1. Je prie Dieu tout-puissant de permettre à l'assassin Lemaire, exécuté le 31 décembre 1857, de venir parmi nous. -
Rép. Je suis là.
2. Comment se fait-il que tu sois venu si promptement à notre appel ?
- Rép. Rachel l'a dit
[1].
3. Quel sentiment éprouves-tu à notre vue ? -
Rép. La honte.
4. Comment une jeune fille, douce comme un agneau, peut-elle servir d'intermédiaire à un être sanguinaire comme toi ? -
Rép. Dieu l'a permis.
5. As-tu conservé toute ta connaissance jusqu'au dernier moment ?
Rép. Oui.
6. Et immédiatement après ton exécution, as-tu eu la conscience de ta nouvelle existence ? -
Rép. J'étais plongé dans un trouble immense dont je ne suis pas encore sorti. J'ai senti une immense douleur ; il m'a semblé que mon coeur la souffrait. J'ai vu je ne sais quoi rouler au pied de l'échafaud ; j'ai vu du sang couler, et ma douleur n'en est devenue que plus poignante.
7. Etait-ce une douleur purement physique, analogue à celle qui serait causée par une grave blessure : par l'amputation d'un membre, par exemple ? -
Rép. Non ; figure-toi un remords, une grande douleur morale.
8. Quand as-tu commencé à ressentir cette douleur ? -
Rép. Dès que j'ai été libre.
9. La douleur physique causée par le supplice était-elle ressentie par le corps ou par l'Esprit ? -
Rép. La douleur morale était dans mon esprit ; le corps a ressenti la douleur physique ; mais l'Esprit séparé s'en ressentait encore.
10. As-tu vu ton corps mutilé ?
- Rép. J'ai vu je ne sais quoi d'informe qu'il me semblait n'avoir pas quitté ; cependant je me sentais encore entier : j'étais moi-même.
11. Quelle impression cette vue a-t-elle faite sur toi ? -
Rép. Je sentais trop ma douleur ; j'étais perdu en elle.
12. Est-il vrai que le corps vive encore quelques instants après la décapitation, et que le supplicié ait la conscience de ses idées ? -
Rép. L'Esprit se retire peu à peu ; plus les liens de la matière l'enlacent, moins la séparation est prompte.
13. Combien de temps cela dure-t-il ? -
Rép. Plus ou moins. (Voir la réponse précédente.)
14. On dit avoir remarqué sur la figure de certains suppliciés l'expression de la colère, et des mouvements comme s'ils voulaient parler ; est-ce l'effet d'une contraction nerveuse, ou bien la volonté y avait-elle part ? -
Rép. La volonté ; car l'Esprit ne s'en était pas encore retiré.
15. Quel est le premier sentiment que tu as éprouvé en entrant dans ta nouvelle existence ? -
Rép. Une intolérable souffrance ; une sorte de remords poignant dont j'ignorais la cause.
16. T'es-tu trouvé réuni à tes complices exécutés en même temps que toi ? -
Rép. Pour notre malheur ; notre vue est un supplice continuel ; chacun de nous reproche à l'autre son crime.
17. Rencontres-tu tes victimes ? -
Rép. Je les vois... elles sont heureuses... leur regard me poursuit... je le sens qui plonge jusqu'au fond de mon être... en vain je veux le fuir.
18. Quel sentiment éprouves-tu à leur vue ? -
Rép. La honte et le remords. Je les ai élevées de mes propres mains, et je les hais encore.
19. Quel sentiment éprouvent-elles à ta vue ? -
Rép. La pitié !
20. Ont-elles de la haine et le désir de la vengeance ? -
Rép. Non ; leurs voeux appellent pour moi l'expiation. Vous ne sauriez sentir quel horrible supplice de tout devoir à qui l'on hait.
21. Regrettes-tu la vie terrestre ? -
Rép. Je ne regrette que mes crimes ; si l'événement était encore dans mes mains, je ne succomberais plus.
