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REVUE SPIRITE JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1861 > Août
Août
Phénomènes psycho-physiologiques
Des personnes qui parlent d'elles-mêmes à
la troisième personne.
Le journal le Siècle, du 4 juillet 1861, cite le fait suivant, d'après le journal du Havre :
« Il vient de mourir à l'hospice un homme qui était en proie à une aberration mentale des plus singulières. C'était un soldat, nommé Pierre Valin, qui avait été blessé à la tête à la bataille de Solferino. Sa blessure s'était complètement cicatrisée, mais depuis ce moment il se croyait mort.
« Quand on lui demandait des nouvelles de sa santé, il répondait : « Vous voulez savoir comment va Pierre Valin ? Le pauvre garçon ! Il a été tué d'un coup de feu dans la tête à Solferino. Ce que vous voyez là n'est pas Valin, c'est une machine qu'ils ont faite à sa ressemblance, mais elle est bien mal faite ; vous devriez les prier d'en faire une autre. »
« Jamais, en parlant de lui-même, il ne disait je ou moi, mais cela. Souvent il tombait dans un état complet d'immobilité et d'insensibilité qui durait plusieurs jours. Appliqués contre cette affection, les sinapismes, les vésicatoires n'ont jamais déterminé le moindre signe de douleur. On a exploré souvent la sensibilité de la peau chez cet homme, on lui a pincé les bras et les jambes, sans qu'il manifestât la plus petite souffrance.
« Pour être plus certain qu'il ne la dissimulait pas, le médecin le faisait piquer vivement par derrière pendant qu'on lui parlait ; le malade ne s'apercevait de rien. Souvent Pierre Valin refusait de manger, en disant que ça n'en avait pas besoin ; que d'ailleurs ça n'avait pas de ventre, etc.
« Ce fait, du reste, n'est pas le seul de ce genre. Un autre soldat, également blessé à la tête, parlait toujours à la troisième personne et au féminin. Il s'écriait : « Ah ! comme elle souffre ! Elle a bien soif ! etc. » On le fit d'abord apercevoir de son erreur, et il en convint avec beaucoup de surprise, mais il y retombait continuellement, et dans les derniers temps de sa vie, il ne s'exprimait plus que de cette manière.
« Un zouave, toujours par suite d'une blessure à la tête, parfaitement guérie cependant, avait perdu la mémoire des substantifs. Sergent instructeur, quoiqu'il connût très bien les noms des soldats de son escouade, il les désignait par ces mots : Le grand brun, le petit châtain, etc. Pour commander, il se servait de périphrases lorsqu'il s'agissait de désigner le fusil ou le sabre, etc. On fut obligé de le renvoyer dans ses foyers.
« Les dernières années du célèbre médecin Baudelocque offrirent l'exemple d'une lésion analogue, mais moins marquée. Il se rappelait fort bien ce qu'il avait fait étant en santé ; il reconnaissait à la voix (car il avait été frappé de cécité) les personnes qui venaient le voir ; mais il n'avait aucune conscience de son existence. Lui demandait-on, par exemple : Comment va la tête ? il répondait : « Je n'ai pas de tête. » Si on lui demandait le bras pour lui tâter le pouls, il répondait qu'il ne savait pas où il était. Il voulut un jour se tâter lui-même le pouls ; on lui mit la main droite sur le poignet gauche ; il demanda ensuite si c'était bien sa main qu'il sentait, après quoi il jugea fort sainement de son pouls. »
La physiologie nous offre à chaque pas des phénomènes qui semblent des anomalies, et devant lesquels elle reste muette. Pourquoi cela ? Nous l'avons déjà dit, et nous ne saurions trop le répéter, c'est qu'elle veut tout rattacher à l'élément matériel, sans tenir aucun compte de l'élément spirituel. Tant qu'elle s'obstinera dans cette voie restrictive, elle sera impuissante à résoudre les mille problèmes qui surgissent à chaque instant sous son scalpel, comme pour lui dire : « Tu vois bien qu'il y a autre chose que la matière, puisque avec la matière seule tu ne peux tout expliquer. » Et ici nous ne parlons pas seulement de quelques phénomènes bizarres qui pourraient la prendre au dépourvu, mais des effets les plus vulgaires. S'est-elle seulement rendu compte des rêves ? Nous ne parlons pas même des rêves vrais, de ceux qui sont des perceptions réelles de choses absentes, présentes ou futures, mais simplement des rêves fantastiques ou de souvenirs ; dit-elle comment se produisent ces images si claires et si nettes qui nous apparaissent quelquefois ? Quel est ce miroir magique qui conserve ainsi l'empreinte des choses ? Dans le somnambulisme naturel, que personne ne conteste, dit-elle d'où vient cette étrange faculté de voir sans le secours des yeux ? de voir, non pas vaguement, mais les détails les plus minutieux, au point de pouvoir faire avec précision et régularité des travaux qui, dans l'état normal, exigeraient une vue perçante ? Il y a donc en nous quelque chose qui voit indépendamment des yeux. Dans cet état, non seulement le sujet agit, mais il pense, il calcule, il combine, il prévoit, il se livre à des travaux d'intelligence dont il est incapable dans l'état de veille, et dont il ne conserve aucun souvenir ; il y a donc quelque chose qui pense indépendamment de la matière. Quel est ce quelque chose ? là, elle s'arrête. Ces faits cependant ne sont pas rares ; mais un savant ira aux antipodes pour voir et calculer une éclipse, tandis qu'il n'ira pas chez son voisin pour observer un phénomène de l'âme. Les faits naturels et spontanés, qui prouvent l'action indépendante d'un principe intelligent, sont très nombreux, mais cette action ressort avec encore plus d'évidence dans les phénomènes magnétiques et spirites, où l'isolement de ce principe se produit pour ainsi dire à volonté.
Revenons à notre sujet. Nous avons rapporté un fait analogue dans la Revue de juin 1861, à propos de l'évocation du marquis de Saint-Paul. Dans ses derniers moments ; il disait toujours : Il a soif, il faut lui donner à boire ; il a froid, il faut le réchauffer ; il souffre à tel endroit, etc. Et quand on lui disait : Mais c'est vous qui avez soif, il répondait : Non, c'est lui. C'est que le moi pensant est dans l'Esprit et non dans le corps ; l'Esprit, déjà en partie dégagé, considérait son corps comme une autre individualité qui n'était pas lui, à proprement parler ; c'était donc à son corps, à cet autre individu qu'il fallait donner à boire, et non à lui Esprit. Aussi, lorsque dans l'évocation on lui fit cette demande : Pourquoi parliez-vous toujours à la troisième personne ? Il répondit : « Parce que j'étais voyant, je vous l'ai dit, et que je sentais nettement les différences qui existent entre le physique et le moral ; ces différences, reliées entre elles par le fluide de vie, deviennent très tranchées aux yeux des mourants clairvoyants. »
Une cause semblable a dû produire l'effet remarqué chez les militaires dont on a parlé. On dira peut-être que la blessure avait déterminé une sorte de folie ; mais le marquis de Saint-Paul n'avait reçu aucune blessure ; il avait toute sa raison, ce dont nous sommes certains, puisque nous le tenons de sa soeur, membre de la Société. Ce qui s'est produit spontanément chez lui a parfaitement pu être déterminé chez les autres par une cause accidentelle. Tous les magnétiseurs savent d'ailleurs qu'il est très ordinaire aux somnambules de parler à la troisième personne, faisant ainsi la distinction entre la personnalité de leur âme ou Esprit, et celle de leur corps.
Dans l'état normal les deux individualités se confondent, et leur parfaite assimilation est nécessaire à l'harmonie des actes de la vie ; mais le principe intelligent est comme ces gaz qui ne tiennent à certains corps solides que par une cohésion éphémère, et s'échappent au premier souffle ; il a toujours une tendance à se débarrasser de son fardeau corporel, dès que la force qui maintient l'équilibre cesse d'agir par une cause quelconque. L'activité harmonique des organes maintient seule l'union intime et complète de l'âme et du corps ; mais à la moindre suspension de cette activité, l'âme prend son essor ; c'est ce qui a lieu dans le sommeil, dans le demi-sommeil, dans le simple engourdissement des sens, dans la catalepsie, dans la léthargie, dans le somnambulisme naturel ou magnétique, dans l'extase, dans ce qu'on appelle le rêve éveillé ou seconde vue, dans les inspirations du génie, dans toutes les grandes tensions de l'esprit qui souvent rendent le corps insensible ; c'est enfin ce qui peut avoir lieu comme conséquence de certains états pathologiques. Une foule de phénomènes moraux n'ont pas d'autre cause que l'émancipation de l'âme ; la médecine admet bien l'influence des causes morales, mais elle n'admet pas l'élément moral comme principe actif ; c'est pourquoi elle confond ces phénomènes avec la folie organique, et c'est pourquoi aussi elle leur applique un traitement purement physique qui, bien souvent, détermine une folie réelle là où il n'y en avait que l'apparence.
Parmi les faits cités, il en est un qui semble assez bizarre ; c'est celui du militaire qui parlait à la troisième personne du féminin. L'élément primitif du phénomène est, comme nous l'avons dit, la distinction des deux personnalités par suite du dégagement de l'Esprit ; mais il en est un autre que nous révèle le Spiritisme, et dont il faut tenir compte, parce qu'il peut donner aux idées un caractère particulier : c'est le vague souvenir des existences antérieures qui, dans l'état d'émancipation de l'âme, peut se réveiller, et permettre de jeter un coup d'oeil rétrospectif sur quelques points du passé. Dans de telles conditions, le dégagement de l'âme n'est jamais complet, et les idées se ressentant de l'affaiblissement des organes, ne peuvent être très lucides, puisqu'elles ne le sont pas même entièrement dans les premiers instants qui suivent la mort. Supposons que l'homme dont nous parlons ait été femme dans sa précédente incarnation, l'idée qu'il en aurait conservée pouvait se confondre avec celle de son état présent.
Ne pourrait-on trouver dans ce fait la cause première de l'idée fixe de certains aliénés qui se croient rois ? S'ils l'ont été dans une autre existence, il peut leur en rester un souvenir qui leur fasse illusion. Ce n'est qu'une supposition, mais qui, pour les initiés au Spiritisme, n'est pas dépourvue de vraisemblance. Si cette cause est possible dans ce cas, dira-t-on, elle ne saurait s'appliquer à ceux qui se croient loups ou porcs, puisqu'on sait que l'homme n'a jamais été animal. C'est vrai, mais un homme peut avoir été dans une condition abjecte qui l'obligeait à vivre parmi les animaux immondes ou sauvages ; là peut être la source de cette illusion qui pourrait bien, chez certains, leur être imposée en punition des actes de leur vie actuelle. Lorsque des faits de la nature de ceux que nous avons rapportés se présentent, si, au lieu de les assimiler systématiquement aux maladies purement corporelles, on en suivait attentivement toutes les phases à l'aide des données fournies par les observations spirites, on reconnaîtrait sans peine la double cause que nous leur assignons, et l'on comprendrait que ce n'est pas avec des douches, des moxas et des saignées qu'on peut y remédier.
Le fait du docteur Baudelocque trouve encore son explication dans des causes analogues. Il n'avait, dit l'article, aucune conscience de son existence ; c'est une erreur, car il ne se croyait pas mort, seulement il n'avait pas conscience de son existence corporelle ; il se trouvait dans un état à peu près semblable à celui de certains Esprits qui, dans les premiers temps qui suivent la mort, ne croient pas être morts et prennent leur corps pour celui d'un autre, le trouble où ils se trouvent ne leur permettant pas de se rendre compte de leur situation ; ce qui se passe chez certains désincarnés peut avoir lieu chez certains incarnés ; c'est ainsi que le docteur Baudelocque pouvait faire abstraction de son corps, et dire qu'il n'avait plus de tête, parce qu'en effet son Esprit n'avait plus de tête charnelle. Les observations spirites fournissent de nombreux exemples de ce genre, aussi jettent-elles une lumière toute nouvelle sur une infinie variété de phénomènes jusqu'à ce jour inexpliqués, et inexplicables sans les bases fournies par le Spiritisme.
Il resterait à examiner le cas du zouave qui avait perdu la mémoire des substantifs ; mais il ne peut s'expliquer que par des considérations d'un tout autre ordre qui rentrent dans le domaine de la physiologie organique. Les développements qu'il comporte nous engagent à y consacrer un article spécial que nous publierons prochainement.
Le journal le Siècle, du 4 juillet 1861, cite le fait suivant, d'après le journal du Havre :
« Il vient de mourir à l'hospice un homme qui était en proie à une aberration mentale des plus singulières. C'était un soldat, nommé Pierre Valin, qui avait été blessé à la tête à la bataille de Solferino. Sa blessure s'était complètement cicatrisée, mais depuis ce moment il se croyait mort.
« Quand on lui demandait des nouvelles de sa santé, il répondait : « Vous voulez savoir comment va Pierre Valin ? Le pauvre garçon ! Il a été tué d'un coup de feu dans la tête à Solferino. Ce que vous voyez là n'est pas Valin, c'est une machine qu'ils ont faite à sa ressemblance, mais elle est bien mal faite ; vous devriez les prier d'en faire une autre. »
« Jamais, en parlant de lui-même, il ne disait je ou moi, mais cela. Souvent il tombait dans un état complet d'immobilité et d'insensibilité qui durait plusieurs jours. Appliqués contre cette affection, les sinapismes, les vésicatoires n'ont jamais déterminé le moindre signe de douleur. On a exploré souvent la sensibilité de la peau chez cet homme, on lui a pincé les bras et les jambes, sans qu'il manifestât la plus petite souffrance.
« Pour être plus certain qu'il ne la dissimulait pas, le médecin le faisait piquer vivement par derrière pendant qu'on lui parlait ; le malade ne s'apercevait de rien. Souvent Pierre Valin refusait de manger, en disant que ça n'en avait pas besoin ; que d'ailleurs ça n'avait pas de ventre, etc.
« Ce fait, du reste, n'est pas le seul de ce genre. Un autre soldat, également blessé à la tête, parlait toujours à la troisième personne et au féminin. Il s'écriait : « Ah ! comme elle souffre ! Elle a bien soif ! etc. » On le fit d'abord apercevoir de son erreur, et il en convint avec beaucoup de surprise, mais il y retombait continuellement, et dans les derniers temps de sa vie, il ne s'exprimait plus que de cette manière.
« Un zouave, toujours par suite d'une blessure à la tête, parfaitement guérie cependant, avait perdu la mémoire des substantifs. Sergent instructeur, quoiqu'il connût très bien les noms des soldats de son escouade, il les désignait par ces mots : Le grand brun, le petit châtain, etc. Pour commander, il se servait de périphrases lorsqu'il s'agissait de désigner le fusil ou le sabre, etc. On fut obligé de le renvoyer dans ses foyers.
« Les dernières années du célèbre médecin Baudelocque offrirent l'exemple d'une lésion analogue, mais moins marquée. Il se rappelait fort bien ce qu'il avait fait étant en santé ; il reconnaissait à la voix (car il avait été frappé de cécité) les personnes qui venaient le voir ; mais il n'avait aucune conscience de son existence. Lui demandait-on, par exemple : Comment va la tête ? il répondait : « Je n'ai pas de tête. » Si on lui demandait le bras pour lui tâter le pouls, il répondait qu'il ne savait pas où il était. Il voulut un jour se tâter lui-même le pouls ; on lui mit la main droite sur le poignet gauche ; il demanda ensuite si c'était bien sa main qu'il sentait, après quoi il jugea fort sainement de son pouls. »
La physiologie nous offre à chaque pas des phénomènes qui semblent des anomalies, et devant lesquels elle reste muette. Pourquoi cela ? Nous l'avons déjà dit, et nous ne saurions trop le répéter, c'est qu'elle veut tout rattacher à l'élément matériel, sans tenir aucun compte de l'élément spirituel. Tant qu'elle s'obstinera dans cette voie restrictive, elle sera impuissante à résoudre les mille problèmes qui surgissent à chaque instant sous son scalpel, comme pour lui dire : « Tu vois bien qu'il y a autre chose que la matière, puisque avec la matière seule tu ne peux tout expliquer. » Et ici nous ne parlons pas seulement de quelques phénomènes bizarres qui pourraient la prendre au dépourvu, mais des effets les plus vulgaires. S'est-elle seulement rendu compte des rêves ? Nous ne parlons pas même des rêves vrais, de ceux qui sont des perceptions réelles de choses absentes, présentes ou futures, mais simplement des rêves fantastiques ou de souvenirs ; dit-elle comment se produisent ces images si claires et si nettes qui nous apparaissent quelquefois ? Quel est ce miroir magique qui conserve ainsi l'empreinte des choses ? Dans le somnambulisme naturel, que personne ne conteste, dit-elle d'où vient cette étrange faculté de voir sans le secours des yeux ? de voir, non pas vaguement, mais les détails les plus minutieux, au point de pouvoir faire avec précision et régularité des travaux qui, dans l'état normal, exigeraient une vue perçante ? Il y a donc en nous quelque chose qui voit indépendamment des yeux. Dans cet état, non seulement le sujet agit, mais il pense, il calcule, il combine, il prévoit, il se livre à des travaux d'intelligence dont il est incapable dans l'état de veille, et dont il ne conserve aucun souvenir ; il y a donc quelque chose qui pense indépendamment de la matière. Quel est ce quelque chose ? là, elle s'arrête. Ces faits cependant ne sont pas rares ; mais un savant ira aux antipodes pour voir et calculer une éclipse, tandis qu'il n'ira pas chez son voisin pour observer un phénomène de l'âme. Les faits naturels et spontanés, qui prouvent l'action indépendante d'un principe intelligent, sont très nombreux, mais cette action ressort avec encore plus d'évidence dans les phénomènes magnétiques et spirites, où l'isolement de ce principe se produit pour ainsi dire à volonté.
Revenons à notre sujet. Nous avons rapporté un fait analogue dans la Revue de juin 1861, à propos de l'évocation du marquis de Saint-Paul. Dans ses derniers moments ; il disait toujours : Il a soif, il faut lui donner à boire ; il a froid, il faut le réchauffer ; il souffre à tel endroit, etc. Et quand on lui disait : Mais c'est vous qui avez soif, il répondait : Non, c'est lui. C'est que le moi pensant est dans l'Esprit et non dans le corps ; l'Esprit, déjà en partie dégagé, considérait son corps comme une autre individualité qui n'était pas lui, à proprement parler ; c'était donc à son corps, à cet autre individu qu'il fallait donner à boire, et non à lui Esprit. Aussi, lorsque dans l'évocation on lui fit cette demande : Pourquoi parliez-vous toujours à la troisième personne ? Il répondit : « Parce que j'étais voyant, je vous l'ai dit, et que je sentais nettement les différences qui existent entre le physique et le moral ; ces différences, reliées entre elles par le fluide de vie, deviennent très tranchées aux yeux des mourants clairvoyants. »
Une cause semblable a dû produire l'effet remarqué chez les militaires dont on a parlé. On dira peut-être que la blessure avait déterminé une sorte de folie ; mais le marquis de Saint-Paul n'avait reçu aucune blessure ; il avait toute sa raison, ce dont nous sommes certains, puisque nous le tenons de sa soeur, membre de la Société. Ce qui s'est produit spontanément chez lui a parfaitement pu être déterminé chez les autres par une cause accidentelle. Tous les magnétiseurs savent d'ailleurs qu'il est très ordinaire aux somnambules de parler à la troisième personne, faisant ainsi la distinction entre la personnalité de leur âme ou Esprit, et celle de leur corps.
