact avec des pauvres d'esprit. Quant aux autres, la réponse de la sibylle laisse heureusement supposer que leur règne est fini ; bonne nouvelle pour les économistes que la question du paupérisme empêche de dormir.
Pour en finir, une femme de 45 à 50 ans s'approche et demande si son Esprit a déjà été incarné et combien de fois ?
Vous eussiez été fort embarrassé pour répondre et moi aussi ; mais les Esprits ont réponse à tout :
- Oui, répond la plume d'oie, il l'a été trois fois : la première, comme fille naturelle d'une respectable princesse russe (ce mot respectable, rapproché du précédent, m'intrigue) ; la deuxième, comme fille légitime d'un chiffonnier de Bohême, et la troisième, elle le sait…
Cet échantillon d'une séance de Spirites lyonnais doit suffire, nous l'espérons, pour démontrer que les Esprits de Lyon valent bien ceux de Paris.
Mais nous demandons s'il ne serait pas bien d'empêcher de pauvres fous de le devenir encore davantage ?
Autrefois, l'Eglise était assez puissante pour imposer silence à de pareilles divagations ; elle frappait peut-être trop fort, c'est vrai, mais elle arrêtait le mal. Aujourd'hui, puisque l'autorité religieuse est impuissante, puisque le bon sens n'a pas assez d'empire pour faire justice de telles hallucinations, l'autre autorité ne devrait-elle pas intervenir en ce cas, et mettre fin à des pratiques dont le moindre inconvénient est de rendre ridicules ceux qui s'en occupent ?C. M. »
Réponse de M. Allan Kardec à Monsieur le rédacteur de la Gazette de Lyon
Monsieur,
On m'a communiqué un article signé C. M., que vous avez publié dans la Gazette de Lyon du 2 août 1860, sous le titre de Une séance chez les Spirites. Dans cet article, si je ne suis attaqué qu'indirectement, je le suis dans la personne de tous ceux qui partagent mes convictions ; mais ceci ne serait rien si vos paroles ne tendaient à fausser l'opinion publique sur le principe et les conséquences des croyances spirites, en déversant le ridicule et le blâme sur ceux qui les professent, et que vous signalez à la vindicte légale. Je vous prie de me permettre quelques rectifications à ce sujet, espérant de votre impartialité que, puisque vous avez cru devoir publier l'attaque, vous voudrez bien publier ma réponse.
Ne croyez pas, Monsieur, que mon but soit de chercher à vous convaincre, ni que je vais vous rendre injure pour injure ; quelles que soient les raisons qui vous empêchent de partager notre manière de voir, je ne songe point à m'en enquérir, et je les respecte si elles sont sincères ; je ne demande que la réciprocité pratiquée entre gens qui savent vivre. Quant aux épithètes inciviles, il n'est pas dans mes habitudes de m'en servir.
Si vous aviez discuté sérieusement les principes du Spiritisme, si vous y aviez opposé des arguments quelconques bons ou mauvais, j'aurais pu vous répondre ; mais toute votre argumentation se bornant à nous qualifier d'ineptes, il ne m'appartient pas de discuter avec vous si vous avez tort ou raison ; je me borne donc à relever ce que vos assertions ont d'inexact, en dehors de toute personnalité.
Il ne suffit pas de dire aux gens qui ne pensent pas comme nous qu'ils sont des imbéciles : ceci est à la portée du premier venu ; il faut leur démontrer qu'ils ont tort ; mais comment le faire, comment entrer dans le vif de la question si l'on n'en sait pas le premier mot ? Or, je crois que c'est le cas où vous vous trouvez, autrement vous auriez employé de meilleures armes que l'accusation banale de stupidité. Quand vous aurez donné à l'étude du Spiritisme le temps moral nécessaire, et je vous préviens qu'il en faut beaucoup ; quand vous aurez lu tout ce qui peut asseoir votre opinion, approfondi toutes les questions, assisté en observateur consciencieux et impartial à quelques milliers d'expériences, votre critique aura quelque poids ; jusque là ce n'est qu'une opinion individuelle qui ne s'appuie sur rien, et au sujet de laquelle vous pouvez à chaque mot être pris en flagrant délit d'ignorance. Le début de votre article en est la preuve.
On appelle Spirites, dites-vous, certains hallucinés qui ont rompu avec toutes les croyances religieuses de leur époque et de leur pays. » Savez-vous, Monsieur, que cette accusation est très grave, et d'autant plus grave qu'elle est à la fois fausse et calomnieuse ? Le Spiritisme est entièrement fondé sur le dogme de l'existence de l'âme, sa survivance au corps, son individualité après la mort, son immortalité, les peines et les récompenses futures. Il ne sanctionne pas seulement ces vérités par la théorie, son essence est d'en donner des preuves patentes ; voilà pourquoi tant de gens qui ne croyaient à rien ont été ramenés aux idées religieuses. Toute sa morale n'est que le développement de ces maximes du Christ : Pratiquer la charité, rendre le bien pour le mal, être indulgent pour son prochain, pardonner à ses ennemis, en un mot agir envers les autres comme nous voudrions qu'on agît envers nous-mêmes. Trouvez-vous donc ces idées bien stupides ? Ont-ils rompu avec toute croyance religieuse ceux qui s'appuient sur les bases mêmes de la religion ? Non, direz-vous, mais il suffit d'être catholique pour avoir ces idées-là ; les avoir, soit ; mais les pratiquer c'est autre chose, à ce qu'il paraît. Est-il bien évangélique à vous, catholique, d'insulter de braves gens qui ne vous ont point fait de mal, que vous ne connaissez pas et qui ont eu assez de confiance en vous pour vous recevoir parmi eux ? Admettons qu'ils soient dans l'erreur ; est-ce en leur prodiguant l'injure, en les irritant que vous le ramènerez ?
Votre article contient une autre erreur de fait qui prouve encore une fois votre ignorance en matière de Spiritisme. Vous dites : Les adeptes sont généralement des ouvriers. Sachez donc, Monsieur, pour votre gouverne, que sur les cinq ou six millions de Spirites qui existent aujourd'hui, la presque totalité appartient aux classes les plus éclairées de la société ; il compte parmi ses adhérents un très grand nombre de médecins dans tous les pays, des avocats, des magistrats, des hommes de lettres, de hauts fonctionnaires, des officiers de tous grades, des artistes, des savants, des négociants, etc., gens que vous rangez bien lestement parmi les ineptes. Mais passons là-dessus. Les mots insulte et injure vous semblent-ils trop forts ? Voyons !
Avez-vous bien pesé la portée de vos paroles quand, après avoir dit que les adeptes sont généralement des ouvriers, vous ajoutez, à propos des réunions lyonnaises : Car on n'y reçoit pas facilement ceux qui, par leur extérieur, annoncent trop d'intelligence ; les Esprits ne daignent se manifester qu'aux simples, c'est probablement ce qui nous a valu d'y être admis. Et plus loin cette autre phrase : Après un Speech sur la nature des Esprits, le tout débité d'un style qui devait charmer les Esprits, à cause de sa simplicité, les questions commencèrent. Je ne rappelle pas vos facéties au sujet de la plume d'oie dont se servait, selon vous, le médium, et autres choses tout aussi spirituelles ; je parle plus sérieusement. Je ne ferai qu'une simple remarque, c'est que vos yeux et vos oreilles vous ont très mal servi, car le médium dont vous parlez ne se sert pas de plume d'oie, et la forme aussi bien que le fond de la plupart des questions et des réponses que vous rapportez dans votre article sont de pure invention ; ce sont donc de petites calomnies à la faveur desquelles vous avez voulu faire briller votre esprit.
Ainsi, selon vous, pour être admis dans ces réunions d'ouvriers, il faut être ouvrier, c'est-à-dire dépourvu de bon sens, et vous n'y avez été introduit que parce qu'on vous a, dites-vous, probablement pris pour un sot. Assurément si l'on avait cru que vous eussiez assez d'esprit pour inventer des choses qui ne sont pas, il est bien certain qu'on vous aurait fermé la porte.
Savez-vous bien, Monsieur, que vous n'attaquez pas seulement les Spirites, mais toute la classe ouvrière, et en particulier celle de Lyon ? Oubliez-vous que ce sont ces mêmes ouvriers, ces canus, comme vous le dites avec affectation, qui font la prospérité de votre ville, par leur industrie ? Sont-ce des gens sans valeur morale que ces ouvriers qui ont produit Jacquard ? d'où sont sortis bon nombre de vos fabricants qui ont acquis leur fortune à la sueur de leur front et à force d'ordre et d'économie ? N'est-ce pas insulter à leur travail que de comparer leurs métiers à d'ignobles potences ? Vous déversez le ridicule sur leur langage ; mais oubliez-vous que leur état n'est pas de faire des discours académiques ? Est-il besoin d'un style tiré au cordeau pour dire ce qu'on pense ? Vos paroles, Monsieur, ne sont pas seulement légères, - j'emploie ce mot par ménagement, - elles sont imprudentes. Si jamais Dieu vous réservait encore des jours néfastes, priez-le qu'ils ne s'en souviennent pas. Ceux qui seront Spirites les oublieront, car la charité le leur commande ; faites donc des vœux pour qu'ils le soient tous, car ils puisent dans le Spiritisme des principes d'ordre social, de respect pour la propriété, et des sentiments religieux.
Savez-vous ce que font ces ouvriers spirites lyonnais que vous traitez avec tant de dédain ? Au lieu d'aller s'étourdir dans un cabaret, ou de se nourrir de doctrines subversives et chimériques ; dans cet atelier que vous comparez dérisoirement à l'antre de Trophonius, au milieu de ces métiers aux quatre potences, ils pensent à Dieu. Je les ai vus pendant mon séjour ici ; j'ai causé avec eux et je me suis convaincu de ce qui suit : Parmi eux, beaucoup maudissaient leur travail pénible : aujourd'hui ils l'acceptent avec la résignation du chrétien, comme une épreuve ; beaucoup voyaient d'un œil envieux et jaloux le sort des riches : aujourd'hui ils savent que la richesse est une épreuve encore plus glissante que celle de la misère, et que le malheureux qui souffre et ne cède pas à la tentation est le véritable élu de Dieu ; ils savent que le vrai bonheur n'est pas dans le superflu, et que ceux qu'on appelle les heureux de ce monde ont aussi de cruelles angoisses que l'or n'apaise pas ; beaucoup se riaient de la prière : aujourd'hui, ils prient, et ont retrouvé le chemin de l'église qu'ils avaient oublié, parce que jadis ils ne croyaient à rien et qu'aujourd'hui ils croient ; plusieurs auraient succombé au désespoir : aujourd'hui qu'ils connaissent le sort de ceux qui abrègent volontairement leur vie, ils se résignent à la volonté de Dieu, parce qu'ils savent qu'ils ont une âme, et qu'avant ils n'en étaient pas certains ; parce qu'ils savent enfin qu'ils ne sont qu'en passant sur la terre, et que la justice de Dieu ne fait défaut à personne.
Voilà, Monsieur, ce que savent et ce que font ces ineptes, comme vous les appelez ; ils s'expriment dans un langage peut-être ridicule, trivial aux yeux d'un homme d'esprit comme vous, mais aux yeux de Dieu le mérite est dans le cœur et non dans l'élégance des phrases.
Ailleurs vous dites : « Autrefois l'Église était assez puissante pour imposer silence à de pareilles divagations ; elle frappait peut être trop fort, c'est vrai, mais elle arrêtait le mal. Aujourd'hui que l'autorité religieuse est impuissante, l'autre autorité ne devrait-elle pas intervenir ? » En effet elle brûlait ; c'est vraiment dommage qu'il n'y ait plus de bûchers. Oh ! déplorables effets du progrès des lumières !
Je n'ai pas pour habitude de répondre aux diatribes ; s'il ne s'était agi que de moi, je n'aurais rien dit ; mais à propos d'une croyance que je me fais gloire de professer, parce que c'est une croyance éminemment chrétienne, vous bafouez des gens honnêtes et laborieux parce qu'ils sont illettrés, oubliant que Jésus lui-même était ouvrier ; vous les excitez par des paroles irritantes ; vous appelez sur eux les rigueurs de l'autorité civile et religieuse, alors qu'ils sont paisibles et comprennent le vide des utopies dont ils se sont bercés, et qui vous ont fait peur : j'ai dû prendre leur défense, tout en leur rappelant les devoirs que la charité commande, et en leur disant que si d'autres manquent à ces devoirs, ce n'est pas une raison pour eux de s'en affranchir. Voilà, Monsieur, les conseils que je leur donne ; ce sont aussi ceux que leur donnent ces Esprits qui ont la sottise de s'adresser à des gens simples et ignorants plutôt qu'à vous ; c'est que probablement ils savent qu'ils en seront mieux écoutés. Voudriez-vous à ce sujet me dire pourquoi Jésus a choisi ses apôtres parmi le peuple, au lieu de les prendre parmi les hommes de lettres ? C'est sans doute parce qu'il n'y avait pas alors des journalistes pour lui dire ce qu'il avait à faire.
Vous direz sans doute que votre critique ne porte que sur la croyance aux Esprits et à leurs manifestations, et non sur les principes sacrés de la religion. J'en suis persuadé ; mais alors pourquoi dire que les Spirites ont rompu avec tous les principes religieux ? C’est que vous ne saviez pas sur quoi ils s'appuient. Cependant vous avez vu là un médium prier avec recueillement, et vous, catholique, vous avez ri d'une personne qui priait !
Vous ne savez probablement pas davantage ce que c'est que les Esprits. Les Esprits ne sont pas autre chose que les âmes de ceux qui ont vécu ; les âmes et les Esprits sont donc une seule et même chose ; de telle sorte que nier l'existence des Esprits, c'est nier l'âme ; admettre l'âme, sa survivance et son individualité, c'est admettre les Esprits. Toute la question se réduit donc à savoir si l'âme, après la mort, peut se manifester aux vivants ; les livres sacrés et les Pères de l'Eglise le reconnaissent. Si les Spirites ont tort, ces autorités se sont également trompées ; pour le prouver il s'agit de démontrer, non par une simple négation, mais par des raisons péremptoires :
1° Que l'être qui pense en nous pendant la vie ne doit plus penser après la mort ;
2° Que s'il pense, il ne doit plus penser à ceux qu'il a aimés ;
3° Que s'il pense à ceux qu'il a aimés, il ne doit plus vouloir se communiquer à eux ;
4° Que s'il peut être partout, il ne peut pas être à nos côtés ;
5° Que s'il est à nos côtés, il ne peut pas se communiquer à nous.
Si vous connaissiez l'état des Esprits, leur nature, et, si je puis m'exprimer ainsi, leur constitution physiologique, telle qu'ils nous la décrivent, et telle que l'observation la confirme, vous sauriez que l'Esprit et l'âme étant une seule et même chose, il n'y a de moins chez l'Esprit que le corps dont il s'est dépouillé en mourant, mais qu'il lui reste une enveloppe éthérée, qui constitue pour lui un corps fluidique à l'aide duquel il peut en certaines circonstances se rendre visible, ainsi que cela a lieu dans les faits d'apparitions que l'Eglise elle-même admet parfaitement, puisque de quelques-uns elle fait des articles de foi. Cette base étant donnée, aux propositions précédentes j'ajouterai les suivantes, en vous demandant de prouver :
6° Que par son enveloppe fluidique l'Esprit ne peut pas agir sur la matière inerte ;
7° Que s'il peut agir sur la matière inerte, il ne peut pas agir sur un être animé ;
8° Que s'il peut agir sur un être animé, il ne peut pas diriger sa main pour le faire écrire ;
9° Que pouvant le faire écrire, il ne peut pas répondre à ses questions et lui transmettre sa pensée.
Quand vous aurez démontré que tout cela ne se peut pas, par des raisons aussi patentes que celles par lesquelles Galilée démontra que ce n'est pas le soleil qui tourne, alors votre opinion pourra être prise en considération.
Vous objecterez sans doute que, dans leurs communications, les Esprits disent quelquefois des choses absurdes. Cela est très vrai ; ils font plus : ils disent parfois des grossièretés et des impertinences. C'est qu'en quittant son corps l'Esprit ne se dépouille pas immédiatement de toutes ses imperfections ; il est donc probable que ceux qui disent des choses ridicules, comme Esprits, en ont dit de plus ridicules encore quand il étaient parmi nous ; c'est pourquoi nous n'acceptons pas plus aveuglément tout ce qui vient de leur part, que ce qui vient de la part des hommes. Mais je m'arrête, n'ayant pas l'intention de faire ici un cours d'enseignement ; il m'a suffit de prouver que vous aviez parlé du Spiritisme sans le connaître.
Agréez, Monsieur, mes salutations empressées.Ne croyez pas, Monsieur, que mon but soit de chercher à vous convaincre, ni que je vais vous rendre injure pour injure ; quelles que soient les raisons qui vous empêchent de partager notre manière de voir, je ne songe point à m'en enquérir, et je les respecte si elles sont sincères ; je ne demande que la réciprocité pratiquée entre gens qui savent vivre. Quant aux épithètes inciviles, il n'est pas dans mes habitudes de m'en servir.
Si vous aviez discuté sérieusement les principes du Spiritisme, si vous y aviez opposé des arguments quelconques bons ou mauvais, j'aurais pu vous répondre ; mais toute votre argumentation se bornant à nous qualifier d'ineptes, il ne m'appartient pas de discuter avec vous si vous avez tort ou raison ; je me borne donc à relever ce que vos assertions ont d'inexact, en dehors de toute personnalité.
Il ne suffit pas de dire aux gens qui ne pensent pas comme nous qu'ils sont des imbéciles : ceci est à la portée du premier venu ; il faut leur démontrer qu'ils ont tort ; mais comment le faire, comment entrer dans le vif de la question si l'on n'en sait pas le premier mot ? Or, je crois que c'est le cas où vous vous trouvez, autrement vous auriez employé de meilleures armes que l'accusation banale de stupidité. Quand vous aurez donné à l'étude du Spiritisme le temps moral nécessaire, et je vous préviens qu'il en faut beaucoup ; quand vous aurez lu tout ce qui peut asseoir votre opinion, approfondi toutes les questions, assisté en observateur consciencieux et impartial à quelques milliers d'expériences, votre critique aura quelque poids ; jusque là ce n'est qu'une opinion individuelle qui ne s'appuie sur rien, et au sujet de laquelle vous pouvez à chaque mot être pris en flagrant délit d'ignorance. Le début de votre article en est la preuve.
On appelle Spirites, dites-vous, certains hallucinés qui ont rompu avec toutes les croyances religieuses de leur époque et de leur pays. » Savez-vous, Monsieur, que cette accusation est très grave, et d'autant plus grave qu'elle est à la fois fausse et calomnieuse ? Le Spiritisme est entièrement fondé sur le dogme de l'existence de l'âme, sa survivance au corps, son individualité après la mort, son immortalité, les peines et les récompenses futures. Il ne sanctionne pas seulement ces vérités par la théorie, son essence est d'en donner des preuves patentes ; voilà pourquoi tant de gens qui ne croyaient à rien ont été ramenés aux idées religieuses. Toute sa morale n'est que le développement de ces maximes du Christ : Pratiquer la charité, rendre le bien pour le mal, être indulgent pour son prochain, pardonner à ses ennemis, en un mot agir envers les autres comme nous voudrions qu'on agît envers nous-mêmes. Trouvez-vous donc ces idées bien stupides ? Ont-ils rompu avec toute croyance religieuse ceux qui s'appuient sur les bases mêmes de la religion ? Non, direz-vous, mais il suffit d'être catholique pour avoir ces idées-là ; les avoir, soit ; mais les pratiquer c'est autre chose, à ce qu'il paraît. Est-il bien évangélique à vous, catholique, d'insulter de braves gens qui ne vous ont point fait de mal, que vous ne connaissez pas et qui ont eu assez de confiance en vous pour vous recevoir parmi eux ? Admettons qu'ils soient dans l'erreur ; est-ce en leur prodiguant l'injure, en les irritant que vous le ramènerez ?
Votre article contient une autre erreur de fait qui prouve encore une fois votre ignorance en matière de Spiritisme. Vous dites : Les adeptes sont généralement des ouvriers. Sachez donc, Monsieur, pour votre gouverne, que sur les cinq ou six millions de Spirites qui existent aujourd'hui, la presque totalité appartient aux classes les plus éclairées de la société ; il compte parmi ses adhérents un très grand nombre de médecins dans tous les pays, des avocats, des magistrats, des hommes de lettres, de hauts fonctionnaires, des officiers de tous grades, des artistes, des savants, des négociants, etc., gens que vous rangez bien lestement parmi les ineptes. Mais passons là-dessus. Les mots insulte et injure vous semblent-ils trop forts ? Voyons !
Avez-vous bien pesé la portée de vos paroles quand, après avoir dit que les adeptes sont généralement des ouvriers, vous ajoutez, à propos des réunions lyonnaises : Car on n'y reçoit pas facilement ceux qui, par leur extérieur, annoncent trop d'intelligence ; les Esprits ne daignent se manifester qu'aux simples, c'est probablement ce qui nous a valu d'y être admis. Et plus loin cette autre phrase : Après un Speech sur la nature des Esprits, le tout débité d'un style qui devait charmer les Esprits, à cause de sa simplicité, les questions commencèrent. Je ne rappelle pas vos facéties au sujet de la plume d'oie dont se servait, selon vous, le médium, et autres choses tout aussi spirituelles ; je parle plus sérieusement. Je ne ferai qu'une simple remarque, c'est que vos yeux et vos oreilles vous ont très mal servi, car le médium dont vous parlez ne se sert pas de plume d'oie, et la forme aussi bien que le fond de la plupart des questions et des réponses que vous rapportez dans votre article sont de pure invention ; ce sont donc de petites calomnies à la faveur desquelles vous avez voulu faire briller votre esprit.
Ainsi, selon vous, pour être admis dans ces réunions d'ouvriers, il faut être ouvrier, c'est-à-dire dépourvu de bon sens, et vous n'y avez été introduit que parce qu'on vous a, dites-vous, probablement pris pour un sot. Assurément si l'on avait cru que vous eussiez assez d'esprit pour inventer des choses qui ne sont pas, il est bien certain qu'on vous aurait fermé la porte.