22. Comment as-tu été conduit à la vie criminelle que tu as menée ? -
Rép. Ecoute ! Je me suis cru fort ; j'ai choisi une rude épreuve ; j'ai cédé aux tentations du mal.
23. Le penchant au crime était-il dans ta nature, ou bien as-tu été entraîné par le milieu dans lequel tu as vécu ?
- Rép. Le penchant au crime était dans ma nature, car je n'étais qu'un Esprit inférieur. J'ai voulu m'élever promptement, mais j'ai demandé plus que mes forces.
24. Si tu avais reçu de bons principes d'éducation, aurais-tu pu être détourné de la vie criminelle ? -
Rép. Oui ; mais j'ai choisi la position où je suis né.
25. Aurais-tu pu faire un homme de bien ? -
Rép. Un homme faible, incapable du bien comme du mal. Je pouvais paralyser le mal de ma nature pendant mon existence, mais je ne pouvais m'élever jusqu'à faire le bien.
26. De ton vivant croyais-tu en Dieu ? -
Rép. Non.
27. On dit qu'au moment de mourir tu t'es repenti ; est-ce vrai ? -
Rép. J'ai cru à un Dieu vengeur... j'ai eu peur de sa justice.
28. En ce moment ton repentir est-il plus sincère ?
- Rép. Hélas ! je vois ce que j'ai fait.
29. Que penses-tu de Dieu maintenant ? -
Rép. Je le sens et ne le comprends pas.
30. Trouves-tu juste le châtiment qui t'a été infligé sur la terre ? -
Rép. Oui.
31. Espères-tu obtenir le pardon de tes crimes ? -
Rép. Je ne sais.
32. Comment espères-tu racheter tes crimes ? -
Rép. Par de nouvelles épreuves ; mais il me semble que l'Eternité est entre elles et moi.
33. Ces épreuves s'accompliront-elles sur la terre ou dans un autre monde ? -
Rép. Je ne sais pas.
34. Comment pourras-tu expier tes fautes passées dans une nouvelle existence si tu n'en as pas le souvenir ? -
Rép. J'en aurai la prescience.
35. Où es-tu maintenant ? -
Rép. Je suis dans ma souffrance.
36. Je demande dans quel lieu tu es ? -
Rép. Près d'Ermance.
37. Es-tu réincarné ou errant ? -
Rép. Errant ; si j'étais réincarné, j'aurais l'espoir. J'ai dit : l'Eternité me semble entre l'expiation et moi.
38. Puisque tu es ici, si nous pouvions te voir, sous quelle forme nous apparaîtrais-tu ? -
Rép. Sous ma forme corporelle, ma tête séparée du tronc.
39. Pourrais-tu nous apparaître ? -
Rép. Non ; laissez-moi.
40. Voudrais-tu nous dire comment tu t'es évadé de la prison de Montdidier ? -
Rép. Je ne sais plus... Ma souffrance est si grande que je n'ai plus que le souvenir du crime... Laissez-moi.
41. Pourrions-nous apporter quelque soulagement à tes souffrances ? -
Rép. Faites des voeux pour que l'expiation arrive.
La reine d'OudeNota. - Dans ces entretiens, nous supprimerons dorénavant la formule d'évocation, qui est toujours la même, à moins qu'elle ne présente, par la réponse, quelque particularité.
1. Quelle sensation avez-vous éprouvée en quittant la vie terrestre ? -
Rép. Je ne saurais le dire ; j'éprouve encore du trouble.
2. Etes-vous heureuse ? -
Rép. Non.
3. Pourquoi n'êtes-vous pas heureuse ? -
Rép. Je regrette la vie... je ne sais... j'éprouve une poignante douleur ; la vie m'en aurait délivrée... je voudrais que mon corps se levât de son sépulcre.
4. Regrettez-vous de n'avoir pas été ensevelie dans votre pays et de l'être parmi des chrétiens ? -
Rép. Oui ; la terre indienne pèserait moins sur mon corps.