Dans l'état normal les deux individualités se confondent, et leur parfaite assimilation est nécessaire à l'harmonie des actes de la vie ; mais le principe intelligent est comme ces gaz qui ne tiennent à certains corps solides que par une cohésion éphémère, et s'échappent au premier souffle ; il a toujours une tendance à se débarrasser de son fardeau corporel, dès que la force qui maintient l'équilibre cesse d'agir par une cause quelconque. L'activité harmonique des organes maintient seule l'union intime et complète de l'âme et du corps ; mais à la moindre suspension de cette activité, l'âme prend son essor ; c'est ce qui a lieu dans le sommeil, dans le demi-sommeil, dans le simple engourdissement des sens, dans la catalepsie, dans la léthargie, dans le somnambulisme naturel ou magnétique, dans l'extase, dans ce qu'on appelle le rêve éveillé ou seconde vue, dans les inspirations du génie, dans toutes les grandes tensions de l'esprit qui souvent rendent le corps insensible ; c'est enfin ce qui peut avoir lieu comme conséquence de certains états pathologiques. Une foule de phénomènes moraux n'ont pas d'autre cause que l'émancipation de l'âme ; la médecine admet bien l'influence des causes morales, mais elle n'admet pas l'élément moral comme principe actif ; c'est pourquoi elle confond ces phénomènes avec la folie organique, et c'est pourquoi aussi elle leur applique un traitement purement physique qui, bien souvent, détermine une folie réelle là où il n'y en avait que l'apparence.
Parmi les faits cités, il en est un qui semble assez bizarre ; c'est celui du militaire qui parlait à la troisième personne du féminin. L'élément primitif du phénomène est, comme nous l'avons dit, la distinction des deux personnalités par suite du dégagement de l'Esprit ; mais il en est un autre que nous révèle le Spiritisme, et dont il faut tenir compte, parce qu'il peut donner aux idées un caractère particulier : c'est le vague souvenir des existences antérieures qui, dans l'état d'émancipation de l'âme, peut se réveiller, et permettre de jeter un coup d'oeil rétrospectif sur quelques points du passé. Dans de telles conditions, le dégagement de l'âme n'est jamais complet, et les idées se ressentant de l'affaiblissement des organes, ne peuvent être très lucides, puisqu'elles ne le sont pas même entièrement dans les premiers instants qui suivent la mort. Supposons que l'homme dont nous parlons ait été femme dans sa précédente incarnation, l'idée qu'il en aurait conservée pouvait se confondre avec celle de son état présent.
Ne pourrait-on trouver dans ce fait la cause première de l'idée fixe de certains aliénés qui se croient rois ? S'ils l'ont été dans une autre existence, il peut leur en rester un souvenir qui leur fasse illusion. Ce n'est qu'une supposition, mais qui, pour les initiés au Spiritisme, n'est pas dépourvue de vraisemblance. Si cette cause est possible dans ce cas, dira-t-on, elle ne saurait s'appliquer à ceux qui se croient loups ou porcs, puisqu'on sait que l'homme n'a jamais été animal. C'est vrai, mais un homme peut avoir été dans une condition abjecte qui l'obligeait à vivre parmi les animaux immondes ou sauvages ; là peut être la source de cette illusion qui pourrait bien, chez certains, leur être imposée en punition des actes de leur vie actuelle. Lorsque des faits de la nature de ceux que nous avons rapportés se présentent, si, au lieu de les assimiler systématiquement aux maladies purement corporelles, on en suivait attentivement toutes les phases à l'aide des données fournies par les observations spirites, on reconnaîtrait sans peine la double cause que nous leur assignons, et l'on comprendrait que ce n'est pas avec des douches, des moxas et des saignées qu'on peut y remédier.
Le fait du docteur Baudelocque trouve encore son explication dans des causes analogues. Il n'avait, dit l'article, aucune conscience de son existence ; c'est une erreur, car il ne se croyait pas mort, seulement il n'avait pas conscience de son existence corporelle ; il se trouvait dans un état à peu près semblable à celui de certains Esprits qui, dans les premiers temps qui suivent la mort, ne croient pas être morts et prennent leur corps pour celui d'un autre, le trouble où ils se trouvent ne leur permettant pas de se rendre compte de leur situation ; ce qui se passe chez certains désincarnés peut avoir lieu chez certains incarnés ; c'est ainsi que le docteur Baudelocque pouvait faire abstraction de son corps, et dire qu'il n'avait plus de tête, parce qu'en effet son Esprit n'avait plus de tête charnelle. Les observations spirites fournissent de nombreux exemples de ce genre, aussi jettent-elles une lumière toute nouvelle sur une infinie variété de phénomènes jusqu'à ce jour inexpliqués, et inexplicables sans les bases fournies par le Spiritisme.
Il resterait à examiner le cas du zouave qui avait perdu la mémoire des substantifs ; mais il ne peut s'expliquer que par des considérations d'un tout autre ordre qui rentrent dans le domaine de la physiologie organique. Les développements qu'il comporte nous engagent à y consacrer un article spécial que nous publierons prochainement.
Manifestations américaines
On lit dans le Banner of Light, journal de New-York, du 18 mai 1861.
Pensant que les faits suivants sont dignes d'attention, nous les avons réunis pour être publiés par le Banner, et nous les faisons suivre de nos signatures pour en attester la sincérité.
Mercredi matin, 1° mai, nous avons prié M. Say, médium, de se joindre à nous chez M. Hallock, à New-York. Le médium s'est assis près d'une table sur laquelle étaient placés un cornet d'étain, un violon et trois bouts de corde. Les invités étaient assis en demi-cercle et faisaient face au médium, la table à six ou sept pouces d'eux ; leurs mains se touchaient pour donner à chacun l'assurance que personne ne quittait sa place pendant les expériences que nous allons raconter. La lumière fut ôtée, et les invités furent priés de chanter ; après quelques minutes la lumière ayant été rapportée, le médium fut trouvé assis dans sa chaise, les bras croisés devant lui, les poignets attachés ensemble avec la corde nouée et serrée au point d'arrêter la circulation et de faire enfler les chairs. Le bout de la corde était passé dans le fond de la chaise et attachait les jambes aux barreaux. Une autre corde était nouée autour des genoux, qu'elle serrait fortement, pendant que la troisième retenait de la même manière les chevilles des pieds. Dans cette condition, il était clair que le médium ne pouvait ni marcher, ni se lever, ni faire usage de ses mains.
Un membre du cercle plaça une feuille de papier sur le plancher sous les pieds du médium, et traça, avec un crayon, le contour des pieds. La lumière fut emportée, et presque immédiatement le cornet, saisi par une puissance invisible, se mit à frapper rapidement et violemment sur la table, de manière à laisser une foule de traces. Du cornet sortait une voix qui conversait avec les membres de la société ; l'articulation des mots était très distincte ; le son était celui d'une voix mâle, et le ton quelquefois plus haut que celui de la conversation ordinaire. Une autre voix, plus faible, tant soit peu gutturale et moins distincte, conversait aussi avec la société. On apporta une lumière, et le médium fut trouvé sur sa chaise, pieds et mains liés comme nous avons dit, et les pieds sur le papier dans les lignes de crayon. La lumière fut encore emportée, et le cornet recommença comme ci-dessus. La société fut priée de chanter, et les manifestations cessèrent. On renouvela plusieurs fois l'expérience, et chaque fois le médium fut trouvé dans le même état. Ceci fut la première série des manifestations.
On emporta encore la lumière, la société chanta quelques moments, puis, la lumière étant rapportée, on constata que le médium était toujours attaché sur sa chaise. Une cloche fut placée sur la table, et aussitôt l'obscurité faite, la cloche commença par frapper sur la table, sur le cornet et sur le plancher ; elle fut enlevée de la table et se mit à sonner très fort, et semblait parcourir un arc de cinq à six pieds à chaque coup de battant ; pendant ce temps-là le médium criait : Je suis là, je suis là, pour montrer qu'il était toujours à la même place.
On fit sur le violon une grande marque brillante avec du phosphore. On ôta la lumière, et aussitôt on vit, à la trace phosphorescente, le violon s'élever à six ou sept pieds, et voler rapidement en l'air. On pouvait aussi le suivre par l'ouïe, car les cordes étaient mises en vibration dans sa course. Pendant que le violon flottait, le médium criait : Je suis là, je suis là.
Un membre de la société plaça sur la table un vase à moitié rempli d'eau, et un morceau de papier entre les lèvres du médium. On emporte la lumière, la société chante quelques instants, et la lumière étant rapportée, le vase fut trouvé vide sans aucune trace d'eau, ni sur la table, ni sur le plancher ; le médium toujours à sa place, et le papier sec entre ses lèvres. Ceci termina la deuxième série d'expériences.
Madame Spence s'assit en face du médium. Un monsieur s'assit entre eux deux, mettant son pied droit sur celui de madame Spence, sa main droite sur la tête du médium, et sa main gauche sur la tête de madame Spence. Le médium prit le bras droit du monsieur avec ses deux mains, et madame Spence en fit de même du bras gauche. Quand la lumière fut enlevée, le monsieur sentit distinctement les doigts d'une main passer sur sa figure, lui tirer le nez ; il reçut un soufflet qui fut entendu des assistants, et le violon vint lui donner des coups sur la tête qui furent également entendus des autres personnes. Chacun répéta l'expérience et éprouva les mêmes effets. Ceci termine la troisième série, et nous certifions que tout cela n'a pu être produit ni par M. Fay, ni par aucune autre personne de la société.
Charles Patridge, R. T. Hallock, Mme Sarah P. Clark, Mme Mary, S. Hallock, Mme Amanda, M. Spence, Mlle Alla Britt, William Blondel, William P. Coles, W. B. Hallock, B. Franklin Clark, Peyton Spence.
Remarque. Nous ne contestons pas la possibilité de toutes ces choses, et nous n'avons aucun motif de douter de l'honorabilité des signataires, quoique nous ne les connaissions pas ; toutefois, nous maintenons les réflexions que nous avons faites dans notre dernier numéro, à propos des deux articles sur les dessins mystérieux et l'exploitation du Spiritisme.
On dit qu'en Amérique cette exploitation n'a rien qui choque l'opinion, et qu'on trouve tout naturel que les médiums se fassent payer ; cela se conçoit, d'après les habitudes d'un pays où time is money ; mais nous n'en répéterons pas moins ce que nous disons dans un autre article, que le désintéressement absolu est une garantie encore meilleure que toutes les précautions matérielles. Si nos écrits ont contribué à jeter en France et dans d'autres contrées du discrédit sur la médianimité intéressée, nous croyons que ce ne sera pas un des moindres services qu'ils auront rendus au Spiritisme sérieux. Ces réflexions générales ne sont nullement faites en vue de M. Fay, dont nous ne connaissons pas la position vis-à-vis du public.
A. K.
Pensant que les faits suivants sont dignes d'attention, nous les avons réunis pour être publiés par le Banner, et nous les faisons suivre de nos signatures pour en attester la sincérité.
Mercredi matin, 1° mai, nous avons prié M. Say, médium, de se joindre à nous chez M. Hallock, à New-York. Le médium s'est assis près d'une table sur laquelle étaient placés un cornet d'étain, un violon et trois bouts de corde. Les invités étaient assis en demi-cercle et faisaient face au médium, la table à six ou sept pouces d'eux ; leurs mains se touchaient pour donner à chacun l'assurance que personne ne quittait sa place pendant les expériences que nous allons raconter. La lumière fut ôtée, et les invités furent priés de chanter ; après quelques minutes la lumière ayant été rapportée, le médium fut trouvé assis dans sa chaise, les bras croisés devant lui, les poignets attachés ensemble avec la corde nouée et serrée au point d'arrêter la circulation et de faire enfler les chairs. Le bout de la corde était passé dans le fond de la chaise et attachait les jambes aux barreaux. Une autre corde était nouée autour des genoux, qu'elle serrait fortement, pendant que la troisième retenait de la même manière les chevilles des pieds. Dans cette condition, il était clair que le médium ne pouvait ni marcher, ni se lever, ni faire usage de ses mains.
Un membre du cercle plaça une feuille de papier sur le plancher sous les pieds du médium, et traça, avec un crayon, le contour des pieds. La lumière fut emportée, et presque immédiatement le cornet, saisi par une puissance invisible, se mit à frapper rapidement et violemment sur la table, de manière à laisser une foule de traces. Du cornet sortait une voix qui conversait avec les membres de la société ; l'articulation des mots était très distincte ; le son était celui d'une voix mâle, et le ton quelquefois plus haut que celui de la conversation ordinaire. Une autre voix, plus faible, tant soit peu gutturale et moins distincte, conversait aussi avec la société. On apporta une lumière, et le médium fut trouvé sur sa chaise, pieds et mains liés comme nous avons dit, et les pieds sur le papier dans les lignes de crayon. La lumière fut encore emportée, et le cornet recommença comme ci-dessus. La société fut priée de chanter, et les manifestations cessèrent. On renouvela plusieurs fois l'expérience, et chaque fois le médium fut trouvé dans le même état. Ceci fut la première série des manifestations.
On emporta encore la lumière, la société chanta quelques moments, puis, la lumière étant rapportée, on constata que le médium était toujours attaché sur sa chaise. Une cloche fut placée sur la table, et aussitôt l'obscurité faite, la cloche commença par frapper sur la table, sur le cornet et sur le plancher ; elle fut enlevée de la table et se mit à sonner très fort, et semblait parcourir un arc de cinq à six pieds à chaque coup de battant ; pendant ce temps-là le médium criait : Je suis là, je suis là, pour montrer qu'il était toujours à la même place.
On fit sur le violon une grande marque brillante avec du phosphore. On ôta la lumière, et aussitôt on vit, à la trace phosphorescente, le violon s'élever à six ou sept pieds, et voler rapidement en l'air. On pouvait aussi le suivre par l'ouïe, car les cordes étaient mises en vibration dans sa course. Pendant que le violon flottait, le médium criait : Je suis là, je suis là.
Un membre de la société plaça sur la table un vase à moitié rempli d'eau, et un morceau de papier entre les lèvres du médium. On emporte la lumière, la société chante quelques instants, et la lumière étant rapportée, le vase fut trouvé vide sans aucune trace d'eau, ni sur la table, ni sur le plancher ; le médium toujours à sa place, et le papier sec entre ses lèvres. Ceci termina la deuxième série d'expériences.
Madame Spence s'assit en face du médium. Un monsieur s'assit entre eux deux, mettant son pied droit sur celui de madame Spence, sa main droite sur la tête du médium, et sa main gauche sur la tête de madame Spence. Le médium prit le bras droit du monsieur avec ses deux mains, et madame Spence en fit de même du bras gauche. Quand la lumière fut enlevée, le monsieur sentit distinctement les doigts d'une main passer sur sa figure, lui tirer le nez ; il reçut un soufflet qui fut entendu des assistants, et le violon vint lui donner des coups sur la tête qui furent également entendus des autres personnes. Chacun répéta l'expérience et éprouva les mêmes effets. Ceci termine la troisième série, et nous certifions que tout cela n'a pu être produit ni par M. Fay, ni par aucune autre personne de la société.
Charles Patridge, R. T. Hallock, Mme Sarah P. Clark, Mme Mary, S. Hallock, Mme Amanda, M. Spence, Mlle Alla Britt, William Blondel, William P. Coles, W. B. Hallock, B. Franklin Clark, Peyton Spence.
Remarque. Nous ne contestons pas la possibilité de toutes ces choses, et nous n'avons aucun motif de douter de l'honorabilité des signataires, quoique nous ne les connaissions pas ; toutefois, nous maintenons les réflexions que nous avons faites dans notre dernier numéro, à propos des deux articles sur les dessins mystérieux et l'exploitation du Spiritisme.
On dit qu'en Amérique cette exploitation n'a rien qui choque l'opinion, et qu'on trouve tout naturel que les médiums se fassent payer ; cela se conçoit, d'après les habitudes d'un pays où time is money ; mais nous n'en répéterons pas moins ce que nous disons dans un autre article, que le désintéressement absolu est une garantie encore meilleure que toutes les précautions matérielles. Si nos écrits ont contribué à jeter en France et dans d'autres contrées du discrédit sur la médianimité intéressée, nous croyons que ce ne sera pas un des moindres services qu'ils auront rendus au Spiritisme sérieux. Ces réflexions générales ne sont nullement faites en vue de M. Fay, dont nous ne connaissons pas la position vis-à-vis du public.
A. K.
Entretiens familiers d'outre-tombe
Don Peyra, prieur d'Amilly
Cette évocation a été faite l'année dernière à la Société, sur la demande de M. Borreau, de Niort, qui nous avait adressé la notice suivante :
« Nous avions, il y a quelque trente ans, au prieuré d'Amilly, tout près de Mauzé, un prêtre qui se nommait don Peyra, et qui a laissé dans le pays une réputation de sorcier. Il est de fait qu'il s'occupait constamment de sciences occultes ; on raconte de lui des choses qui paraissent fabuleuses, mais qui, d'après la science Spirite, pourraient bien avoir leur raison d'être. Il y a environ une douzaine d'années, en faisant avec une somnambule des recherches fort intéressantes, je me suis trouvé en rapport avec son Esprit ; il s'est présenté comme un auxiliaire avec lequel nous ne pouvions manquer de réussir, et pourtant nous avons échoué. Depuis, dans des recherches de même nature, j'ai été porté à croire que cet Esprit a dû s'y intéresser. Je viens vous prier, si ce n'est abuser de votre obligeance, de l'évoquer, et de lui demander quels ont été, et quels sont ses rapports avec moi. Partant de là, j'aurai peut-être un jour d'intéressantes choses à vous communiquer. »
(Premier entretien, le 13 janvier 1860.)
1. Évocation. - R. Je suis là.
2. D'où vous venait la réputation de sorcier que vous aviez de votre vivant ? - R. Contes de bonnes femmes ; j'étudiais la chimie.
3. Quel est le motif qui vous a porté à vous mettre en rapport avec M. Borreau, de Niort ? - R. Le désir de me distraire un peu à propos du pouvoir qu'il me croyait.
4. Il dit que vous vous êtes présenté à lui comme un auxiliaire dans ses recherches ; pourriez-vous nous dire quelle était la nature de ces recherches ? - R. Je ne suis pas assez indiscret pour trahir un secret qu'il n'a pas jugé à propos de vous révéler. Votre demande me blesse.
5. Nous n'avons garde d'insister, mais nous vous ferons remarquer que vous auriez pu répondre plus convenablement à des personnes qui vous interrogent sérieusement et avec bienveillance ; votre langage n'est pas celui d'un Esprit avancé. - R. Je suis ce que j'ai toujours été.
6. De quelle nature sont les choses fabuleuses qu'on raconte de vous ? - R. Ce sont, je vous l'ai dit, des contes ; je connaissais l'opinion que l'on, avait de moi, et loin de chercher à l'étouffer je faisais ce qu'il fallait pour la favoriser.
7. D'après votre réponse précédente, il semblerait que vous n'avez pas progressé depuis votre mort ?- R. Je n'ai pas, à vrai dire, cherché à le faire, n'en connaissant pas les moyens ; cependant je crois qu'il doit y avoir quelque chose à faire ; j'y ai pensé depuis peu.
8. Votre langage nous étonne de la part d'un Esprit qui était prêtre de son vivant, et qui, par cela même, devait avoir des idées d'une certaine élévation. - R. J'étais, je crois bien, trop et trop peu instruit.
9. Veuillez développer votre pensée. - R. Trop instruit pour croire, pas assez pour savoir.
10. Vous n'étiez donc pas ce qu'on appelle un bon prêtre ? - R. Oh ! non.
11. Quelles sont vos occupations comme Esprit ? - R. Toujours la chimie ; je crois que j'aurais mieux fait de chercher Dieu que la matière.
12. Comment un Esprit peut-il s'occuper de chimie ? - R. Oh ! permettez-moi de vous dire que la question est puérile ; ai-je besoin de microscope ou d'alambic pour étudier les propriétés de la matière que vous savez si pénétrable à l'Esprit ?
13. Êtes-vous heureux comme Esprit ? - R. Ma foi, non ; je vous l'ai dit, je crois avoir fait fausse route, et je vais en changer, surtout si je suis assez heureux pour être un peu secondé ; surtout, si moi, qui ai dû tant prier pour les autres, ce que j'avoue n'avoir pas toujours fait pour l'argent reçu ; si, dis-je, on veut bien ne pas m'appliquer la peine du talion.
14. Nous vous remercions d'être venu et nous ferons pour vous ce que vous n'avez pas fait pour les autres. - R. Vous valez mieux que moi.
(Deuxième entretien, le 25 juin 1861.)