Savez-vous bien, Monsieur, que vous n'attaquez pas seulement les Spirites, mais toute la classe ouvrière, et en particulier celle de Lyon ? Oubliez-vous que ce sont ces mêmes ouvriers, ces canus, comme vous le dites avec affectation, qui font la prospérité de votre ville, par leur industrie ? Sont-ce des gens sans valeur morale que ces ouvriers qui ont produit Jacquard ? d'où sont sortis bon nombre de vos fabricants qui ont acquis leur fortune à la sueur de leur front et à force d'ordre et d'économie ? N'est-ce pas insulter à leur travail que de comparer leurs métiers à d'ignobles potences ? Vous déversez le ridicule sur leur langage ; mais oubliez-vous que leur état n'est pas de faire des discours académiques ? Est-il besoin d'un style tiré au cordeau pour dire ce qu'on pense ? Vos paroles, Monsieur, ne sont pas seulement légères, - j'emploie ce mot par ménagement, - elles sont imprudentes. Si jamais Dieu vous réservait encore des jours néfastes, priez-le qu'ils ne s'en souviennent pas. Ceux qui seront Spirites les oublieront, car la charité le leur commande ; faites donc des vœux pour qu'ils le soient tous, car ils puisent dans le Spiritisme des principes d'ordre social, de respect pour la propriété, et des sentiments religieux.
Savez-vous ce que font ces ouvriers spirites lyonnais que vous traitez avec tant de dédain ? Au lieu d'aller s'étourdir dans un cabaret, ou de se nourrir de doctrines subversives et chimériques ; dans cet atelier que vous comparez dérisoirement à l'antre de Trophonius, au milieu de ces métiers aux quatre potences, ils pensent à Dieu. Je les ai vus pendant mon séjour ici ; j'ai causé avec eux et je me suis convaincu de ce qui suit : Parmi eux, beaucoup maudissaient leur travail pénible : aujourd'hui ils l'acceptent avec la résignation du chrétien, comme une épreuve ; beaucoup voyaient d'un œil envieux et jaloux le sort des riches : aujourd'hui ils savent que la richesse est une épreuve encore plus glissante que celle de la misère, et que le malheureux qui souffre et ne cède pas à la tentation est le véritable élu de Dieu ; ils savent que le vrai bonheur n'est pas dans le superflu, et que ceux qu'on appelle les heureux de ce monde ont aussi de cruelles angoisses que l'or n'apaise pas ; beaucoup se riaient de la prière : aujourd'hui, ils prient, et ont retrouvé le chemin de l'église qu'ils avaient oublié, parce que jadis ils ne croyaient à rien et qu'aujourd'hui ils croient ; plusieurs auraient succombé au désespoir : aujourd'hui qu'ils connaissent le sort de ceux qui abrègent volontairement leur vie, ils se résignent à la volonté de Dieu, parce qu'ils savent qu'ils ont une âme, et qu'avant ils n'en étaient pas certains ; parce qu'ils savent enfin qu'ils ne sont qu'en passant sur la terre, et que la justice de Dieu ne fait défaut à personne.
Voilà, Monsieur, ce que savent et ce que font ces ineptes, comme vous les appelez ; ils s'expriment dans un langage peut-être ridicule, trivial aux yeux d'un homme d'esprit comme vous, mais aux yeux de Dieu le mérite est dans le cœur et non dans l'élégance des phrases.
Ailleurs vous dites : « Autrefois l'Église était assez puissante pour imposer silence à de pareilles divagations ; elle frappait peut être trop fort, c'est vrai, mais elle arrêtait le mal. Aujourd'hui que l'autorité religieuse est impuissante, l'autre autorité ne devrait-elle pas intervenir ? » En effet elle brûlait ; c'est vraiment dommage qu'il n'y ait plus de bûchers. Oh ! déplorables effets du progrès des lumières !
Je n'ai pas pour habitude de répondre aux diatribes ; s'il ne s'était agi que de moi, je n'aurais rien dit ; mais à propos d'une croyance que je me fais gloire de professer, parce que c'est une croyance éminemment chrétienne, vous bafouez des gens honnêtes et laborieux parce qu'ils sont illettrés, oubliant que Jésus lui-même était ouvrier ; vous les excitez par des paroles irritantes ; vous appelez sur eux les rigueurs de l'autorité civile et religieuse, alors qu'ils sont paisibles et comprennent le vide des utopies dont ils se sont bercés, et qui vous ont fait peur : j'ai dû prendre leur défense, tout en leur rappelant les devoirs que la charité commande, et en leur disant que si d'autres manquent à ces devoirs, ce n'est pas une raison pour eux de s'en affranchir. Voilà, Monsieur, les conseils que je leur donne ; ce sont aussi ceux que leur donnent ces Esprits qui ont la sottise de s'adresser à des gens simples et ignorants plutôt qu'à vous ; c'est que probablement ils savent qu'ils en seront mieux écoutés. Voudriez-vous à ce sujet me dire pourquoi Jésus a choisi ses apôtres parmi le peuple, au lieu de les prendre parmi les hommes de lettres ? C'est sans doute parce qu'il n'y avait pas alors des journalistes pour lui dire ce qu'il avait à faire.
Vous direz sans doute que votre critique ne porte que sur la croyance aux Esprits et à leurs manifestations, et non sur les principes sacrés de la religion. J'en suis persuadé ; mais alors pourquoi dire que les Spirites ont rompu avec tous les principes religieux ? C’est que vous ne saviez pas sur quoi ils s'appuient. Cependant vous avez vu là un médium prier avec recueillement, et vous, catholique, vous avez ri d'une personne qui priait !
Vous ne savez probablement pas davantage ce que c'est que les Esprits. Les Esprits ne sont pas autre chose que les âmes de ceux qui ont vécu ; les âmes et les Esprits sont donc une seule et même chose ; de telle sorte que nier l'existence des Esprits, c'est nier l'âme ; admettre l'âme, sa survivance et son individualité, c'est admettre les Esprits. Toute la question se réduit donc à savoir si l'âme, après la mort, peut se manifester aux vivants ; les livres sacrés et les Pères de l'Eglise le reconnaissent. Si les Spirites ont tort, ces autorités se sont également trompées ; pour le prouver il s'agit de démontrer, non par une simple négation, mais par des raisons péremptoires :
1° Que l'être qui pense en nous pendant la vie ne doit plus penser après la mort ;
2° Que s'il pense, il ne doit plus penser à ceux qu'il a aimés ;
3° Que s'il pense à ceux qu'il a aimés, il ne doit plus vouloir se communiquer à eux ;
4° Que s'il peut être partout, il ne peut pas être à nos côtés ;
5° Que s'il est à nos côtés, il ne peut pas se communiquer à nous.
Si vous connaissiez l'état des Esprits, leur nature, et, si je puis m'exprimer ainsi, leur constitution physiologique, telle qu'ils nous la décrivent, et telle que l'observation la confirme, vous sauriez que l'Esprit et l'âme étant une seule et même chose, il n'y a de moins chez l'Esprit que le corps dont il s'est dépouillé en mourant, mais qu'il lui reste une enveloppe éthérée, qui constitue pour lui un corps fluidique à l'aide duquel il peut en certaines circonstances se rendre visible, ainsi que cela a lieu dans les faits d'apparitions que l'Eglise elle-même admet parfaitement, puisque de quelques-uns elle fait des articles de foi. Cette base étant donnée, aux propositions précédentes j'ajouterai les suivantes, en vous demandant de prouver :
6° Que par son enveloppe fluidique l'Esprit ne peut pas agir sur la matière inerte ;
7° Que s'il peut agir sur la matière inerte, il ne peut pas agir sur un être animé ;
8° Que s'il peut agir sur un être animé, il ne peut pas diriger sa main pour le faire écrire ;
9° Que pouvant le faire écrire, il ne peut pas répondre à ses questions et lui transmettre sa pensée.
Quand vous aurez démontré que tout cela ne se peut pas, par des raisons aussi patentes que celles par lesquelles Galilée démontra que ce n'est pas le soleil qui tourne, alors votre opinion pourra être prise en considération.
Vous objecterez sans doute que, dans leurs communications, les Esprits disent quelquefois des choses absurdes. Cela est très vrai ; ils font plus : ils disent parfois des grossièretés et des impertinences. C'est qu'en quittant son corps l'Esprit ne se dépouille pas immédiatement de toutes ses imperfections ; il est donc probable que ceux qui disent des choses ridicules, comme Esprits, en ont dit de plus ridicules encore quand il étaient parmi nous ; c'est pourquoi nous n'acceptons pas plus aveuglément tout ce qui vient de leur part, que ce qui vient de la part des hommes. Mais je m'arrête, n'ayant pas l'intention de faire ici un cours d'enseignement ; il m'a suffit de prouver que vous aviez parlé du Spiritisme sans le connaître.
Allan Kardec.
Banquet - Offert par les Spirites Lyonnais à M. Allan Kardec le 19 septembre 1860
RÉPONSE DE M. ALLAN KARDECMesdames, Messieurs, et vous tous, mes chers et bons frères en Spiritisme.
L'accueil si amical et si bienveillant que je reçois parmi vous depuis mon arrivée serait bien fait pour me donner de l'orgueil, si je ne comprenais que ces témoignages s'adressent moins à la personne qu'à la doctrine dont je ne suis qu'un des plus humbles ouvriers ; c'est la consécration d'un principe, et j'en suis doublement heureux, car ce principe doit assurer un jour le bonheur de l'homme et le repos de la société, lorsqu'il sera bien compris, et encore mieux lorsqu'il sera pratiqué. Ses adversaires ne le combattent que parce qu'ils ne le comprennent pas ; c'est à nous, c'est aux vrais Spirites, à ceux qui voient dans le Spiritisme autre chose que des expériences plus ou moins curieuses, de le faire comprendre et de le répandre, en prêchant d'exemple autant que de paroles. Le Livre des Esprits a eu pour résultat d'en faire voir la portée philosophique ; si ce livre a quelque mérite, il serait présomptueux à moi de m'en glorifier, car la doctrine qu'il renferme n'est point ma création ; tout l'honneur du bien qu'il a fait revient aux Esprits sages qui l'ont dicté et qui ont bien voulu se servir de moi. Je puis donc en entendre l'éloge sans que ma modestie en soit blessée, et sans que mon amour-propre en soit exalté. Si j'avais voulu m'en prévaloir, j'en aurais assurément revendiqué la conception, au lieu de l'attribuer aux Esprits ; et si l'on pouvait douter de la supériorité de ceux qui y ont coopéré, il suffirait de considérer l'influence qu'il a exercée en si peu de temps, par la seule puissance de la logique, et sans aucun des moyens matériels propres à surexciter la curiosité.
Quoi qu'il en soit, Messieurs, la cordialité de votre accueil sera pour moi un puissant encouragement dans la tâche laborieuse que j'ai entreprise et dont je fais l'œuvre de ma vie, car il me donne la certitude consolante que les hommes de cœur ne sont pas aussi rares en ce siècle matériel qu'on se plaît à le dire. Les sentiments que font naître en moi ces témoignages bienveillants se comprennent mieux qu'ils ne peuvent s'exprimer, et ce qui leur donne à mes yeux un prix inestimable, c'est qu'ils n'ont pour mobile aucune considération personnelle. Je vous en remercie du fond du cœur, au nom du Spiritisme, au nom surtout de la Société parisienne des études Spirites qui sera heureuse des marques de sympathie que vous voulez bien lui donner, et fière de compter à Lyon un aussi grand nombre de bons et loyaux confrères. Permettez-moi de retracer en quelques mots les impressions que j'emporte de mon trop court séjour parmi vous.
La première chose qui m'a frappé, c'est le nombre d'adeptes ; je savais bien que Lyon en comptait beaucoup, mais j'étais loin de me douter que le nombre fût aussi considérable, car c'est par centaines qu'on les compte, et bientôt, je l'espère, on ne pourra plus les compter. Mais si Lyon se distingue par le nombre, il ne le fait pas moins par la qualité, ce qui vaut encore mieux. Partout je n'ai rencontré que des Spirites sincères, comprenant la doctrine sous son véritable point de vue. Il y a, messieurs, trois catégories d'adeptes : les uns qui se bornent à croire à la réalité des manifestations, et qui recherchent avant tout les phénomènes ; le Spiritisme est simplement pour eux une série de faits plus ou moins intéressants.
Les seconds y voient autre chose que des faits ; ils en comprennent la portée philosophique ; ils admirent la morale qui en découle, mais ils ne la pratiquent pas ; pour eux la charité chrétienne est une belle maxime, mais voilà tout.
Les troisièmes, enfin, ne se contentent pas d'admirer la morale : ils la pratiquent et en acceptent toutes les conséquences. Bien convaincus que l'existence terrestre est une épreuve passagère, ils tâchent de mettre à profit ces courts instants pour marcher dans la voie du progrès que leur tracent les Esprits, en s'efforçant de faire le bien et de réprimer leurs penchants mauvais ; leurs relations sont toujours sûres, car leurs convictions les éloignent de toute pensée du mal ; la charité est en toute chose la règle de leur conduite ; ce sont là les vrais Spirites, ou mieux, les Spirites chrétiens.
Eh bien ! messieurs, je vous le dis avec bonheur, je n'ai encore rencontré ici aucun adepte de la première catégorie ; nulle part je n'ai vu qu'on s'occupât du Spiritisme par pure curiosité ; nulle part je n'ai vu qu'on se servît des communications pour des sujets futiles ; partout le but est grave, les intentions sérieuses, et, si j'en crois ce que je vois et ce qui m'est dit, il y en a beaucoup de la troisième catégorie. Honneur donc aux Spirites lyonnais d'être aussi largement entrés dans cette voie progressive, sans laquelle le Spiritisme serait sans objet ! Cet exemple ne sera pas perdu, il aura ses conséquences, et ce n'est pas sans raison, je le vois, que les Esprits m'ont répondu l'autre jour, par l'un de vos médiums les plus dévoués, quoique l'un des plus obscurs, alors que je leur exprimais ma surprise : « Pourquoi t'en étonner ? Lyon a été la ville des martyrs ; la foi y est vive ; elle fournira des apôtres au Spiritisme. Si Paris est la tête, Lyon sera le cœur. La coïncidence de cette réponse avec celle qui vous a été faite précédemment, et que M. Guillaume vient de rappeler dans son allocution, a quelque chose de très significatif.
La rapidité avec laquelle la doctrine s'est propagée dans ces derniers temps, malgré l'opposition qu'elle rencontre encore, ou peut-être à cause même de cette opposition, peut en faire présager l'avenir ; évitons donc, par notre prudence, tout ce qui pourrait produire une impression fâcheuse, et, je ne dis pas perdre une cause désormais assurée, mais en retarder le développement ; suivons en cela les conseils des Esprits sages, et n'oublions pas que, dans ce monde, beaucoup de succès ont été compromis par trop de précipitation ; n'oublions pas non plus que nos ennemis de l'autre monde, aussi bien que de celui-ci, peuvent chercher à nous entraîner dans une voie périlleuse.
Vous avez bien voulu me demander quelques avis ; je me ferai un plaisir de vous donner ceux que l'expérience pourra me suggérer ; ce ne sera toujours qu'une opinion personnelle que je vous engage à peser dans votre sagesse, et dont vous ferez l'usage que vous jugerez à propos, n'ayant pas la prétention de me poser en arbitre absolu.
Vous aviez l'intention de former une grande société ; je vous ai déjà dit à ce sujet ma façon de penser, je me borne à la résumer ici.
Il est reconnu que les meilleures communications s'obtiennent dans les réunions peu nombreuses, dans celles surtout où règnent l'harmonie et une communauté de sentiments ; or, plus le nombre est grand plus cette homogénéité est difficile à obtenir. Comme il est impossible qu'au début d'une science, si nouvelle encore, il ne surgisse pas quelques divergences dans la manière d'apprécier certaines choses, de cette divergence naîtrait infailliblement un malaise qui pourrait amener la désunion. Les petits groupes, au contraire, seront toujours plus homogènes ; on s'y connaît mieux, on y est plus en famille ; on y admet mieux qui l'on veut ; et, comme en définitive, tous tendent au même but, ils peuvent parfaitement s'entendre, et ils s'entendront d'autant mieux qu'il n'y aura pas ce froissement incessant, incompatible avec le recueillement et la concentration d'esprit. Les mauvais Esprits qui cherchent sans cesse à semer la discorde, en irritant la susceptibilité, y auront toujours moins de prise que dans un milieu nombreux et mélangé ; en un mot l'unité de vue et de sentiment y sera plus facile à établir.
La multiplicité des groupes a un autre avantage, c'est d'obtenir une bien plus grande variété dans les communications, par la diversité d'aptitude des médiums. Que ces réunions partielles se fassent part réciproquement de ce qu'elles obtiennent chacune de leur côté, et toutes profiteront ainsi de leurs travaux mutuels. Il viendra un temps d'ailleurs où le nombre des adhérents ne permettrait plus une seule réunion qui devrait se fractionner par la force des choses, c'est pourquoi il vaut mieux faire immédiatement ce qu'on serait forcé de faire plus tard.
Au point de vue de la propagande, il est encore un fait certain, c'est que ce n'est pas dans les grandes réunions que les novices peuvent puiser des éléments de conviction, mais bien dans l'intimité ; il y a donc double motif pour préférer les petits groupes qui peuvent se multiplier à l'infini ; or, vingt groupes de dix personnes, par exemple, obtiendront sans contredit plus, et feront plus de prosélytes qu'une seule assemblée de deux cents membres.
J'ai parlé tout à l'heure des divergences qui peuvent surgir, et j'ai dit qu'elles ne devaient point apporter d'obstacle à la parfaite entente des différents centres ; en effet, ces divergences ne peuvent porter que sur des points de détail et non sur le fond ; le but est le même : l'amélioration morale ; le moyen est le même : l'enseignement donné par les Esprits. Si cet enseignement était contradictoire ; si, évidemment, l'un devait être faux et l'autre vrai, remarquez bien que cela ne saurait altérer le but qui est de conduire l'homme au bien pour son plus grand bonheur présent et futur ; or le bien ne saurait avoir deux poids et mesures. Au point de vue scientifique, ou dogmatique, il est cependant utile, ou tout au moins intéressant de savoir qui a tort ou raison ; eh bien ! vous avez un critérium infaillible pour l'apprécier, qu'il s'agisse de simples détails, ou de systèmes plus radicalement divergents ; et ceci s'applique non seulement aux systèmes Spirites, mais à tous les systèmes philosophiques.
Examinez d'abord celui qui est le plus logique, celui qui répond le mieux à vos aspirations, qui peut le mieux atteindre le but ; le plus vrai sera évidemment celui qui explique le mieux, qui rend le mieux raison de tout. Si l'on peut opposer à un système un seul fait en contradiction avec sa théorie, c'est que sa théorie est fausse ou incomplète. Examinez ensuite les résultats pratiques de chaque système ; la vérité doit être du côté de celui qui produit le plus de bien, qui exerce l'influence la plus salutaire, qui fait le plus d'hommes bons et vertueux, qui excite au bien par les motifs les plus purs et les plus rationnels. Le but constant auquel aspire l'homme, c'est le bonheur ; la vérité sera du côté du système qui procure la plus grande somme de satisfaction morale, en un mot qui rend le plus heureux.
L'enseignement venant des Esprits, les différents groupes, aussi bien que les individus, se trouvent sous l'influence de certains Esprits qui président à leurs travaux, ou les dirigent moralement. Si ces Esprits ne s'accordent pas, la question est de savoir quel est celui qui mérite le plus de confiance ; ce sera évidemment celui dont la théorie ne peut soulever aucune objection sérieuse, en un mot celui qui, sur tous les points, donne le plus de preuves de sa supériorité. Si tout est bon, rationnel dans cet enseignement, peu importe le nom que prend l'Esprit, et sous ce rapport la question d'identité est tout à fait secondaire. Si sous un nom respectable l'enseignement pèche par les qualités essentielles, vous pouvez hardiment en conclure que c'est un nom apocryphe et que c'est un Esprit imposteur ou qui s'amuse. Règle générale : le nom n'est jamais une garantie ; la seule, la véritable garantie de supériorité c'est la pensée et la manière dont elle est exprimée. Les Esprits trompeurs peuvent tout imiter, tout, excepté le vrai savoir et le vrai sentiment.
Je n'ai pas l'intention, Messieurs, de vous faire ici un cours de Spiritisme, et j'abuse peut-être de votre patience par tous ces détails ; cependant, je ne puis m'empêcher d'y ajouter encore quelques mots.
Il arrive souvent que pour faire adopter certaines utopies, des Esprits font parade d'un faux savoir, et pensent en imposer en puisant dans l'arsenal des mots techniques tout ce qui peut fasciner celui qui croit trop facilement. Ils ont encore un moyen plus certain, c'est d'affecter les dehors de la vertu ; à la faveur des grands mots de charité, de fraternité, d'humilité, ils espèrent faire passer les plus grossières absurdités, et c'est ce qui arrive très souvent quand on n'est pas sur ses gardes ; il faut donc éviter de se laisser prendre aux apparences aussi bien de la part des Esprits que de celle des hommes ; or, je l'avoue, c'est là une des plus grandes difficultés ; mais on n'a jamais dit que le Spiritisme fût une science facile ; il a ses écueils que l'on ne peut éviter que par l'expérience. Pour éviter de tomber dans le piège il faut d'abord se garder de l'enthousiasme qui aveugle, de l'orgueil qui porte certains médiums à se croire seuls les interprètes de la vérité ; il faut tout examiner froidement, tout peser mûrement, tout contrôler, et si l'on se défie de son propre jugement, ce qui est souvent le plus sage, il faut en référer à d'autres, selon le proverbe que quatre yeux voient mieux que deux ; un faux amour-propre, ou une obsession, peuvent seuls faire persister dans une idée notoirement fausse, et que le bon sens de chacun repousse.
Je n'ignore pas, Messieurs, que j'ai ici beaucoup d'ennemis ; cela vous étonne, et pourtant rien n'est plus vrai ; oui, il y en a ici qui m'écoutent avec rage ; je ne dis pas parmi vous, Dieu merci ! où j'espère bien n'avoir jamais que des amis ; je veux parler des Esprits trompeurs qui m'en veulent de vous donner les moyens de les démasquer, parce que je dévoile leurs ruses ; parce qu'en vous mettant sur vos gardes, je leur ôte l'empire qu'ils pourraient prendre sur vous. A ce sujet, Messieurs, je vous dirai que ce serait une erreur de croire qu'ils n'exercent cet empire que sur les médiums ; soyez bien assurés que les esprits étant partout, ils agissent incessamment sur nous à notre insu, que l'on soit ou non Spirite ou médium. La médiumnité ne les attire pas ; elle donne au contraire le moyen de connaître son ennemi qui se trahit toujours ; toujours, entendez-vous bien, et qui n'abuse que ceux qui se laissent abuser.