5. Que pensez-vous des honneurs funèbres rendus à votre dépouille ?
- Rép. Ils ont été bien peu de chose ; j'étais reine, et tous n'ont pas ployé les genoux devant moi... Laissez-moi... On me force à parler... Je ne veux pas que vous sachiez ce que je suis maintenant... J'ai été reine, sachez-le bien.
6. Nous respectons votre rang, et nous vous prions de nous répondre pour notre instruction.
Pensez-vous que votre fils recouvrera un jour les Etats de son père ? -
Rép. Certes mon sang régnera ; il en est digne.
7. Attachez-vous à la réintégration de votre fils sur le trône d'Oude la même importance que de votre vivant ? -
Rép. Mon sang ne peut être confondu dans la foule.
8. Quelle est votre opinion actuelle sur la véritable cause de la révolte des Indes ? -
Rép. L'Indien est fait pour être maître chez lui.
9. Que pensez-vous de l'avenir qui est réservé à ce pays ? -
Rép. L'Inde sera grande parmi les nations.
10. On n'a pu inscrire sur votre acte de décès le lieu de votre naissance ; pourriez-vous le dire maintenant ? -
Rép. Je suis née du plus noble sang de l'Inde. Je crois que je suis née à Delhy.
11. Vous qui avez vécu dans les splendeurs du luxe et qui avez été entourée d'honneurs, qu'en pensez-vous maintenant ? -
Rép. Ils m'étaient dus.
12. Le rang que vous avez occupé sur la terre vous en donne-t-il un plus élevé dans le monde où vous êtes aujourd'hui ? -
Rép. Je suis toujours reine... Qu'on m'envoie des esclaves pour me servir !... Je ne sais ; on ne semble pas se soucier de moi ici... Pourtant, je suis toujours moi.
13. Apparteniez-vous à la religion musulmane, ou à une religion hindoue ? -
Rép. Musulmane ; mais j'étais trop grande pour m'occuper de Dieu.
14. Quelle différence faites-vous entre la religion que vous professiez et la religion chrétienne, pour le bonheur à venir de l'homme ? -
Rép. La religion chrétienne est absurde ; elle dit que tous sont frères.
15. Quelle est votre opinion sur Mahomet ? -
Rép. Il n'était pas fils de roi.
16. Avait-il une mission divine ? -
Rép. Que m'importe cela !
17. Quelle est votre opinion sur le Christ ? -
Rép. Le fils du charpentier n'est pas digne d'occuper ma pensée.
18. Que pensez-vous de l'usage, qui soustrait les femmes musulmanes aux regards des hommes ? -
Rép. Je pense que les femmes sont faites pour dominer : moi, j'étais femme.
19. Avez-vous quelquefois envié la liberté dont jouissent les femmes en Europe ? -
Rép. Non ; que m'importait leur liberté ! les sert-on à genoux ?
20. Quelle est votre opinion sur la condition de la femme en général dans l'espèce humaine ? -
Rép. Que m'importent les femmes ! Si tu me parlais des reines !
21. Vous rappelez-vous avoir eu d'autres existences sur la terre avant celle que vous venez de quitter ? -
Rép. J'ai dû toujours être reine.
22. Pourquoi êtes-vous venue si promptement à notre appel ? -
Rép. Je ne l'ai pas voulu ; on m'y a forcée... Penses-tu donc que j'eusse daigné répondre ? Qu'êtes-vous donc près de moi ?
23. Qui vous a forcée à venir ? -
Rép. Je ne le sais pas... Cependant, il ne doit pas y en avoir de plus grand que moi.
24. Dans quel endroit êtes-vous ici ? -
Rép. Près d'Ermance.
25. Sous quelle forme y êtes-vous ? -
Rép. Je suis toujours reine... Penses-tu donc que j'aie cessé de l'être ? Vous êtes peu respectueux... Sachez que l'on parle autrement à des reines.
26. Pourquoi ne pouvons-nous pas vous voir ? -
Rép. Je ne le veux pas.