M. Borreau nous ayant adressé de nouvelles questions pour l'Esprit de don Peyra, celui-ci fut évoqué de nouveau par l'intermédiaire d'un autre médium, et donna les réponses suivantes dans lesquelles on peut puiser d'utiles leçons, soit comme étude des individualités du monde spirite, soit comme enseignement général.
15. Évocation. - R. Que me voulez-vous, et pourquoi me dérangez-vous ?
16. C'est M. Borreau, de Niort, qui nous a prié de vous adresser quelques questions. - R. Que me veut-il encore ? Il n'est donc pas content de me déranger à Niort ? Pourquoi faut-il qu'il me fasse évoquer à Paris, où rien ne m'appelle ? Je voudrais bien que la pensée lui vînt de me laisser en repos. Il m'appelle, il m'évoque, il me met en rapport avec ses somnambules ; il me fait évoquer par des tiers ; il est très ennuyeux ce monsieur.
17. Vous devez cependant vous rappeler que nous vous avons déjà évoqué et que vous avez répondu plus gracieusement qu'aujourd'hui ; et même nous vous avons promis de prier pour vous. - R. Je me le rappelle fort bien ; mais promettre et tenir sont deux ; vous avez prié, vous ; mais les autres ?
18. Certainement d'autres ont prié aussi. Enfin, voulez-vous répondre aux questions de M. Borreau ? - R. Je vous certifie que pour lui je n'ai nulle envie de le satisfaire, parce qu'il est toujours sur mon dos ; pardon de l'expression, mais elle est vraie, d'autant plus qu'il n'existe entre lui et moi aucune affinité ; mais pour vous qui avez pieusement appelé sur moi la miséricorde d'en haut, je veux bien vous répondre du mieux que je pourrai.
19. Vous disiez tout à l'heure qu'on vous avait dérangé ; pouvez-vous nous donner une explication à ce sujet pour notre instruction personnelle ? - R. J'appelle être dérangé, en ce sens que vous avez appelé mon attention et ma pensée près de vous en vous occupant de moi, et j'ai vu qu'il me faudrait répondre à ce que vous me demanderiez, ne fût-ce que par politesse. Je m'explique mal ; ma pensée était ailleurs, à mes études, mon occupation habituelle ; votre évocation a forcément appelé mon attention sur vous, sur les choses de la terre ; par conséquent, comme ce n'était point dans mes vues de m'occuper de vous et de la terre, vous m'avez dérangé.
Remarque. Les Esprits sont plus ou moins communicatifs, et viennent plus ou moins volontiers, selon leur caractère ; mais on peut être certain que, pas plus que les hommes sérieux, ils n'aiment ceux qui les importunent sans nécessité. Quant aux Esprits légers, c'est différent ; ils sont toujours disposés à se mêler de tout, même quand on ne les appelle pas.
20. Quand vous vous êtes mis en rapport avec M. Borreau, connaissiez-vous ses croyances sur la possibilité de faire triompher ses convictions par l'accomplissement d'un grand fait devant lequel l'incrédulité eût été forcée de s'incliner ? - R. M. Borreau voulait que je le servisse dans une opération mi-magnétique, mi-Spirite ; mais il n'est pas de taille pour mener à bien une pareille oeuvre, et je n'ai pas cru devoir lui accorder plus longtemps mon concours. Du reste, je l'aurais voulu, que je ne l'aurais pas pu ; l'heure n'était pas et n'est pas encore venue pour cela.
21. Pourriez-vous voir et lui dire quelles sont les causes qui, pendant ses recherches en Vendée, sont venues le faire échouer en le culbutant, lui, sa somnambule, et deux autres personnes présentes ? - R. Ma réponse précédente peut s'appliquer à cette question. M. Borreau a été renversé par les Esprits qui ont voulu lui donner une leçon, et lui apprendre à ne pas chercher ce qui doit être caché. C'est moi qui les ai bousculés avec son propre fluide, à lui, magnétiseur.
Remarque. Cette explication concorde parfaitement avec la théorie qui a été donnée des manifestations physiques ; ce n'est pas avec leurs mains que les Esprits les ont bousculés, mais avec le propre fluide animé des personnes, combiné avec celui de l'Esprit. La dissertation que nous donnons ci-après sur les apports contient à ce sujet des développements du plus haut intérêt. Une comparaison qui pourrait peut-être bien avoir quelque analogie semble justifier l'expression de l'Esprit.
Lorsqu'un corps chargé d'électricité positive s'approche d'une personne, celle-ci se charge d'électricité contraire ; la tension croît jusqu'à la distance explosive ; à ce point, les deux fluides se réunissent violemment par l'étincelle, et la personne reçoit une secousse qui, selon la masse de fluide, peut la renverser et même la foudroyer. Dans ce phénomène il faut toujours que la personne fournisse son contingent de fluide. Si l'on supposait que le corps électrisé positivement fût un être intelligent, agissant par sa volonté et rendant compte de l'opération, il dirait qu'il a combiné une partie du fluide de la personne avec le sien. Dans le fait de M. Borreau, les choses ne se sont peut-être pas passées exactement de même, mais on comprend qu'il peut y avoir un effet analogue, et que don Peyra a été logique en disant qu'il l'a bousculé avec son propre fluide ; on le comprendra mieux encore, si l'on veut bien se reporter à ce qui est dit dans le Livre des Esprits et dans le Livre des Médiums sur le fluide universel qui est le principe du fluide vital, du fluide électrique et du fluide magnétique animal.
22. Il dit avoir fait, pendant ses longues et dramatiques expériences, des découvertes beaucoup plus étonnantes pour lui que la solution qu'il cherchait ; les connaissez-vous ? - R. Oui, mais il y a quelque chose qu'il n'a pas découvert ; c'est que les Esprits n'ont pas mission d'aider les hommes dans des recherches pareilles à celles qu'il faisait. S'ils le pouvaient, Dieu ne pourrait rien avoir de caché, et les hommes négligeraient le travail et l'exercice de leurs facultés pour courir, celui-ci après un trésor, celui-là après une invention, en priant les Esprits de leur servir cela tout chaud, de telle façon qu'il n'y ait plus qu'à se baisser pour récolter gloire et fortune. Nous aurions vraiment fort à faire s'il nous fallait contenter l'ambition de tout le monde. Voyez-vous d'ici quel remue-ménage dans le monde des Esprits par la croyance universelle au Spiritisme ? Nous serions appelés tantôt à droite, tantôt à gauche, ici pour fouiller la terre et enrichir un paresseux ; là pour épargner à un imbécile la peine de résoudre un problème ; ailleurs, pour chauffer le fourneau d'un chimiste ; et partout, pour trouver la pierre philosophale. La plus belle découverte que M. Borreau aurait dû faire, c'est celle de savoir qu'il y a toujours des Esprits qui s'amusent à faire miroiter des mines d'or, même aux yeux du somnambule le plus clairvoyant, en les faisant paraître où elles ne sont pas, et se donner le plaisir de rire à vos dépens quand vous croyez mettre la main dessus, et cela pour vous apprendre que la sagesse et le travail sont les véritables trésors.
23. Est-ce que l'objet des recherches de M. Borreau était un trésor ? - R. Je crois vous avoir dit, quand vous m'avez appelé la première fois, que je ne sais pas indiscret ; s'il n'a pas jugé à propos de vous le dire, ce n'est pas à moi de le faire.
Remarque. On voit que cet Esprit est discret ; c'est du reste une qualité que l'on retrouve chez tous en général, et même chez les Esprits peu avancés ; d'où l'on peut conclure que si un Esprit faisait des révélations indiscrètes sur quelqu'un, il y aurait toute probabilité que ce serait pour s'amuser, et on aurait tort de le prendre au sérieux.
24. Pourriez-vous lui donner quelques explications sur la main invisible qui, pendant longtemps, a tracé les nombreux écrits qu'il trouvait sur les feuilles du cahier mis exprès pour les recevoir ? - R. Quant aux écrits, ce n'est pas le fait des Esprits ; il en connaîtra plus tard la source, mais je ne dois pas la dire à présent. Les Esprits ont pu les provoquer dans le but que j'ai dit plus haut, mais ils ne sont pour rien dans l'écriture.
Remarque. Quoique ces deux entretiens aient eu lieu à dix-huit mois d'intervalle et par des médiums différents, on y reconnaît un enchaînement, une suite et une similitude de langage qui ne permettent pas de douter que ce soit le même Esprit qui ait répondu. Quant à l'identité, elle ressort de la lettre suivante que nous a écrite M. Borreau après l'envoi de la seconde évocation.
« 18 juillet 1861.
« Monsieur,
« Je viens vous remercier de la peine que vous avez bien voulu prendre, et de l'empressement que vous avez mis à m'adresser la dernière évocation de don Peyra. Comme vous le dites, l'Esprit de l'ancien prieur n'était point en belle humeur, aussi exprime-t-il vertement l'impatience que lui a causée cette nouvelle démarche. Il résulte de là, monsieur, un grand enseignement, c'est que les Esprits qui se font un jeu malin de nous tourmenter peuvent être, à leur tour, payés par nous dans une monnaie à peu près semblable.
« Ah ! messieurs d'outre-tombe ! - je ne parle ici que des Esprits farceurs et légers, - vous vous flattiez sans doute d'avoir seuls le privilège de nous importuner ; et voilà qu'un pauvre Esprit terrestre, bien pacifique, en se mettant tout simplement en garde contre vos manœuvres et en cherchant à les déjouer, vous tourmente au point de le sentir péniblement peser sur votre dos fluidique ! Eh ! que dirai-je donc, moi, cher prieur, quand vous avouez avoir fait partie de la tourbe Spirite qui m'a si cruellement obsédé et joué de si beaux tours pendant mes excursions dans la Vendée ? S'il est vrai que vous y fussiez, vous deviez savoir que je ne les avais entreprises que dans le but de faire triompher la vérité par des faits irréfutables. C'était une grande ambition, sans doute, mais elle était honorable, ce me semble ; seulement, ainsi que vous le dites, je ne me suis pas trouvé de taille pour lutter, et vous et les vôtres nous avez secoués de telle sorte, que nous nous sommes vus forcés d'abandonner la partie, en emportant nos morts, car vos manœuvres fantastiques, qui amenèrent une horrible lutte, venaient de briser ma pauvre somnambule qui, dans un évanouissement qui ne dura pas moins de six heures, ne donnait plus aucun signe de vie, et nous la croyions morte. Notre position semblera sans doute plus facile à comprendre qu'à décrire, si l'on songe qu'il était minuit, et que nous étions là sur un des champs ensanglantés par les guerres de la Vendée, lieu d'un aspect sauvage et entouré de petites collines pelées dont les échos venaient de répéter les cris déchirants de la victime. Mon effroi était à son comble, en songeant à l'affreuse responsabilité qui retombait sur moi, et à laquelle je ne savais comment échapper… J'étais éperdu ! la prière seule pouvait me sauver ; elle me sauva. Si vous appelez cela des leçons, il faut convenir qu'elles sont rudes ! c'était probablement encore pour me donner une de ces leçons, qu'un an plus tard vous me faisiez appeler à Mauzé ; mais là j'étais plus instruit et je savais déjà à quoi m'en tenir sur l'existence des Esprits, et sur les faits et gestes de beaucoup d'entre eux ; et puis d'ailleurs la scène n'était plus disposée pour un drame comme à Châtillon ; aussi en fus-je quitte pour une échauffourée.
« Pardon, monsieur, si je me suis laissé entraîner avec le prieur ; je reviens à vous, mais pour vous en entretenir encore, si vous voulez bien le permettre. Je suis allé, il y a peu de jours, chez un homme fort honorable qui l'a beaucoup connu dans sa jeunesse, et je lui ai fait part de l'évocation que vous m'avez adressée ; il a parfaitement reconnu le langage, le style et l'esprit caustique de l'ancien prieur, et m'a raconté les faits suivants.
« Don Peyra, par suite de la Révolution, s'étant vu forcé d'abandonner le prieuré de Surgères, acheta, près de Mauzé, la petite propriété d'Amilly où il se fixa ; là il se fit connaître par de belles cures qu'il obtenait au moyen du magnétisme et de l'électricité qu'il employait avec succès ; mais, voyant que les affaires n'allaient pas aussi bien qu'il le désirait, il employa le charlatanisme, et, à l'aide de sa machine électrique, fit des tours qui ne tardèrent pas à le faire passer pour sorcier ; loin de combattre cette opinion, il la provoquait et l'encourageait. Il y avait à Amilly une longue allée de charmilles par laquelle arrivaient les clients qui souvent venaient de dix ou quinze lieues. Sa machine était mise en communication avec le maillet de la porte, et lorsque les pauvres paysans voulaient frapper, ils se trouvaient comme foudroyés. Il est facile de se figurer ce que de semblables faits devaient produire sur des personnes peu éclairées, surtout à cette époque.
« Nous avons un proverbe qui dit que « dans la peau mourra le renard. » Hélas ! je vois bien qu'il nous en faut changer plus d'une fois avant que nos mauvais instincts nous abandonnent. N'allez pourtant pas tirer de tout cela, monsieur, que j'en veuille au prieur ; non ; et la preuve, c'est que, à votre exemple, j'ai prié pour lui, ce que j'avoue bien, ainsi qu'il vous l'a dit, n'avoir pas fait jusque-là.
« Agréez.
« J.-B. Borreau. »
On remarquera que cette lettre est du 18 juillet 1861, tandis que la première évocation remonte au mois de janvier 1860 ; à cette époque nous ne connaissions pas toutes ces particularités de la vie de don Peyra, avec lesquelles ses réponses concordent parfaitement, puisqu'il dit qu'il faisait ce qu'il fallait pour accréditer sa réputation de sorcier.
Ce qui est arrivé à M. Borreau a une singulière analogie avec les mauvais tours que don Peyra, de son vivant, jouait à ses visiteurs ; et nous serions fort porté à croire que ce dernier a voulu en donner une répétition ; or, pour cela, il n'avait pas besoin de machine électrique, ayant à sa disposition la grande machine universelle ; on en comprendra la possibilité si l'on rapproche cette idée de la remarque que nous avons faite ci-dessus à la question 21. M. Borreau trouve une sorte de compensation aux malices de certains Esprits dans les ennuis qu'on peut leur susciter ; nous l'engageons pourtant à ne pas trop s'y fier, car ils ont plus de moyens de nous échapper que nous n'en avons de nous soustraire à leur influence. Du reste, il est évident que si, à cette époque, M. Borreau avait connu à fond le Spiritisme, il aurait su ce qu'on peut raisonnablement lui demander, et ne se serait pas aventuré dans des tentatives que la science lui aurait démontré ne pouvoir aboutir qu'à une mystification. Il n'est pas le premier qui ait acheté l'expérience à ses dépens ; c'est pourquoi nous ne cessons de répéter : Étudiez d'abord la théorie ; elle vous apprendra toutes les difficultés de la pratique, et vous éviterez ainsi des écoles dont on doit s'estimer heureux lorsqu'on en est quitte pour quelques désagréments. Son intention, dit-il, était bonne, puisqu'il voulait prouver par un grand fait la vérité du Spiritisme ; mais en pareil cas les Esprits donnent les preuves qu'ils veulent et quand ils veulent, et jamais quand on les leur demande. Nous connaissons des personnes qui, elles aussi, voulaient donner de ces preuves irrécusables par la découverte de fortunes colossales au moyen des Esprits, mais ce qui en est résulté de plus clair pour elles a été de dépenser leur argent. Nous ajouterons même que de pareilles preuves, si elles pouvaient réussir une fois par hasard, seraient beaucoup plus nuisibles qu'utiles, parce qu'elles fausseraient l'opinion sur le but du Spiritisme, en accréditant la croyance qu'il peut servir de moyen de divination, et c'est alors que se vérifierait la réponse de don Peyra à la question 22.
Cette évocation a été faite l'année dernière à la Société, sur la demande de M. Borreau, de Niort, qui nous avait adressé la notice suivante :
« Nous avions, il y a quelque trente ans, au prieuré d'Amilly, tout près de Mauzé, un prêtre qui se nommait don Peyra, et qui a laissé dans le pays une réputation de sorcier. Il est de fait qu'il s'occupait constamment de sciences occultes ; on raconte de lui des choses qui paraissent fabuleuses, mais qui, d'après la science Spirite, pourraient bien avoir leur raison d'être. Il y a environ une douzaine d'années, en faisant avec une somnambule des recherches fort intéressantes, je me suis trouvé en rapport avec son Esprit ; il s'est présenté comme un auxiliaire avec lequel nous ne pouvions manquer de réussir, et pourtant nous avons échoué. Depuis, dans des recherches de même nature, j'ai été porté à croire que cet Esprit a dû s'y intéresser. Je viens vous prier, si ce n'est abuser de votre obligeance, de l'évoquer, et de lui demander quels ont été, et quels sont ses rapports avec moi. Partant de là, j'aurai peut-être un jour d'intéressantes choses à vous communiquer. »
(Premier entretien, le 13 janvier 1860.)
1. Évocation. - R. Je suis là.
2. D'où vous venait la réputation de sorcier que vous aviez de votre vivant ? - R. Contes de bonnes femmes ; j'étudiais la chimie.
3. Quel est le motif qui vous a porté à vous mettre en rapport avec M. Borreau, de Niort ? - R. Le désir de me distraire un peu à propos du pouvoir qu'il me croyait.
4. Il dit que vous vous êtes présenté à lui comme un auxiliaire dans ses recherches ; pourriez-vous nous dire quelle était la nature de ces recherches ? - R. Je ne suis pas assez indiscret pour trahir un secret qu'il n'a pas jugé à propos de vous révéler. Votre demande me blesse.
5. Nous n'avons garde d'insister, mais nous vous ferons remarquer que vous auriez pu répondre plus convenablement à des personnes qui vous interrogent sérieusement et avec bienveillance ; votre langage n'est pas celui d'un Esprit avancé. - R. Je suis ce que j'ai toujours été.
6. De quelle nature sont les choses fabuleuses qu'on raconte de vous ? - R. Ce sont, je vous l'ai dit, des contes ; je connaissais l'opinion que l'on, avait de moi, et loin de chercher à l'étouffer je faisais ce qu'il fallait pour la favoriser.
7. D'après votre réponse précédente, il semblerait que vous n'avez pas progressé depuis votre mort ?- R. Je n'ai pas, à vrai dire, cherché à le faire, n'en connaissant pas les moyens ; cependant je crois qu'il doit y avoir quelque chose à faire ; j'y ai pensé depuis peu.
8. Votre langage nous étonne de la part d'un Esprit qui était prêtre de son vivant, et qui, par cela même, devait avoir des idées d'une certaine élévation. - R. J'étais, je crois bien, trop et trop peu instruit.
9. Veuillez développer votre pensée. - R. Trop instruit pour croire, pas assez pour savoir.
10. Vous n'étiez donc pas ce qu'on appelle un bon prêtre ? - R. Oh ! non.
11. Quelles sont vos occupations comme Esprit ? - R. Toujours la chimie ; je crois que j'aurais mieux fait de chercher Dieu que la matière.
12. Comment un Esprit peut-il s'occuper de chimie ? - R. Oh ! permettez-moi de vous dire que la question est puérile ; ai-je besoin de microscope ou d'alambic pour étudier les propriétés de la matière que vous savez si pénétrable à l'Esprit ?
13. Êtes-vous heureux comme Esprit ? - R. Ma foi, non ; je vous l'ai dit, je crois avoir fait fausse route, et je vais en changer, surtout si je suis assez heureux pour être un peu secondé ; surtout, si moi, qui ai dû tant prier pour les autres, ce que j'avoue n'avoir pas toujours fait pour l'argent reçu ; si, dis-je, on veut bien ne pas m'appliquer la peine du talion.
14. Nous vous remercions d'être venu et nous ferons pour vous ce que vous n'avez pas fait pour les autres. - R. Vous valez mieux que moi.
(Deuxième entretien, le 25 juin 1861.)
M. Borreau nous ayant adressé de nouvelles questions pour l'Esprit de don Peyra, celui-ci fut évoqué de nouveau par l'intermédiaire d'un autre médium, et donna les réponses suivantes dans lesquelles on peut puiser d'utiles leçons, soit comme étude des individualités du monde spirite, soit comme enseignement général.