Ceci, Messieurs, me conduit à compléter ma pensée sur ce que je vous ai dit tout à l'heure au sujet des dissidences qui pourraient surgir entre les différents groupes, par suite de la diversité d'enseignement. Je vous ai dit que, malgré quelques divergences, ils pouvaient s'entendre, et ils doivent s'entendre si ce sont des vrais Spirites. Je vous ai donné le moyen de contrôler la valeur des communications ; voici celui d'apprécier la nature des influences qui s'exercent sur chacun. Étant donné que toute bonne influence émane d'un bon Esprit, que tout ce qui est mal vient d'une mauvaise source, que les mauvais Esprits sont les ennemis de l'union et de la concorde, le groupe qui sera assisté par l'Esprit du mal, sera celui qui jettera la pierre à l'autre, et ne lui tendra pas la main. Quant à moi, Messieurs, je vous regarde tous comme des frères, que vous soyez dans la vérité ou dans l'erreur ; mais, je vous le déclare hautement, je serai de cœur et d'âme avec ceux qui montreront le plus de charité, le plus d'abnégation ; s'il y en avait, ce qu'à Dieu ne plaise, qui entretinssent des sentiments de haine, d'envie, de jalousie, je les plaindrais, parce qu'ils seraient sous une mauvaise influence, et j'aimerais encore mieux croire que ces mauvaises pensées leur viennent d'un Esprit étranger que de leur propre cœur ; mais cela seul me rendrait suspecte la véracité des communications qu'ils pourraient recevoir, en vertu de ce principe qu'un Esprit vraiment bon ne peut suggérer que de bons sentiments.
Je terminerai, Messieurs, cette allocution, déjà trop longue sans doute, par quelques considérations sur les causes qui doivent assurer l'avenir du Spiritisme.
Vous comprenez tous par ce que vous avez sous les yeux, et par ce que vous ressentez en vous-mêmes, qu'un jour à venir le Spiritisme doit exercer une immense influence sur l'état social ; mais celui où cette influence sera généralisée est encore loin, sans doute ; il faut des générations pour que l'homme se dépouille du vieil homme. Cependant, dès aujourd'hui, si le bien ne peut encore être général, il est déjà individuel, et c'est parce que ce bien est effectif que la doctrine qui le procure est acceptée avec autant de facilité ; je puis même dire avec autant d'empressement par beaucoup. En effet, à part sa rationalité, quelle philosophie est plus capable de détacher la pensée de l'homme des liens terrestres, d'élever son âme vers l'infini ? Quelle est celle qui lui donne une idée plus juste, plus logique et appuyée sur des preuves plus patentes, de sa nature et de sa destinée ? Que ses adversaires y substituent donc quelque chose de mieux, une doctrine plus consolante, qui s'accorde mieux avec la raison, qui remplace la joie ineffable de savoir que les êtres qui nous furent chers sur la terre sont auprès de nous, qu'ils nous voient, nous écoutent, nous parlent et nous conseillent ; qui donne un motif plus légitime à la résignation ; qui fasse moins redouter la mort ; qui procure plus de calme dans les épreuves de la vie ; qui remplace enfin cette douce quiétude que l'on éprouve quand on peut se dire : Je me sens meilleur. Devant une doctrine qui fera mieux que tout cela, le Spiritisme mettra bas les armes.
Le Spiritisme rend donc souverainement heureux ; avec lui plus d'isolement, plus de désespoir ; il a déjà épargné bien des fautes, empêché plus d'un crime, ramené la paix dans plus d'une famille, corrigé bien des travers ; que sera-ce donc quand les hommes seront nourris dans ces idées-là ! Car alors la raison venant, ils s'y fortifieront et ne renieront plus leur âme. Oui, le Spiritisme rend heureux, et c'est ce qui lui donne une irrésistible puissance et assure son triomphe à venir. Les hommes veulent le bonheur, le Spiritisme le leur donne, ils se jetteront dans les bras du Spiritisme. Veut-on l'anéantir ? qu'on donne à l'homme une source plus grande de félicité et d'espérance. Voilà pour les individus.
Deux autres puissances semblent avoir redouté son apparition : l'autorité civile et l'autorité religieuse ; et pourquoi cela ? parce qu'on ne le connaissait pas. Aujourd'hui l'Église commence à voir qu'elle y trouvera une arme puissante pour combattre l'incrédulité ; la solution logique de plus d'un dogme embarrassant, et finalement qu'il ramène déjà à leurs devoirs de chrétiens bon nombre de brebis égarées. Le pouvoir civil, de son côté, commence à avoir des preuves de sa bienfaisante influence sur la moralité des classes laborieuses auxquelles cette doctrine inculque, par la conviction, des idées d'ordre, de respect pour la propriété, et fait comprendre le néant des utopies ; témoin de métamorphoses morales presque miraculeuses, il entreverra bientôt dans la diffusion de ces idées, un aliment plus utile à la pensée que les joies du cabaret ou le tumulte de la place publique, et par conséquent une sauvegarde pour la société. Ainsi, peuple, Église et pouvoir, y voyant un jour une digue contre la brutalité des passions, une garantie d'ordre et de tranquillité, un retour aux idées religieuses qui s'éteignent, personne n'aura d'intérêt à l'entraver. Chacun, au contraire, y cherchera un appui. Qui pourrait d'ailleurs arrêter le cours de ce fleuve d'idées qui roule déjà ses eaux bienfaisantes sur les cinq parties du monde ?
Telles sont, mes chers confrères, les considérations que je désirais vous soumettre. Je termine en vous remerciant de nouveau de votre bienveillant accueil dont le souvenir sera toujours présent à ma mémoire. Je remercie également les bons Esprits de toute la satisfaction qu'ils m'ont procurée pendant mon voyage, car partout où je me suis arrêté j'ai aussi trouvé de bons et sincères Spirites, et j'ai pu constater, par mes propres yeux, l'immense développement de ces idées, et combien elles prennent facilement racine ; partout j'ai trouvé des gens heureux, des affligés consolés, des chagrins calmés, des haines apaisées, partout la confiance et l'espérance succédant aux angoisses du doute et de l'incertitude. Encore une fois le Spiritisme est la clef du vrai bonheur, et c'est là le secret de son irrésistible puissance. Est-ce donc une utopie qu'une doctrine qui fait de tels prodiges ? Que Dieu, dans sa bonté, mes chers amis, daigne nous envoyer de bons Esprits pour vous assister dans vos communications, afin que ceux-ci vous éclairent sur les vérités que vous êtes chargés de répandre ! Vous récolterez un jour au centuple les fruits du bon grain que vous aurez semé.Que ce repas d'amis, mes bien-aimés confrères, comme les anciennes agapes, soit le gage de l'union entre tous les vrais Spirites.
Je porte un toast aux Spirites lyonnais, tant en mon nom qu'en celui de la Société parisienne des études Spirites.
Allan Kardec.
L'accueil si amical et si bienveillant que je reçois parmi vous depuis mon arrivée serait bien fait pour me donner de l'orgueil, si je ne comprenais que ces témoignages s'adressent moins à la personne qu'à la doctrine dont je ne suis qu'un des plus humbles ouvriers ; c'est la consécration d'un principe, et j'en suis doublement heureux, car ce principe doit assurer un jour le bonheur de l'homme et le repos de la société, lorsqu'il sera bien compris, et encore mieux lorsqu'il sera pratiqué. Ses adversaires ne le combattent que parce qu'ils ne le comprennent pas ; c'est à nous, c'est aux vrais Spirites, à ceux qui voient dans le Spiritisme autre chose que des expériences plus ou moins curieuses, de le faire comprendre et de le répandre, en prêchant d'exemple autant que de paroles. Le Livre des Esprits a eu pour résultat d'en faire voir la portée philosophique ; si ce livre a quelque mérite, il serait présomptueux à moi de m'en glorifier, car la doctrine qu'il renferme n'est point ma création ; tout l'honneur du bien qu'il a fait revient aux Esprits sages qui l'ont dicté et qui ont bien voulu se servir de moi. Je puis donc en entendre l'éloge sans que ma modestie en soit blessée, et sans que mon amour-propre en soit exalté. Si j'avais voulu m'en prévaloir, j'en aurais assurément revendiqué la conception, au lieu de l'attribuer aux Esprits ; et si l'on pouvait douter de la supériorité de ceux qui y ont coopéré, il suffirait de considérer l'influence qu'il a exercée en si peu de temps, par la seule puissance de la logique, et sans aucun des moyens matériels propres à surexciter la curiosité.
Quoi qu'il en soit, Messieurs, la cordialité de votre accueil sera pour moi un puissant encouragement dans la tâche laborieuse que j'ai entreprise et dont je fais l'œuvre de ma vie, car il me donne la certitude consolante que les hommes de cœur ne sont pas aussi rares en ce siècle matériel qu'on se plaît à le dire. Les sentiments que font naître en moi ces témoignages bienveillants se comprennent mieux qu'ils ne peuvent s'exprimer, et ce qui leur donne à mes yeux un prix inestimable, c'est qu'ils n'ont pour mobile aucune considération personnelle. Je vous en remercie du fond du cœur, au nom du Spiritisme, au nom surtout de la Société parisienne des études Spirites qui sera heureuse des marques de sympathie que vous voulez bien lui donner, et fière de compter à Lyon un aussi grand nombre de bons et loyaux confrères. Permettez-moi de retracer en quelques mots les impressions que j'emporte de mon trop court séjour parmi vous.
La première chose qui m'a frappé, c'est le nombre d'adeptes ; je savais bien que Lyon en comptait beaucoup, mais j'étais loin de me douter que le nombre fût aussi considérable, car c'est par centaines qu'on les compte, et bientôt, je l'espère, on ne pourra plus les compter. Mais si Lyon se distingue par le nombre, il ne le fait pas moins par la qualité, ce qui vaut encore mieux. Partout je n'ai rencontré que des Spirites sincères, comprenant la doctrine sous son véritable point de vue. Il y a, messieurs, trois catégories d'adeptes : les uns qui se bornent à croire à la réalité des manifestations, et qui recherchent avant tout les phénomènes ; le Spiritisme est simplement pour eux une série de faits plus ou moins intéressants.
Les seconds y voient autre chose que des faits ; ils en comprennent la portée philosophique ; ils admirent la morale qui en découle, mais ils ne la pratiquent pas ; pour eux la charité chrétienne est une belle maxime, mais voilà tout.
Les troisièmes, enfin, ne se contentent pas d'admirer la morale : ils la pratiquent et en acceptent toutes les conséquences. Bien convaincus que l'existence terrestre est une épreuve passagère, ils tâchent de mettre à profit ces courts instants pour marcher dans la voie du progrès que leur tracent les Esprits, en s'efforçant de faire le bien et de réprimer leurs penchants mauvais ; leurs relations sont toujours sûres, car leurs convictions les éloignent de toute pensée du mal ; la charité est en toute chose la règle de leur conduite ; ce sont là les vrais Spirites, ou mieux, les Spirites chrétiens.
Eh bien ! messieurs, je vous le dis avec bonheur, je n'ai encore rencontré ici aucun adepte de la première catégorie ; nulle part je n'ai vu qu'on s'occupât du Spiritisme par pure curiosité ; nulle part je n'ai vu qu'on se servît des communications pour des sujets futiles ; partout le but est grave, les intentions sérieuses, et, si j'en crois ce que je vois et ce qui m'est dit, il y en a beaucoup de la troisième catégorie. Honneur donc aux Spirites lyonnais d'être aussi largement entrés dans cette voie progressive, sans laquelle le Spiritisme serait sans objet ! Cet exemple ne sera pas perdu, il aura ses conséquences, et ce n'est pas sans raison, je le vois, que les Esprits m'ont répondu l'autre jour, par l'un de vos médiums les plus dévoués, quoique l'un des plus obscurs, alors que je leur exprimais ma surprise : « Pourquoi t'en étonner ? Lyon a été la ville des martyrs ; la foi y est vive ; elle fournira des apôtres au Spiritisme. Si Paris est la tête, Lyon sera le cœur. La coïncidence de cette réponse avec celle qui vous a été faite précédemment, et que M. Guillaume vient de rappeler dans son allocution, a quelque chose de très significatif.
La rapidité avec laquelle la doctrine s'est propagée dans ces derniers temps, malgré l'opposition qu'elle rencontre encore, ou peut-être à cause même de cette opposition, peut en faire présager l'avenir ; évitons donc, par notre prudence, tout ce qui pourrait produire une impression fâcheuse, et, je ne dis pas perdre une cause désormais assurée, mais en retarder le développement ; suivons en cela les conseils des Esprits sages, et n'oublions pas que, dans ce monde, beaucoup de succès ont été compromis par trop de précipitation ; n'oublions pas non plus que nos ennemis de l'autre monde, aussi bien que de celui-ci, peuvent chercher à nous entraîner dans une voie périlleuse.
Vous avez bien voulu me demander quelques avis ; je me ferai un plaisir de vous donner ceux que l'expérience pourra me suggérer ; ce ne sera toujours qu'une opinion personnelle que je vous engage à peser dans votre sagesse, et dont vous ferez l'usage que vous jugerez à propos, n'ayant pas la prétention de me poser en arbitre absolu.
Vous aviez l'intention de former une grande société ; je vous ai déjà dit à ce sujet ma façon de penser, je me borne à la résumer ici.
Il est reconnu que les meilleures communications s'obtiennent dans les réunions peu nombreuses, dans celles surtout où règnent l'harmonie et une communauté de sentiments ; or, plus le nombre est grand plus cette homogénéité est difficile à obtenir. Comme il est impossible qu'au début d'une science, si nouvelle encore, il ne surgisse pas quelques divergences dans la manière d'apprécier certaines choses, de cette divergence naîtrait infailliblement un malaise qui pourrait amener la désunion. Les petits groupes, au contraire, seront toujours plus homogènes ; on s'y connaît mieux, on y est plus en famille ; on y admet mieux qui l'on veut ; et, comme en définitive, tous tendent au même but, ils peuvent parfaitement s'entendre, et ils s'entendront d'autant mieux qu'il n'y aura pas ce froissement incessant, incompatible avec le recueillement et la concentration d'esprit. Les mauvais Esprits qui cherchent sans cesse à semer la discorde, en irritant la susceptibilité, y auront toujours moins de prise que dans un milieu nombreux et mélangé ; en un mot l'unité de vue et de sentiment y sera plus facile à établir.
La multiplicité des groupes a un autre avantage, c'est d'obtenir une bien plus grande variété dans les communications, par la diversité d'aptitude des médiums. Que ces réunions partielles se fassent part réciproquement de ce qu'elles obtiennent chacune de leur côté, et toutes profiteront ainsi de leurs travaux mutuels. Il viendra un temps d'ailleurs où le nombre des adhérents ne permettrait plus une seule réunion qui devrait se fractionner par la force des choses, c'est pourquoi il vaut mieux faire immédiatement ce qu'on serait forcé de faire plus tard.
Au point de vue de la propagande, il est encore un fait certain, c'est que ce n'est pas dans les grandes réunions que les novices peuvent puiser des éléments de conviction, mais bien dans l'intimité ; il y a donc double motif pour préférer les petits groupes qui peuvent se multiplier à l'infini ; or, vingt groupes de dix personnes, par exemple, obtiendront sans contredit plus, et feront plus de prosélytes qu'une seule assemblée de deux cents membres.
J'ai parlé tout à l'heure des divergences qui peuvent surgir, et j'ai dit qu'elles ne devaient point apporter d'obstacle à la parfaite entente des différents centres ; en effet, ces divergences ne peuvent porter que sur des points de détail et non sur le fond ; le but est le même : l'amélioration morale ; le moyen est le même : l'enseignement donné par les Esprits. Si cet enseignement était contradictoire ; si, évidemment, l'un devait être faux et l'autre vrai, remarquez bien que cela ne saurait altérer le but qui est de conduire l'homme au bien pour son plus grand bonheur présent et futur ; or le bien ne saurait avoir deux poids et mesures. Au point de vue scientifique, ou dogmatique, il est cependant utile, ou tout au moins intéressant de savoir qui a tort ou raison ; eh bien ! vous avez un critérium infaillible pour l'apprécier, qu'il s'agisse de simples détails, ou de systèmes plus radicalement divergents ; et ceci s'applique non seulement aux systèmes Spirites, mais à tous les systèmes philosophiques.
Examinez d'abord celui qui est le plus logique, celui qui répond le mieux à vos aspirations, qui peut le mieux atteindre le but ; le plus vrai sera évidemment celui qui explique le mieux, qui rend le mieux raison de tout. Si l'on peut opposer à un système un seul fait en contradiction avec sa théorie, c'est que sa théorie est fausse ou incomplète. Examinez ensuite les résultats pratiques de chaque système ; la vérité doit être du côté de celui qui produit le plus de bien, qui exerce l'influence la plus salutaire, qui fait le plus d'hommes bons et vertueux, qui excite au bien par les motifs les plus purs et les plus rationnels. Le but constant auquel aspire l'homme, c'est le bonheur ; la vérité sera du côté du système qui procure la plus grande somme de satisfaction morale, en un mot qui rend le plus heureux.
L'enseignement venant des Esprits, les différents groupes, aussi bien que les individus, se trouvent sous l'influence de certains Esprits qui président à leurs travaux, ou les dirigent moralement. Si ces Esprits ne s'accordent pas, la question est de savoir quel est celui qui mérite le plus de confiance ; ce sera évidemment celui dont la théorie ne peut soulever aucune objection sérieuse, en un mot celui qui, sur tous les points, donne le plus de preuves de sa supériorité. Si tout est bon, rationnel dans cet enseignement, peu importe le nom que prend l'Esprit, et sous ce rapport la question d'identité est tout à fait secondaire. Si sous un nom respectable l'enseignement pèche par les qualités essentielles, vous pouvez hardiment en conclure que c'est un nom apocryphe et que c'est un Esprit imposteur ou qui s'amuse. Règle générale : le nom n'est jamais une garantie ; la seule, la véritable garantie de supériorité c'est la pensée et la manière dont elle est exprimée. Les Esprits trompeurs peuvent tout imiter, tout, excepté le vrai savoir et le vrai sentiment.
Je n'ai pas l'intention, Messieurs, de vous faire ici un cours de Spiritisme, et j'abuse peut-être de votre patience par tous ces détails ; cependant, je ne puis m'empêcher d'y ajouter encore quelques mots.
Il arrive souvent que pour faire adopter certaines utopies, des Esprits font parade d'un faux savoir, et pensent en imposer en puisant dans l'arsenal des mots techniques tout ce qui peut fasciner celui qui croit trop facilement. Ils ont encore un moyen plus certain, c'est d'affecter les dehors de la vertu ; à la faveur des grands mots de charité, de fraternité, d'humilité, ils espèrent faire passer les plus grossières absurdités, et c'est ce qui arrive très souvent quand on n'est pas sur ses gardes ; il faut donc éviter de se laisser prendre aux apparences aussi bien de la part des Esprits que de celle des hommes ; or, je l'avoue, c'est là une des plus grandes difficultés ; mais on n'a jamais dit que le Spiritisme fût une science facile ; il a ses écueils que l'on ne peut éviter que par l'expérience. Pour éviter de tomber dans le piège il faut d'abord se garder de l'enthousiasme qui aveugle, de l'orgueil qui porte certains médiums à se croire seuls les interprètes de la vérité ; il faut tout examiner froidement, tout peser mûrement, tout contrôler, et si l'on se défie de son propre jugement, ce qui est souvent le plus sage, il faut en référer à d'autres, selon le proverbe que quatre yeux voient mieux que deux ; un faux amour-propre, ou une obsession, peuvent seuls faire persister dans une idée notoirement fausse, et que le bon sens de chacun repousse.
Je n'ignore pas, Messieurs, que j'ai ici beaucoup d'ennemis ; cela vous étonne, et pourtant rien n'est plus vrai ; oui, il y en a ici qui m'écoutent avec rage ; je ne dis pas parmi vous, Dieu merci ! où j'espère bien n'avoir jamais que des amis ; je veux parler des Esprits trompeurs qui m'en veulent de vous donner les moyens de les démasquer, parce que je dévoile leurs ruses ; parce qu'en vous mettant sur vos gardes, je leur ôte l'empire qu'ils pourraient prendre sur vous. A ce sujet, Messieurs, je vous dirai que ce serait une erreur de croire qu'ils n'exercent cet empire que sur les médiums ; soyez bien assurés que les esprits étant partout, ils agissent incessamment sur nous à notre insu, que l'on soit ou non Spirite ou médium. La médiumnité ne les attire pas ; elle donne au contraire le moyen de connaître son ennemi qui se trahit toujours ; toujours, entendez-vous bien, et qui n'abuse que ceux qui se laissent abuser.
Ceci, Messieurs, me conduit à compléter ma pensée sur ce que je vous ai dit tout à l'heure au sujet des dissidences qui pourraient surgir entre les différents groupes, par suite de la diversité d'enseignement. Je vous ai dit que, malgré quelques divergences, ils pouvaient s'entendre, et ils doivent s'entendre si ce sont des vrais Spirites. Je vous ai donné le moyen de contrôler la valeur des communications ; voici celui d'apprécier la nature des influences qui s'exercent sur chacun. Étant donné que toute bonne influence émane d'un bon Esprit, que tout ce qui est mal vient d'une mauvaise source, que les mauvais Esprits sont les ennemis de l'union et de la concorde, le groupe qui sera assisté par l'Esprit du mal, sera celui qui jettera la pierre à l'autre, et ne lui tendra pas la main. Quant à moi, Messieurs, je vous regarde tous comme des frères, que vous soyez dans la vérité ou dans l'erreur ; mais, je vous le déclare hautement, je serai de cœur et d'âme avec ceux qui montreront le plus de charité, le plus d'abnégation ; s'il y en avait, ce qu'à Dieu ne plaise, qui entretinssent des sentiments de haine, d'envie, de jalousie, je les plaindrais, parce qu'ils seraient sous une mauvaise influence, et j'aimerais encore mieux croire que ces mauvaises pensées leur viennent d'un Esprit étranger que de leur propre cœur ; mais cela seul me rendrait suspecte la véracité des communications qu'ils pourraient recevoir, en vertu de ce principe qu'un Esprit vraiment bon ne peut suggérer que de bons sentiments.