27. Si nous pouvions nous voir, est-ce que nous vous verrions avec vos vêtements, vos parures et vos bijoux ? -
Rép. Certes !
28. Comment se fait-il qu'ayant quitté tout cela, votre Esprit en ait conservé l'apparence, surtout de vos parures ? -
Rép. Elles ne m'ont pas quittée... Je suis toujours aussi belle que j'étais... Je ne sais quelle idée vous vous faites de moi ! Il est vrai que vous ne m'avez jamais vue.
29. Quelle impression éprouvez-vous de vous trouver au milieu de nous ? -
Rép. Si je le pouvais, je n'y serais pas : vous me traitez avec si peu de respect ! Je ne veux pas que l'on me tutoie... Nommez-moi Majesté, ou je ne réponds plus.
30. Votre Majesté
comprenait-elle la langue française ? -
Rép. Pourquoi ne l'aurais-je pas comprise ? Je savais tout.
31. Votre Majesté voudrait-elle nous répondre en anglais ? -
Rép. Non... Ne me laisserez-vous donc pas tranquille ?... Je veux m'en aller... Laissez-moi... Me pensez-vous soumise à vos caprices ?... Je suis reine et ne suis pas esclave.
32. Nous vous prions seulement de vouloir bien répondre encore à deux ou trois questions.
Réponse de saint Louis, qui était présent : Laissez-la, la pauvre égarée ; ayez pitié de son aveuglement. Qu'elle vous serve d'exemple ! Vous ne savez pas combien souffre son orgueil.
Remarque. - Cet entretien offre plus d'un enseignement. En évoquant cette grandeur déchue, maintenant dans la tombe, nous n'espérions pas des réponses d'une grande profondeur, vu le genre d'éducation des femmes de ce pays ; mais nous pensions trouver en cet Esprit, sinon de la philosophie, du moins un sentiment plus vrai de la réalité, et des idées plus saines sur les vanités et les grandeurs d'ici-bas. Loin de là : chez lui les idées terrestres ont conservé toute leur force ; c'est l'orgueil qui n'a rien perdu de ses illusions, qui lutte contre sa propre faiblesse, et qui doit en effet bien souffrir de son impuissance. Dans la prévision de réponses d'une tout autre nature, nous avions préparé diverses questions qui sont devenues sans objet. Ces réponses sont si différentes de celles que nous attendions, ainsi que les personnes présentes, qu'on ne saurait y voir l'influence d'une pensée étrangère. Elles ont en outre un cachet de personnalité si caractérisé, qu'elles accusent clairement l'identité de l'Esprit qui s'est manifesté.
On pourrait s'étonner avec raison de voir Lemaire, homme dégradé et souillé de tous les crimes, manifester par son langage d'outre-tombe des sentiments qui dénotent une certaine élévation et une appréciation assez exacte de sa situation, tandis que chez la reine d'Oude, dont le rang qu'elle occupait aurait dû développer le sens moral, les idées terrestres n'ont subi aucune modification. La cause de cette anomalie nous paraît facile à expliquer. Lemaire, tout dégradé qu'il était, vivait au milieu d'une société civilisée et éclairée qui avait réagi sur sa nature grossière ; il avait absorbé à son insu quelques rayons de la lumière qui l'entourait, et cette lumière a dû faire naître en lui des pensées étouffées par son abjection, mais dont le germe n'en subsistait pas moins. Il en est tout autrement de la reine d'Oude : le milieu où elle a vécu, les habitudes, le défaut absolu de culture intellectuelle, tout a dû contribuer à maintenir dans toute leur force les idées dont elle était imbue dès l'enfance ; rien n'est venu modifier cette nature primitive, sur laquelle les préjugés ont conservé tout leur empire.
Le Docteur Xavier Sur diverses questions Psycho-Physiologiques.