15. Évocation. - R. Que me voulez-vous, et pourquoi me dérangez-vous ?
16. C'est M. Borreau, de Niort, qui nous a prié de vous adresser quelques questions. - R. Que me veut-il encore ? Il n'est donc pas content de me déranger à Niort ? Pourquoi faut-il qu'il me fasse évoquer à Paris, où rien ne m'appelle ? Je voudrais bien que la pensée lui vînt de me laisser en repos. Il m'appelle, il m'évoque, il me met en rapport avec ses somnambules ; il me fait évoquer par des tiers ; il est très ennuyeux ce monsieur.
17. Vous devez cependant vous rappeler que nous vous avons déjà évoqué et que vous avez répondu plus gracieusement qu'aujourd'hui ; et même nous vous avons promis de prier pour vous. - R. Je me le rappelle fort bien ; mais promettre et tenir sont deux ; vous avez prié, vous ; mais les autres ?
18. Certainement d'autres ont prié aussi. Enfin, voulez-vous répondre aux questions de M. Borreau ? - R. Je vous certifie que pour lui je n'ai nulle envie de le satisfaire, parce qu'il est toujours sur mon dos ; pardon de l'expression, mais elle est vraie, d'autant plus qu'il n'existe entre lui et moi aucune affinité ; mais pour vous qui avez pieusement appelé sur moi la miséricorde d'en haut, je veux bien vous répondre du mieux que je pourrai.
19. Vous disiez tout à l'heure qu'on vous avait dérangé ; pouvez-vous nous donner une explication à ce sujet pour notre instruction personnelle ? - R. J'appelle être dérangé, en ce sens que vous avez appelé mon attention et ma pensée près de vous en vous occupant de moi, et j'ai vu qu'il me faudrait répondre à ce que vous me demanderiez, ne fût-ce que par politesse. Je m'explique mal ; ma pensée était ailleurs, à mes études, mon occupation habituelle ; votre évocation a forcément appelé mon attention sur vous, sur les choses de la terre ; par conséquent, comme ce n'était point dans mes vues de m'occuper de vous et de la terre, vous m'avez dérangé.
Remarque. Les Esprits sont plus ou moins communicatifs, et viennent plus ou moins volontiers, selon leur caractère ; mais on peut être certain que, pas plus que les hommes sérieux, ils n'aiment ceux qui les importunent sans nécessité. Quant aux Esprits légers, c'est différent ; ils sont toujours disposés à se mêler de tout, même quand on ne les appelle pas.
20. Quand vous vous êtes mis en rapport avec M. Borreau, connaissiez-vous ses croyances sur la possibilité de faire triompher ses convictions par l'accomplissement d'un grand fait devant lequel l'incrédulité eût été forcée de s'incliner ? - R. M. Borreau voulait que je le servisse dans une opération mi-magnétique, mi-Spirite ; mais il n'est pas de taille pour mener à bien une pareille oeuvre, et je n'ai pas cru devoir lui accorder plus longtemps mon concours. Du reste, je l'aurais voulu, que je ne l'aurais pas pu ; l'heure n'était pas et n'est pas encore venue pour cela.
21. Pourriez-vous voir et lui dire quelles sont les causes qui, pendant ses recherches en Vendée, sont venues le faire échouer en le culbutant, lui, sa somnambule, et deux autres personnes présentes ? - R. Ma réponse précédente peut s'appliquer à cette question. M. Borreau a été renversé par les Esprits qui ont voulu lui donner une leçon, et lui apprendre à ne pas chercher ce qui doit être caché. C'est moi qui les ai bousculés avec son propre fluide, à lui, magnétiseur.
Remarque. Cette explication concorde parfaitement avec la théorie qui a été donnée des manifestations physiques ; ce n'est pas avec leurs mains que les Esprits les ont bousculés, mais avec le propre fluide animé des personnes, combiné avec celui de l'Esprit. La dissertation que nous donnons ci-après sur les apports contient à ce sujet des développements du plus haut intérêt. Une comparaison qui pourrait peut-être bien avoir quelque analogie semble justifier l'expression de l'Esprit.
Lorsqu'un corps chargé d'électricité positive s'approche d'une personne, celle-ci se charge d'électricité contraire ; la tension croît jusqu'à la distance explosive ; à ce point, les deux fluides se réunissent violemment par l'étincelle, et la personne reçoit une secousse qui, selon la masse de fluide, peut la renverser et même la foudroyer. Dans ce phénomène il faut toujours que la personne fournisse son contingent de fluide. Si l'on supposait que le corps électrisé positivement fût un être intelligent, agissant par sa volonté et rendant compte de l'opération, il dirait qu'il a combiné une partie du fluide de la personne avec le sien. Dans le fait de M. Borreau, les choses ne se sont peut-être pas passées exactement de même, mais on comprend qu'il peut y avoir un effet analogue, et que don Peyra a été logique en disant qu'il l'a bousculé avec son propre fluide ; on le comprendra mieux encore, si l'on veut bien se reporter à ce qui est dit dans le Livre des Esprits et dans le Livre des Médiums sur le fluide universel qui est le principe du fluide vital, du fluide électrique et du fluide magnétique animal.
22. Il dit avoir fait, pendant ses longues et dramatiques expériences, des découvertes beaucoup plus étonnantes pour lui que la solution qu'il cherchait ; les connaissez-vous ? - R. Oui, mais il y a quelque chose qu'il n'a pas découvert ; c'est que les Esprits n'ont pas mission d'aider les hommes dans des recherches pareilles à celles qu'il faisait. S'ils le pouvaient, Dieu ne pourrait rien avoir de caché, et les hommes négligeraient le travail et l'exercice de leurs facultés pour courir, celui-ci après un trésor, celui-là après une invention, en priant les Esprits de leur servir cela tout chaud, de telle façon qu'il n'y ait plus qu'à se baisser pour récolter gloire et fortune. Nous aurions vraiment fort à faire s'il nous fallait contenter l'ambition de tout le monde. Voyez-vous d'ici quel remue-ménage dans le monde des Esprits par la croyance universelle au Spiritisme ? Nous serions appelés tantôt à droite, tantôt à gauche, ici pour fouiller la terre et enrichir un paresseux ; là pour épargner à un imbécile la peine de résoudre un problème ; ailleurs, pour chauffer le fourneau d'un chimiste ; et partout, pour trouver la pierre philosophale. La plus belle découverte que M. Borreau aurait dû faire, c'est celle de savoir qu'il y a toujours des Esprits qui s'amusent à faire miroiter des mines d'or, même aux yeux du somnambule le plus clairvoyant, en les faisant paraître où elles ne sont pas, et se donner le plaisir de rire à vos dépens quand vous croyez mettre la main dessus, et cela pour vous apprendre que la sagesse et le travail sont les véritables trésors.
23. Est-ce que l'objet des recherches de M. Borreau était un trésor ? - R. Je crois vous avoir dit, quand vous m'avez appelé la première fois, que je ne sais pas indiscret ; s'il n'a pas jugé à propos de vous le dire, ce n'est pas à moi de le faire.
Remarque. On voit que cet Esprit est discret ; c'est du reste une qualité que l'on retrouve chez tous en général, et même chez les Esprits peu avancés ; d'où l'on peut conclure que si un Esprit faisait des révélations indiscrètes sur quelqu'un, il y aurait toute probabilité que ce serait pour s'amuser, et on aurait tort de le prendre au sérieux.
24. Pourriez-vous lui donner quelques explications sur la main invisible qui, pendant longtemps, a tracé les nombreux écrits qu'il trouvait sur les feuilles du cahier mis exprès pour les recevoir ? - R. Quant aux écrits, ce n'est pas le fait des Esprits ; il en connaîtra plus tard la source, mais je ne dois pas la dire à présent. Les Esprits ont pu les provoquer dans le but que j'ai dit plus haut, mais ils ne sont pour rien dans l'écriture.
Remarque. Quoique ces deux entretiens aient eu lieu à dix-huit mois d'intervalle et par des médiums différents, on y reconnaît un enchaînement, une suite et une similitude de langage qui ne permettent pas de douter que ce soit le même Esprit qui ait répondu. Quant à l'identité, elle ressort de la lettre suivante que nous a écrite M. Borreau après l'envoi de la seconde évocation.
« 18 juillet 1861.
« Monsieur,
« Je viens vous remercier de la peine que vous avez bien voulu prendre, et de l'empressement que vous avez mis à m'adresser la dernière évocation de don Peyra. Comme vous le dites, l'Esprit de l'ancien prieur n'était point en belle humeur, aussi exprime-t-il vertement l'impatience que lui a causée cette nouvelle démarche. Il résulte de là, monsieur, un grand enseignement, c'est que les Esprits qui se font un jeu malin de nous tourmenter peuvent être, à leur tour, payés par nous dans une monnaie à peu près semblable.
« Ah ! messieurs d'outre-tombe ! - je ne parle ici que des Esprits farceurs et légers, - vous vous flattiez sans doute d'avoir seuls le privilège de nous importuner ; et voilà qu'un pauvre Esprit terrestre, bien pacifique, en se mettant tout simplement en garde contre vos manœuvres et en cherchant à les déjouer, vous tourmente au point de le sentir péniblement peser sur votre dos fluidique ! Eh ! que dirai-je donc, moi, cher prieur, quand vous avouez avoir fait partie de la tourbe Spirite qui m'a si cruellement obsédé et joué de si beaux tours pendant mes excursions dans la Vendée ? S'il est vrai que vous y fussiez, vous deviez savoir que je ne les avais entreprises que dans le but de faire triompher la vérité par des faits irréfutables. C'était une grande ambition, sans doute, mais elle était honorable, ce me semble ; seulement, ainsi que vous le dites, je ne me suis pas trouvé de taille pour lutter, et vous et les vôtres nous avez secoués de telle sorte, que nous nous sommes vus forcés d'abandonner la partie, en emportant nos morts, car vos manœuvres fantastiques, qui amenèrent une horrible lutte, venaient de briser ma pauvre somnambule qui, dans un évanouissement qui ne dura pas moins de six heures, ne donnait plus aucun signe de vie, et nous la croyions morte. Notre position semblera sans doute plus facile à comprendre qu'à décrire, si l'on songe qu'il était minuit, et que nous étions là sur un des champs ensanglantés par les guerres de la Vendée, lieu d'un aspect sauvage et entouré de petites collines pelées dont les échos venaient de répéter les cris déchirants de la victime. Mon effroi était à son comble, en songeant à l'affreuse responsabilité qui retombait sur moi, et à laquelle je ne savais comment échapper… J'étais éperdu ! la prière seule pouvait me sauver ; elle me sauva. Si vous appelez cela des leçons, il faut convenir qu'elles sont rudes ! c'était probablement encore pour me donner une de ces leçons, qu'un an plus tard vous me faisiez appeler à Mauzé ; mais là j'étais plus instruit et je savais déjà à quoi m'en tenir sur l'existence des Esprits, et sur les faits et gestes de beaucoup d'entre eux ; et puis d'ailleurs la scène n'était plus disposée pour un drame comme à Châtillon ; aussi en fus-je quitte pour une échauffourée.
« Pardon, monsieur, si je me suis laissé entraîner avec le prieur ; je reviens à vous, mais pour vous en entretenir encore, si vous voulez bien le permettre. Je suis allé, il y a peu de jours, chez un homme fort honorable qui l'a beaucoup connu dans sa jeunesse, et je lui ai fait part de l'évocation que vous m'avez adressée ; il a parfaitement reconnu le langage, le style et l'esprit caustique de l'ancien prieur, et m'a raconté les faits suivants.
« Don Peyra, par suite de la Révolution, s'étant vu forcé d'abandonner le prieuré de Surgères, acheta, près de Mauzé, la petite propriété d'Amilly où il se fixa ; là il se fit connaître par de belles cures qu'il obtenait au moyen du magnétisme et de l'électricité qu'il employait avec succès ; mais, voyant que les affaires n'allaient pas aussi bien qu'il le désirait, il employa le charlatanisme, et, à l'aide de sa machine électrique, fit des tours qui ne tardèrent pas à le faire passer pour sorcier ; loin de combattre cette opinion, il la provoquait et l'encourageait. Il y avait à Amilly une longue allée de charmilles par laquelle arrivaient les clients qui souvent venaient de dix ou quinze lieues. Sa machine était mise en communication avec le maillet de la porte, et lorsque les pauvres paysans voulaient frapper, ils se trouvaient comme foudroyés. Il est facile de se figurer ce que de semblables faits devaient produire sur des personnes peu éclairées, surtout à cette époque.
« Nous avons un proverbe qui dit que « dans la peau mourra le renard. » Hélas ! je vois bien qu'il nous en faut changer plus d'une fois avant que nos mauvais instincts nous abandonnent. N'allez pourtant pas tirer de tout cela, monsieur, que j'en veuille au prieur ; non ; et la preuve, c'est que, à votre exemple, j'ai prié pour lui, ce que j'avoue bien, ainsi qu'il vous l'a dit, n'avoir pas fait jusque-là.
« Agréez.
« J.-B. Borreau. »
On remarquera que cette lettre est du 18 juillet 1861, tandis que la première évocation remonte au mois de janvier 1860 ; à cette époque nous ne connaissions pas toutes ces particularités de la vie de don Peyra, avec lesquelles ses réponses concordent parfaitement, puisqu'il dit qu'il faisait ce qu'il fallait pour accréditer sa réputation de sorcier.
Ce qui est arrivé à M. Borreau a une singulière analogie avec les mauvais tours que don Peyra, de son vivant, jouait à ses visiteurs ; et nous serions fort porté à croire que ce dernier a voulu en donner une répétition ; or, pour cela, il n'avait pas besoin de machine électrique, ayant à sa disposition la grande machine universelle ; on en comprendra la possibilité si l'on rapproche cette idée de la remarque que nous avons faite ci-dessus à la question 21. M. Borreau trouve une sorte de compensation aux malices de certains Esprits dans les ennuis qu'on peut leur susciter ; nous l'engageons pourtant à ne pas trop s'y fier, car ils ont plus de moyens de nous échapper que nous n'en avons de nous soustraire à leur influence. Du reste, il est évident que si, à cette époque, M. Borreau avait connu à fond le Spiritisme, il aurait su ce qu'on peut raisonnablement lui demander, et ne se serait pas aventuré dans des tentatives que la science lui aurait démontré ne pouvoir aboutir qu'à une mystification. Il n'est pas le premier qui ait acheté l'expérience à ses dépens ; c'est pourquoi nous ne cessons de répéter : Étudiez d'abord la théorie ; elle vous apprendra toutes les difficultés de la pratique, et vous éviterez ainsi des écoles dont on doit s'estimer heureux lorsqu'on en est quitte pour quelques désagréments. Son intention, dit-il, était bonne, puisqu'il voulait prouver par un grand fait la vérité du Spiritisme ; mais en pareil cas les Esprits donnent les preuves qu'ils veulent et quand ils veulent, et jamais quand on les leur demande. Nous connaissons des personnes qui, elles aussi, voulaient donner de ces preuves irrécusables par la découverte de fortunes colossales au moyen des Esprits, mais ce qui en est résulté de plus clair pour elles a été de dépenser leur argent. Nous ajouterons même que de pareilles preuves, si elles pouvaient réussir une fois par hasard, seraient beaucoup plus nuisibles qu'utiles, parce qu'elles fausseraient l'opinion sur le but du Spiritisme, en accréditant la croyance qu'il peut servir de moyen de divination, et c'est alors que se vérifierait la réponse de don Peyra à la question 22.
Correspondance - Lettre de M. Mathieu sur les médiums trompeurs.
Paris, 21 juillet 1861.
Monsieur,
On peut être en désaccord sur certains points, et être en parfait accord sur d'autres. Je viens de lire, à la page 213 du dernier numéro de votre journal, des réflexions sur la fraude en matière d'expériences spiritualistes (ou Spirites) auxquelles je suis heureux de m'associer de toutes mes forces. Là, toute dissidence en matière de théories et de doctrines disparaît comme par enchantement.
Je ne suis peut-être pas aussi sévère que vous à l'égard des médiums qui, sous une forme digne et convenable, acceptent une rémunération comme indemnité du temps qu'ils consacrent à des expériences souvent longues et fatigantes ; mais je le suis tout autant, - et on ne saurait trop l'être, - à l'égard de ceux qui, en pareil cas, suppléent, dans l'occasion, par la tricherie et par la fraude à l'absence ou à l'insuffisance des résultats promis et attendus.
Mêler le faux au vrai, quand il s'agit des phénomènes obtenus par l'intervention des Esprits, c'est tout bonnement une infamie, et il y aurait oblitération de sens moral chez le médium qui croirait pouvoir le faire sans scrupule. Ainsi que vous le faites parfaitement observer, c'est jeter le discrédit sur la chose dans l'esprit des indécis, dès que la fraude est reconnue. J'ajouterai que c'est compromettre de la manière la plus déplorable les hommes honorables qui prêtent aux médiums l'appui désintéressé de leurs connaissances et de leurs lumières, qui se portent garants de leur bonne foi, et les patronnent en quelque sorte ; c'est commettre envers eux une véritable forfaiture.
Tout médium qui serait convaincu de manœuvres frauduleuses ; qui serait pris, pour me servir d'une expression un peu triviale, la main dans le sac, mériterait d'être mis au ban de tous les spiritualistes, ou Spirites du monde, pour qui ce serait un devoir rigoureux de les démasquer ou de les flétrir.
S'il vous convient, monsieur, d'insérer ces quelques lignes dans votre journal, elles sont à votre service.
Agréez, etc.
Mathieu.
Nous n'attendions pas moins des sentiments honorables qui distinguent M. Mathieu, que cette énergique réprobation prononcée contre les médiums de mauvaise foi ; nous aurions été surpris, au contraire, qu'il eût pris froidement et avec indifférence de tels abus de confiance. Ils pouvaient être plus faciles, lorsque le Spiritisme était moins connu ; mais, à mesure que cette science est plus répandue et mieux comprise, que l'on connaît mieux les véritables conditions dans lesquelles les phénomènes peuvent se produire, il se trouve partout des yeux clairvoyants capables de découvrir la fraude ; la signaler partout où elle se montre est le meilleur moyen de la décourager.
On a dit qu'il serait préférable de ne pas dévoiler ces turpitudes dans l'intérêt du Spiritisme ; que la possibilité de tromper pourrait augmenter la défiance des indécis. Nous ne sommes pas de cet avis, et nous pensons qu'il vaut encore mieux que les indécis soient défiants que trompés, car une fois qu'ils sauraient l'avoir été, ils pourraient s'éloigner sans retour ; il y aurait d'ailleurs encore un plus grand inconvénient à ce qu'ils crussent que les Spirites se laissent facilement prendre pour dupes ; ils seront au contraire d'autant plus disposés à croire, qu'ils verront les croyants s'entourer de plus de précautions, et répudier les médiums susceptibles de tromper.
M. Mathieu dit qu'il n'est peut-être pas aussi sévère que nous à l'endroit des médiums qui, sous une forme digne et convenable, acceptent une rémunération comme indemnité du temps qu'ils consacrent à la chose. Nous sommes parfaitement d'avis qu'il peut et doit y avoir d'honorables exceptions, mais comme l'appât du gain est un grand tentateur, et que les personnes novices n'ont pas l'expérience nécessaire pour distinguer le vrai du faux, nous maintenons notre opinion que la meilleure garantie de sincérité est dans le désintéressement absolu, parce que là où il n'y a rien à gagner, le charlatanisme n'a rien à faire ; celui qui paie veut en avoir pour son argent, et ne serait pas content si on lui disait que l'Esprit ne veut pas agir ; de là à la découverte des moyens de faire agir l'Esprit quand même, il n'y a qu'un pas, selon le proverbe : la nécessité est la mère de l'industrie. Nous ajoutons que les médiums gagneront au centuple en considération ce qu'ils manqueront de gagner en profits matériels. La considération, dit-on, ne fait pas vivre ; il est vrai qu'elle ne suffit pas, mais il est, pour vivre, d'autres industries plus honorables, que l'exploitation des âmes des morts.