Je terminerai, Messieurs, cette allocution, déjà trop longue sans doute, par quelques considérations sur les causes qui doivent assurer l'avenir du Spiritisme.
Vous comprenez tous par ce que vous avez sous les yeux, et par ce que vous ressentez en vous-mêmes, qu'un jour à venir le Spiritisme doit exercer une immense influence sur l'état social ; mais celui où cette influence sera généralisée est encore loin, sans doute ; il faut des générations pour que l'homme se dépouille du vieil homme. Cependant, dès aujourd'hui, si le bien ne peut encore être général, il est déjà individuel, et c'est parce que ce bien est effectif que la doctrine qui le procure est acceptée avec autant de facilité ; je puis même dire avec autant d'empressement par beaucoup. En effet, à part sa rationalité, quelle philosophie est plus capable de détacher la pensée de l'homme des liens terrestres, d'élever son âme vers l'infini ? Quelle est celle qui lui donne une idée plus juste, plus logique et appuyée sur des preuves plus patentes, de sa nature et de sa destinée ? Que ses adversaires y substituent donc quelque chose de mieux, une doctrine plus consolante, qui s'accorde mieux avec la raison, qui remplace la joie ineffable de savoir que les êtres qui nous furent chers sur la terre sont auprès de nous, qu'ils nous voient, nous écoutent, nous parlent et nous conseillent ; qui donne un motif plus légitime à la résignation ; qui fasse moins redouter la mort ; qui procure plus de calme dans les épreuves de la vie ; qui remplace enfin cette douce quiétude que l'on éprouve quand on peut se dire : Je me sens meilleur. Devant une doctrine qui fera mieux que tout cela, le Spiritisme mettra bas les armes.
Le Spiritisme rend donc souverainement heureux ; avec lui plus d'isolement, plus de désespoir ; il a déjà épargné bien des fautes, empêché plus d'un crime, ramené la paix dans plus d'une famille, corrigé bien des travers ; que sera-ce donc quand les hommes seront nourris dans ces idées-là ! Car alors la raison venant, ils s'y fortifieront et ne renieront plus leur âme. Oui, le Spiritisme rend heureux, et c'est ce qui lui donne une irrésistible puissance et assure son triomphe à venir. Les hommes veulent le bonheur, le Spiritisme le leur donne, ils se jetteront dans les bras du Spiritisme. Veut-on l'anéantir ? qu'on donne à l'homme une source plus grande de félicité et d'espérance. Voilà pour les individus.
Deux autres puissances semblent avoir redouté son apparition : l'autorité civile et l'autorité religieuse ; et pourquoi cela ? parce qu'on ne le connaissait pas. Aujourd'hui l'Église commence à voir qu'elle y trouvera une arme puissante pour combattre l'incrédulité ; la solution logique de plus d'un dogme embarrassant, et finalement qu'il ramène déjà à leurs devoirs de chrétiens bon nombre de brebis égarées. Le pouvoir civil, de son côté, commence à avoir des preuves de sa bienfaisante influence sur la moralité des classes laborieuses auxquelles cette doctrine inculque, par la conviction, des idées d'ordre, de respect pour la propriété, et fait comprendre le néant des utopies ; témoin de métamorphoses morales presque miraculeuses, il entreverra bientôt dans la diffusion de ces idées, un aliment plus utile à la pensée que les joies du cabaret ou le tumulte de la place publique, et par conséquent une sauvegarde pour la société. Ainsi, peuple, Église et pouvoir, y voyant un jour une digue contre la brutalité des passions, une garantie d'ordre et de tranquillité, un retour aux idées religieuses qui s'éteignent, personne n'aura d'intérêt à l'entraver. Chacun, au contraire, y cherchera un appui. Qui pourrait d'ailleurs arrêter le cours de ce fleuve d'idées qui roule déjà ses eaux bienfaisantes sur les cinq parties du monde ?
Telles sont, mes chers confrères, les considérations que je désirais vous soumettre. Je termine en vous remerciant de nouveau de votre bienveillant accueil dont le souvenir sera toujours présent à ma mémoire. Je remercie également les bons Esprits de toute la satisfaction qu'ils m'ont procurée pendant mon voyage, car partout où je me suis arrêté j'ai aussi trouvé de bons et sincères Spirites, et j'ai pu constater, par mes propres yeux, l'immense développement de ces idées, et combien elles prennent facilement racine ; partout j'ai trouvé des gens heureux, des affligés consolés, des chagrins calmés, des haines apaisées, partout la confiance et l'espérance succédant aux angoisses du doute et de l'incertitude. Encore une fois le Spiritisme est la clef du vrai bonheur, et c'est là le secret de son irrésistible puissance. Est-ce donc une utopie qu'une doctrine qui fait de tels prodiges ? Que Dieu, dans sa bonté, mes chers amis, daigne nous envoyer de bons Esprits pour vous assister dans vos communications, afin que ceux-ci vous éclairent sur les vérités que vous êtes chargés de répandre ! Vous récolterez un jour au centuple les fruits du bon grain que vous aurez semé.Que ce repas d'amis, mes bien-aimés confrères, comme les anciennes agapes, soit le gage de l'union entre tous les vrais Spirites.
Je porte un toast aux Spirites lyonnais, tant en mon nom qu'en celui de la Société parisienne des études Spirites.
Allan Kardec.
Sur la valeur des communications Spirites - Par M. Jobard
L'orthodoxie religieuse fait jouer un trop grand rôle à Satan et à ses prétendus satellites qu'on devrait se borner à appeler Esprits malins, ignorants, vaniteux, et presque tous entachés du péché d'orgueil qui les a perdus. En cela ils ne diffèrent en rien des hommes dont ils ont fait partie pendant une période fort courte eu égard à l'éternité de leur existence pneumatique qui peut se comparer à celle d'un corps passé à l'état volatil. L'erreur est de croire que, parce qu'ils sont Esprits, ils doivent être parfaits, comme si la vapeur ou le gaz étaient plus parfaits que l'eau ou le liquide d'où ils sont sortis ; comme si un brigand ne pouvait être qu'un honnête homme après s'être échappé de sa prison ; comme si un fou pouvait être réputé sage après avoir franchi les murs de Charenton ; comme si un aveugle sorti des Quinze-Vingts pouvait se faire passer pour un clairvoyant.
Figurez-vous bien, Messieurs les médiums, que vous aurez affaire à tout ce monde-là, et qu'il y a autant de différence entre les Esprits qu'entre les hommes ; or, vous n'ignorez pas qu'autant d'hommes, autant de sentiments ; autant de corps, autant de propriétés diverses, avant comme après leur changement d'état. Vous pouvez juger, par leurs erreurs, de la mauvaise qualité des Esprits, comme on juge de la mauvaise qualité d'un corps par l'odeur qu'il exhale. Si quelquefois ils sont d'accord sur certains points, entre eux et avec vous, c'est qu'ils se copient et vous copient, car ils savent mieux que vous ce qui a été écrit anciennement et nouvellement sur telle ou telle doctrine qu'ils vous répètent, souvent comme des perroquets, mais quelquefois avec conviction si ce sont des Esprits studieux et consciencieux, comme certains philosophes ou savants qui vous feraient l'honneur de venir converser et discuter avec vous. Mais soyez bien persuadés qu'ils ne vous répondent que s'ils sentent que vous êtes en état de les comprendre ; sans cela ils ne vous disent que des vulgarités, et rien qui dépasse la portée de votre intelligence et de vos connaissances acquises. Ils savent aussi bien que vous qu'il ne faut pas jeter des perles aux pourceaux ; ils citent l'Évangile si vous êtes chrétien, et le Coran si vous êtes turc, et se mettent facilement à votre unisson, car à l'état pneumatique ils ont de l'intelligence que les corps matériels volatilisés n'ont pas ; en cela seul la comparaison qui précède manque d'exactitude. Si vous aimez à rire, à jouer sur les mots, et que vous ayez affaire à un Esprit sérieux, il vous enverra les Esprits farceurs, plus forts que vous sur la raillerie et les jeux de mots. Si vous avez le cerveau faible, il vous abandonne aux mystificateurs qui vous mèneront plus loin que vous ne voudriez.
En général les Esprits aiment à s'entretenir avec les hommes ; c'est une distraction, et quelquefois une étude pour eux ; ils vous le disent tous. Ne craignez pas de les fatiguer, vous le serez toujours avant eux, mais ils ne vous apprendront rien que ce qu'ils auraient pu vous dire de leur vivant ; voilà pourquoi tant de gens demandent à quoi bon perdre son temps à les consulter, puisqu'on n'en peut attendre des révélations extraordinaires, des inventions inespérées, des panacées, des pierres philosophales, des transmutations de métaux, des moteurs perpétuels, car ils n'en savent pas plus que vous sur les résultats non encore obtenus par la science humaine ; et s'ils vous engagent à faire des expériences, c'est qu'ils seraient curieux eux-mêmes d'en voir les effets, autrement, ils ne vous donnent que des explications entortillées, comme les prétendus savants et les avocats qui tiennent à ne jamais rester court. S'il s'agit d'un trésor, ils vous diront : creusez ; d'un alliage, ils vous diront : soufflez. Il se peut que vous trouviez en cherchant ; ils seront aussi étonnés que vous, et se flatteront de vous avoir donné de bons conseils ; la vanité humaine ne les abandonne pas. Les bons Esprits ne vous affirment pas que vous trouverez, comme les mauvais, qui ne se font pas scrupule de vous ruiner ; c'est en cela que vous ne devez jamais faire abstraction de votre jugement, de votre libre arbitre, de votre raison. Que dites-vous quand un homme vous engage dans une méchante affaire ? Que c'est un Esprit infernal, diabolique. Et bien ! l'Esprit qui vous conseille mal n'est pas plus diabolique, pas plus infernal ; c'est un ignorant, un mystificateur tout au plus ; mais il n'a ni mission spéciale, ni pouvoir surhumain, ni grand intérêt à vous tromper ; il use également du libre arbitre que Dieu lui a donné comme à vous, et peut, comme vous, en faire un bon ou un mauvais usage ; voilà tout. C'est une sottise de croire qu'il s'attache à vous pendant des années et des années pour tâcher d'enrôler votre pauvre âme dans l'armée de Satan. Que lui fait à Satan une recrue de plus ou de moins quand il lui en arrive spontanément par millions et par milliards, sans qu'il ait la peine d'en faire l'appel ? Les élus sont rares, mais les volontaires du mal sont innombrables. Si Dieu et le Diable ont chacun leur armée, Dieu seul a besoin de recruteurs ; le Diable peut s'épargner le soin de remplir ses cadres ; et comme la victoire est toujours du côté des gros bataillons, jugez de sa grandeur et de sa puissance et de la facilité de ses triomphes sur tous les points de l'univers ; et sans aller bien loin, regardez autour de vous.
Mais tout cela n'a pas de sens ; puisque l'on sait aujourd'hui causer facilement avec les gens de l'autre monde, il faut les prendre comme ils sont et pour ce qu'ils sont. Il y a des poètes qui peuvent vous dicter de bons vers, des philosophes et des moralistes qui peuvent vous dicter de bonnes maximes, des historiens qui peuvent vous donner de bons éclaircissements sur leur époque, des naturalistes qui peuvent vous enseigner ce qu'ils savent, ou rectifier les erreurs qu'ils ont commises, des astronomes qui peuvent vous révéler certains phénomènes que vous ignorez, des musiciens, des auteurs capables d'écrire leurs œuvres posthumes, et qui ont même la vanité de demander qu'on les publie en leur nom ; l'un d'eux qui croyait avoir fait une invention s'indignait d'apprendre que le brevet ne saurait lui être délivré personnellement ; d'autres qui ne font pas plus de cas des choses de la terre que certains sages. Il y en a aussi qui assistent avec un plaisir enfantin à l'inauguration de leur statue, et d'autres qui ne prennent pas la peine d'y aller voir, et qui méprisent profondément les imbéciles qui leur font cet honneur après les avoir méconnus et persécutés pendant leur vie. De Humbolt ne nous a répondu au sujet de sa statue qu'un seul mot : dérision. Un autre a donné l'inscription de la statue qu'on lui prépare et qu'il sait n'avoir pas méritée : Au grand voleur, les volés reconnaissants.
Au résumé, nous devons regarder comme certain que chacun emporte avec soi son caractère et ses acquêts moraux et scientifiques ; les sots d'ici-bas sont encore les sots de là-haut. Il n'y a que les filous n'ayant plus de poches à vider, les gourmands plus rien à frire, les banquiers plus rien à escompter, qui souffrent de ces privations. C'est pour cela que l'Esprit Saint, l'Esprit de vérité, nous recommande le mépris des choses terrestres que nous ne pouvons emporter, ni nous assimiler, pour ne songer qu'aux biens spirituels et moraux qui nous suivent et qui nous serviront pour l'éternité, non seulement de distraction, mais d'échelons pour nous élever sans cesse sur la grande échelle de Jacob dans l'incommensurable hiérarchie des Esprits.
Aussi, voyez combien peu de cas les bons Esprits font des biens et des plaisirs grossiers qu'ils ont perdus en mourant, c'est-à-dire en rentrant dans leur pays, comme ils disent ; semblables à un savant prisonnier arraché subitement de son cachot, ce ne sont pas ses hardes, ses meubles, son argent qu'il regrette, mais ses livres et ses manuscrits. Le papillon qui secoue la poussière de ses ailes avant de reprendre son vol, se soucie fort peu des débris de la chenille qui lui servit d'habitacle. De même un Esprit supérieur comme celui de Buffon, ne regrette pas plus son château de Montbard que Lamartine ne regrettera son Saint-Point qu'il regrette tant de son vivant. C'est pour cela que la mort du sage est si calme et celle de l'humanimal si affreuse, car ce dernier sent qu'en perdant les biens de la terre, il perd tout ; il s'y cramponne donc comme l'avare à son coffre-fort. Son Esprit ne peut même s'en éloigner, il tient à la matière et continue de hanter les endroits qui lui ont été chers, et au lieu de faire des efforts incessants pour briser les liens qui le retiennent à la terre, il s'y attache en désespéré ; il souffre vraiment comme un damné de ne pouvoir plus en jouir : voilà l'enfer, voilà le feu que ces réprouvés s'appliquent à rendre éternel. Tels sont les mauvais Esprits qui repoussent les conseils des bons, et qui ont besoin des secours de la raison et de la sagesse humaine elle-même pour les décider à lâcher prise. Les bons Médiums doivent prendre la peine de les raisonner, de les sermonner et de prier pour eux, car ils avouent que la prière les soulage et en témoignent leur reconnaissance, en termes souvent fort touchants. Cela prouve l'existence d'une solidarité commune entre tous les Esprits libres aux incorporés, car évidemment l'incarnation n'est qu'une punition, la terre qu'un lieu d'expiation où nous ne sommes pas mis, comme dit le psalmiste, pour notre amusement, mais pour nous perfectionner et apprendre à adorer Dieu en étudiant ses œuvres ; d'où il suit que le plus malheureux est le plus ignorant ; le plus sauvage devient le plus vicieux, le plus criminel et le plus misérable des êtres auxquels Dieu a remis une étincelle de son âme divine et des talents pour les faire valoir, et non pour les enfouir jusqu'à l'arrivée du maître, ou plutôt jusqu'à la comparution devant Dieu du coupable de paresse ou de négligence.
Voilà ce qu'il en est, vraisemblablement pour les uns et réellement pour les autres, du monde Spirite, qui fait si peur aux uns et qui charme si fort les autres, et qui n'a mérité ni cet excès d'horreur ni cette indignité.
Quand, à force d'expérience et d'étude, on se sera familiarisé avec le phénomène des manifestations aussi, naturel que pas un, on reconnaîtra la vérité des explications que nous venons de donner. La puissance du mal qu'on accorde aux Esprits a pour antithèse la puissance du bien qu'on peut espérer des autres ; ces deux forces sont adéquates comme toutes celles de la nature, sans quoi l'équilibre serait rompu, et le libre arbitre remplacé par la fatalité, l'aveugle fatum, le fait brut, inintelligent, la mort de tous, la catalepsie de l'univers, le chaos.
Défendre d'interroger les Esprits, c'est reconnaître qu'ils existent ; les signaler comme les suppôts du diable, c'est faire penser qu'il doit en exister qui sont les agents, les missionnaires de Dieu ; que les mauvais soient les plus nombreux, nous vous l'accordons ; mais il en est de tout ainsi sur la terre ; de ce qu'il y a plus de grains de sable que de paillettes d'or doit-on condamner les orpailleurs ?
Quand les Esprits vous disent qu'il leur est interdit de répondre à certaines questions d'une importance seulement personnelle, c'est une façon commode de couvrir leur ignorance des choses de l'avenir ; tout ce qui dépend de nos efforts propres, de nos recherches intellectuelles, ne peut nous être révélé, sans enfreindre la loi divine qui condamne l'homme au travail ; il serait par trop commode pour le premier médium venu, en possession d'un Esprit familier complaisant, de se procurer sans peine tous les trésors et toute la puissance imaginable, en se débarrassant de tous les obstacles que les autres ont tant de peines à surmonter. Non, les Esprits n'ont point une pareille puissance et font bien de dire que tout ce que vous leur demandez d'illicite leur est interdit. Cependant ils exercent une grande influence sur nous, en bien ou en mal ; heureux sont ceux que les bons Esprits conseillent et protègent ; tout leur réussit, s'ils obéissent aux bonnes inspirations qu'ils ne reçoivent d'ailleurs qu'après les avoir méritées, et pris la peine équivalente au succès qui leur est donné par surcroît.
Quiconque attend la fortune dans son lit n'a pas grande chance de l'attraper ; tout ici-bas dépend du travail intelligent et honnête qui nous donne un grand contentement intérieur, et nous délivre du mal physique en nous communiquant le don de soulager le mal des autres ; car il n'est pas un médium bien intentionné qui ne soit magnétiseur et guérisseur de sa nature ; mais ils ne savent pas posséder un tel trésor n'essayant pas d'en faire usage. C'est en cela qu'ils seraient le mieux conseillés et le plus puissamment aidés par leurs bons Esprits. On a vu faire des miracles analogues à celui qui vient de s'opérer sur le duc de Celeuza prince Vasto, au café Nocera à Naples, le 13 juin dernier, lequel vient de publier qu'il a été guéri instantanément d'une maladie réputée incurable, dont il souffrait depuis dix ans, par la seule parole d'un vieux chevalier français, auquel il racontait ses souffrances. Il en est d'autres qui font de ces choses en différents pays, en Hollande, en Angleterre, en France, en Suisse ; mais ils se multiplieront avec le temps : les germes sont semés.
Les médiums dûment avertis sur la nature, les mœurs et coutumes des Esprits terrestres n'ont qu'à se conduire en conséquence ; quant aux Esprits célestes ou d'un ordre transcendant, il est si rare de les voir se communiquer aux individus, que le temps n'est pas encore venu d'en parler ; ils président aux destinées des nations, et aux grandes catastrophes, aux grandes évolutions des globes et des humanités ; ils sont à l'œuvre en ce moment, attendons avec recueillement les grandes choses qui vont arriver : Renovabunt faciem terræ.
En général les Esprits aiment à s'entretenir avec les hommes ; c'est une distraction, et quelquefois une étude pour eux ; ils vous le disent tous. Ne craignez pas de les fatiguer, vous le serez toujours avant eux, mais ils ne vous apprendront rien que ce qu'ils auraient pu vous dire de leur vivant ; voilà pourquoi tant de gens demandent à quoi bon perdre son temps à les consulter, puisqu'on n'en peut attendre des révélations extraordinaires, des inventions inespérées, des panacées, des pierres philosophales, des transmutations de métaux, des moteurs perpétuels, car ils n'en savent pas plus que vous sur les résultats non encore obtenus par la science humaine ; et s'ils vous engagent à faire des expériences, c'est qu'ils seraient curieux eux-mêmes d'en voir les effets, autrement, ils ne vous donnent que des explications entortillées, comme les prétendus savants et les avocats qui tiennent à ne jamais rester court. S'il s'agit d'un trésor, ils vous diront : creusez ; d'un alliage, ils vous diront : soufflez. Il se peut que vous trouviez en cherchant ; ils seront aussi étonnés que vous, et se flatteront de vous avoir donné de bons conseils ; la vanité humaine ne les abandonne pas. Les bons Esprits ne vous affirment pas que vous trouverez, comme les mauvais, qui ne se font pas scrupule de vous ruiner ; c'est en cela que vous ne devez jamais faire abstraction de votre jugement, de votre libre arbitre, de votre raison. Que dites-vous quand un homme vous engage dans une méchante affaire ? Que c'est un Esprit infernal, diabolique. Et bien ! l'Esprit qui vous conseille mal n'est pas plus diabolique, pas plus infernal ; c'est un ignorant, un mystificateur tout au plus ; mais il n'a ni mission spéciale, ni pouvoir surhumain, ni grand intérêt à vous tromper ; il use également du libre arbitre que Dieu lui a donné comme à vous, et peut, comme vous, en faire un bon ou un mauvais usage ; voilà tout. C'est une sottise de croire qu'il s'attache à vous pendant des années et des années pour tâcher d'enrôler votre pauvre âme dans l'armée de Satan. Que lui fait à Satan une recrue de plus ou de moins quand il lui en arrive spontanément par millions et par milliards, sans qu'il ait la peine d'en faire l'appel ? Les élus sont rares, mais les volontaires du mal sont innombrables. Si Dieu et le Diable ont chacun leur armée, Dieu seul a besoin de recruteurs ; le Diable peut s'épargner le soin de remplir ses cadres ; et comme la victoire est toujours du côté des gros bataillons, jugez de sa grandeur et de sa puissance et de la facilité de ses triomphes sur tous les points de l'univers ; et sans aller bien loin, regardez autour de vous.
Mais tout cela n'a pas de sens ; puisque l'on sait aujourd'hui causer facilement avec les gens de l'autre monde, il faut les prendre comme ils sont et pour ce qu'ils sont. Il y a des poètes qui peuvent vous dicter de bons vers, des philosophes et des moralistes qui peuvent vous dicter de bonnes maximes, des historiens qui peuvent vous donner de bons éclaircissements sur leur époque, des naturalistes qui peuvent vous enseigner ce qu'ils savent, ou rectifier les erreurs qu'ils ont commises, des astronomes qui peuvent vous révéler certains phénomènes que vous ignorez, des musiciens, des auteurs capables d'écrire leurs œuvres posthumes, et qui ont même la vanité de demander qu'on les publie en leur nom ; l'un d'eux qui croyait avoir fait une invention s'indignait d'apprendre que le brevet ne saurait lui être délivré personnellement ; d'autres qui ne font pas plus de cas des choses de la terre que certains sages. Il y en a aussi qui assistent avec un plaisir enfantin à l'inauguration de leur statue, et d'autres qui ne prennent pas la peine d'y aller voir, et qui méprisent profondément les imbéciles qui leur font cet honneur après les avoir méconnus et persécutés pendant leur vie. De Humbolt ne nous a répondu au sujet de sa statue qu'un seul mot : dérision. Un autre a donné l'inscription de la statue qu'on lui prépare et qu'il sait n'avoir pas méritée : Au grand voleur, les volés reconnaissants.