Un médecin de grand talent, que nous désignerons sous le nom de Xavier, mort il y a quelques mois, et qui s'était beaucoup occupé de magnétisme, avait laissé un manuscrit destiné, pensait-il, à faire une révolution dans la science. Avant de mourir il avait lu le
Livre des Esprits et désiré se mettre en rapport avec l'auteur. La maladie à laquelle il a succombé ne lui en a pas laissé le temps. Son évocation a eu lieu sur la demande de sa famille, et les réponses, éminemment instructives, qu'elle renferme nous ont engagé à en insérer un extrait dans notre recueil, en supprimant tout ce qui est d'un intérêt privé.
1. Vous rappelez-vous le manuscrit que vous avez laissé ? -
Rép. J'y attache peu d'importance.
2. Quelle est votre opinion actuelle sur ce manuscrit ? -
Rép. Vaine oeuvre d'un être qui s'ignorait lui-même.
3. Vous pensiez cependant que cet ouvrage pourrait faire une révolution dans la science ? -
Rép. Je vois trop clair maintenant.
4. Pourriez-vous, comme Esprit, corriger et achever ce manuscrit ? -
Rép. Je suis parti d'un point que je connaissais mal ; peut-être faudrait-il tout refaire.
5. Etes-vous heureux ou malheureux ? -
Rép. J'attends et je souffre.
6. Qu'attendez-vous ? -
Rép. De nouvelles épreuves.
7. Quelle est la cause de vos souffrances ? -
Rép. Le mal que j'ai fait.
8. Vous n'avez cependant pas fait de mal avec intention ? -
Rép. Connais-tu bien le coeur de l'homme ?
9. Etes-vous errant ou incarné ? -
Rép. Errant.
10. Quel était, de votre vivant, votre opinion sur la Divinité ? -
Rép. Je n'y croyais pas.
11. Quelle est-elle maintenant ? -
Rép. Je n'y crois que trop.
12. Vous aviez le désir de vous mettre en rapport avec moi ; vous le rappelez-vous ? -
Rép. Oui.
13. Me voyez-vous et me reconnaissez-vous pour la personne avec qui vous vouliez entrer en relation ? -
Rép. Oui.
14. Quelle impression le
Livre des Esprits a-t-il faite sur vous ? -
Rép. Il m'a bouleversé.
15. Qu'en pensez-vous maintenant ? -
Rép. C'est une grande oeuvre.
16. Que pensez-vous de l'avenir de la doctrine spirite ? -
Rép. Il est grand, mais certains disciples la gâtent.
17. Quels sont ceux qui la gâtent ? -
Rép. Ceux qui attaquent ce qui existe : les religions, les premières et les plus simples croyances des hommes.
18. Comme médecin, et en raison des études que vous avez faites, vous pourrez sans doute répondre aux questions suivantes :
Le corps peut-il conserver quelques instants la vie organique après la séparation de l'âme ? -
Rép. Oui.
19. Combien de temps ?
- Rép. Il n'y a pas de temps.
20. Précisez votre réponse, je vous prie. -
Rép. Cela ne dure que quelques instants.
21. Comment s'opère la séparation de l'âme du corps ? -
Rép. Comme un fluide qui s'échappe d'un vase quelconque.
22. Y a-t-il une ligne de démarcation réellement tranchée entre la vie et la mort ? -
Rép. Ces deux états se touchent et se confondent ; ainsi l'Esprit se dégage peu à peu de ses liens ; il se dénoue et ne se brise pas.
23. Ce dégagement de l'âme s'opère-t-il plus promptement chez les uns que chez les autres ? -
Rép. Oui : ceux qui, de leur vivant, se sont déjà élevés au-dessus de la matière, car alors leur âme appartient plus au monde des Esprits qu'au monde terrestre.
24. A quel moment s'opère l'union de l'âme et du corps chez l'enfant ? -
Rép. Lorsque l'enfant respire ; comme s'il recevait l'âme avec l'air extérieur.