Monsieur,
On peut être en désaccord sur certains points, et être en parfait accord sur d'autres. Je viens de lire, à la page 213 du dernier numéro de votre journal, des réflexions sur la fraude en matière d'expériences spiritualistes (ou Spirites) auxquelles je suis heureux de m'associer de toutes mes forces. Là, toute dissidence en matière de théories et de doctrines disparaît comme par enchantement.
Je ne suis peut-être pas aussi sévère que vous à l'égard des médiums qui, sous une forme digne et convenable, acceptent une rémunération comme indemnité du temps qu'ils consacrent à des expériences souvent longues et fatigantes ; mais je le suis tout autant, - et on ne saurait trop l'être, - à l'égard de ceux qui, en pareil cas, suppléent, dans l'occasion, par la tricherie et par la fraude à l'absence ou à l'insuffisance des résultats promis et attendus.
Mêler le faux au vrai, quand il s'agit des phénomènes obtenus par l'intervention des Esprits, c'est tout bonnement une infamie, et il y aurait oblitération de sens moral chez le médium qui croirait pouvoir le faire sans scrupule. Ainsi que vous le faites parfaitement observer, c'est jeter le discrédit sur la chose dans l'esprit des indécis, dès que la fraude est reconnue. J'ajouterai que c'est compromettre de la manière la plus déplorable les hommes honorables qui prêtent aux médiums l'appui désintéressé de leurs connaissances et de leurs lumières, qui se portent garants de leur bonne foi, et les patronnent en quelque sorte ; c'est commettre envers eux une véritable forfaiture.
Tout médium qui serait convaincu de manœuvres frauduleuses ; qui serait pris, pour me servir d'une expression un peu triviale, la main dans le sac, mériterait d'être mis au ban de tous les spiritualistes, ou Spirites du monde, pour qui ce serait un devoir rigoureux de les démasquer ou de les flétrir.
S'il vous convient, monsieur, d'insérer ces quelques lignes dans votre journal, elles sont à votre service.
Agréez, etc.
Mathieu.
Nous n'attendions pas moins des sentiments honorables qui distinguent M. Mathieu, que cette énergique réprobation prononcée contre les médiums de mauvaise foi ; nous aurions été surpris, au contraire, qu'il eût pris froidement et avec indifférence de tels abus de confiance. Ils pouvaient être plus faciles, lorsque le Spiritisme était moins connu ; mais, à mesure que cette science est plus répandue et mieux comprise, que l'on connaît mieux les véritables conditions dans lesquelles les phénomènes peuvent se produire, il se trouve partout des yeux clairvoyants capables de découvrir la fraude ; la signaler partout où elle se montre est le meilleur moyen de la décourager.
On a dit qu'il serait préférable de ne pas dévoiler ces turpitudes dans l'intérêt du Spiritisme ; que la possibilité de tromper pourrait augmenter la défiance des indécis. Nous ne sommes pas de cet avis, et nous pensons qu'il vaut encore mieux que les indécis soient défiants que trompés, car une fois qu'ils sauraient l'avoir été, ils pourraient s'éloigner sans retour ; il y aurait d'ailleurs encore un plus grand inconvénient à ce qu'ils crussent que les Spirites se laissent facilement prendre pour dupes ; ils seront au contraire d'autant plus disposés à croire, qu'ils verront les croyants s'entourer de plus de précautions, et répudier les médiums susceptibles de tromper.
M. Mathieu dit qu'il n'est peut-être pas aussi sévère que nous à l'endroit des médiums qui, sous une forme digne et convenable, acceptent une rémunération comme indemnité du temps qu'ils consacrent à la chose. Nous sommes parfaitement d'avis qu'il peut et doit y avoir d'honorables exceptions, mais comme l'appât du gain est un grand tentateur, et que les personnes novices n'ont pas l'expérience nécessaire pour distinguer le vrai du faux, nous maintenons notre opinion que la meilleure garantie de sincérité est dans le désintéressement absolu, parce que là où il n'y a rien à gagner, le charlatanisme n'a rien à faire ; celui qui paie veut en avoir pour son argent, et ne serait pas content si on lui disait que l'Esprit ne veut pas agir ; de là à la découverte des moyens de faire agir l'Esprit quand même, il n'y a qu'un pas, selon le proverbe : la nécessité est la mère de l'industrie. Nous ajoutons que les médiums gagneront au centuple en considération ce qu'ils manqueront de gagner en profits matériels. La considération, dit-on, ne fait pas vivre ; il est vrai qu'elle ne suffit pas, mais il est, pour vivre, d'autres industries plus honorables, que l'exploitation des âmes des morts.
Dissertations et enseignements spirites
De l'influence morale des médiums dans les communications (Société Spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)Nous l'avons déjà dit : les médiums, en tant que médiums, n'ont qu'une
influence secondaire dans les communications des Esprits ; leur tâche
est celle d'une machine électrique, qui transmet les dépêches
télégraphiques d'un point éloigné à un autre point éloigné de la terre.
Ainsi, quand nous voulons dicter une communication, nous agissons sur le
médium, comme l'employé du télégraphe sur son appareil ; c'est-à-dire
que de même que le tac tac du télégraphe dessine à des milliers de
lieues, sur une bande de papier, les signes reproducteurs de la dépêche,
de même nous communiquons à travers les distances incommensurables qui
séparent le monde visible du monde invisible, le monde immatériel du
monde incarné, ce que nous voulons vous enseigner au moyen de l'appareil
médianimique. Mais aussi, de même que les influences atmosphériques
agissent, et troublent souvent les transmissions du télégraphe
électrique, l'influence morale du médium agit, et trouble quelquefois la
transmission de nos dépêches d'outre-tombe ; parce que nous sommes
obligés de les faire passer par un milieu qui leur est contraire.
Cependant, le plus souvent cette influence est annulée par notre énergie
et notre volonté, et aucun acte perturbateur ne se manifeste. En effet,
des dictées d'une haute portée philosophique, des communications d'une
parfaite moralité, sont transmises quelquefois par des médiums peu
propices à ces enseignements supérieurs ; tandis que, d'un autre côté,
des communications peu édifiantes arrivent aussi quelquefois par des
médiums tout honteux de leur avoir servi de conducteur.
En thèse générale, on peut affirmer que les Esprits similaires appellent les Esprits similaires, et que rarement les Esprits des pléiades élevées se communiquent par des appareils mauvais conducteurs, quand ils ont sous la main de bons appareils médianimiques, de bons médiums en un mot.
Les médiums légers et peu sérieux appellent donc des Esprits de même nature ; c'est pourquoi leurs communications sont empreintes de banalités, de frivolités, d'idées sans suite et souvent fort hétérodoxes, spiritement parlant. Certes, ils peuvent dire et disent quelquefois de bonnes choses ; mais c'est dans ce cas surtout qu'il faut apporter un examen sévère et scrupuleux, car, au milieu de ces bonnes choses, certains Esprits hypocrites insinuent avec habileté et avec une perfidie calculée des faits controuvés, des assertions mensongères, afin de duper la bonne foi de leurs auditeurs. On doit alors élaguer sans pitié tout mot, toute phrase équivoques, et ne conserver de la dictée que ce que la logique accepte, ou ce que la doctrine a déjà enseigné. Les communications de cette nature ne sont à redouter que pour les Spirites isolés, les groupes récents ou peu éclairés, car, dans les réunions où les adeptes sont plus avancés et ont acquis de l'expérience, le geai a beau se parer des plumes du paon, il est toujours impitoyablement éconduit.
Je ne parlerai pas des médiums qui se plaisent à solliciter et à écouter des communications ordurières ; laissons-les se complaire dans la société des Esprits cyniques. D'ailleurs, les communications de cet ordre recherchent d'elles-mêmes la solitude et l'isolement ; elles ne pourraient, en tout cas, que soulever le dédain et le dégoût parmi les membres des groupes philosophiques et sérieux. Mais où l'influence morale du médium se fait réellement sentir, c'est quand celui-ci substitue ses idées personnelles à celles que les Esprits s'efforcent de lui suggérer ; c'est encore lorsqu'il puise dans son imagination des théories fantastiques qu'il croit lui-même, de bonne foi, résulter d'une communication intuitive. Il y a souvent alors mille à parier contre un que ceci n'est que le reflet de l'Esprit personnel du médium ; et il arrive même ce fait curieux, c'est que la main du médium se meut quelquefois presque mécaniquement, poussée qu'elle est par un Esprit secondaire et moqueur. C'est contre cette pierre de touche que viennent se briser les imaginations jeunes et ardentes ; car, emportés par la fougue de leurs propres idées, par le clinquant de leurs connaissances littéraires, ils méconnaissent la modeste dictée d'un sage Esprit, et abandonnant la proie pour l'ombre, y substituent une paraphrase ampoulée. C'est contre cet écueil redoutable que viennent également échouer les personnalités ambitieuses qui, à défaut des communications que les bons Esprits leur refusent, présentent leurs propres œuvres comme l'œuvre de ces Esprits eux-mêmes. Voilà pourquoi il faut que les chefs des groupes Spirites soient pourvus d'un tact exquis et d'une rare sagacité, pour discerner les communications authentiques de celles qui ne le sont pas, et pour ne pas blesser ceux qui se font illusion à eux-mêmes.
Dans le doute, abstiens-toi, dit un de vos anciens proverbes ; n'admettez donc que ce qui est pour vous d'une évidence certaine. Dès qu'une opinion nouvelle se fait jour, pour peu qu'elle vous semble douteuse, passez-la au laminoir de la raison et de la logique ; ce que la raison et le bon sens réprouvent, rejetez-le hardiment ; mieux vaut repousser dix vérités, qu'admettre un seul mensonge, une seule fausse théorie. En effet, sur cette théorie vous pourriez édifier tout un système qui croulerait au premier souffle de la vérité comme un monument bâti sur un sable mouvant ; tandis que, si vous rejetez aujourd'hui certaines vérités, parce qu'elles ne vous sont pas démontrées logiquement et clairement, bientôt un fait brutal ou une démonstration irréfutable viendra vous en affirmer l'authenticité.
Rappelez-vous, néanmoins, ô Spirites, qu'il n'y a d'impossible pour Dieu et pour les bons Esprits que l'injustice et l'iniquité.
Le Spiritisme est assez répandu maintenant parmi les hommes, et a suffisamment moralisé les adeptes sincères de sa sainte doctrine, pour que les Esprits ne soient plus réduits à employer de mauvais outils, des médiums imparfaits. Si donc maintenant un médium, quel qu'il soit, donne, par sa conduite ou ses mœurs, par son orgueil, par son manque d'amour et de charité, un légitime sujet de suspicion, repoussez, repoussez, ses communications, car il y a un serpent caché dans l'herbe. Voilà ma conclusion sur l'influence morale des médiums.
Éraste.
En thèse générale, on peut affirmer que les Esprits similaires appellent les Esprits similaires, et que rarement les Esprits des pléiades élevées se communiquent par des appareils mauvais conducteurs, quand ils ont sous la main de bons appareils médianimiques, de bons médiums en un mot.
Les médiums légers et peu sérieux appellent donc des Esprits de même nature ; c'est pourquoi leurs communications sont empreintes de banalités, de frivolités, d'idées sans suite et souvent fort hétérodoxes, spiritement parlant. Certes, ils peuvent dire et disent quelquefois de bonnes choses ; mais c'est dans ce cas surtout qu'il faut apporter un examen sévère et scrupuleux, car, au milieu de ces bonnes choses, certains Esprits hypocrites insinuent avec habileté et avec une perfidie calculée des faits controuvés, des assertions mensongères, afin de duper la bonne foi de leurs auditeurs. On doit alors élaguer sans pitié tout mot, toute phrase équivoques, et ne conserver de la dictée que ce que la logique accepte, ou ce que la doctrine a déjà enseigné. Les communications de cette nature ne sont à redouter que pour les Spirites isolés, les groupes récents ou peu éclairés, car, dans les réunions où les adeptes sont plus avancés et ont acquis de l'expérience, le geai a beau se parer des plumes du paon, il est toujours impitoyablement éconduit.
Je ne parlerai pas des médiums qui se plaisent à solliciter et à écouter des communications ordurières ; laissons-les se complaire dans la société des Esprits cyniques. D'ailleurs, les communications de cet ordre recherchent d'elles-mêmes la solitude et l'isolement ; elles ne pourraient, en tout cas, que soulever le dédain et le dégoût parmi les membres des groupes philosophiques et sérieux. Mais où l'influence morale du médium se fait réellement sentir, c'est quand celui-ci substitue ses idées personnelles à celles que les Esprits s'efforcent de lui suggérer ; c'est encore lorsqu'il puise dans son imagination des théories fantastiques qu'il croit lui-même, de bonne foi, résulter d'une communication intuitive. Il y a souvent alors mille à parier contre un que ceci n'est que le reflet de l'Esprit personnel du médium ; et il arrive même ce fait curieux, c'est que la main du médium se meut quelquefois presque mécaniquement, poussée qu'elle est par un Esprit secondaire et moqueur. C'est contre cette pierre de touche que viennent se briser les imaginations jeunes et ardentes ; car, emportés par la fougue de leurs propres idées, par le clinquant de leurs connaissances littéraires, ils méconnaissent la modeste dictée d'un sage Esprit, et abandonnant la proie pour l'ombre, y substituent une paraphrase ampoulée. C'est contre cet écueil redoutable que viennent également échouer les personnalités ambitieuses qui, à défaut des communications que les bons Esprits leur refusent, présentent leurs propres œuvres comme l'œuvre de ces Esprits eux-mêmes. Voilà pourquoi il faut que les chefs des groupes Spirites soient pourvus d'un tact exquis et d'une rare sagacité, pour discerner les communications authentiques de celles qui ne le sont pas, et pour ne pas blesser ceux qui se font illusion à eux-mêmes.
Dans le doute, abstiens-toi, dit un de vos anciens proverbes ; n'admettez donc que ce qui est pour vous d'une évidence certaine. Dès qu'une opinion nouvelle se fait jour, pour peu qu'elle vous semble douteuse, passez-la au laminoir de la raison et de la logique ; ce que la raison et le bon sens réprouvent, rejetez-le hardiment ; mieux vaut repousser dix vérités, qu'admettre un seul mensonge, une seule fausse théorie. En effet, sur cette théorie vous pourriez édifier tout un système qui croulerait au premier souffle de la vérité comme un monument bâti sur un sable mouvant ; tandis que, si vous rejetez aujourd'hui certaines vérités, parce qu'elles ne vous sont pas démontrées logiquement et clairement, bientôt un fait brutal ou une démonstration irréfutable viendra vous en affirmer l'authenticité.
Rappelez-vous, néanmoins, ô Spirites, qu'il n'y a d'impossible pour Dieu et pour les bons Esprits que l'injustice et l'iniquité.
Le Spiritisme est assez répandu maintenant parmi les hommes, et a suffisamment moralisé les adeptes sincères de sa sainte doctrine, pour que les Esprits ne soient plus réduits à employer de mauvais outils, des médiums imparfaits. Si donc maintenant un médium, quel qu'il soit, donne, par sa conduite ou ses mœurs, par son orgueil, par son manque d'amour et de charité, un légitime sujet de suspicion, repoussez, repoussez, ses communications, car il y a un serpent caché dans l'herbe. Voilà ma conclusion sur l'influence morale des médiums.
Éraste.
Des apports et des autres phénomènes tangibles (Société spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)
Il faut nécessairement, pour obtenir des phénomènes de cet ordre, avoir
avec soi des médiums que j'appellerai sensitifs, c'est-à-dire, doués au
plus haut degré des facultés médianimiques d'expansion et de
pénétrabilité ; parce que le système nerveux de ces médiums, facilement
excitable, leur permet, au moyen de certaines vibrations, de projeter
autour d'eux, avec profusion, leur fluide animalisé.
Les natures impressionnables, les personnes dont les nerfs vibrent au moindre sentiment, à la plus petite sensation, que l'influence morale ou physique, interne ou externe, sensibilise, sont des sujets très aptes à devenir d'excellents médiums pour les effets physiques de tangibilité et d'apports. En effet, leur système nerveux, presque entièrement dépourvu de l'enveloppe réfractaire, qui isole ce système chez la plupart des autres incarnés, les rend propres au développement de ces divers phénomènes. En conséquence, avec un sujet de cette nature, et dont les autres facultés ne sont pas hostiles à la médianimisation, on obtiendra plus facilement les phénomènes de tangibilité, les coups frappés dans les murs et dans les meubles, les mouvements intelligents, et même la suspension dans l'espace de la matière inerte la plus lourde ; à fortiori, obtiendra-t-on ces résultats si, au lieu d'un médium, on en a sous la main plusieurs également bien doués.
Mais de la production de ces phénomènes à l'obtention de celui des apports, il y a tout un monde ; car, dans ce cas, non seulement le travail de l'Esprit est plus complexe, plus difficile, mais bien plus, l'Esprit ne peut opérer qu'au moyen d'un seul appareil médianimique, c'est-à-dire que plusieurs médiums ne peuvent pas concourir simultanément à la production du même phénomène. Il arrive même, au contraire, que la présence de certaines personnes antipathiques à l'Esprit qui opère entrave radicalement son opération. A ces motifs qui, comme vous le voyez, ne manquent pas d'importance, ajoutez que les apports nécessitent toujours une plus grande concentration et en même temps une plus grande diffusion de certains fluides, et qu'enfin ils ne peuvent être obtenus qu'avec les médiums les mieux doués, ceux, en un mot, dont l'appareil électro-médianimique est le mieux conditionné.
En général, les faits d'apports sont et resteront excessivement rares. Je n'ai pas besoin de vous démontrer pourquoi ils sont et seront moins fréquents que les autres faits de tangibilité ; de ce que je dis vous le déduirez vous-mêmes. D'ailleurs, ces phénomènes sont d'une nature telle, que non seulement tous les médiums n'y sont pas propres, mais que tous les Esprits eux-mêmes ne peuvent pas les produire. En effet, il faut qu'entre l'Esprit et le médium influencé il existe une certaine affinité, une certaine analogie, en un mot une certaine ressemblance qui permette à la partie expansible du fluide périspritique[1] de l'incarné de se mêler, de s'unir, de se combiner avec celui de l'Esprit qui veut faire un apport. Cette fusion doit être telle que la force résultante devienne, pour ainsi dire, une ; de même qu'un courant électrique, en agissant sur le charbon, produit un foyer, une clarté uniques.
Pourquoi cette union ? pourquoi cette fusion, direz-vous ? C'est que, pour la production de ces phénomènes, il faut que les propriétés essentielles de l'Esprit moteur soient augmentées de quelques-unes de celles du médianimisé ; c'est que le fluide vital, indispensable à la production de tous les phénomènes médianimiques, est l'apanage exclusif de l'incarné, et que, par conséquent, l'Esprit opérateur est obligé de s'en imprégner. Ce n'est qu'alors qu'il peut, au moyen de certaines propriétés de votre milieu ambiant, inconnues pour vous, isoler, rendre invisibles et faire mouvoir certains objets matériels, et des incarnés eux-mêmes.
Il ne m'est pas permis, pour le moment, de vous dévoiler ces lois particulières qui régissent les gaz et les fluides qui vous environnent ; mais avant que des années soient écoulées, avant qu'une existence d'homme soit accomplie, l'explication de ces lois et de ces phénomènes vous sera révélée, et vous verrez surgir et se produire une nouvelle variété de médiums, qui tomberont dans un état cataleptique particulier dès qu'ils seront médianimisés.
Vous voyez de combien de difficultés la production des apports se trouve entourée ; vous pouvez en conclure très logiquement que les phénomènes de cette nature sont excessivement rares, et avec d'autant plus de raison que les Esprits s'y prêtent fort peu, parce que cela motive de leur part un travail quasi matériel, ce qui est un ennui et une fatigue pour eux. D'autre part, il arrive encore ceci : c'est que très souvent, malgré leur énergie et leur volonté, l'état du médium lui-même leur oppose une barrière infranchissable.