Au résumé, nous devons regarder comme certain que chacun emporte avec soi son caractère et ses acquêts moraux et scientifiques ; les sots d'ici-bas sont encore les sots de là-haut. Il n'y a que les filous n'ayant plus de poches à vider, les gourmands plus rien à frire, les banquiers plus rien à escompter, qui souffrent de ces privations. C'est pour cela que l'Esprit Saint, l'Esprit de vérité, nous recommande le mépris des choses terrestres que nous ne pouvons emporter, ni nous assimiler, pour ne songer qu'aux biens spirituels et moraux qui nous suivent et qui nous serviront pour l'éternité, non seulement de distraction, mais d'échelons pour nous élever sans cesse sur la grande échelle de Jacob dans l'incommensurable hiérarchie des Esprits.
Aussi, voyez combien peu de cas les bons Esprits font des biens et des plaisirs grossiers qu'ils ont perdus en mourant, c'est-à-dire en rentrant dans leur pays, comme ils disent ; semblables à un savant prisonnier arraché subitement de son cachot, ce ne sont pas ses hardes, ses meubles, son argent qu'il regrette, mais ses livres et ses manuscrits. Le papillon qui secoue la poussière de ses ailes avant de reprendre son vol, se soucie fort peu des débris de la chenille qui lui servit d'habitacle. De même un Esprit supérieur comme celui de Buffon, ne regrette pas plus son château de Montbard que Lamartine ne regrettera son Saint-Point qu'il regrette tant de son vivant. C'est pour cela que la mort du sage est si calme et celle de l'humanimal si affreuse, car ce dernier sent qu'en perdant les biens de la terre, il perd tout ; il s'y cramponne donc comme l'avare à son coffre-fort. Son Esprit ne peut même s'en éloigner, il tient à la matière et continue de hanter les endroits qui lui ont été chers, et au lieu de faire des efforts incessants pour briser les liens qui le retiennent à la terre, il s'y attache en désespéré ; il souffre vraiment comme un damné de ne pouvoir plus en jouir : voilà l'enfer, voilà le feu que ces réprouvés s'appliquent à rendre éternel. Tels sont les mauvais Esprits qui repoussent les conseils des bons, et qui ont besoin des secours de la raison et de la sagesse humaine elle-même pour les décider à lâcher prise. Les bons Médiums doivent prendre la peine de les raisonner, de les sermonner et de prier pour eux, car ils avouent que la prière les soulage et en témoignent leur reconnaissance, en termes souvent fort touchants. Cela prouve l'existence d'une solidarité commune entre tous les Esprits libres aux incorporés, car évidemment l'incarnation n'est qu'une punition, la terre qu'un lieu d'expiation où nous ne sommes pas mis, comme dit le psalmiste, pour notre amusement, mais pour nous perfectionner et apprendre à adorer Dieu en étudiant ses œuvres ; d'où il suit que le plus malheureux est le plus ignorant ; le plus sauvage devient le plus vicieux, le plus criminel et le plus misérable des êtres auxquels Dieu a remis une étincelle de son âme divine et des talents pour les faire valoir, et non pour les enfouir jusqu'à l'arrivée du maître, ou plutôt jusqu'à la comparution devant Dieu du coupable de paresse ou de négligence.
Voilà ce qu'il en est, vraisemblablement pour les uns et réellement pour les autres, du monde Spirite, qui fait si peur aux uns et qui charme si fort les autres, et qui n'a mérité ni cet excès d'horreur ni cette indignité.
Quand, à force d'expérience et d'étude, on se sera familiarisé avec le phénomène des manifestations aussi, naturel que pas un, on reconnaîtra la vérité des explications que nous venons de donner. La puissance du mal qu'on accorde aux Esprits a pour antithèse la puissance du bien qu'on peut espérer des autres ; ces deux forces sont adéquates comme toutes celles de la nature, sans quoi l'équilibre serait rompu, et le libre arbitre remplacé par la fatalité, l'aveugle fatum, le fait brut, inintelligent, la mort de tous, la catalepsie de l'univers, le chaos.
Défendre d'interroger les Esprits, c'est reconnaître qu'ils existent ; les signaler comme les suppôts du diable, c'est faire penser qu'il doit en exister qui sont les agents, les missionnaires de Dieu ; que les mauvais soient les plus nombreux, nous vous l'accordons ; mais il en est de tout ainsi sur la terre ; de ce qu'il y a plus de grains de sable que de paillettes d'or doit-on condamner les orpailleurs ?
Quand les Esprits vous disent qu'il leur est interdit de répondre à certaines questions d'une importance seulement personnelle, c'est une façon commode de couvrir leur ignorance des choses de l'avenir ; tout ce qui dépend de nos efforts propres, de nos recherches intellectuelles, ne peut nous être révélé, sans enfreindre la loi divine qui condamne l'homme au travail ; il serait par trop commode pour le premier médium venu, en possession d'un Esprit familier complaisant, de se procurer sans peine tous les trésors et toute la puissance imaginable, en se débarrassant de tous les obstacles que les autres ont tant de peines à surmonter. Non, les Esprits n'ont point une pareille puissance et font bien de dire que tout ce que vous leur demandez d'illicite leur est interdit. Cependant ils exercent une grande influence sur nous, en bien ou en mal ; heureux sont ceux que les bons Esprits conseillent et protègent ; tout leur réussit, s'ils obéissent aux bonnes inspirations qu'ils ne reçoivent d'ailleurs qu'après les avoir méritées, et pris la peine équivalente au succès qui leur est donné par surcroît.
Quiconque attend la fortune dans son lit n'a pas grande chance de l'attraper ; tout ici-bas dépend du travail intelligent et honnête qui nous donne un grand contentement intérieur, et nous délivre du mal physique en nous communiquant le don de soulager le mal des autres ; car il n'est pas un médium bien intentionné qui ne soit magnétiseur et guérisseur de sa nature ; mais ils ne savent pas posséder un tel trésor n'essayant pas d'en faire usage. C'est en cela qu'ils seraient le mieux conseillés et le plus puissamment aidés par leurs bons Esprits. On a vu faire des miracles analogues à celui qui vient de s'opérer sur le duc de Celeuza prince Vasto, au café Nocera à Naples, le 13 juin dernier, lequel vient de publier qu'il a été guéri instantanément d'une maladie réputée incurable, dont il souffrait depuis dix ans, par la seule parole d'un vieux chevalier français, auquel il racontait ses souffrances. Il en est d'autres qui font de ces choses en différents pays, en Hollande, en Angleterre, en France, en Suisse ; mais ils se multiplieront avec le temps : les germes sont semés.
Les médiums dûment avertis sur la nature, les mœurs et coutumes des Esprits terrestres n'ont qu'à se conduire en conséquence ; quant aux Esprits célestes ou d'un ordre transcendant, il est si rare de les voir se communiquer aux individus, que le temps n'est pas encore venu d'en parler ; ils président aux destinées des nations, et aux grandes catastrophes, aux grandes évolutions des globes et des humanités ; ils sont à l'œuvre en ce moment, attendons avec recueillement les grandes choses qui vont arriver : Renovabunt faciem terræ.
Jobard.
Observations
M. Jobard avait intitulé son article : Avis aux médiums ; nous avons cru devoir y donner un titre moins exclusif, attendu que ses remarques s'appliquent en général à la manière d'apprécier les communications spirites ; les médiums n'étant que les instruments des manifestations, celles-ci peuvent être données à tout le monde soit directement, soit par intermédiaire ; tous les évocateurs peuvent donc en faire leur profit, aussi bien que les médiums.
Nous approuvons cette manière de juger les communications, parce qu'elle est rigoureusement vraie, et qu'elle ne peut que contribuer à mettre en garde contre l'illusion à laquelle sont exposés ceux qui acceptent trop facilement, comme l'expression de la vérité, tout ce qui vient du monde des Esprits. Nous pensons toutefois que M. Jobard est peut-être un peu trop absolu sur quelques points. A notre avis, il ne tient pas assez compte du progrès qui s'accomplit chez l'Esprit à l'état errant. Sans doute il emporte au-delà de la tombe les imperfections de la vie terrestre, c'est un fait constaté par l'expérience ; mais comme il est dans un milieu tout différent, qu'il ne reçoit plus ses sensations par l'intermédiaire d'organes matériels, qu'il n'a plus sur les yeux ce voile épais qui obscurcit les idées, ses sensations, ses perceptions et ses idées doivent en éprouver une modification sensible ; c'est pourquoi nous voyons tous les jours des hommes penser après leur mort tout autrement que de leur vivant, parce que l'horizon moral s'est étendu pour eux ; des auteurs critiquer leurs ouvrages, des hommes du monde censurer leur propre conduite, des savants reconnaître leurs erreurs. Si l'Esprit ne progressait pas dans la vie spirite, il rentrerait dans la vie corporelle comme il en était sorti, ni plus avancé, ni plus arriéré, ce qui est positivement contredit par l'expérience. Certains Esprits peuvent donc voir plus clair et plus juste que lorsqu'ils étaient sur la terre, aussi en voit-on donner d'excellents conseils dont on s'est fort bien trouvé ; mais parmi les Esprits, comme parmi les hommes, il faut savoir à qui l'on s'adresse, et ne pas croire que le premier venu possède la science infuse, ni qu'un savant soit affranchi de ses préjugés terrestres, parce qu'ils sont Esprits ; sous ce rapport, M. Jobard a parfaitement raison de dire qu'il ne faut accepter qu'avec une extrême réserve leurs théories et leurs systèmes ; il faut faire avec eux ce que l'on fait avec les hommes, c'est-à-dire ne leur accorder confiance que lorsqu'ils ont donné des preuves irrécusables de leur supériorité, non pas par le nom qu'ils se donnent souvent à tort, mais par la constante sagesse de leurs pensées, l'irréfutable logique de leurs raisonnements, et l'inaltérable bonté de leur caractère.
Les judicieuses remarques de M. Jobard, tout en faisant la part de ce qu'elles peuvent avoir d'exagéré, désenchanteront sans doute ceux qui croient trouver dans les Esprits un moyen certain de tout savoir, de faire des découvertes lucratives, etc. ; en effet, aux yeux de certaines gens, à quoi servent les Esprits s'ils ne sont pas même bons à nous faire faire fortune ? Nous pensons qu'il suffit d'avoir étudié un peu la doctrine spirite pour comprendre qu'ils nous apprennent une foule de choses plus utiles que de savoir si l'on gagnera à la bourse ou à la loterie ; mais en admettant même l'hypothèse la plus rigoureuse, celle où il serait complètement indifférent de s'adresser aux Esprits ou aux hommes, pour les choses de ce monde, n'est-ce donc rien que de nous donner la preuve de l'existence d'outre-tombe ; de nous initier à l'état heureux ou malheureux de ceux qui nous y précèdent ; de nous prouver que ceux que nous avons aimés ne sont pas perdus pour nous, et que nous les retrouverons dans ce monde qui nous attend tous, riches comme pauvres, puissants ou esclaves ? Car en définitive, il est un fait certain, c'est qu'un jour ou l'autre il nous faut franchir le pas ; qu'y a-t-il au-delà de cette barrière ? derrière ce rideau qui nous voile l'avenir ? Y a-t-il quelque chose ou n'y a-t-il rien ? Eh bien ! les Esprits nous apprennent qu'il y a quelque chose ; que, quand nous mourons, tout n'est pas fini ; loin de là, c'est qu'alors commence la véritable vie, la vie normale ; ne nous apprendraient-ils que cela, leurs entretiens ne seraient certes pas inutiles ; ils font plus : ils nous apprennent ce qu'il faut faire ici-bas pour être le mieux possible dans ce nouveau pays ; et comme nous y devons rester longtemps, il est bon de nous y assurer la meilleure place possible. Comme le dit M. Jobard, les Esprits, en général, tiennent fort peu aux choses de la terre, par une raison très simple, c'est qu'ils ont mieux que cela ; leur but est de nous renseigner sur ce qu'il faut faire pour y être heureux ; ils savent que nous tenons aux joies de la terre, comme des enfants à leurs jouets : ils veulent avancer notre raison ; telle est leur mission ; et si l'on est trompé par quelques-uns, c'est parce qu'on veut les faire sortir de la sphère de leurs attributions ; qu'on leur demande ce qu'ils ne savent pas, ce qu'ils ne peuvent pas ou ne doivent pas dire ; c'est alors qu'on est mystifié par la tourbe des Esprits moqueurs qui s'amusent de notre crédulité. Le tort de certains médiums est de croire à l'infaillibilité des Esprits qui se communiquent à eux et qui les séduisent par quelques belles phrases, appuyées d'un nom imposant, qui, le plus souvent, est un nom d'emprunt. Reconnaître la fraude est un résultat d'étude et d'expérience. L'article de M. Jobard ne peut, sous ce rapport, qu'aider à leur ouvrir les yeux.
Nous approuvons cette manière de juger les communications, parce qu'elle est rigoureusement vraie, et qu'elle ne peut que contribuer à mettre en garde contre l'illusion à laquelle sont exposés ceux qui acceptent trop facilement, comme l'expression de la vérité, tout ce qui vient du monde des Esprits. Nous pensons toutefois que M. Jobard est peut-être un peu trop absolu sur quelques points. A notre avis, il ne tient pas assez compte du progrès qui s'accomplit chez l'Esprit à l'état errant. Sans doute il emporte au-delà de la tombe les imperfections de la vie terrestre, c'est un fait constaté par l'expérience ; mais comme il est dans un milieu tout différent, qu'il ne reçoit plus ses sensations par l'intermédiaire d'organes matériels, qu'il n'a plus sur les yeux ce voile épais qui obscurcit les idées, ses sensations, ses perceptions et ses idées doivent en éprouver une modification sensible ; c'est pourquoi nous voyons tous les jours des hommes penser après leur mort tout autrement que de leur vivant, parce que l'horizon moral s'est étendu pour eux ; des auteurs critiquer leurs ouvrages, des hommes du monde censurer leur propre conduite, des savants reconnaître leurs erreurs. Si l'Esprit ne progressait pas dans la vie spirite, il rentrerait dans la vie corporelle comme il en était sorti, ni plus avancé, ni plus arriéré, ce qui est positivement contredit par l'expérience. Certains Esprits peuvent donc voir plus clair et plus juste que lorsqu'ils étaient sur la terre, aussi en voit-on donner d'excellents conseils dont on s'est fort bien trouvé ; mais parmi les Esprits, comme parmi les hommes, il faut savoir à qui l'on s'adresse, et ne pas croire que le premier venu possède la science infuse, ni qu'un savant soit affranchi de ses préjugés terrestres, parce qu'ils sont Esprits ; sous ce rapport, M. Jobard a parfaitement raison de dire qu'il ne faut accepter qu'avec une extrême réserve leurs théories et leurs systèmes ; il faut faire avec eux ce que l'on fait avec les hommes, c'est-à-dire ne leur accorder confiance que lorsqu'ils ont donné des preuves irrécusables de leur supériorité, non pas par le nom qu'ils se donnent souvent à tort, mais par la constante sagesse de leurs pensées, l'irréfutable logique de leurs raisonnements, et l'inaltérable bonté de leur caractère.
Les judicieuses remarques de M. Jobard, tout en faisant la part de ce qu'elles peuvent avoir d'exagéré, désenchanteront sans doute ceux qui croient trouver dans les Esprits un moyen certain de tout savoir, de faire des découvertes lucratives, etc. ; en effet, aux yeux de certaines gens, à quoi servent les Esprits s'ils ne sont pas même bons à nous faire faire fortune ? Nous pensons qu'il suffit d'avoir étudié un peu la doctrine spirite pour comprendre qu'ils nous apprennent une foule de choses plus utiles que de savoir si l'on gagnera à la bourse ou à la loterie ; mais en admettant même l'hypothèse la plus rigoureuse, celle où il serait complètement indifférent de s'adresser aux Esprits ou aux hommes, pour les choses de ce monde, n'est-ce donc rien que de nous donner la preuve de l'existence d'outre-tombe ; de nous initier à l'état heureux ou malheureux de ceux qui nous y précèdent ; de nous prouver que ceux que nous avons aimés ne sont pas perdus pour nous, et que nous les retrouverons dans ce monde qui nous attend tous, riches comme pauvres, puissants ou esclaves ? Car en définitive, il est un fait certain, c'est qu'un jour ou l'autre il nous faut franchir le pas ; qu'y a-t-il au-delà de cette barrière ? derrière ce rideau qui nous voile l'avenir ? Y a-t-il quelque chose ou n'y a-t-il rien ? Eh bien ! les Esprits nous apprennent qu'il y a quelque chose ; que, quand nous mourons, tout n'est pas fini ; loin de là, c'est qu'alors commence la véritable vie, la vie normale ; ne nous apprendraient-ils que cela, leurs entretiens ne seraient certes pas inutiles ; ils font plus : ils nous apprennent ce qu'il faut faire ici-bas pour être le mieux possible dans ce nouveau pays ; et comme nous y devons rester longtemps, il est bon de nous y assurer la meilleure place possible. Comme le dit M. Jobard, les Esprits, en général, tiennent fort peu aux choses de la terre, par une raison très simple, c'est qu'ils ont mieux que cela ; leur but est de nous renseigner sur ce qu'il faut faire pour y être heureux ; ils savent que nous tenons aux joies de la terre, comme des enfants à leurs jouets : ils veulent avancer notre raison ; telle est leur mission ; et si l'on est trompé par quelques-uns, c'est parce qu'on veut les faire sortir de la sphère de leurs attributions ; qu'on leur demande ce qu'ils ne savent pas, ce qu'ils ne peuvent pas ou ne doivent pas dire ; c'est alors qu'on est mystifié par la tourbe des Esprits moqueurs qui s'amusent de notre crédulité. Le tort de certains médiums est de croire à l'infaillibilité des Esprits qui se communiquent à eux et qui les séduisent par quelques belles phrases, appuyées d'un nom imposant, qui, le plus souvent, est un nom d'emprunt. Reconnaître la fraude est un résultat d'étude et d'expérience. L'article de M. Jobard ne peut, sous ce rapport, qu'aider à leur ouvrir les yeux.
Dissertations spirites - Obtenues ou lues dans la Société par divers Médiums
Formation des Esprits, Méd. madame CostelDieu a créé la semence humaine qu'il a
répandue dans les mondes comme le laboureur jette dans les sillons le
grain qui doit germer et mûrir. Ces semences divines sont des molécules
de feu que Dieu fait jaillir du grand foyer, centre de vie, où il
rayonne dans sa puissance. Ces molécules sont à l'humanité ce que sont
les germes des plantes à la terre ; elles se développent lentement, et
ne mûrissent qu'après de longs séjours dans les planètes-mères, celles
où se forme le commencement des choses. Je ne parle que du principe ;
l'être arrivé à sa qualité d'homme se reproduit et l'œuvre de Dieu est
consommée.
Pourquoi, le point de départ étant commun, les destinées humaines sont-elles si diverses ? Pourquoi les uns naissent-ils dans un milieu civilisé, les autres dans l'état sauvage ? Quelle est alors l'origine des démons ? Reprenons l'histoire de l'Esprit à sa première éclosion. Les âmes à peine formées, hésitantes et balbutiantes, sont pourtant libres de pencher du bon ou du mauvais côté. Dès qu'ils ont vécu, les bons se séparent des méchants. L'histoire d'Abel est naïvement vraie. Les âmes ingrates à peine sorties des mains du Créateur, persistent dans la révolte du crime ; alors pendant la succession des siècles, elles errent, nuisant aux autres et surtout à elles-mêmes, jusqu'à ce que le repentir les touche, ce qui arrive infailliblement. Donc les premiers démons sont les premiers hommes coupables. Dieu, dans son immense justice, n'impose jamais que les souffrances résultant des actes mauvais. La terre devait être entièrement peuplée, mais ne pouvait l'être également, et, selon le degré d'avancement obtenu dans les migrations terrestres, les uns naissent dans les grands centres de civilisation, les autres, Esprits incertains, qui ont encore besoin d'initiation, naissent dans les forêts reculées ; l'état sauvage est préparatoire. Tout est harmonieux, et l'âme coupable et aveugle d'un démon de la terre ne peut revivre dans un centre éclairé. Cependant quelques-unes se hasardent dans ce milieu qui n'est pas le leur ; si elles ne peuvent y marcher à l'unisson, elles donnent le spectacle de la barbarie au milieu de la civilisation ; ce sont des êtres dépaysés.
L'état embryonnaire est celui d'un être qui n'a pas encore subi de migration ; on ne peut l'étudier à part, puisqu'il est l'origine de l'homme.
Georges.
Pourquoi, le point de départ étant commun, les destinées humaines sont-elles si diverses ? Pourquoi les uns naissent-ils dans un milieu civilisé, les autres dans l'état sauvage ? Quelle est alors l'origine des démons ? Reprenons l'histoire de l'Esprit à sa première éclosion. Les âmes à peine formées, hésitantes et balbutiantes, sont pourtant libres de pencher du bon ou du mauvais côté. Dès qu'ils ont vécu, les bons se séparent des méchants. L'histoire d'Abel est naïvement vraie. Les âmes ingrates à peine sorties des mains du Créateur, persistent dans la révolte du crime ; alors pendant la succession des siècles, elles errent, nuisant aux autres et surtout à elles-mêmes, jusqu'à ce que le repentir les touche, ce qui arrive infailliblement. Donc les premiers démons sont les premiers hommes coupables. Dieu, dans son immense justice, n'impose jamais que les souffrances résultant des actes mauvais. La terre devait être entièrement peuplée, mais ne pouvait l'être également, et, selon le degré d'avancement obtenu dans les migrations terrestres, les uns naissent dans les grands centres de civilisation, les autres, Esprits incertains, qui ont encore besoin d'initiation, naissent dans les forêts reculées ; l'état sauvage est préparatoire. Tout est harmonieux, et l'âme coupable et aveugle d'un démon de la terre ne peut revivre dans un centre éclairé. Cependant quelques-unes se hasardent dans ce milieu qui n'est pas le leur ; si elles ne peuvent y marcher à l'unisson, elles donnent le spectacle de la barbarie au milieu de la civilisation ; ce sont des êtres dépaysés.