Il est donc évident, et votre raisonnement le sanctionne, je n'en doute pas, que les faits tangibles de coups, de mouvement et de suspension sont des phénomènes simples, qui s'opèrent par la concentration et la dilatation de certains fluides, et qu'ils peuvent être provoqués et obtenus par la volonté et le travail des médiums qui y sont aptes, quand ceux-ci sont secondés par des Esprits amis et bienveillants ; tandis que les faits d'apports sont multiples, complexes, exigent un concours de circonstances spéciales, ne peuvent s'opérer que par un seul Esprit et un seul médium, et nécessitent, en dehors des besoins de la tangibilité, une combinaison toute particulière pour isoler et rendre invisible l'objet ou les objets qui font le sujet de l'apport.
Vous tous, Spirites, vous comprenez mes explications, et vous vous rendez parfaitement compte de cette concentration de fluides spéciaux, pour la locomotion et la tactilité de la matière inerte ; vous y croyez, comme vous croyez aux phénomènes de l'électricité et du magnétisme, avec lesquels les faits médianimiques sont pleins d'analogie, et en sont, pour ainsi dire, la consécration et le développement. Quant aux incrédules, je n'ai que faire de les convaincre, je ne m'occupe pas d'eux ; ils le seront un jour, par la force de l'évidence, car il faudra bien qu'ils s'inclinent devant le témoignage unanime des faits spirites, comme ils ont été forcés de le faire devant tant d'autres faits qu'ils avaient d'abord repoussés.
Pour me résumer : si les faits de tangibilité sont fréquents, les faits d'apports sont très rares, parce que les conditions en sont très difficiles ; par conséquent, nul médium ne peut dire : A telle heure, à tel moment, j'obtiendrai un apport ; car souvent l'Esprit lui-même se trouve empêché dans son œuvre. Je dois ajouter que ces phénomènes sont doublement difficiles en public, car on y rencontre presque toujours des éléments énergiquement réfractaires qui paralysent les efforts de l'Esprit, et à plus forte raison l'action du médium. Tenez, au contraire, pour certain, que ces phénomènes se produisent spontanément ; le plus souvent à l'insu des médiums et sans préméditation, presque toujours en particulier, et enfin, fort rarement, quand ceux-ci en sont prévenus ; d'où vous devez conclure qu'il y a motif légitime de suspicion, toutes les fois qu'un médium se flatte de les obtenir à volonté, autrement dit, de commander aux Esprits comme à des serviteurs, ce qui est tout simplement absurde. Tenez encore pour règle générale que les phénomènes spirites ne sont point faits pour être donnés en spectacle et pour amuser les curieux. Si quelques Esprits se prêtent à ces sortes de choses, ce ne peut être que pour des phénomènes simples, et non pour ceux qui, comme les apports et autres semblables, exigent des conditions exceptionnelles.
Rappelez-vous, Spirites, que s'il est absurde de repousser systématiquement tous les phénomènes d'outre-tombe, il n'est pas sage non plus de les accepter tous aveuglément. Quand un phénomène de tangibilité, d'apparition, de visibilité ou d'apport se manifeste spontanément et d'une manière instantanée, acceptez-le ; mais, je ne saurais trop vous le répéter, n'acceptez rien aveuglément ; que chaque fait subisse un examen minutieux, approfondi et sévère ; car, croyez-le, le Spiritisme, si riche en phénomènes sublimes et grandioses, n'a rien à gagner à ces petites manifestations que d'habiles prestidigitateurs peuvent imiter.
Je sais bien ce que vous allez me dire : c'est que ces phénomènes sont utiles pour convaincre les incrédules ; mais sachez bien que si vous n'aviez pas eu d'autres moyens de conviction, vous n'auriez pas aujourd'hui la centième partie des Spirites que vous avez. Parlez au cœur ; c'est par là que vous ferez le plus de conversions sérieuses. Si vous croyez utile, pour certaines personnes, d'agir par les faits matériels, présentez-les au moins dans des circonstances telles qu'ils ne puissent donner lieu à aucune fausse interprétation, et surtout ne sortez pas des conditions normales de ces faits ; car les faits présentés dans de mauvaises conditions fournissent des arguments aux incrédules au lieu de les convaincre.
Eraste.
Les natures impressionnables, les personnes dont les nerfs vibrent au moindre sentiment, à la plus petite sensation, que l'influence morale ou physique, interne ou externe, sensibilise, sont des sujets très aptes à devenir d'excellents médiums pour les effets physiques de tangibilité et d'apports. En effet, leur système nerveux, presque entièrement dépourvu de l'enveloppe réfractaire, qui isole ce système chez la plupart des autres incarnés, les rend propres au développement de ces divers phénomènes. En conséquence, avec un sujet de cette nature, et dont les autres facultés ne sont pas hostiles à la médianimisation, on obtiendra plus facilement les phénomènes de tangibilité, les coups frappés dans les murs et dans les meubles, les mouvements intelligents, et même la suspension dans l'espace de la matière inerte la plus lourde ; à fortiori, obtiendra-t-on ces résultats si, au lieu d'un médium, on en a sous la main plusieurs également bien doués.
Mais de la production de ces phénomènes à l'obtention de celui des apports, il y a tout un monde ; car, dans ce cas, non seulement le travail de l'Esprit est plus complexe, plus difficile, mais bien plus, l'Esprit ne peut opérer qu'au moyen d'un seul appareil médianimique, c'est-à-dire que plusieurs médiums ne peuvent pas concourir simultanément à la production du même phénomène. Il arrive même, au contraire, que la présence de certaines personnes antipathiques à l'Esprit qui opère entrave radicalement son opération. A ces motifs qui, comme vous le voyez, ne manquent pas d'importance, ajoutez que les apports nécessitent toujours une plus grande concentration et en même temps une plus grande diffusion de certains fluides, et qu'enfin ils ne peuvent être obtenus qu'avec les médiums les mieux doués, ceux, en un mot, dont l'appareil électro-médianimique est le mieux conditionné.
En général, les faits d'apports sont et resteront excessivement rares. Je n'ai pas besoin de vous démontrer pourquoi ils sont et seront moins fréquents que les autres faits de tangibilité ; de ce que je dis vous le déduirez vous-mêmes. D'ailleurs, ces phénomènes sont d'une nature telle, que non seulement tous les médiums n'y sont pas propres, mais que tous les Esprits eux-mêmes ne peuvent pas les produire. En effet, il faut qu'entre l'Esprit et le médium influencé il existe une certaine affinité, une certaine analogie, en un mot une certaine ressemblance qui permette à la partie expansible du fluide périspritique[1] de l'incarné de se mêler, de s'unir, de se combiner avec celui de l'Esprit qui veut faire un apport. Cette fusion doit être telle que la force résultante devienne, pour ainsi dire, une ; de même qu'un courant électrique, en agissant sur le charbon, produit un foyer, une clarté uniques.
Pourquoi cette union ? pourquoi cette fusion, direz-vous ? C'est que, pour la production de ces phénomènes, il faut que les propriétés essentielles de l'Esprit moteur soient augmentées de quelques-unes de celles du médianimisé ; c'est que le fluide vital, indispensable à la production de tous les phénomènes médianimiques, est l'apanage exclusif de l'incarné, et que, par conséquent, l'Esprit opérateur est obligé de s'en imprégner. Ce n'est qu'alors qu'il peut, au moyen de certaines propriétés de votre milieu ambiant, inconnues pour vous, isoler, rendre invisibles et faire mouvoir certains objets matériels, et des incarnés eux-mêmes.
Il ne m'est pas permis, pour le moment, de vous dévoiler ces lois particulières qui régissent les gaz et les fluides qui vous environnent ; mais avant que des années soient écoulées, avant qu'une existence d'homme soit accomplie, l'explication de ces lois et de ces phénomènes vous sera révélée, et vous verrez surgir et se produire une nouvelle variété de médiums, qui tomberont dans un état cataleptique particulier dès qu'ils seront médianimisés.
Vous voyez de combien de difficultés la production des apports se trouve entourée ; vous pouvez en conclure très logiquement que les phénomènes de cette nature sont excessivement rares, et avec d'autant plus de raison que les Esprits s'y prêtent fort peu, parce que cela motive de leur part un travail quasi matériel, ce qui est un ennui et une fatigue pour eux. D'autre part, il arrive encore ceci : c'est que très souvent, malgré leur énergie et leur volonté, l'état du médium lui-même leur oppose une barrière infranchissable.
Il est donc évident, et votre raisonnement le sanctionne, je n'en doute pas, que les faits tangibles de coups, de mouvement et de suspension sont des phénomènes simples, qui s'opèrent par la concentration et la dilatation de certains fluides, et qu'ils peuvent être provoqués et obtenus par la volonté et le travail des médiums qui y sont aptes, quand ceux-ci sont secondés par des Esprits amis et bienveillants ; tandis que les faits d'apports sont multiples, complexes, exigent un concours de circonstances spéciales, ne peuvent s'opérer que par un seul Esprit et un seul médium, et nécessitent, en dehors des besoins de la tangibilité, une combinaison toute particulière pour isoler et rendre invisible l'objet ou les objets qui font le sujet de l'apport.
Vous tous, Spirites, vous comprenez mes explications, et vous vous rendez parfaitement compte de cette concentration de fluides spéciaux, pour la locomotion et la tactilité de la matière inerte ; vous y croyez, comme vous croyez aux phénomènes de l'électricité et du magnétisme, avec lesquels les faits médianimiques sont pleins d'analogie, et en sont, pour ainsi dire, la consécration et le développement. Quant aux incrédules, je n'ai que faire de les convaincre, je ne m'occupe pas d'eux ; ils le seront un jour, par la force de l'évidence, car il faudra bien qu'ils s'inclinent devant le témoignage unanime des faits spirites, comme ils ont été forcés de le faire devant tant d'autres faits qu'ils avaient d'abord repoussés.
Pour me résumer : si les faits de tangibilité sont fréquents, les faits d'apports sont très rares, parce que les conditions en sont très difficiles ; par conséquent, nul médium ne peut dire : A telle heure, à tel moment, j'obtiendrai un apport ; car souvent l'Esprit lui-même se trouve empêché dans son œuvre. Je dois ajouter que ces phénomènes sont doublement difficiles en public, car on y rencontre presque toujours des éléments énergiquement réfractaires qui paralysent les efforts de l'Esprit, et à plus forte raison l'action du médium. Tenez, au contraire, pour certain, que ces phénomènes se produisent spontanément ; le plus souvent à l'insu des médiums et sans préméditation, presque toujours en particulier, et enfin, fort rarement, quand ceux-ci en sont prévenus ; d'où vous devez conclure qu'il y a motif légitime de suspicion, toutes les fois qu'un médium se flatte de les obtenir à volonté, autrement dit, de commander aux Esprits comme à des serviteurs, ce qui est tout simplement absurde. Tenez encore pour règle générale que les phénomènes spirites ne sont point faits pour être donnés en spectacle et pour amuser les curieux. Si quelques Esprits se prêtent à ces sortes de choses, ce ne peut être que pour des phénomènes simples, et non pour ceux qui, comme les apports et autres semblables, exigent des conditions exceptionnelles.
Rappelez-vous, Spirites, que s'il est absurde de repousser systématiquement tous les phénomènes d'outre-tombe, il n'est pas sage non plus de les accepter tous aveuglément. Quand un phénomène de tangibilité, d'apparition, de visibilité ou d'apport se manifeste spontanément et d'une manière instantanée, acceptez-le ; mais, je ne saurais trop vous le répéter, n'acceptez rien aveuglément ; que chaque fait subisse un examen minutieux, approfondi et sévère ; car, croyez-le, le Spiritisme, si riche en phénomènes sublimes et grandioses, n'a rien à gagner à ces petites manifestations que d'habiles prestidigitateurs peuvent imiter.
Je sais bien ce que vous allez me dire : c'est que ces phénomènes sont utiles pour convaincre les incrédules ; mais sachez bien que si vous n'aviez pas eu d'autres moyens de conviction, vous n'auriez pas aujourd'hui la centième partie des Spirites que vous avez. Parlez au cœur ; c'est par là que vous ferez le plus de conversions sérieuses. Si vous croyez utile, pour certaines personnes, d'agir par les faits matériels, présentez-les au moins dans des circonstances telles qu'ils ne puissent donner lieu à aucune fausse interprétation, et surtout ne sortez pas des conditions normales de ces faits ; car les faits présentés dans de mauvaises conditions fournissent des arguments aux incrédules au lieu de les convaincre.
Eraste.
Les animaux médiums (Société spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)
J'aborde aujourd'hui cette question de la médianimité des animaux,
soulevée et soutenue par un de vos plus fervents adeptes. Il prétend, en
vertu de cet axiome, qui peut le plus peut le moins, que nous pouvons
médianimiser les oiseaux et les autres animaux, et nous en servir dans
nos communications avec l'espèce humaine. C'est ce que vous appelez en
philosophie, ou plutôt en logique, purement et simplement un sophisme.
« Vous animez, dit-il, la matière inerte, c'est-à-dire, une table, une chaise, un piano ; à fortiori devez-vous animer la matière déjà animée et notamment des oiseaux. » Eh bien ! dans l'état normal du Spiritisme, cela n'est pas, cela ne peut pas exister.
D'abord, convenons bien de nos faits. Qu'est-ce qu'un médium ? C'est l'être, c'est l'individu qui sert de trait d'union aux Esprits, pour que ceux-ci puissent avec facilité se communiquer aux hommes : Esprits incarnés. Par conséquent, sans médium, point de communications tangibles, mentales, scriptives, physiques, ni de quelque sorte que ce soit.
Il est un principe qui, j'en suis sûr, est admis par tous les Spirites : c'est que les semblables agissent avec leurs semblables et comme leurs semblables. Or, quels sont les semblables des Esprits, sinon les Esprits, incarnés ou non ? Faut-il vous le répéter sans cesse ? Eh bien ! je vous le répéterai encore : Votre périsprit et le nôtre sont puisés dans le même milieu, sont d'une nature identique, sont semblables en un mot ; ils possèdent une propriété d'assimilation plus ou moins développée, d'aimantation plus ou moins vigoureuse, qui nous permet, Esprits et incarnés, de nous mettre très promptement et très facilement en rapport. Enfin, ce qui appartient en propre aux médiums, ce qui est de l'essence même de leur individualité, c'est une affinité spéciale, et en même temps une force d'expansion particulière qui anéantissent en eux toute réfractibilité, et établissent entre eux et nous une sorte de courant, une espèce de fusion qui facilite nos communications. C'est, du reste, cette réfractibilité de la matière qui s'oppose au développement de la médianimité chez la plupart de ceux qui ne sont pas médiums. J'ajouterai que c'est à cette qualité réfractaire qu'il faut attribuer la particularité qui fait que certains individus, non médiums, transmettent et développent la médianimité, par leur simple contact, chez des médiums novices ou chez des médiums presque passifs, c'est-à-dire dépourvus de certaines qualités médianimiques.
Les hommes sont toujours disposés à tout exagérer ; les uns, je ne parle pas ici des matérialistes, refusent une âme aux animaux, et d'autres veulent leur en donner une, pour ainsi dire pareille à la nôtre. Pourquoi vouloir ainsi confondre le perfectible avec l'imperfectible ? Non, non, soyez-en bien convaincus, le feu qui anime les bêtes, le souffle qui les fait agir, mouvoir et parler en leur langage, n'a, quant à présent, aucune aptitude à se mêler, à s'unir, à se fondre avec le souffle divin, l'âme éthérée, l'Esprit en un mot, qui anime l'être essentiellement perfectible, l'homme, ce roi de la création. Or, n'est-ce pas ce qui fait la supériorité de l'espèce humaine sur les autres espèces terrestres que cette condition essentielle de perfectibilité ? Eh bien ! reconnaissez donc qu'on ne peut assimiler à l'homme, seul perfectible en lui-même et dans ses œuvres, aucun individu des autres races vivantes sur la terre.
Le chien, que son intelligence supérieure parmi les animaux, a rendu l'ami et le commensal de l'homme, est-il perfectible de son chef et de son initiative personnelle ? Nul n'oserait le soutenir ; car le chien ne fait pas progresser le chien ; et celui d'entre eux qui est le mieux dressé est toujours dressé par son maître. Depuis que le monde est monde, la loutre bâtit toujours sa hutte sur les eaux, d'après les mêmes proportions et suivant une règle invariable ; les rossignols et les hirondelles n'ont jamais construit leurs nids autrement que leurs pères ne l'avaient fait. Un nid de moineaux d'avant le déluge, comme un nid de moineaux de l'époque moderne, est toujours un nid de moineaux, édifié dans les mêmes conditions et avec le même système d'entrelacement de brins d'herbes et de débris, recueillis au printemps à l'époque des amours. Les abeilles et les fourmis, ces petites républiques ménagères, n'ont jamais varié dans leurs habitudes d'approvisionnement, dans leurs allures, dans leurs mœurs, dans leurs productions. Enfin l'araignée tisse toujours sa toile de la même manière.
D'un autre côté, si vous cherchez les cabanes de feuillage et les tentes des premiers âges de la terre, vous rencontrerez à leur place les palais et les châteaux de la civilisation moderne ; aux vêtements de peaux brutes, ont succédé les tissus d'or et de soie ; enfin, à chaque pas vous trouvez la preuve de cette marche incessante de l'humanité vers le progrès.
De ce progrès constant, invincible, irrécusable de l'espèce humaine, et de ce stationnement indéfini des autres espèces animées, concluez avec moi que s'il existe des principes communs à ce qui vit et se meut sur la terre : le souffle et la matière, il n'en est pas moins vrai que vous seuls, Esprits incarnés, êtes soumis à cette inévitable loi du progrès, qui vous pousse fatalement en avant et toujours en avant. Dieu a mis les animaux à côté de vous comme des auxiliaires pour vous nourrir, vous vêtir, vous seconder. Il leur a donné une certaine dose d'intelligence, parce que, pour vous aider, il leur fallait comprendre, et il a proportionné leur intelligence aux services qu'il sont appelés à rendre ; mais, dans sa sagesse, il n'a pas voulu qu'il fussent soumis à la même loi du progrès ; tels ils ont été créés, tels ils sont restés et resteront jusqu'à l'extinction de leurs races.
On a dit : les Esprits médianimisent et font mouvoir la matière inerte, des chaises, des tables, des pianos ; font mouvoir, oui ; mais médianimisent, non ! Car, encore une fois, sans médium aucun de ces phénomènes ne peut se produire. Qu'y a-t-il d'extraordinaire qu'à l'aide d'un ou de plusieurs médiums nous fassions mouvoir la matière inerte, passive, qui, justement en raison de sa passivité, de son inertie, est propre à subir les mouvements et les impulsions que nous désirons lui imprimer ? Pour cela nous avons besoin de médiums, c'est positif ; mais il n'est pas nécessaire que le médium soit présent ou conscient, car nous pouvons agir avec les éléments qu'il nous fournit, à son insu et hors de sa présence, surtout dans les faits de tangibilité et d'apports. Notre enveloppe fluidique, plus impondérable et plus subtile que le plus subtil et le plus impondérable de vos gaz, s'unissant, se mariant, se combinant avec l'enveloppe fluidique, mais animalisée du médium, et dont la propriété d'expansion et de pénétrabilité est insaisissable pour vos sens grossiers, et presque inexplicable pour vous, nous permet de mouvoir des meubles et même de les briser dans des pièces inhabitées.
Certainement les Esprits peuvent se rendre visibles et tangibles pour les animaux, et souvent telle frayeur subite que prennent ceux-ci, et qui ne vous semble pas motivée, est causée par la vue d'un ou de plusieurs de ces Esprits mal intentionnés pour les individus présents ou pour ceux à qui appartiennent ces animaux. Très souvent, vous apercevez des chevaux qui ne veulent ni avancer ni reculer, ou qui se cabrent devant un obstacle imaginaire ; eh bien ! tenez pour certain que l'obstacle imaginaire est souvent un Esprit ou un groupe d'Esprits qui se plaît à les empêcher d'avancer. Rappelez-vous l'ânesse de Balaam, qui voyant un ange devant elle, et redoutant son épée flamboyante, s'obstinait à ne pas bouger ; c'est qu'avant de se manifester visiblement à Balaam, l'ange avait voulu se rendre visible pour l'animal seul ; mais, je le répète, nous ne médianimisons directement ni les animaux ni la matière inerte ; il nous faut toujours le concours conscient ou inconscient d'un médium humain, parce qu'il nous faut l'union de fluides similaires, ce que nous ne trouvons ni dans les animaux, ni dans la matière brute.