L'état embryonnaire est celui d'un être qui n'a pas encore subi de migration ; on ne peut l'étudier à part, puisqu'il est l'origine de l'homme.
Georges.
Les Esprits errants, Méd. Mad. Costel
Les Esprits sont divisés en plusieurs catégories ; d'abord les embryons
qui n'ont aucune faculté distincte ; qui nagent dans l'air comme les
insectes qu'on voit tourbillonner dans un rayon de soleil ; ils
voltigent sans but et sont incarnés sans avoir fait de choix ; ils
deviennent des être humains ignorants et grossiers.
Au-dessus d'eux sont les Esprits légers dont les instincts ne sont pas mauvais, mais seulement malins ; ils se jouent des hommes et leur causent des peines frivoles ; ce sont des enfants ; ils en ont les caprices et la puérile méchanceté.
Les Esprits mauvais ne le sont pas tous au même degré ; il y en a qui ne font d'autre mal que de légères tromperies ; qui ne s'attachent pas à un être, et se bornent à faire commettre des fautes peu graves.
Les Esprits malfaisants poussent au mal et en jouissent, mais ils ont encore quelque lueur de pitié.
Les Esprits pervers n'en ont pas ; toutes leurs facultés tendent vers le mal ; ils le font avec calcul, avec suite ; ils jouissent des tortures morales qu'ils causent. Ils correspondent, dans le monde des Esprits, aux criminels dans le vôtre. Ils arrivent à cette perversité à force de méconnaître les lois de Dieu ; dans leurs vies charnelles, ils tombent de chute en chute et les siècles se passent avant qu'il leur vienne une pensée de rénovation. Le mal est leur élément, ils s'y plongent avec délices ; mais obligés de se
réincarner, ils subissent de telles souffrances, et ces souffrances s'accroissent tellement dans leurs vies Spirites, que l'amour du mal s'use en eux ; ils finissent par comprendre qu'ils doivent céder à la voix de Dieu qui ne cesse de les appeler. On a vu des Esprits rebelles demander avec ardeur les expiations les plus terribles et les subir avec la joie du martyr. C'est un immense bonheur pour les purs Esprits que ces retours vers le bien. La parole du Christ, pour les brebis égarées, est éclatante de vérité.
Les Esprits errants du second ordre sont les intermédiaires entre les Esprits supérieurs et les mortels, car il est rare que les Esprits supérieurs se communiquent directement ; il faut qu'ils y soient poussés par une sollicitude particulière. Ces intermédiaires sont les Esprits des mortels qui n'ont aucun mal grave à se reprocher, et dont les intentions n'ont point été mauvaises. Ils reçoivent des missions, et quand ils les accomplissent avec zèle et amour ils en sont récompensés par un avancement plus rapide. Ils ont moins de migrations à subir ; aussi les Esprits désirent-ils ardemment ces missions qui ne leur sont accordées que comme récompense et quand on les juge capables de les remplir. Ce sont les Esprits supérieurs qui les dirigent et qui choisissent leurs fonctions.
Les Esprits supérieurs ne le sont pas tous au même degré ; s'ils sont dispensés des migrations dans vos mondes, ils ne le sont pas des conditions d'avancement dans les sphères plus élevées. Enfin il n'y a aucune lacune dans le monde visible et invisible ; un ordre admirable a pourvu à tout ; aucun être n'est oisif ou inutile ; tous concourent dans la mesure de leurs facultés à la perfection de l'œuvre de Dieu qui n'a ni terme ni limite.
Georges.
Au-dessus d'eux sont les Esprits légers dont les instincts ne sont pas mauvais, mais seulement malins ; ils se jouent des hommes et leur causent des peines frivoles ; ce sont des enfants ; ils en ont les caprices et la puérile méchanceté.
Les Esprits mauvais ne le sont pas tous au même degré ; il y en a qui ne font d'autre mal que de légères tromperies ; qui ne s'attachent pas à un être, et se bornent à faire commettre des fautes peu graves.
Les Esprits malfaisants poussent au mal et en jouissent, mais ils ont encore quelque lueur de pitié.
Les Esprits pervers n'en ont pas ; toutes leurs facultés tendent vers le mal ; ils le font avec calcul, avec suite ; ils jouissent des tortures morales qu'ils causent. Ils correspondent, dans le monde des Esprits, aux criminels dans le vôtre. Ils arrivent à cette perversité à force de méconnaître les lois de Dieu ; dans leurs vies charnelles, ils tombent de chute en chute et les siècles se passent avant qu'il leur vienne une pensée de rénovation. Le mal est leur élément, ils s'y plongent avec délices ; mais obligés de se
réincarner, ils subissent de telles souffrances, et ces souffrances s'accroissent tellement dans leurs vies Spirites, que l'amour du mal s'use en eux ; ils finissent par comprendre qu'ils doivent céder à la voix de Dieu qui ne cesse de les appeler. On a vu des Esprits rebelles demander avec ardeur les expiations les plus terribles et les subir avec la joie du martyr. C'est un immense bonheur pour les purs Esprits que ces retours vers le bien. La parole du Christ, pour les brebis égarées, est éclatante de vérité.
Les Esprits errants du second ordre sont les intermédiaires entre les Esprits supérieurs et les mortels, car il est rare que les Esprits supérieurs se communiquent directement ; il faut qu'ils y soient poussés par une sollicitude particulière. Ces intermédiaires sont les Esprits des mortels qui n'ont aucun mal grave à se reprocher, et dont les intentions n'ont point été mauvaises. Ils reçoivent des missions, et quand ils les accomplissent avec zèle et amour ils en sont récompensés par un avancement plus rapide. Ils ont moins de migrations à subir ; aussi les Esprits désirent-ils ardemment ces missions qui ne leur sont accordées que comme récompense et quand on les juge capables de les remplir. Ce sont les Esprits supérieurs qui les dirigent et qui choisissent leurs fonctions.
Les Esprits supérieurs ne le sont pas tous au même degré ; s'ils sont dispensés des migrations dans vos mondes, ils ne le sont pas des conditions d'avancement dans les sphères plus élevées. Enfin il n'y a aucune lacune dans le monde visible et invisible ; un ordre admirable a pourvu à tout ; aucun être n'est oisif ou inutile ; tous concourent dans la mesure de leurs facultés à la perfection de l'œuvre de Dieu qui n'a ni terme ni limite.
Georges.
Le Châtiment, Méd. Mad. Costel
Les Esprits méchants, égoïstes et
durs, sont, aussitôt après la mort, livrés à un doute cruel sur leur
destinée présente et future ; ils regardent autour d'eux, ils ne voient
d'abord aucun sujet sur lequel puisse s'exercer leur méchante
personnalité, et le désespoir s'empare d'eux, car l'isolement et
l'inaction sont intolérables aux mauvais Esprits ; ils ne lèvent pas
leurs regards vers les lieux habités par les purs Esprits ; ils
considèrent ce qui les entoure, et bientôt frappés de l'abattement des
Esprits faibles et punis, ils s'attachent à eux comme à une proie,
s'armant du souvenir de leurs fautes passées, qu'ils mettent sans cesse
en action par leurs gestes dérisoires. Cette moquerie ne leur suffisant
pas, ils plongent sur la terre comme des vautours affamés ; ils
cherchent parmi les hommes l'âme qui ouvrira un plus facile accès à
leurs tentations ; ils s'en emparent, exaltent sa convoitise, tâchent
d'éteindre sa foi en Dieu, et lorsque enfin, maîtres d'une conscience,
ils voient leur proie assurée, ils étendent sur tout ce qui approche
leur victime la fatale contagion.
Le mauvais Esprit qui exerce sa rage est presque heureux ; il ne souffre que dans les moments où il n'agit pas et dans ceux aussi où le bien triomphe du mal.
Cependant les siècles s'écoulent ; le mauvais Esprit sent tout à coup les ténèbres l'envahir ; son cercle d'action se resserre, sa conscience, muette jusqu'alors, lui fait sentir les pointes acérées du repentir. Inactif, emporté par le tourbillon, il erre, sentant, comme dit l'Ecriture, le poil de sa chair se dresser de frayeur ; bientôt un grand vide se fait en lui, autour de lui ; le moment est venu, il doit expier ; la réincarnation est-là, menaçante ; il voit, comme dans un mirage, les épreuves terribles qui l'attendent ; il voudrait reculer, il avance, et précipité dans le gouffre béant de la vie, il roule effaré jusqu'à ce que le voile de l'ignorance retombe sur ses yeux. Il vit, il agit, il est encore coupable ; il sent en lui je ne sais quel souvenir inquiet, quels pressentiments qui le font trembler, mais ne le font pas reculer dans la voie du mal. A bout de forces et de crimes, il va mourir. Étendu sur un grabat, ou sur son lit, qu'importe ! l'homme coupable sent, sous son apparente immobilité, se remuer et vivre un monde de sensations oubliées ! sous ses paupières fermées, il voit pointer une lueur, il entend des sons étranges ; son âme qui va quitter son corps s'agite impatiente, tandis que ses mains crispées essaient de s'accrocher aux draps ; il voudrait parler, il voudrait crier à ceux qui l'entourent : Retenez-moi ! Je vois le châtiment ! Il ne le peut ; la mort se fixe sur ses lèvres blêmies, et les assistants disent : le voilà en paix !
Cependant il entend tout ; il flotte autour de son corps qu'il ne voudrait pas abandonner, une force secrète l'attire ; il voit, il reconnaît ce qu'il a déjà vu. Éperdu, il s'élance dans l'espace où il voudrait se cacher. Plus de retraite ! plus de repos ! d'autres Esprits lui rendent le mal qu'il a fait, et châtié, raillé, confus à son tour, il erre et il errera jusqu'à ce que la divine lueur glisse dans son endurcissement et l'éclaire, pour lui montrer le Dieu vengeur, le Dieu triomphant de tout mal, qu'il ne pourra apaiser qu'à force de gémissements et d'expiations. Georges.
Remarque. Jamais tableau plus éloquent, plus terrible et plus vrai n'a été tracé du sort du méchant ; est-il donc nécessaire d'avoir recours à la fantasmagorie des flammes et des tortures physiques ?
Le mauvais Esprit qui exerce sa rage est presque heureux ; il ne souffre que dans les moments où il n'agit pas et dans ceux aussi où le bien triomphe du mal.
Cependant les siècles s'écoulent ; le mauvais Esprit sent tout à coup les ténèbres l'envahir ; son cercle d'action se resserre, sa conscience, muette jusqu'alors, lui fait sentir les pointes acérées du repentir. Inactif, emporté par le tourbillon, il erre, sentant, comme dit l'Ecriture, le poil de sa chair se dresser de frayeur ; bientôt un grand vide se fait en lui, autour de lui ; le moment est venu, il doit expier ; la réincarnation est-là, menaçante ; il voit, comme dans un mirage, les épreuves terribles qui l'attendent ; il voudrait reculer, il avance, et précipité dans le gouffre béant de la vie, il roule effaré jusqu'à ce que le voile de l'ignorance retombe sur ses yeux. Il vit, il agit, il est encore coupable ; il sent en lui je ne sais quel souvenir inquiet, quels pressentiments qui le font trembler, mais ne le font pas reculer dans la voie du mal. A bout de forces et de crimes, il va mourir. Étendu sur un grabat, ou sur son lit, qu'importe ! l'homme coupable sent, sous son apparente immobilité, se remuer et vivre un monde de sensations oubliées ! sous ses paupières fermées, il voit pointer une lueur, il entend des sons étranges ; son âme qui va quitter son corps s'agite impatiente, tandis que ses mains crispées essaient de s'accrocher aux draps ; il voudrait parler, il voudrait crier à ceux qui l'entourent : Retenez-moi ! Je vois le châtiment ! Il ne le peut ; la mort se fixe sur ses lèvres blêmies, et les assistants disent : le voilà en paix !
Cependant il entend tout ; il flotte autour de son corps qu'il ne voudrait pas abandonner, une force secrète l'attire ; il voit, il reconnaît ce qu'il a déjà vu. Éperdu, il s'élance dans l'espace où il voudrait se cacher. Plus de retraite ! plus de repos ! d'autres Esprits lui rendent le mal qu'il a fait, et châtié, raillé, confus à son tour, il erre et il errera jusqu'à ce que la divine lueur glisse dans son endurcissement et l'éclaire, pour lui montrer le Dieu vengeur, le Dieu triomphant de tout mal, qu'il ne pourra apaiser qu'à force de gémissements et d'expiations. Georges.
Remarque. Jamais tableau plus éloquent, plus terrible et plus vrai n'a été tracé du sort du méchant ; est-il donc nécessaire d'avoir recours à la fantasmagorie des flammes et des tortures physiques ?
Mars, Médium Mad. Costel
Mars est une planète inférieure à la
terre dont elle est la grossière ébauche ; il n'est pas nécessaire de
l'habiter. Mars est première incarnation des démons les plus grossiers ;
les êtres qui l'habitent sont rudimentaires ; ils ont la forme humaine,
mais sans aucune beauté ; ils ont tous les instincts de l'homme sans
l'ennoblissement de la bonté.
Livrés aux besoins matériels, ils boivent, ils mangent, ils se battent, ils s'accouplent. Mais comme Dieu n'abandonne aucune de ses créatures, au fond des ténèbres de leur intelligence, gît, latente, la vague connaissance de lui-même développée plus ou moins. Cet instinct suffit pour les rendre supérieurs les uns aux autres, et préparer leur éclosion à une vie plus complète. La leur est courte, comme celle des éphémères. Les hommes, qui ne sont que matière, disparaissent après une courte évolution. Dieu a horreur du mal, et ne le tolère que comme servant de principe au bien ; il abrège son règne, et la résurrection triomphe de lui.
Dans cette planète la terre est aride ; peu de verdure ; un feuillage sombre que le printemps ne rajeunit pas ; un jour égal et gris ; le soleil, à peine apparent, ne prodigue jamais ses fêtes ; le temps coule monotone, sans les alternatives et les espérances des saisons nouvelles ; ce n'est pas l'hiver, ce n'est pas l'été. Le jour, plus court, ne se mesure pas de la même façon ; la nuit règne plus longue. Sans industrie, sans invention, les habitants de Mars dépensent leur vie à la conquête de leur nourriture. Leurs demeures grossières, basses comme des tanières, sont repoussantes par l'incurie et le désordre qui y règnent. Les femmes enchérissent sur les hommes ; plus abandonnées, plus faméliques, elles ne sont que leurs femelles. Elles ont à peine le sentiment maternel ; elles mettent au monde avec facilité, sans aucune angoisse ; elles nourrissent et gardent leurs petits auprès d'elles jusqu'au complet développement de leurs forces, et les chassent sans regret, sans un souvenir.
Ils ne sont pas cannibales ; leurs continuelles batailles n'ont d'autre but que la possession d'un terrain plus ou moins giboyeux. Ils chassent dans des plaines interminables. Inquiets et mobiles comme les êtres dépourvus d'intelligence, ils se déplacent sans cesse. L'égalité de la saison, partout la même, comporte par suite les mêmes besoins et les mêmes occupations ; il y a peu de différence entre les habitants d'un hémisphère à l'autre.
La mort n'a pour eux ni terreur ni mystère ; ils la regardent seulement comme la pourriture du corps qu'ils brûlent immédiatement. Lorsqu'un de ces hommes va mourir il est aussitôt abandonné, et seul, gisant, il pense pour la première fois ; un vague instinct le saisit ; comme l'hirondelle avertie de sa prochaine migration, il sent que tout n'est pas fini, qu'il va recommencer quelque chose d'inconnu. Il n'est pas assez intelligent pour supposer, craindre ou espérer, mais il calcule en hâte ses victoires ou ses défaites ; il pense au nombre de gibier qu'il a abattu, et se réjouit ou s'afflige selon les résultats obtenus. Sa femme (ils n'en ont jamais qu'une à la fois, mais qu'ils peuvent changer autant que cela leur convient) accroupie sur le seuil, jette en l'air des cailloux ; lorsqu'ils forment un petit monticule, elle juge que le temps est accompli et se hasarde à regarder dans l'intérieur ; si ses prévisions sont réalisées, si l'homme est mort, elle entre, sans un cri, sans une larme, le dépouille des peaux de bêtes qui l'enveloppent, et va froidement avertir ses voisins qui emportent le corps et le brûlent, à peine refroidi.
Les animaux, qui subissent partout le reflet humain, sont plus sauvages, plus cruels que partout ailleurs. Le chien et le loup ne sont qu'une même espèce, et sans cesse en lutte avec l'homme, ils lui livrent des combats acharnés. D'ailleurs, moins nombreux, moins variés que sur la terre, les animaux sont l'abrégé d'eux-mêmes.
Les éléments ont la colère aveugle du chaos ; la mer furieuse sépare les continents sans navigation possible ; le vent mugit et courbe les arbres jusqu'au sol. Les eaux submergent les terres ingrates qu'elles ne fécondent point. Le terrain n'offre pas les mêmes conditions géologiques que la terre ; le feu ne l'échauffe pas ; les volcans y sont inconnus ; les montagnes, à peine élevées, n'offrent aucune beauté ; elles lassent l'œil et découragent l'exploration ; partout enfin monotonie et violence ; partout la fleur sans la couleur et le parfum ; partout l'homme sans prévoyance, tuant pour vivre.
Georges.
Remarque. Pour servir de transition entre le tableau de Mars et celui de Jupiter, il faudrait celui d'un monde intermédiaire, de la Terre, par exemple, mais que nous connaissions suffisamment. En l'observant, il est aisé de reconnaître qu'il se rapproche plus de Mars que de Jupiter, puisqu'au sein même de la civilisation on trouve encore des êtres tout aussi abjects et tout aussi dépourvus de sentiments et d'humanité, qui vivent dans l'abrutissement le plus absolu, ne songent qu'aux besoins matériels, sans avoir jamais tourné leurs regards vers le ciel, et qui semblent venir de Mars en ligne directe.
Livrés aux besoins matériels, ils boivent, ils mangent, ils se battent, ils s'accouplent. Mais comme Dieu n'abandonne aucune de ses créatures, au fond des ténèbres de leur intelligence, gît, latente, la vague connaissance de lui-même développée plus ou moins. Cet instinct suffit pour les rendre supérieurs les uns aux autres, et préparer leur éclosion à une vie plus complète. La leur est courte, comme celle des éphémères. Les hommes, qui ne sont que matière, disparaissent après une courte évolution. Dieu a horreur du mal, et ne le tolère que comme servant de principe au bien ; il abrège son règne, et la résurrection triomphe de lui.
Dans cette planète la terre est aride ; peu de verdure ; un feuillage sombre que le printemps ne rajeunit pas ; un jour égal et gris ; le soleil, à peine apparent, ne prodigue jamais ses fêtes ; le temps coule monotone, sans les alternatives et les espérances des saisons nouvelles ; ce n'est pas l'hiver, ce n'est pas l'été. Le jour, plus court, ne se mesure pas de la même façon ; la nuit règne plus longue. Sans industrie, sans invention, les habitants de Mars dépensent leur vie à la conquête de leur nourriture. Leurs demeures grossières, basses comme des tanières, sont repoussantes par l'incurie et le désordre qui y règnent. Les femmes enchérissent sur les hommes ; plus abandonnées, plus faméliques, elles ne sont que leurs femelles. Elles ont à peine le sentiment maternel ; elles mettent au monde avec facilité, sans aucune angoisse ; elles nourrissent et gardent leurs petits auprès d'elles jusqu'au complet développement de leurs forces, et les chassent sans regret, sans un souvenir.
Ils ne sont pas cannibales ; leurs continuelles batailles n'ont d'autre but que la possession d'un terrain plus ou moins giboyeux. Ils chassent dans des plaines interminables. Inquiets et mobiles comme les êtres dépourvus d'intelligence, ils se déplacent sans cesse. L'égalité de la saison, partout la même, comporte par suite les mêmes besoins et les mêmes occupations ; il y a peu de différence entre les habitants d'un hémisphère à l'autre.
La mort n'a pour eux ni terreur ni mystère ; ils la regardent seulement comme la pourriture du corps qu'ils brûlent immédiatement. Lorsqu'un de ces hommes va mourir il est aussitôt abandonné, et seul, gisant, il pense pour la première fois ; un vague instinct le saisit ; comme l'hirondelle avertie de sa prochaine migration, il sent que tout n'est pas fini, qu'il va recommencer quelque chose d'inconnu. Il n'est pas assez intelligent pour supposer, craindre ou espérer, mais il calcule en hâte ses victoires ou ses défaites ; il pense au nombre de gibier qu'il a abattu, et se réjouit ou s'afflige selon les résultats obtenus. Sa femme (ils n'en ont jamais qu'une à la fois, mais qu'ils peuvent changer autant que cela leur convient) accroupie sur le seuil, jette en l'air des cailloux ; lorsqu'ils forment un petit monticule, elle juge que le temps est accompli et se hasarde à regarder dans l'intérieur ; si ses prévisions sont réalisées, si l'homme est mort, elle entre, sans un cri, sans une larme, le dépouille des peaux de bêtes qui l'enveloppent, et va froidement avertir ses voisins qui emportent le corps et le brûlent, à peine refroidi.
Les animaux, qui subissent partout le reflet humain, sont plus sauvages, plus cruels que partout ailleurs. Le chien et le loup ne sont qu'une même espèce, et sans cesse en lutte avec l'homme, ils lui livrent des combats acharnés. D'ailleurs, moins nombreux, moins variés que sur la terre, les animaux sont l'abrégé d'eux-mêmes.
Les éléments ont la colère aveugle du chaos ; la mer furieuse sépare les continents sans navigation possible ; le vent mugit et courbe les arbres jusqu'au sol. Les eaux submergent les terres ingrates qu'elles ne fécondent point. Le terrain n'offre pas les mêmes conditions géologiques que la terre ; le feu ne l'échauffe pas ; les volcans y sont inconnus ; les montagnes, à peine élevées, n'offrent aucune beauté ; elles lassent l'œil et découragent l'exploration ; partout enfin monotonie et violence ; partout la fleur sans la couleur et le parfum ; partout l'homme sans prévoyance, tuant pour vivre.
Georges.