M. Thiry, dit-il, a magnétisé son chien ; à quoi est-il arrivé ? Il l'a tué ; car ce malheureux animal est mort après être tombé dans une espèce d'atonie, de langueur, conséquence de sa magnétisation. En effet, en l'inondant d'un fluide puisé dans une essence supérieure à l'essence spéciale à sa nature, il l'a écrasé et a agi sur lui, quoique plus lentement, à la manière de la foudre. Donc, comme il n'y a nulle assimilation possible entre notre périsprit et l'enveloppe fluidique des animaux proprement dits, nous les écraserions instantanément en les médianimisant.
Ceci établi, je reconnais parfaitement que chez les animaux il existe des aptitudes diverses ; que certains sentiments, que certaines passions identiques aux passions et aux sentiments humains se développent en eux ; qu'ils sont sensibles et reconnaissants, vindicatifs et haineux, suivant que l'on agit bien ou mal avec eux. C'est que Dieu, qui ne fait rien d'incomplet, a donné aux animaux, compagnons ou serviteurs de l'homme, des qualités de sociabilité qui manquent entièrement aux animaux sauvages qui habitent les solitudes.
Pour me résumer : les faits médianimiques ne peuvent se manifester sans le concours conscient ou inconscient du médium ; et ce n'est que parmi les incarnés, Esprits comme nous, que nous pouvons rencontrer ceux qui peuvent nous servir de médiums. Quant à dresser des chiens, des oiseaux ou autres animaux pour faire tels ou tels exercices, c'est votre affaire et non la nôtre.
Éraste.
Remarque. A propos de la discussion qui eut lien dans la Société sur la médianimité des animaux, M. Allan Kardec dit qu'il a observé très attentivement les expériences qui ont été faites en ces derniers temps sur des oiseaux auxquels on attribuait la faculté médianimique, et il ajoute qu'il y a reconnu de la manière la moins contestable les procédés de la prestidigitation, c'est-à-dire des cartes forcées, mais employées avec assez d'adresse pour faire illusion sur des spectateurs qui se contentent de l'apparence sans scruter le fond. En effet, ces oiseaux font des choses que ni l'homme le plus intelligent, ni même le somnambule le plus lucide ne pourraient faire, d'où il faudrait conclure qu'ils possèdent des facultés intellectuelles supérieures à l'homme, ce qui serait contraire aux lois de la nature. Ce qu'il faut le plus admirer dans ces expériences, c'est l'art, la patience qu'il a fallu déployer pour dresser ces animaux, les rendre dociles et attentifs ; pour obtenir ces résultats, il a certainement fallu avoir affaire à des natures flexibles, mais ce ne peut être en définitive que des animaux dressés, chez qui il y a plus d'habitude que de combinaisons ; et la preuve en est, c'est que si on cesse de les exercer pendant quelque temps, ils perdent bientôt ce qu'ils ont appris. Le charme de ces expériences, comme celui de tous les tours de prestidigitation, est dans le secret des procédés ; une fois le procédé connu, elles perdent tout leur attrait ; c'est ce qui est arrivé quand les saltimbanques ont voulu imiter la lucidité somnambulique par le prétendu phénomène de ce qu'ils appelaient la double vue. Il ne pouvait y avoir d'illusion pour quiconque connaissait les conditions normales du somnambulisme ; il en est de même de la prétendue médianimité des oiseaux dont tout observateur expérimenté peut facilement se rendre compte.
« Vous animez, dit-il, la matière inerte, c'est-à-dire, une table, une chaise, un piano ; à fortiori devez-vous animer la matière déjà animée et notamment des oiseaux. » Eh bien ! dans l'état normal du Spiritisme, cela n'est pas, cela ne peut pas exister.
D'abord, convenons bien de nos faits. Qu'est-ce qu'un médium ? C'est l'être, c'est l'individu qui sert de trait d'union aux Esprits, pour que ceux-ci puissent avec facilité se communiquer aux hommes : Esprits incarnés. Par conséquent, sans médium, point de communications tangibles, mentales, scriptives, physiques, ni de quelque sorte que ce soit.
Il est un principe qui, j'en suis sûr, est admis par tous les Spirites : c'est que les semblables agissent avec leurs semblables et comme leurs semblables. Or, quels sont les semblables des Esprits, sinon les Esprits, incarnés ou non ? Faut-il vous le répéter sans cesse ? Eh bien ! je vous le répéterai encore : Votre périsprit et le nôtre sont puisés dans le même milieu, sont d'une nature identique, sont semblables en un mot ; ils possèdent une propriété d'assimilation plus ou moins développée, d'aimantation plus ou moins vigoureuse, qui nous permet, Esprits et incarnés, de nous mettre très promptement et très facilement en rapport. Enfin, ce qui appartient en propre aux médiums, ce qui est de l'essence même de leur individualité, c'est une affinité spéciale, et en même temps une force d'expansion particulière qui anéantissent en eux toute réfractibilité, et établissent entre eux et nous une sorte de courant, une espèce de fusion qui facilite nos communications. C'est, du reste, cette réfractibilité de la matière qui s'oppose au développement de la médianimité chez la plupart de ceux qui ne sont pas médiums. J'ajouterai que c'est à cette qualité réfractaire qu'il faut attribuer la particularité qui fait que certains individus, non médiums, transmettent et développent la médianimité, par leur simple contact, chez des médiums novices ou chez des médiums presque passifs, c'est-à-dire dépourvus de certaines qualités médianimiques.
Les hommes sont toujours disposés à tout exagérer ; les uns, je ne parle pas ici des matérialistes, refusent une âme aux animaux, et d'autres veulent leur en donner une, pour ainsi dire pareille à la nôtre. Pourquoi vouloir ainsi confondre le perfectible avec l'imperfectible ? Non, non, soyez-en bien convaincus, le feu qui anime les bêtes, le souffle qui les fait agir, mouvoir et parler en leur langage, n'a, quant à présent, aucune aptitude à se mêler, à s'unir, à se fondre avec le souffle divin, l'âme éthérée, l'Esprit en un mot, qui anime l'être essentiellement perfectible, l'homme, ce roi de la création. Or, n'est-ce pas ce qui fait la supériorité de l'espèce humaine sur les autres espèces terrestres que cette condition essentielle de perfectibilité ? Eh bien ! reconnaissez donc qu'on ne peut assimiler à l'homme, seul perfectible en lui-même et dans ses œuvres, aucun individu des autres races vivantes sur la terre.
Le chien, que son intelligence supérieure parmi les animaux, a rendu l'ami et le commensal de l'homme, est-il perfectible de son chef et de son initiative personnelle ? Nul n'oserait le soutenir ; car le chien ne fait pas progresser le chien ; et celui d'entre eux qui est le mieux dressé est toujours dressé par son maître. Depuis que le monde est monde, la loutre bâtit toujours sa hutte sur les eaux, d'après les mêmes proportions et suivant une règle invariable ; les rossignols et les hirondelles n'ont jamais construit leurs nids autrement que leurs pères ne l'avaient fait. Un nid de moineaux d'avant le déluge, comme un nid de moineaux de l'époque moderne, est toujours un nid de moineaux, édifié dans les mêmes conditions et avec le même système d'entrelacement de brins d'herbes et de débris, recueillis au printemps à l'époque des amours. Les abeilles et les fourmis, ces petites républiques ménagères, n'ont jamais varié dans leurs habitudes d'approvisionnement, dans leurs allures, dans leurs mœurs, dans leurs productions. Enfin l'araignée tisse toujours sa toile de la même manière.
D'un autre côté, si vous cherchez les cabanes de feuillage et les tentes des premiers âges de la terre, vous rencontrerez à leur place les palais et les châteaux de la civilisation moderne ; aux vêtements de peaux brutes, ont succédé les tissus d'or et de soie ; enfin, à chaque pas vous trouvez la preuve de cette marche incessante de l'humanité vers le progrès.
De ce progrès constant, invincible, irrécusable de l'espèce humaine, et de ce stationnement indéfini des autres espèces animées, concluez avec moi que s'il existe des principes communs à ce qui vit et se meut sur la terre : le souffle et la matière, il n'en est pas moins vrai que vous seuls, Esprits incarnés, êtes soumis à cette inévitable loi du progrès, qui vous pousse fatalement en avant et toujours en avant. Dieu a mis les animaux à côté de vous comme des auxiliaires pour vous nourrir, vous vêtir, vous seconder. Il leur a donné une certaine dose d'intelligence, parce que, pour vous aider, il leur fallait comprendre, et il a proportionné leur intelligence aux services qu'il sont appelés à rendre ; mais, dans sa sagesse, il n'a pas voulu qu'il fussent soumis à la même loi du progrès ; tels ils ont été créés, tels ils sont restés et resteront jusqu'à l'extinction de leurs races.
On a dit : les Esprits médianimisent et font mouvoir la matière inerte, des chaises, des tables, des pianos ; font mouvoir, oui ; mais médianimisent, non ! Car, encore une fois, sans médium aucun de ces phénomènes ne peut se produire. Qu'y a-t-il d'extraordinaire qu'à l'aide d'un ou de plusieurs médiums nous fassions mouvoir la matière inerte, passive, qui, justement en raison de sa passivité, de son inertie, est propre à subir les mouvements et les impulsions que nous désirons lui imprimer ? Pour cela nous avons besoin de médiums, c'est positif ; mais il n'est pas nécessaire que le médium soit présent ou conscient, car nous pouvons agir avec les éléments qu'il nous fournit, à son insu et hors de sa présence, surtout dans les faits de tangibilité et d'apports. Notre enveloppe fluidique, plus impondérable et plus subtile que le plus subtil et le plus impondérable de vos gaz, s'unissant, se mariant, se combinant avec l'enveloppe fluidique, mais animalisée du médium, et dont la propriété d'expansion et de pénétrabilité est insaisissable pour vos sens grossiers, et presque inexplicable pour vous, nous permet de mouvoir des meubles et même de les briser dans des pièces inhabitées.
Certainement les Esprits peuvent se rendre visibles et tangibles pour les animaux, et souvent telle frayeur subite que prennent ceux-ci, et qui ne vous semble pas motivée, est causée par la vue d'un ou de plusieurs de ces Esprits mal intentionnés pour les individus présents ou pour ceux à qui appartiennent ces animaux. Très souvent, vous apercevez des chevaux qui ne veulent ni avancer ni reculer, ou qui se cabrent devant un obstacle imaginaire ; eh bien ! tenez pour certain que l'obstacle imaginaire est souvent un Esprit ou un groupe d'Esprits qui se plaît à les empêcher d'avancer. Rappelez-vous l'ânesse de Balaam, qui voyant un ange devant elle, et redoutant son épée flamboyante, s'obstinait à ne pas bouger ; c'est qu'avant de se manifester visiblement à Balaam, l'ange avait voulu se rendre visible pour l'animal seul ; mais, je le répète, nous ne médianimisons directement ni les animaux ni la matière inerte ; il nous faut toujours le concours conscient ou inconscient d'un médium humain, parce qu'il nous faut l'union de fluides similaires, ce que nous ne trouvons ni dans les animaux, ni dans la matière brute.
M. Thiry, dit-il, a magnétisé son chien ; à quoi est-il arrivé ? Il l'a tué ; car ce malheureux animal est mort après être tombé dans une espèce d'atonie, de langueur, conséquence de sa magnétisation. En effet, en l'inondant d'un fluide puisé dans une essence supérieure à l'essence spéciale à sa nature, il l'a écrasé et a agi sur lui, quoique plus lentement, à la manière de la foudre. Donc, comme il n'y a nulle assimilation possible entre notre périsprit et l'enveloppe fluidique des animaux proprement dits, nous les écraserions instantanément en les médianimisant.
Ceci établi, je reconnais parfaitement que chez les animaux il existe des aptitudes diverses ; que certains sentiments, que certaines passions identiques aux passions et aux sentiments humains se développent en eux ; qu'ils sont sensibles et reconnaissants, vindicatifs et haineux, suivant que l'on agit bien ou mal avec eux. C'est que Dieu, qui ne fait rien d'incomplet, a donné aux animaux, compagnons ou serviteurs de l'homme, des qualités de sociabilité qui manquent entièrement aux animaux sauvages qui habitent les solitudes.
Pour me résumer : les faits médianimiques ne peuvent se manifester sans le concours conscient ou inconscient du médium ; et ce n'est que parmi les incarnés, Esprits comme nous, que nous pouvons rencontrer ceux qui peuvent nous servir de médiums. Quant à dresser des chiens, des oiseaux ou autres animaux pour faire tels ou tels exercices, c'est votre affaire et non la nôtre.
Éraste.
Remarque. A propos de la discussion qui eut lien dans la Société sur la médianimité des animaux, M. Allan Kardec dit qu'il a observé très attentivement les expériences qui ont été faites en ces derniers temps sur des oiseaux auxquels on attribuait la faculté médianimique, et il ajoute qu'il y a reconnu de la manière la moins contestable les procédés de la prestidigitation, c'est-à-dire des cartes forcées, mais employées avec assez d'adresse pour faire illusion sur des spectateurs qui se contentent de l'apparence sans scruter le fond. En effet, ces oiseaux font des choses que ni l'homme le plus intelligent, ni même le somnambule le plus lucide ne pourraient faire, d'où il faudrait conclure qu'ils possèdent des facultés intellectuelles supérieures à l'homme, ce qui serait contraire aux lois de la nature. Ce qu'il faut le plus admirer dans ces expériences, c'est l'art, la patience qu'il a fallu déployer pour dresser ces animaux, les rendre dociles et attentifs ; pour obtenir ces résultats, il a certainement fallu avoir affaire à des natures flexibles, mais ce ne peut être en définitive que des animaux dressés, chez qui il y a plus d'habitude que de combinaisons ; et la preuve en est, c'est que si on cesse de les exercer pendant quelque temps, ils perdent bientôt ce qu'ils ont appris. Le charme de ces expériences, comme celui de tous les tours de prestidigitation, est dans le secret des procédés ; une fois le procédé connu, elles perdent tout leur attrait ; c'est ce qui est arrivé quand les saltimbanques ont voulu imiter la lucidité somnambulique par le prétendu phénomène de ce qu'ils appelaient la double vue. Il ne pouvait y avoir d'illusion pour quiconque connaissait les conditions normales du somnambulisme ; il en est de même de la prétendue médianimité des oiseaux dont tout observateur expérimenté peut facilement se rendre compte.
Peuples, faites silence ! (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux, médium madame Cazemajoux.)
I
Où courent ces enfants revêtus de robes blanches ? la joie illumine leurs cœurs ; leur essaim folâtre va s'ébattre dans les vertes prairies où ils feront une ample moisson de fleurs et poursuivront l'insecte brillant qui se nourrit dans leurs calices. Insouciants et heureux, ils ne voient pas plus loin que l'horizon bleu qui les entoure ; leur chute sera terrible, si vous ne vous hâtez de disposer leurs cœurs aux enseignements spirites ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
II
Ils sont devenus grands et forts ; la mâle beauté des uns, la grâce et l'abandon des autres font revivre dans le cœur des pères les doux souvenirs d'une époque déjà éloignée d'eux, mais le sourire qui allait s'épanouir sur leurs lèvres flétries disparaît pour faire place aux sombres soucis. C'est qu'eux aussi, ils ont bu à longs traits dans la coupe enchantée des illusions de la jeunesse, et son poison subtil a appauvri leur sang, énervé leurs forces, vieilli leurs visages, dégarni leurs fronts, et ils voudraient empêcher leurs fils de goûter à cette coupe empoisonnée. Frères ! le Spiritisme sera l'antidote qui doit préserver la nouvelle génération de ses mortels ravages ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
III
Ils ont atteint l'âge de la virilité ; ils sont devenus hommes ; ils sont sérieux et graves, mais ils ne sont pas heureux ; leur cœur est blasé et n'a qu'une fibre sensible : celle de l'ambition. Ils emploient tout ce qu'ils ont de force et d'énergie à acquérir des biens terrestres. Pour eux, pas de bonheur sans les dignités, les honneurs, la fortune. Insensés ! D'un instant à l'autre, l'ange de la délivrance va vous frapper ; vous serez forcés d'abandonner toutes ces chimères ; vous êtes des proscrits que Dieu peut rappeler d'un instant à l'autre dans la mère patrie. Ne bâtissez ni palais ni monuments ; une tente, des vêtements et du pain, voilà le nécessaire. Contentez-vous de cela, et avec votre superflu donnez à vos frères qui en manquent : l'abri, le vêtement et le pain. Le Spiritisme vient vous dire que les véritables trésors que vous devez acquérir sont l'amour de Dieu et du prochain ; ils vous feront riches pour l'éternité ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
IV
Ils ont leurs fronts penchés sur le bord du sépulcre ; ils ont peur et voudraient relever la tête, mais le temps a voûté leurs épaules, raidi leurs nerfs et leurs muscles, et ils sont impuissants à regarder en haut. Ah ! quelles angoisses viennent les assaillir ! Ils repassent dans le secret de leur âme leur vie inutile et souvent criminelle ; le remords les ronge comme un vautour affamé ; c'est qu'ils ont souvent, dans le cours de cette existence écoulée dans l'indifférence, nié leur Dieu, et il leur apparaît au bord de la tombe, vengeur inexorable. Ne craignez pas, Frères, et priez. Si dans sa justice, Dieu vous châtie, il fera grâce à votre repentir, car le Spiritisme vient vous dire que l'éternité des peines n'existe pas, et que vous renaissez pour vous purifier et expier. Aussi, vous qui êtes fatigués de votre exil sur la terre, faites tous vos efforts pour vous améliorer afin de n'y plus revenir ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
Byron.
Où courent ces enfants revêtus de robes blanches ? la joie illumine leurs cœurs ; leur essaim folâtre va s'ébattre dans les vertes prairies où ils feront une ample moisson de fleurs et poursuivront l'insecte brillant qui se nourrit dans leurs calices. Insouciants et heureux, ils ne voient pas plus loin que l'horizon bleu qui les entoure ; leur chute sera terrible, si vous ne vous hâtez de disposer leurs cœurs aux enseignements spirites ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
II
Ils sont devenus grands et forts ; la mâle beauté des uns, la grâce et l'abandon des autres font revivre dans le cœur des pères les doux souvenirs d'une époque déjà éloignée d'eux, mais le sourire qui allait s'épanouir sur leurs lèvres flétries disparaît pour faire place aux sombres soucis. C'est qu'eux aussi, ils ont bu à longs traits dans la coupe enchantée des illusions de la jeunesse, et son poison subtil a appauvri leur sang, énervé leurs forces, vieilli leurs visages, dégarni leurs fronts, et ils voudraient empêcher leurs fils de goûter à cette coupe empoisonnée. Frères ! le Spiritisme sera l'antidote qui doit préserver la nouvelle génération de ses mortels ravages ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
III
Ils ont atteint l'âge de la virilité ; ils sont devenus hommes ; ils sont sérieux et graves, mais ils ne sont pas heureux ; leur cœur est blasé et n'a qu'une fibre sensible : celle de l'ambition. Ils emploient tout ce qu'ils ont de force et d'énergie à acquérir des biens terrestres. Pour eux, pas de bonheur sans les dignités, les honneurs, la fortune. Insensés ! D'un instant à l'autre, l'ange de la délivrance va vous frapper ; vous serez forcés d'abandonner toutes ces chimères ; vous êtes des proscrits que Dieu peut rappeler d'un instant à l'autre dans la mère patrie. Ne bâtissez ni palais ni monuments ; une tente, des vêtements et du pain, voilà le nécessaire. Contentez-vous de cela, et avec votre superflu donnez à vos frères qui en manquent : l'abri, le vêtement et le pain. Le Spiritisme vient vous dire que les véritables trésors que vous devez acquérir sont l'amour de Dieu et du prochain ; ils vous feront riches pour l'éternité ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
IV
Ils ont leurs fronts penchés sur le bord du sépulcre ; ils ont peur et voudraient relever la tête, mais le temps a voûté leurs épaules, raidi leurs nerfs et leurs muscles, et ils sont impuissants à regarder en haut. Ah ! quelles angoisses viennent les assaillir ! Ils repassent dans le secret de leur âme leur vie inutile et souvent criminelle ; le remords les ronge comme un vautour affamé ; c'est qu'ils ont souvent, dans le cours de cette existence écoulée dans l'indifférence, nié leur Dieu, et il leur apparaît au bord de la tombe, vengeur inexorable. Ne craignez pas, Frères, et priez. Si dans sa justice, Dieu vous châtie, il fera grâce à votre repentir, car le Spiritisme vient vous dire que l'éternité des peines n'existe pas, et que vous renaissez pour vous purifier et expier. Aussi, vous qui êtes fatigués de votre exil sur la terre, faites tous vos efforts pour vous améliorer afin de n'y plus revenir ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
Byron.