Remarque. Pour servir de transition entre le tableau de Mars et celui de Jupiter, il faudrait celui d'un monde intermédiaire, de la Terre, par exemple, mais que nous connaissions suffisamment. En l'observant, il est aisé de reconnaître qu'il se rapproche plus de Mars que de Jupiter, puisqu'au sein même de la civilisation on trouve encore des êtres tout aussi abjects et tout aussi dépourvus de sentiments et d'humanité, qui vivent dans l'abrutissement le plus absolu, ne songent qu'aux besoins matériels, sans avoir jamais tourné leurs regards vers le ciel, et qui semblent venir de Mars en ligne directe.
Jupiter, Méd. Mad. Costel
La planète de Jupiter, infiniment plus
grande que la terre, ne présente pas le même aspect. Elle est inondée
d'une lumière pure et brillante qui éclaire sans éblouir. Les arbres,
les fleurs, les insectes, les animaux dont les vôtres sont le point de
départ, y sont agrandis et perfectionnés ; la nature y est plus
grandiose et plus variée ; la température est égale et délicieuse ;
l'harmonie des sphères enchante les yeux et les oreilles. La forme des
êtres qui l'habitent est la même que la vôtre, mais embellie,
perfectionnée, et surtout purifiée. Nous ne sommes point soumis aux
conditions matérielles de votre nature ; nous n'avons ni les besoins, ni
les maladies qui en sont les conséquences. Nous sommes des âmes
revêtues d'une enveloppe diaphane qui conserve les traits de nos
migrations passées ; nous paraissons à nos amis tels qu'ils nous ont
connus, mais illuminés par une lumière divine, transfigurés par nos
impressions intérieures qui sont toujours élevées.
Jupiter est divisé, comme la terre, en un grand nombre de pays variés d'aspect, mais non de climat. Les différences de conditions y sont établies seulement par la supériorité morale et intelligente ; il n'y a ni maîtres ni esclaves ; les degrés plus élevés ne sont marqués que par les communications plus directes et plus fréquentes avec les Esprits purs, et par les fonctions plus importantes qui nous confiées. Vos habitations ne peuvent vous donner nulle idée des nôtres, puisque nous n'avons pas les mêmes besoins. Nous cultivons des arts arrivés à un degré de perfection inconnue parmi vous. Nous jouissons de spectacles sublimes, parmi lesquels ce que nous admirons davantage à mesure que nous le comprenons mieux, c'est l'inépuisable variété des créations, variétés harmonieuses qui ont le même point de départ et se perfectionnent dans le même sens. Tous les sentiments tendres et élevés de la nature humaine, nous les retrouvons agrandis et purifiés, et le désir incessant que nous avons de parvenir au rang des purs Esprits, n'est point un tourment, mais une noble ambition qui nous pousse à nous perfectionner. Nous étudions incessamment avec amour pour être élevés jusqu'à eux, ce que font aussi les êtres inférieurs pour arriver à nous égaler. Vos petites haines, vos mesquines jalousies nous sont inconnues ; un lien d'amour et de fraternité nous unit ; les plus forts aident les plus faibles. Dans votre monde vous avez besoin de l'ombre du mal pour sentir le bien, de la nuit pour admirer la lumière, de la maladie pour apprécier la santé. Ici, ces contrastes ne sont pas nécessaires ; l'éternelle lumière, l'éternelle bonté, l'éternel calme de l'âme, nous comblent d'une éternelle joie. Voilà ce que l'Esprit humain a le plus de peine à comprendre ; il a été ingénieux pour peindre les tourments de l'enfer, il n'a jamais pu se représenter les joies du ciel ; et pourquoi cela ? parce qu'étant inférieur, il n'a enduré que peines et misères et n'a point entrevu les célestes clartés ; il ne peut vous parler que de ce qu'il connaît, comme un voyageur décrit les pays qu'il a parcourus ; mais à mesure qu'il s'élève et s'épure, l'horizon s'éclaircit et il comprend le bien qui est devant lui, comme il a compris le mal qui est resté derrière lui.
Déjà d'autres Esprits ont cherché à vous faire comprendre, autant que le permet votre nature, l'état des mondes heureux, afin de vous exciter à suivre la seule route qui peut y conduire ; mais il en est parmi vous qui sont tellement attachés à la matière, qu'ils préfèrent encore les joies matérielles de la terre, aux joies pures qui attendent l'homme qui sait s'en détacher. Qu'ils en jouissent donc, pendant qu'ils y sont ! car un triste retour les attend, peut-être même dès cette vie. Ceux que nous choisissons pour nos interprètes sont les premiers à recevoir la lumière ; malheur à eux surtout s'ils ne profitent pas de la faveur que Dieu leur accorde, car sa justice s'appesantira sur eux !
Georges.
Jupiter est divisé, comme la terre, en un grand nombre de pays variés d'aspect, mais non de climat. Les différences de conditions y sont établies seulement par la supériorité morale et intelligente ; il n'y a ni maîtres ni esclaves ; les degrés plus élevés ne sont marqués que par les communications plus directes et plus fréquentes avec les Esprits purs, et par les fonctions plus importantes qui nous confiées. Vos habitations ne peuvent vous donner nulle idée des nôtres, puisque nous n'avons pas les mêmes besoins. Nous cultivons des arts arrivés à un degré de perfection inconnue parmi vous. Nous jouissons de spectacles sublimes, parmi lesquels ce que nous admirons davantage à mesure que nous le comprenons mieux, c'est l'inépuisable variété des créations, variétés harmonieuses qui ont le même point de départ et se perfectionnent dans le même sens. Tous les sentiments tendres et élevés de la nature humaine, nous les retrouvons agrandis et purifiés, et le désir incessant que nous avons de parvenir au rang des purs Esprits, n'est point un tourment, mais une noble ambition qui nous pousse à nous perfectionner. Nous étudions incessamment avec amour pour être élevés jusqu'à eux, ce que font aussi les êtres inférieurs pour arriver à nous égaler. Vos petites haines, vos mesquines jalousies nous sont inconnues ; un lien d'amour et de fraternité nous unit ; les plus forts aident les plus faibles. Dans votre monde vous avez besoin de l'ombre du mal pour sentir le bien, de la nuit pour admirer la lumière, de la maladie pour apprécier la santé. Ici, ces contrastes ne sont pas nécessaires ; l'éternelle lumière, l'éternelle bonté, l'éternel calme de l'âme, nous comblent d'une éternelle joie. Voilà ce que l'Esprit humain a le plus de peine à comprendre ; il a été ingénieux pour peindre les tourments de l'enfer, il n'a jamais pu se représenter les joies du ciel ; et pourquoi cela ? parce qu'étant inférieur, il n'a enduré que peines et misères et n'a point entrevu les célestes clartés ; il ne peut vous parler que de ce qu'il connaît, comme un voyageur décrit les pays qu'il a parcourus ; mais à mesure qu'il s'élève et s'épure, l'horizon s'éclaircit et il comprend le bien qui est devant lui, comme il a compris le mal qui est resté derrière lui.
Déjà d'autres Esprits ont cherché à vous faire comprendre, autant que le permet votre nature, l'état des mondes heureux, afin de vous exciter à suivre la seule route qui peut y conduire ; mais il en est parmi vous qui sont tellement attachés à la matière, qu'ils préfèrent encore les joies matérielles de la terre, aux joies pures qui attendent l'homme qui sait s'en détacher. Qu'ils en jouissent donc, pendant qu'ils y sont ! car un triste retour les attend, peut-être même dès cette vie. Ceux que nous choisissons pour nos interprètes sont les premiers à recevoir la lumière ; malheur à eux surtout s'ils ne profitent pas de la faveur que Dieu leur accorde, car sa justice s'appesantira sur eux !
Georges.
Les purs Esprits, Médium, Mad. Costel
Les purs Esprits sont ceux qui arrivés
au plus haut degré de perfection, sont jugés dignes d'être admis aux
pieds de Dieu. La splendeur infinie qui les environne ne les dispense
point de leur part d'utilité dans les œuvres de la création : les
fonctions qu'ils ont à remplir correspondent à l'étendue de leurs
facultés. Ces Esprits sont les ministres de Dieu ; ils régissent sous
ses ordres les mondes innombrables ; ils dirigent de haut les Esprits et
les humains ; ils sont liés entre eux par un amour sans bornes, et
cette ardeur s'étend sur tous les êtres qu'ils cherchent à appeler et à
rendre dignes de la suprême félicité. Dieu rayonne sur eux et leur
transmet ses ordres ; ils le voient sans être accablés de sa lumière.
Leur forme est éthérée, ils n'ont plus rien de palpable ; ils parlent aux Esprits supérieurs et leur communiquent leur science ; ils sont devenus infaillibles. C'est dans leurs rangs que sont choisis les anges gardiens qui abaissent avec bonté leurs regards sur les mortels, et les recommandent aux Esprits supérieurs qui les ont aimés. Ceux-ci choisissent les agents de leur direction dans les Esprits du second ordre. Les purs Esprits sont égaux ; il n'en peut être autrement, puisqu'ils ne sont appelés à ce rang qu'après avoir atteint le plus haut degré de perfection. Il y a égalité, mais non uniformité, car Dieu n'a pas voulu qu'aucune de ses œuvres fût identique. Les Esprits purs conservent leur personnalité qui a seulement acquis la perfection la plus complète dans le sens de son point de départ.
Il n'est pas permis de donner de plus grands détails sur ce monde suprême.
Georges.
Leur forme est éthérée, ils n'ont plus rien de palpable ; ils parlent aux Esprits supérieurs et leur communiquent leur science ; ils sont devenus infaillibles. C'est dans leurs rangs que sont choisis les anges gardiens qui abaissent avec bonté leurs regards sur les mortels, et les recommandent aux Esprits supérieurs qui les ont aimés. Ceux-ci choisissent les agents de leur direction dans les Esprits du second ordre. Les purs Esprits sont égaux ; il n'en peut être autrement, puisqu'ils ne sont appelés à ce rang qu'après avoir atteint le plus haut degré de perfection. Il y a égalité, mais non uniformité, car Dieu n'a pas voulu qu'aucune de ses œuvres fût identique. Les Esprits purs conservent leur personnalité qui a seulement acquis la perfection la plus complète dans le sens de son point de départ.
Il n'est pas permis de donner de plus grands détails sur ce monde suprême.
Georges.
Séjour des bienheureux, Mad. Costel
(Méd. Mad. Costel)
Parlons des dernières spirales de gloire habitées par les purs Esprits ;
nul ne les atteint avant d'avoir traversé les cycles des Esprits
errants. Jupiter est le plus haut degré de l'échelle ; lorsqu'un Esprit,
longtemps purifié par son séjour dans cette planète est jugé digne de
la suprême félicité, il en est averti par un redoublement d'ardeur ; un
feu subtile anime toutes les parties délicates de son intelligence qui
semble rayonner et devenir visible ; éblouissant, transfiguré, il
éclaire le jour qui semblait si radieux aux yeux des habitants de
Jupiter ; ses frères reconnaissent l'élu du Seigneur, et tremblants,
s'agenouillent devant sa volonté. Cependant l'Esprit choisi s'élève, et
les cieux, dans leur suprême harmonie, lui révèlent des beautés
indescriptibles.
A mesure qu'il monte, il comprend, non plus comme dans l'erraticité, non plus voyant l'ensemble des choses créées, comme dans Jupiter, mais embrassant l'infini. Son intelligence transfigurée s'élance comme une flèche jusqu'à Dieu sans tremblement et sans erreur, comme dans un foyer immense alimenté par mille objets divers. L'amour, dans ces divers Esprits revêt la couleur de leur personnalité éprouvée ; ils se reconnaissent ; ils jouissent les uns par les autres. Leurs vertus reflétées, répercutent pour ainsi dire, les délices de la vue de Dieu et s'augmentent incessamment du bonheur de chaque élu. Mer d'amour que chaque affluent grossit, ces forces pures ne restent pas plus inactives que les forces des autres des autres sphères. Investies aussitôt du don d'ubiquité, elles embrassent à la fois les détails infinis de la vie humaine depuis son éclosion, jusqu'à ses dernières étapes. Irrésistible comme le jour, leur vue pénètre partout à la fois, et, actifs comme la puissance qui les meut, ils répandent les volontés du Seigneur. Comme d'une urne pleine s'échappe le flot bienfaisant, leur bonté universelle échauffe les mondes et confond le mal.
Ces divers interprètes ont pour ministres de leur puissance les Esprits déjà épurés. Ainsi tout s'élève, tout se perfectionne, et la charité rayonne sur les mondes qu'elle nourrit de sa puissante mamelle.
Les purs Esprits ont pour attribut la possession de tout ce qui est bien et vrai, car ils possèdent Dieu, le principe lui-même. La pauvre pensée humaine limite tout ce qu'elle comprend et n'admet pas l'infini que le bonheur ne limite pas. Après Dieu, que peut-il y avoir ? Dieu encore, Dieu toujours ; le voyageur voit les horizons succéder aux horizons et l'un n'est que le commencement de l'autre ; ainsi l'infini se déroule incessamment. La joie la plus immense des purs Esprits est précisément cette étendue aussi profonde que l'éternité elle-même.
On ne peut dépeindre une grâce, une flamme, un rayon ; je ne puis dépeindre les purs Esprits. Plus vifs, plus beaux, plus éclatants que ne le sont les images les plus éthérées, un mot résume leur être, leur pouvoir et leurs jouissances : Amour ! Remplissez de ce mot l'espace qui sépare la terre du ciel, et vous n'aurez encore que l'idée d'une goutte d'eau dans la mer. L'amour terrestre, quelque grossier qu'il soit, peut seul vous faire connaître sa divine réalité.
Georges.
A mesure qu'il monte, il comprend, non plus comme dans l'erraticité, non plus voyant l'ensemble des choses créées, comme dans Jupiter, mais embrassant l'infini. Son intelligence transfigurée s'élance comme une flèche jusqu'à Dieu sans tremblement et sans erreur, comme dans un foyer immense alimenté par mille objets divers. L'amour, dans ces divers Esprits revêt la couleur de leur personnalité éprouvée ; ils se reconnaissent ; ils jouissent les uns par les autres. Leurs vertus reflétées, répercutent pour ainsi dire, les délices de la vue de Dieu et s'augmentent incessamment du bonheur de chaque élu. Mer d'amour que chaque affluent grossit, ces forces pures ne restent pas plus inactives que les forces des autres des autres sphères. Investies aussitôt du don d'ubiquité, elles embrassent à la fois les détails infinis de la vie humaine depuis son éclosion, jusqu'à ses dernières étapes. Irrésistible comme le jour, leur vue pénètre partout à la fois, et, actifs comme la puissance qui les meut, ils répandent les volontés du Seigneur. Comme d'une urne pleine s'échappe le flot bienfaisant, leur bonté universelle échauffe les mondes et confond le mal.
Ces divers interprètes ont pour ministres de leur puissance les Esprits déjà épurés. Ainsi tout s'élève, tout se perfectionne, et la charité rayonne sur les mondes qu'elle nourrit de sa puissante mamelle.
Les purs Esprits ont pour attribut la possession de tout ce qui est bien et vrai, car ils possèdent Dieu, le principe lui-même. La pauvre pensée humaine limite tout ce qu'elle comprend et n'admet pas l'infini que le bonheur ne limite pas. Après Dieu, que peut-il y avoir ? Dieu encore, Dieu toujours ; le voyageur voit les horizons succéder aux horizons et l'un n'est que le commencement de l'autre ; ainsi l'infini se déroule incessamment. La joie la plus immense des purs Esprits est précisément cette étendue aussi profonde que l'éternité elle-même.
On ne peut dépeindre une grâce, une flamme, un rayon ; je ne puis dépeindre les purs Esprits. Plus vifs, plus beaux, plus éclatants que ne le sont les images les plus éthérées, un mot résume leur être, leur pouvoir et leurs jouissances : Amour ! Remplissez de ce mot l'espace qui sépare la terre du ciel, et vous n'aurez encore que l'idée d'une goutte d'eau dans la mer. L'amour terrestre, quelque grossier qu'il soit, peut seul vous faire connaître sa divine réalité.
Georges.
La réincarnation, par M. de Grand-Boulogne
Il y a dans la doctrine de la réincarnation une économie morale qui n'échappe pas à ton intelligence.
La corporéité seule étant compatible avec les actes de vertu, et ces actes étant nécessaires à l'amélioration de l'Esprit, celui-ci doit rarement trouver dans une seule existence les circonstances nécessaires à son amélioration au-dessus de l'humanité.
Etant admis que la justice de Dieu ne peut s'allier avec des peines éternelles, la raison doit conclure à la nécessité : 1° d'une période de temps pendant laquelle l'Esprit examine son passé, et forme ses résolutions pour l'avenir ; 2° d'une existence nouvelle en harmonie avec l'avancement actuel de cet Esprit. Je ne parle pas des supplices, quelquefois terribles, auxquels sont condamnés certains Esprits pendant la période de l'erraticité ; ils répondent d'une part à l'énormité de la faute, de l'autre à la justice de Dieu. Ceci en dit assez pour dispenser de donner des détails que tu rencontreras d'ailleurs dans l'étude des évocations. Revenant aux réincarnations, tu en comprendras la nécessité par une comparaison vulgaire, mais saisissante de vérité.
Après une année d'études, qu'arrive-t-il au jeune collégien ? S'il a progressé, il passe dans une classe supérieure ; s'il est resté immobile dans son ignorance, il redouble sa classe. Va plus loin ; suppose des fautes graves : il est expulsé ; il peut errer de collège en collège ; il peut être chassé de l'Université, et peut aller de la maison d'éducation à la maison de correction. Telle est l'image fidèle du sort des Esprits, et rien ne satisfait plus complètement la raison. Veut-on creuser plus profondément la doctrine ? On verra combien, dans ces idées, la justice de Dieu paraît plus parfaite et plus conforme aux grandes vérités qui dominent notre intelligence.
Dans l'ensemble, comme dans les détails, il y a là quelque chose de si saisissant que l'Esprit qui y est initié pour la première fois en est comme illuminé. Et les reproches murmurés contre la Providence ; et les malédictions contre la douleur ; et le scandale du vice heureux en face de la vertu qui souffre ; et la mort prématurée de l'enfant ; et, dans une même famille, de ravissantes qualités donnant pour ainsi dire la main à une perversité précoce ; et les infirmités qui datent du berceau ; et la diversité infinie des destinées, soit chez les individus, soit chez les peuples, problèmes irrésolus jusqu'à ce jour, énigmes qui ont fait douter de la bonté et presque de l'existence de Dieu, tout cela s'explique à la fois. Un pur rayon de lumière s'étend sur l'horizon de la philosophie nouvelle, et dans son cadre immense, se groupent harmonieusement toutes les conditions de l'existence humaine. Les difficultés s'aplanissent, les problèmes se résolvent, et des mystères impénétrables jusqu'à ce jour se résument et s'expliquent dans ce seul mot : réincarnation.
Je lis dans ta pensée, cher chrétien ; tu dis : voici, pour le coup, une véritable hérésie. Pas plus, mon enfant, que la négation de l'éternité des peines. Aucun dogme pratique n'est contradictoire avec cette vérité. Qu'est-ce que la vie humaine ? Le temps pendant lequel l'Esprit reste uni à un corps. Les philosophes chrétiens, au jour marqué par Dieu, n'auront aucune difficulté à dire que la vie est multiple. Cela n'ajoute ni ne change rien à vos devoirs. La morale chrétienne reste debout, et le souvenir de la Mission de Jésus plane toujours sur l'humanité. La religion n'a rien à redouter de cet enseignement, et le jour n'est pas loin où ses ministres ouvriront les yeux à la lumière ; ils reconnaîtront enfin, dans la révélation nouvelle, les secours que, du fond de leurs basiliques, ils implorent du Ciel. Ils croient que la société va périr : elle va être sauvée.
ZÉnon.
La corporéité seule étant compatible avec les actes de vertu, et ces actes étant nécessaires à l'amélioration de l'Esprit, celui-ci doit rarement trouver dans une seule existence les circonstances nécessaires à son amélioration au-dessus de l'humanité.
Etant admis que la justice de Dieu ne peut s'allier avec des peines éternelles, la raison doit conclure à la nécessité : 1° d'une période de temps pendant laquelle l'Esprit examine son passé, et forme ses résolutions pour l'avenir ; 2° d'une existence nouvelle en harmonie avec l'avancement actuel de cet Esprit. Je ne parle pas des supplices, quelquefois terribles, auxquels sont condamnés certains Esprits pendant la période de l'erraticité ; ils répondent d'une part à l'énormité de la faute, de l'autre à la justice de Dieu. Ceci en dit assez pour dispenser de donner des détails que tu rencontreras d'ailleurs dans l'étude des évocations. Revenant aux réincarnations, tu en comprendras la nécessité par une comparaison vulgaire, mais saisissante de vérité.
Après une année d'études, qu'arrive-t-il au jeune collégien ? S'il a progressé, il passe dans une classe supérieure ; s'il est resté immobile dans son ignorance, il redouble sa classe. Va plus loin ; suppose des fautes graves : il est expulsé ; il peut errer de collège en collège ; il peut être chassé de l'Université, et peut aller de la maison d'éducation à la maison de correction. Telle est l'image fidèle du sort des Esprits, et rien ne satisfait plus complètement la raison. Veut-on creuser plus profondément la doctrine ? On verra combien, dans ces idées, la justice de Dieu paraît plus parfaite et plus conforme aux grandes vérités qui dominent notre intelligence.
Dans l'ensemble, comme dans les détails, il y a là quelque chose de si saisissant que l'Esprit qui y est initié pour la première fois en est comme illuminé. Et les reproches murmurés contre la Providence ; et les malédictions contre la douleur ; et le scandale du vice heureux en face de la vertu qui souffre ; et la mort prématurée de l'enfant ; et, dans une même famille, de ravissantes qualités donnant pour ainsi dire la main à une perversité précoce ; et les infirmités qui datent du berceau ; et la diversité infinie des destinées, soit chez les individus, soit chez les peuples, problèmes irrésolus jusqu'à ce jour, énigmes qui ont fait douter de la bonté et presque de l'existence de Dieu, tout cela s'explique à la fois. Un pur rayon de lumière s'étend sur l'horizon de la philosophie nouvelle, et dans son cadre immense, se groupent harmonieusement toutes les conditions de l'existence humaine. Les difficultés s'aplanissent, les problèmes se résolvent, et des mystères impénétrables jusqu'à ce jour se résument et s'expliquent dans ce seul mot : réincarnation.