Jean-Jacques Rousseau (Méd. Madame Costel.)
Nota. Le médium était occupé de choses très étrangères au Spiritisme ;
il se disposait à écrire pour des affaires personnelles, lorsqu'une
force invisible le contraignit d'écrire ce qui suit, malgré son désir de
poursuivre le travail commencé. C'est ce qui explique le début de la
communication :
« Me voici, quoique tu ne m'appelles pas. Je viens te parler de choses très étrangères à tes préoccupations. Je suis l'Esprit de Jean-Jacques Rousseau. J'attendais depuis longtemps l'occasion de me communiquer à toi. Ecoute donc.
« Je pense que le Spiritisme est une étude toute philosophique des causes secrètes des mouvements intérieurs de l'âme peu ou point définis jusqu'ici. Il explique, plus encore qu'il ne découvre, des horizons nouveaux. La réincarnation et les épreuves subies avant d'arriver au but suprême, ne sont pas des révélations, mais une confirmation importante. Je suis frappé des vérités que ce moyen met en lumière. Je dis moyen avec intention, car, à mon sens, le Spiritisme est un levier qui écarte les barrières de l'aveuglement. La préoccupation des questions morales est tout entière à créer ; on discute la politique qui remue les intérêts généraux ; on discute les intérêts privés ; on se passionne pour l'attaque ou la défense des personnalités ; les systèmes ont leurs partisans et leurs détracteurs ; mais les vérités morales, celles qui sont le pain de l'âme, le pain de vie, sont laissées dans la poussière accumulée par les siècles. Tous les perfectionnements sont utiles aux yeux de la foule, sauf celui de l'âme ; son éducation, son élévation sont des chimères bonnes tout au plus pour occuper les loisirs des prêtres, des poètes, des femmes, soit à l'état de mode, soit à l'état d'enseignement.
« Si le Spiritisme ressuscite le Spiritualisme, il rendra à la société l'élan qui donne aux uns la dignité intérieure, aux autres la résignation, à tous le besoin de s'élever vers l'Être suprême oublié et méconnu par ses ingrates créatures.
« J.-J. Rousseau. »
« Me voici, quoique tu ne m'appelles pas. Je viens te parler de choses très étrangères à tes préoccupations. Je suis l'Esprit de Jean-Jacques Rousseau. J'attendais depuis longtemps l'occasion de me communiquer à toi. Ecoute donc.
« Je pense que le Spiritisme est une étude toute philosophique des causes secrètes des mouvements intérieurs de l'âme peu ou point définis jusqu'ici. Il explique, plus encore qu'il ne découvre, des horizons nouveaux. La réincarnation et les épreuves subies avant d'arriver au but suprême, ne sont pas des révélations, mais une confirmation importante. Je suis frappé des vérités que ce moyen met en lumière. Je dis moyen avec intention, car, à mon sens, le Spiritisme est un levier qui écarte les barrières de l'aveuglement. La préoccupation des questions morales est tout entière à créer ; on discute la politique qui remue les intérêts généraux ; on discute les intérêts privés ; on se passionne pour l'attaque ou la défense des personnalités ; les systèmes ont leurs partisans et leurs détracteurs ; mais les vérités morales, celles qui sont le pain de l'âme, le pain de vie, sont laissées dans la poussière accumulée par les siècles. Tous les perfectionnements sont utiles aux yeux de la foule, sauf celui de l'âme ; son éducation, son élévation sont des chimères bonnes tout au plus pour occuper les loisirs des prêtres, des poètes, des femmes, soit à l'état de mode, soit à l'état d'enseignement.
« Si le Spiritisme ressuscite le Spiritualisme, il rendra à la société l'élan qui donne aux uns la dignité intérieure, aux autres la résignation, à tous le besoin de s'élever vers l'Être suprême oublié et méconnu par ses ingrates créatures.
« J.-J. Rousseau. »
La Controverse (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux.)
O Dieu ! mon maître, mon père et mon créateur, daignez donner encore à
votre serviteur un peu de cette éloquence humaine qui portait la
conviction dans le cœur des Frères qui venaient, autour de la chaire
sacrée, s'instruire des vérités que vous leur avez enseignées.
Dieu, en vous envoyant ses Esprits pour vous enseigner vos véritables devoirs envers lui et envers vos frères, veut surtout que la charité soit votre mobile dans toutes vos actions, et vos frères qui veulent faire renaître ces jours de deuil sont dans la voie de l'orgueil. Ce temps est loin de vous, et Dieu soit à jamais béni d'avoir permis que les hommes cessassent pour toujours ces disputes religieuses qui n'ont jamais produit aucun bien et qui ont causé tant de mal. Pourquoi vouloir discuter les textes évangéliques que vous avez déjà commentés de tant de manières ? Ces divers commentaires ont eu lieu alors que vous n'aviez pas le Spiritisme pour vous éclairer, et il vous dit : La morale évangélique est la meilleure, et suivez-la ; mais si, dans le fond de votre conscience, une voix vous crie : Pour moi il y a tel ou tel point obscur, et je ne puis me permettre de penser différemment que mes autres frères ! Héloïm ! mon frère, laissez de côté ce ni est trouble pour vous ; aimez Dieu et la charité, et vous serez dans la bonne voie. A quoi a servi le fruit de mes longues veilles quand je vivais dans votre monde ? à rien. Beaucoup n'ont pas jeté les yeux sur mes écrits qui n'étaient pas dictés par la charité et qui ont attiré des persécutions à mes frères. La controverse est toujours animée d'un sentiment d'intolérance qui peut dégénérer jusqu'à l'offense, et l'entêtement que chacun met à soutenir ses prétentions éloigne l'époque où la grande famille humaine, reconnaissant ses erreurs passées, respectera toutes les croyances et n'aiguisera pas elle-même le poignard qui avait tranché ces liens fraternels. Et pour vous donner un exemple de ce que je vous dis, ouvrez l'Évangile, et vous y trouverez ces paroles : « Je suis la vérité et la vie ; celui-là seul qui croira en moi vivra. » Et beaucoup d'entre vous condamnent ceux qui ne suivent pas la religion qui possède les enseignements du Verbe incarné ; pourtant, beaucoup sont assis à la droite du Seigneur, parce que, dans la droiture de leurs coeurs, ils l'ont adoré, aimé ; qu'ils ont respecté les croyances de leurs frères et qu'ils ont crié vers le Seigneur quand ils ont vu les peuples se déchirer entre eux dans leurs luttes de religion, et qu'ils n'étaient pas aptes à trouver le véritable sens des paroles du Christ, et qu'ils n'étaient que les insruments aveugles de leurs prêtres ou de leurs ministres.
Mon Dieu, moi qui vivais dans ces temps où les cœurs étaient gros de tempêtes pour les frères d'une croyance opposée, si j'avais été plus tolérant, si je n'avais pas condamné dans mes écrits leur manière d'interpréter l'Évangile, ils seraient aujourd'hui moins irrités contre leurs frères catholiques, et tous auraient fait un pas plus grand vers la fraternité universelle ; mais les Protestants, les Juifs, toutes les religions un peu marquantes, ont leurs savants et leurs docteurs, et quand le Spiritisme, plus répandu, sera étudié de bonne foi par ces hommes instruits, ils viendront, comme l'ont fait les Catholiques, donner la lumière à leurs frères et calmer leurs scrupules religieux. Laissez donc Dieu poursuivre l'œuvre de la réforme morale qui doit vous élever vers lui, tous au même degré, et ne soyez pas rebelles aux enseignements des Esprits qu'ils vous envoie.
Bossuet.
Dieu, en vous envoyant ses Esprits pour vous enseigner vos véritables devoirs envers lui et envers vos frères, veut surtout que la charité soit votre mobile dans toutes vos actions, et vos frères qui veulent faire renaître ces jours de deuil sont dans la voie de l'orgueil. Ce temps est loin de vous, et Dieu soit à jamais béni d'avoir permis que les hommes cessassent pour toujours ces disputes religieuses qui n'ont jamais produit aucun bien et qui ont causé tant de mal. Pourquoi vouloir discuter les textes évangéliques que vous avez déjà commentés de tant de manières ? Ces divers commentaires ont eu lieu alors que vous n'aviez pas le Spiritisme pour vous éclairer, et il vous dit : La morale évangélique est la meilleure, et suivez-la ; mais si, dans le fond de votre conscience, une voix vous crie : Pour moi il y a tel ou tel point obscur, et je ne puis me permettre de penser différemment que mes autres frères ! Héloïm ! mon frère, laissez de côté ce ni est trouble pour vous ; aimez Dieu et la charité, et vous serez dans la bonne voie. A quoi a servi le fruit de mes longues veilles quand je vivais dans votre monde ? à rien. Beaucoup n'ont pas jeté les yeux sur mes écrits qui n'étaient pas dictés par la charité et qui ont attiré des persécutions à mes frères. La controverse est toujours animée d'un sentiment d'intolérance qui peut dégénérer jusqu'à l'offense, et l'entêtement que chacun met à soutenir ses prétentions éloigne l'époque où la grande famille humaine, reconnaissant ses erreurs passées, respectera toutes les croyances et n'aiguisera pas elle-même le poignard qui avait tranché ces liens fraternels. Et pour vous donner un exemple de ce que je vous dis, ouvrez l'Évangile, et vous y trouverez ces paroles : « Je suis la vérité et la vie ; celui-là seul qui croira en moi vivra. » Et beaucoup d'entre vous condamnent ceux qui ne suivent pas la religion qui possède les enseignements du Verbe incarné ; pourtant, beaucoup sont assis à la droite du Seigneur, parce que, dans la droiture de leurs coeurs, ils l'ont adoré, aimé ; qu'ils ont respecté les croyances de leurs frères et qu'ils ont crié vers le Seigneur quand ils ont vu les peuples se déchirer entre eux dans leurs luttes de religion, et qu'ils n'étaient pas aptes à trouver le véritable sens des paroles du Christ, et qu'ils n'étaient que les insruments aveugles de leurs prêtres ou de leurs ministres.
Mon Dieu, moi qui vivais dans ces temps où les cœurs étaient gros de tempêtes pour les frères d'une croyance opposée, si j'avais été plus tolérant, si je n'avais pas condamné dans mes écrits leur manière d'interpréter l'Évangile, ils seraient aujourd'hui moins irrités contre leurs frères catholiques, et tous auraient fait un pas plus grand vers la fraternité universelle ; mais les Protestants, les Juifs, toutes les religions un peu marquantes, ont leurs savants et leurs docteurs, et quand le Spiritisme, plus répandu, sera étudié de bonne foi par ces hommes instruits, ils viendront, comme l'ont fait les Catholiques, donner la lumière à leurs frères et calmer leurs scrupules religieux. Laissez donc Dieu poursuivre l'œuvre de la réforme morale qui doit vous élever vers lui, tous au même degré, et ne soyez pas rebelles aux enseignements des Esprits qu'ils vous envoie.
Bossuet.
Le Paupérisme (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux.)
C'est en vain que les philanthropes de votre terre rêvent des choses
qu'ils ne verront jamais se réaliser. Rappelez-vous cette parole du
Christ : « Vous aurez toujours des pauvres parmi vous, » et vous savez
que ses paroles sont des paroles de vérité. N'est-ce pas, mon ami, qu'à
présent que vous connaissez le Spiritisme, vous trouvez juste et
équitable cette inégalité des conditions qui vous soulevait le cœur,
gros de murmures contre ce Dieu qui n'avait pas fait tous les hommes
également riches et heureux ? Eh bien ! maintenant que vous pensez que
Dieu fait bien tout ce qu'il fait, et que vous savez que la pauvreté est
un châtiment ou une épreuve, cherchez à la soulager, mais ne venez pas,
par des utopies, faire rêver au malheureux une égalité impossible.
Certes que, par une sage organisation sociale, on peut alléger bien des
souffrances, et c'est à quoi il faut viser ; mais prétendre les faire
toutes disparaître de dessus la surface de la terre est une idée
chimérique. La terre étant un lieu d'expiation, il y aura toujours des
pauvres qui expient dans cette épreuve l'abus qu'ils ont fait des biens
dont Dieu les avait fait les dispensateurs et qui n'ont jamais connu la
douceur de faire du bien à leurs frères ; qui ont thésaurisé pièce à
pièce pour amasser des richesses inutiles à eux-mêmes et aux autres ;
qui se sont enrichis des dépouilles de la veuve et de l'orphelin. Oh !
ceux-là sont bien coupables, et leur égoïsme aura un terrible retour !
Gardez-vous cependant de voir dans tous les pauvres des coupables en punition ; si la pauvreté est pour quelques-uns une expiation sévère, pour d'autres c'est une épreuve qui doit leur ouvrir plus promptement le sanctuaire des élus. Oui, il y aura toujours des pauvres et des riches, pour que les uns aient le mérite de la résignation, et les autres celui de la charité et du dévouement. Que vous soyez riches ou pauvres, vous êtes sur un terrain glissant qui peut vous précipiter dans l'abîme, et sur la pente duquel vos vertus seules peuvent vous retenir.
Quand je dis qu'il y aura toujours des pauvres sur la terre, je veux dire tant qu'il y aura des vices qui en feront un lieu d'expiation pour les Esprits pervers que Dieu y envoie s'incarner pour leur propre châtiment et celui des vivants. Méritez par vos vertus, que Dieu ne vous envoie que de bons Esprits, et d'un enfer vous ferez un paradis terrestre.
Adolphe, évêque d'Alger.
Gardez-vous cependant de voir dans tous les pauvres des coupables en punition ; si la pauvreté est pour quelques-uns une expiation sévère, pour d'autres c'est une épreuve qui doit leur ouvrir plus promptement le sanctuaire des élus. Oui, il y aura toujours des pauvres et des riches, pour que les uns aient le mérite de la résignation, et les autres celui de la charité et du dévouement. Que vous soyez riches ou pauvres, vous êtes sur un terrain glissant qui peut vous précipiter dans l'abîme, et sur la pente duquel vos vertus seules peuvent vous retenir.
Quand je dis qu'il y aura toujours des pauvres sur la terre, je veux dire tant qu'il y aura des vices qui en feront un lieu d'expiation pour les Esprits pervers que Dieu y envoie s'incarner pour leur propre châtiment et celui des vivants. Méritez par vos vertus, que Dieu ne vous envoie que de bons Esprits, et d'un enfer vous ferez un paradis terrestre.
Adolphe, évêque d'Alger.
La Concorde (Envoi de M. Rodolphe, de Mulhouse.)
Soyez unis, mes amis, c'est l'union qui fait la force. Proscrivez de vos
réunions tout esprit de discorde, tout esprit de jalousie. N'enviez pas
les communications que reçoit tel ou tel médium, chacun en reçoit
suivant la disposition de son esprit et la perfection de ses organes.
N'oubliez jamais que vous êtes frères, et cette fraternité n'est pas illusoire : c'est une fraternité réelle ; car celui qui a été votre frère dans une autre existence peut se trouver parmi vous, appartenant à une autre famille.
Soyez donc unis d'esprit et de cœur ; ayez la même communion de pensées. Soyez dignes de vous-mêmes, de la doctrine que vous professez et des enseignements que vous êtes appelés à répandre.
Soyez donc conciliants dans vos opinions ; n'en ayez pas d'absolues ; cherchez à vous éclairer les uns par les autres. Soyez à la hauteur de votre apostolat, et donnez au monde l'exemple de la bonne harmonie.
Soyez l'exemple vivant de la fraternité humaine, et montrez à quoi peuvent arriver des hommes sincèrement dévoués à la propagation de la morale.
N'ayant qu'un seul but, vous ne devez avoir qu'une même pensée, celle de mettre en pratique ce que vous enseignez. Que votre devise soit donc : Union et concorde, Paix et fraternité !
Mardochée
N'oubliez jamais que vous êtes frères, et cette fraternité n'est pas illusoire : c'est une fraternité réelle ; car celui qui a été votre frère dans une autre existence peut se trouver parmi vous, appartenant à une autre famille.
Soyez donc unis d'esprit et de cœur ; ayez la même communion de pensées. Soyez dignes de vous-mêmes, de la doctrine que vous professez et des enseignements que vous êtes appelés à répandre.
Soyez donc conciliants dans vos opinions ; n'en ayez pas d'absolues ; cherchez à vous éclairer les uns par les autres. Soyez à la hauteur de votre apostolat, et donnez au monde l'exemple de la bonne harmonie.
Soyez l'exemple vivant de la fraternité humaine, et montrez à quoi peuvent arriver des hommes sincèrement dévoués à la propagation de la morale.
N'ayant qu'un seul but, vous ne devez avoir qu'une même pensée, celle de mettre en pratique ce que vous enseignez. Que votre devise soit donc : Union et concorde, Paix et fraternité !
Mardochée
L'aurore des nouveaux jours
(Société spirite de Paris. Médium Madame Costel.)
Me voici, moi que vous n'évoquez pas, mais qui suis désireuse d'être utile à mon tour à une Société dont le but est aussi sérieux que l'est le vôtre. Je vous parlerai de politique. Ne vous effrayez pas : je sais dans quelles limites je dois me renfermer.
La situation actuelle de l'Europe offre l'aspect le plus saisissant pour l'observateur ; à aucune époque, je n'en excepte pas même la fin du dernier siècle qui a opéré une si large trouée dans les préjugés et les abus qui comprimaient l'esprit humain ; à aucune époque, dis-je, le mouvement intellectuel ne s'est fait sentir plus hardi, plus franc. Je dis franc, car l'esprit européen marche dans le vrai. La liberté n'est plus un fantôme sanglant, mais la belle et grande déesse de la prospérité publique. En Allemagne même, dans cette Allemagne que j'ai décrite avec tant d'amour, le souffle ardent de l'époque abat les dernières forteresses des préjugés. Soyez heureux, vous qui vivez dans un tel moment ; mais plus heureux encore seront vos descendants ; car l'heure approche, l'heure annoncée par le Précurseur ; vous voyez blanchir l'horizon, mais, comme jadis les Hébreux, vous resterez au seuil de la Terre Promise, et vous ne verrez pas se lever le soleil radieux des nouveaux jours.
Staël
Allan Kardec
Me voici, moi que vous n'évoquez pas, mais qui suis désireuse d'être utile à mon tour à une Société dont le but est aussi sérieux que l'est le vôtre. Je vous parlerai de politique. Ne vous effrayez pas : je sais dans quelles limites je dois me renfermer.
La situation actuelle de l'Europe offre l'aspect le plus saisissant pour l'observateur ; à aucune époque, je n'en excepte pas même la fin du dernier siècle qui a opéré une si large trouée dans les préjugés et les abus qui comprimaient l'esprit humain ; à aucune époque, dis-je, le mouvement intellectuel ne s'est fait sentir plus hardi, plus franc. Je dis franc, car l'esprit européen marche dans le vrai. La liberté n'est plus un fantôme sanglant, mais la belle et grande déesse de la prospérité publique. En Allemagne même, dans cette Allemagne que j'ai décrite avec tant d'amour, le souffle ardent de l'époque abat les dernières forteresses des préjugés. Soyez heureux, vous qui vivez dans un tel moment ; mais plus heureux encore seront vos descendants ; car l'heure approche, l'heure annoncée par le Précurseur ; vous voyez blanchir l'horizon, mais, comme jadis les Hébreux, vous resterez au seuil de la Terre Promise, et vous ne verrez pas se lever le soleil radieux des nouveaux jours.
Staël
Allan Kardec