Je lis dans ta pensée, cher chrétien ; tu dis : voici, pour le coup, une véritable hérésie. Pas plus, mon enfant, que la négation de l'éternité des peines. Aucun dogme pratique n'est contradictoire avec cette vérité. Qu'est-ce que la vie humaine ? Le temps pendant lequel l'Esprit reste uni à un corps. Les philosophes chrétiens, au jour marqué par Dieu, n'auront aucune difficulté à dire que la vie est multiple. Cela n'ajoute ni ne change rien à vos devoirs. La morale chrétienne reste debout, et le souvenir de la Mission de Jésus plane toujours sur l'humanité. La religion n'a rien à redouter de cet enseignement, et le jour n'est pas loin où ses ministres ouvriront les yeux à la lumière ; ils reconnaîtront enfin, dans la révélation nouvelle, les secours que, du fond de leurs basiliques, ils implorent du Ciel. Ils croient que la société va périr : elle va être sauvée.
ZÉnon.
Le Réveil de l'Esprit, Mad. Costel, médium Lorsque
l'homme quitte sa dépouille mortelle,
il éprouve un étonnement et un éblouissement qui le tiennent quelque
temps indécis sur son état réel ; il ne sait s'il est mort ou vivant, et
ses sensations très confuses, sont assez longtemps à s'éclaircir. Peu à
peu, les yeux de son Esprit sont éblouis des diverses clartés qui
l'environnent ; il suit tout un ordre de choses, grandes et inconnues,
qu'il a d'abord peine à comprendre, mais bientôt il reconnaît qu'il
n'est plus qu'un être impalpable et immatériel ; il cherche sa
dépouille, et s'étonne de ne pas la trouver ; il est quelque temps avant
que la mémoire du passé lui revienne, et le convainque de son identité.
En regardant la terre qu'il vient de quitter, il voit ses parents et
ses amis qui le pleurent, et son corps inerte. Enfin ses yeux se
détachent de la terre et s'élèvent vers le ciel ; si la volonté de Dieu
ne le retient pas au sol, il monte lentement et se sent flotter dans
l'espace, ce qui est une sensation délicieuse. Alors le souvenir de la
vie qu'il quitte lui apparaît avec une clarté, désolante le plus
souvent, mais consolante quelquefois. Je te parle ici de ce que j'ai
éprouvé, moi qui ne suis pas un mauvais esprit, mais qui n'ai pas le
bonheur d'occuper un rang élevé. On se dépouille de tous les préjugés
terrestres ; la vérité apparaît dans toute sa lumière ; rien ne pallie
les fautes ; rien ne cache les vertus ; on voit son âme aussi clairement
que dans un miroir ; on cherche parmi les Esprits ceux que l'on a
connus, car l'Esprit s'effraie de son isolement, mais ils passent sans
s'arrêter ; il n'y a pas de communications amicales entre les Esprits
errants ; ceux mêmes qui se sont aimés n'échangent pas de signes de
reconnaissance ; ces formes diaphanes glissent et ne se fixent pas ; les
communications affectueuses sont réservées aux Esprits supérieurs qui
échangent leurs pensées. Quant à nous, notre état transitoire ne sert
qu'à notre avancement dont rien ne doit nous distraire, les seules
communications qui nous soient permises sont avec les humains, parce
qu'elles ont un but d'utilité mutuelle que Dieu prescrit.
Les mauvais Esprits contribuent aussi à l'amélioration humaine : ils servent aux épreuves ; si on leur résiste, on acquiert des mérites. Les Esprits qui dirigent les hommes sont récompensés par un grand adoucissement de leurs peines. Les Esprits errants ne souffrent pas de l'absence de communications entre eux, parce qu'ils savent qu'ils se retrouveront ; ils n'en ont que plus d'ardeur pour arriver au moment où les épreuves accomplies leur rendront les objets de leur affection qui ne peut s'exprimer, mais qui gît, latente, en eux. Aucun des liens que nous avons contractés sur la terre n'est brisé ; nos sympathies se rétabliront dans l'ordre où elles auront existé, plus ou moins vives selon le degré de chaleur ou d'intimité qu'elles auront eu.
Georges.
Les mauvais Esprits contribuent aussi à l'amélioration humaine : ils servent aux épreuves ; si on leur résiste, on acquiert des mérites. Les Esprits qui dirigent les hommes sont récompensés par un grand adoucissement de leurs peines. Les Esprits errants ne souffrent pas de l'absence de communications entre eux, parce qu'ils savent qu'ils se retrouveront ; ils n'en ont que plus d'ardeur pour arriver au moment où les épreuves accomplies leur rendront les objets de leur affection qui ne peut s'exprimer, mais qui gît, latente, en eux. Aucun des liens que nous avons contractés sur la terre n'est brisé ; nos sympathies se rétabliront dans l'ordre où elles auront existé, plus ou moins vives selon le degré de chaleur ou d'intimité qu'elles auront eu.
Georges.
Progrès des Esprits, Médium, Mad. Costel
Les Esprits peuvent avancer
intellectuellement, s'ils le veulent sincèrement et avec fermeté ; ils
ont, comme les hommes, leur libre arbitre, et leur état errant n'empêche
pas l'exercice de leurs facultés ; il y aide même en leur donnant des
moyens d'observation dont ils peuvent profiter.
Les mauvais Esprits ne sont pas fatalement condamnés à rester tels ; ils peuvent s'améliorer, mais ils le veulent rarement, car ils manquent de discernement, et trouvent une sorte de plaisir malsain au mal qu'ils font. Pour, qu'ils reviennent au bien, il faut qu'ils soient violemment frappés et punis ; car leurs cerveaux ténébreux ne s'éclairent que par le châtiment.
Les Esprits faibles qui ne font pas le mal par plaisir, mais qui n'avancent point, sont retenus par leur faiblesse même, et par une sorte d'engourdissement qui paralyse leurs facultés ; ils vont sans savoir où ; le temps se passe sans qu'ils le mesurent ; ils s'intéressent peu à ce qu'ils voient, et n'en tirent pas profit ou s'en révoltent. Il faut être arrivé à un certain degré d'avancement moral pour pouvoir progresser dans l'état d'erraticité ; aussi ces pauvres Esprits choisissent-ils souvent fort mal leurs épreuves ; ils cherchent surtout à être le mieux possible dans leur vie charnelle, sans beaucoup s'inquiéter de ce qu'ils deviendront au-delà. Ces Esprits faibles aspirent ardemment à l'incarnation, non pour s'épurer, mais pour vivre encore. Les êtres qui ont accompli beaucoup de migrations sont plus expérimentés que les autres ; chacune de leurs existences a déposé en eux une somme de connaissances plus considérable ; ils ont vu et retenu ; ils sont moins naïfs que ceux qui sont rapprochés de leur point de départ.
Les Esprits qui sont partis de la terre s'y réincarnent plus souvent que partout ailleurs, parce que l'expérience qu'ils ont acquise y est plus applicable. Ils ne visitent guère les autres mondes qu'avant ou après leur perfectionnement. Dans chaque planète les conditions de l'existence sont différentes, car Dieu est inépuisable dans la variété de ses œuvres ; pourtant les êtres qui les habitent obéissent aux mêmes lois d'expiation, et tendent tous vers le même but de complète perfection.
Georges.
Les mauvais Esprits ne sont pas fatalement condamnés à rester tels ; ils peuvent s'améliorer, mais ils le veulent rarement, car ils manquent de discernement, et trouvent une sorte de plaisir malsain au mal qu'ils font. Pour, qu'ils reviennent au bien, il faut qu'ils soient violemment frappés et punis ; car leurs cerveaux ténébreux ne s'éclairent que par le châtiment.
Les Esprits faibles qui ne font pas le mal par plaisir, mais qui n'avancent point, sont retenus par leur faiblesse même, et par une sorte d'engourdissement qui paralyse leurs facultés ; ils vont sans savoir où ; le temps se passe sans qu'ils le mesurent ; ils s'intéressent peu à ce qu'ils voient, et n'en tirent pas profit ou s'en révoltent. Il faut être arrivé à un certain degré d'avancement moral pour pouvoir progresser dans l'état d'erraticité ; aussi ces pauvres Esprits choisissent-ils souvent fort mal leurs épreuves ; ils cherchent surtout à être le mieux possible dans leur vie charnelle, sans beaucoup s'inquiéter de ce qu'ils deviendront au-delà. Ces Esprits faibles aspirent ardemment à l'incarnation, non pour s'épurer, mais pour vivre encore. Les êtres qui ont accompli beaucoup de migrations sont plus expérimentés que les autres ; chacune de leurs existences a déposé en eux une somme de connaissances plus considérable ; ils ont vu et retenu ; ils sont moins naïfs que ceux qui sont rapprochés de leur point de départ.
Les Esprits qui sont partis de la terre s'y réincarnent plus souvent que partout ailleurs, parce que l'expérience qu'ils ont acquise y est plus applicable. Ils ne visitent guère les autres mondes qu'avant ou après leur perfectionnement. Dans chaque planète les conditions de l'existence sont différentes, car Dieu est inépuisable dans la variété de ses œuvres ; pourtant les êtres qui les habitent obéissent aux mêmes lois d'expiation, et tendent tous vers le même but de complète perfection.
Georges.
La Charité matérielle et la charité morale, Médium, Mad. de B…
« Aimons-nous les uns les autres et
faisons à autrui ce que nous voudrions qui nous fût fait. » Toute la
religion, toute la morale se trouvent enfermées dans ces deux préceptes ;
s'ils étaient suivis ici-bas, nous serions tous parfaits : plus de
haines, plus de dissentiments ; je dirai plus encore : plus de pauvreté,
car du superflu de la table de chaque riche, bien des pauvres se
nourriraient, et vous ne verriez plus, dans les sombres quartiers que
j'ai habités pendant ma dernière incarnation, de pauvres femmes traînant
après elles de misérables enfants manquant de tout.
Riches ! pensez un peu à cela ; aidez de votre mieux les malheureux ; donnez, pour que Dieu vous rende un jour le bien que vous aurez fait, pour que vous trouviez un jour, au sortir de votre enveloppe terrestre, un cortège d'Esprits reconnaissants qui vous recevront au seuil d'un monde plus heureux.
Si vous pouviez savoir la joie que j'ai éprouvée en retrouvant là-haut ceux que j'avais pu obliger dans ma dernière vie ! Donnez, et aimez votre prochain ; aimez-le comme vous-même, car vous le savez, vous aussi, maintenant que Dieu a permis que vous commenciez à vous instruire dans la science spirite, ce malheureux que vous repoussez est peut-être un frère, un père, un fils, un ami que vous rejetez loin de vous, et alors quel sera votre désespoir un jour en le reconnaissant dans ce monde spirite !
Je souhaite que vous compreniez bien ce que peut être la charité morale, celle que chacun peut pratiquer ; celle qui ne coûte rien de matériel, et cependant celle qui est la plus difficile à mettre en pratique.
La charité morale consiste à se supporter les uns les autres, et c'est ce que vous faites le moins, en ce bas monde où vous êtes incarnés pour le moment. Soyez donc charitables, parce que vous avancerez le plus dans la bonne voie ; soyez humains et supportez-vous les uns les autres. Il y a un grand mérite à savoir se taire pour laisser parler un plus sot que soi ; et c'est là un genre de charité. Savoir être sourd quand un mot moqueur s'échappe d'une bouche habituée à railler ; ne pas voir le sourire dédaigneux qui accueille votre entrée chez des gens qui, souvent à tort, se croient au-dessus de vous, tandis que, dans la vie spirite, la seule réelle, ils en sont quelquefois bien loin ; voilà un mérite, non pas d'humilité, mais de charité ; car ne pas remarquer les torts d'autrui, voilà la charité morale. En passant près d'un pauvre infirme, le regarder avec compassion, a toujours bien plus de mérite que de lui jeter avec mépris son obole.
Cependant il ne faudrait pas prendre cette figure à la lettre, car cette charité ne doit pas empêcher l'autre ; mais pensez surtout à ne pas mépriser votre semblable ; rappelez-vous ce que je vous ai déjà dit : Il faut se souvenir sans cesse que, dans le pauvre rebuté, vous repoussez peut-être un Esprit qui vous a été cher, et qui se trouve momentanément dans une position inférieure à la vôtre. J'ai revu un des pauvres de votre terre que j'avais pu, par bonheur, obliger quelquefois, et qu'il m'arrive maintenant d'implorer à mon tour.
Soyez donc charitables ; ne soyez pas dédaigneux ; sachez laisser passer un mot qui vous blesse, et ne croyez pas qu'être charitable soit seulement de donner le matériel, mais aussi de pratiquer la charité morale. Je vous le répète, faites l'un et l'autre. Rappelez-vous que Jésus a dit que nous sommes frères, et pensez toujours à cela avant de repousser le lépreux ou le mendiant. Je reviendrai encore vous donner une plus longue communication, mais je suis rappelée. Adieu ; pensez à ceux qui souffrent, et priez.
Sœur Rosalie.
Riches ! pensez un peu à cela ; aidez de votre mieux les malheureux ; donnez, pour que Dieu vous rende un jour le bien que vous aurez fait, pour que vous trouviez un jour, au sortir de votre enveloppe terrestre, un cortège d'Esprits reconnaissants qui vous recevront au seuil d'un monde plus heureux.
Si vous pouviez savoir la joie que j'ai éprouvée en retrouvant là-haut ceux que j'avais pu obliger dans ma dernière vie ! Donnez, et aimez votre prochain ; aimez-le comme vous-même, car vous le savez, vous aussi, maintenant que Dieu a permis que vous commenciez à vous instruire dans la science spirite, ce malheureux que vous repoussez est peut-être un frère, un père, un fils, un ami que vous rejetez loin de vous, et alors quel sera votre désespoir un jour en le reconnaissant dans ce monde spirite !
Je souhaite que vous compreniez bien ce que peut être la charité morale, celle que chacun peut pratiquer ; celle qui ne coûte rien de matériel, et cependant celle qui est la plus difficile à mettre en pratique.
La charité morale consiste à se supporter les uns les autres, et c'est ce que vous faites le moins, en ce bas monde où vous êtes incarnés pour le moment. Soyez donc charitables, parce que vous avancerez le plus dans la bonne voie ; soyez humains et supportez-vous les uns les autres. Il y a un grand mérite à savoir se taire pour laisser parler un plus sot que soi ; et c'est là un genre de charité. Savoir être sourd quand un mot moqueur s'échappe d'une bouche habituée à railler ; ne pas voir le sourire dédaigneux qui accueille votre entrée chez des gens qui, souvent à tort, se croient au-dessus de vous, tandis que, dans la vie spirite, la seule réelle, ils en sont quelquefois bien loin ; voilà un mérite, non pas d'humilité, mais de charité ; car ne pas remarquer les torts d'autrui, voilà la charité morale. En passant près d'un pauvre infirme, le regarder avec compassion, a toujours bien plus de mérite que de lui jeter avec mépris son obole.
Cependant il ne faudrait pas prendre cette figure à la lettre, car cette charité ne doit pas empêcher l'autre ; mais pensez surtout à ne pas mépriser votre semblable ; rappelez-vous ce que je vous ai déjà dit : Il faut se souvenir sans cesse que, dans le pauvre rebuté, vous repoussez peut-être un Esprit qui vous a été cher, et qui se trouve momentanément dans une position inférieure à la vôtre. J'ai revu un des pauvres de votre terre que j'avais pu, par bonheur, obliger quelquefois, et qu'il m'arrive maintenant d'implorer à mon tour.
Soyez donc charitables ; ne soyez pas dédaigneux ; sachez laisser passer un mot qui vous blesse, et ne croyez pas qu'être charitable soit seulement de donner le matériel, mais aussi de pratiquer la charité morale. Je vous le répète, faites l'un et l'autre. Rappelez-vous que Jésus a dit que nous sommes frères, et pensez toujours à cela avant de repousser le lépreux ou le mendiant. Je reviendrai encore vous donner une plus longue communication, mais je suis rappelée. Adieu ; pensez à ceux qui souffrent, et priez.
Sœur Rosalie.
L'Electricité de la pensée, Médium, Mad. Costel
Je vous parlerai de l'étrange
phénomène qui se passe dans les assemblées, quel que soit leur caractère
; je veux parler de l'électricité de la pensée, qui se répand, comme
par enchantement, dans les cerveaux les moins préparés à le recevoir. Ce
fait seul aurait dû confirmer le magnétisme aux yeux des plus
incrédules. Je suis surtout frappée de la coexistence des phénomènes, et
de la façon dont ils se confirment les uns les autres ; vous direz sans
doute : le Spiritisme les explique tous, car il donne la raison des
faits, jusqu'alors relégués dans le domaine de la superstition. Il faut
croire à ce qu'il vous enseigne, parce qu'il transforme la pierre en
diamant, c'est-à-dire, qu'il élève sans cesse les âmes qui s'appliquent à
le comprendre, et qu'il leur donne, sur cette terre, la patience pour
supporter leurs maux, et leur procure, dans le ciel, l'élévation
glorieuse qui rapproche du Créateur.
J'en reviens à mon point de départ dont je me suis un peu écartée, l'électricité qui unit l'Esprit des hommes assemblés, et leur fait comprendre à tous en même temps, la même idée ; cette électricité sera un jour employée aussi efficacement entre les hommes qu'elle l'est déjà pour leurs communications éloignés. Je vous indique cette idée ; je la développerai un jour, car elle est très féconde. Conservez le calme dans vos travaux, et comptez sur la bienveillance des bons Esprits pour vous assister. Je vais compléter ma pensée qui est restée inachevée dans ma dernière communication. Je vous parlais de l'électricité de la pensée, et je disais qu'un jour elle serait employée comme l'est sa sœur l'électricité physique. En effet, les hommes réunis dégagent un fluide qui leur transmet avec la rapidité de l'éclair les moindres impressions. Pourquoi n'a-t-on jamais songé à employer ce moyen, pour découvrir un criminel par exemple, ou pour faire comprendre aux masses les vérités de la religion ou du Spiritisme ? Lors des grands procès criminels, ou politiques, les assistants des drames judiciaires, ont tous pu constater le courant magnétique qui forçait peu à peu les gens les plus intéressés à cacher leur pensée, à la découvrir, à s'accuser même, ne pouvant plus supporter la pression électrique qui faisait malgré eux, jaillir la vérité, non pas de leur conscience, mais de leur poitrine ; à part ces grandes émotions, le même phénomène se reproduit pour les idées intellectuelles qui se communiquent de cerveau à cerveau ; le moyen est donc trouvé, il s'agit de l'appliquer : réunir, dans un même centre, des hommes convaincus, ou des hommes instruits, et leur opposer l'ignorance, ou le vice. Ces expériences doivent être faites sciemment, et sont plus importantes que les vains débats portant sur des mots.
Delphine de Girardin.
J'en reviens à mon point de départ dont je me suis un peu écartée, l'électricité qui unit l'Esprit des hommes assemblés, et leur fait comprendre à tous en même temps, la même idée ; cette électricité sera un jour employée aussi efficacement entre les hommes qu'elle l'est déjà pour leurs communications éloignés. Je vous indique cette idée ; je la développerai un jour, car elle est très féconde. Conservez le calme dans vos travaux, et comptez sur la bienveillance des bons Esprits pour vous assister. Je vais compléter ma pensée qui est restée inachevée dans ma dernière communication. Je vous parlais de l'électricité de la pensée, et je disais qu'un jour elle serait employée comme l'est sa sœur l'électricité physique. En effet, les hommes réunis dégagent un fluide qui leur transmet avec la rapidité de l'éclair les moindres impressions. Pourquoi n'a-t-on jamais songé à employer ce moyen, pour découvrir un criminel par exemple, ou pour faire comprendre aux masses les vérités de la religion ou du Spiritisme ? Lors des grands procès criminels, ou politiques, les assistants des drames judiciaires, ont tous pu constater le courant magnétique qui forçait peu à peu les gens les plus intéressés à cacher leur pensée, à la découvrir, à s'accuser même, ne pouvant plus supporter la pression électrique qui faisait malgré eux, jaillir la vérité, non pas de leur conscience, mais de leur poitrine ; à part ces grandes émotions, le même phénomène se reproduit pour les idées intellectuelles qui se communiquent de cerveau à cerveau ; le moyen est donc trouvé, il s'agit de l'appliquer : réunir, dans un même centre, des hommes convaincus, ou des hommes instruits, et leur opposer l'ignorance, ou le vice. Ces expériences doivent être faites sciemment, et sont plus importantes que les vains débats portant sur des mots.
Delphine de Girardin.
L'Hypocrisie, Médium, M. Didier fils
Il devrait y avoir sur la terre deux
camps bien distincts : les hommes qui font le bien ouvertement et ceux
qui font le mal ouvertement. Hé bien ! non. L'homme n'est même pas franc
dans le mal ; il affecte la vertu. Hypocrisie ! hypocrisie ! déesse
puissante, que de tyrans tu as élevés ! que d'idoles tu as fait adorer !
Le cœur de l'homme est vraiment bien étrange, puisqu'il peut battre
lorsqu'il est mort ; puisqu'il peut aimer en apparence l'honneur, la
vertu, la vérité, la charité ! l'homme chaque jour se prosterne devant
ces vertus, et chaque jour il manque de parole, chaque jour il méprise
le pauvre et le Christ ; chaque jour il ment, chaque jour il est
tartuffe ! Que d'hommes paraissent honnêtes par le moyen que l'apparence
trompe souvent ! Christ les appelait sépulcres blanchis, c'est-à-dire
la pourriture au-dedans, le marbre au dehors étincelant au soleil. Homme
! tu ressembles effectivement à cette demeure de la mort, et tant que
ton cœur sera mort, Jésus ne t'inspirera pas ; Jésus, cette lumière
divine qui n'éclaire pas extérieurement, mais qui illumine
intérieurement.
L'hypocrisie, c'est le vice de votre époque, entendez-vous bien ; et vous voulez vous faire grands par l'hypocrisie ! Au nom de la liberté, vous vous agrandissez ; au nom de la morale, vous vous abrutissez ; au nom de la vérité, vous mentez.
Lamennais.
Allan Kardec.
L'hypocrisie, c'est le vice de votre époque, entendez-vous bien ; et vous voulez vous faire grands par l'hypocrisie ! Au nom de la liberté, vous vous agrandissez ; au nom de la morale, vous vous abrutissez ; au nom de la vérité, vous mentez.
Lamennais.
Allan Kardec.