Remarque. Cette opinion est la conséquence du dogme catholique. En effet, l'Eglise enseigne que l'âme ne peut être sauvée que par le baptême ; or, comme la mort naturelle intra-utérine est très fréquente, que deviendrait cette âme privée, selon elle, de cet unique moyen de salut, si elle existait dans le corps avant la naissance ? Pour être conséquent, il faudrait que le baptême eût lieu, sinon de fait, du moins d'intention, dès l'instant de la conception.
25. Comment expliquez-vous alors la vie intra-utérine ? -
Rép. Comme la plante qui végète. L'enfant vit de sa vie animale.
26. Y a-t-il crime à priver un enfant de la vie avant sa naissance, puisque, avant cette époque, l'enfant n'ayant pas d'âme n'est point en quelque sorte un être humain ? -
Rép. La mère, ou tout autre commettra toujours un crime en ôtant la vie à l'enfant avant sa naissance, car c'est empêcher l'âme de supporter les épreuves dont le corps devait être l'instrument.
27. L'expiation qui devait être subie par l'âme empêchée de s'incarner aura-t-elle lieu néanmoins ? -
Rép. Oui, mais Dieu savait que l'âme ne s'unirait pas à ce corps ; ainsi aucune âme ne devait s'unir à cette enveloppe corporelle :
c'était l'épreuve de la mère. 28. Dans le cas où la vie de la mère serait en danger par la naissance de l'enfant, y a-t-il crime à sacrifier l'enfant pour sauver sa mère ? -
Rép. Non ; il faut sacrifier l'être qui n'existe pas à l'être qui existe.
29. L'union de l'âme et du corps s'opère-t-elle instantanément ou graduellement ; c'est-à-dire faut-il un temps appréciable pour que cette union soit complète ? -
Rép. L'Esprit n'entre pas brusquement dans le corps. Pour mesurer ce temps, imaginez-vous que le premier souffle que l'enfant reçoit est l'âme qui entre dans le corps : le temps que la poitrine se soulève et s'abaisse.
30. L'union d'une âme avec tel ou tel corps est-elle prédestinée, ou bien n'est-ce qu'au moment de la naissance que le choix se fait ? -
Rép. Dieu l'a marqué ; cette question demande de plus longs développements. L'Esprit en choisissant l'épreuve qu'il veut subir demande à s'incarner ; or Dieu, qui sait tout et voit tout, a su et vu d'avance que telle âme s'unirait à tel corps. Lorsque l'Esprit naît dans les basses classes de la société, il sait que sa vie ne sera que labeur et souffrances. L'enfant qui va naître a une existence qui résulte, jusqu'à un certain point, de la position de ses parents.
31. Pourquoi des parents bons et vertueux donnent-ils naissance à des enfants d'une nature perverse ? autrement dit, pourquoi les bonnes qualités des parents n'attirent-elles pas toujours, par sympathie, un bon Esprit pour animer leur enfant ? -
Rép. Un mauvais Esprit demande de bons parents, dans l'espérance que leurs conseils le dirigeront dans une voie meilleure.
32. Les parents peuvent-ils, par leurs pensées et leurs prières, attirer dans le corps de l'enfant un bon Esprit plutôt qu'un Esprit inférieur ? -
Rép. Non ; mais ils peuvent améliorer l'Esprit de l'enfant qu'ils ont fait naître : c'est leur devoir ; de mauvais enfants sont une épreuve pour les parents.
33. On conçoit l'amour maternel pour la conservation de la vie de l'enfant, mais puisque cet amour est dans la nature, pourquoi y a-t-il des mères qui haïssent leurs enfants, et cela souvent dès leur naissance ? -
Rép. Mauvais Esprits qui tâchent d'entraver l'Esprit de l'enfant, afin qu'il succombe sous l'épreuve qu'il a voulue.
34. Nous vous remercions des explications que vous avez bien voulu nous donner. -
Rép. Pour vous instruire, je ferai tout.
Remarque. La théorie donnée par cet Esprit sur l'instant de l'union de l'âme et du corps n'est pas tout à fait exacte. L'union commence dès la conception ; c'est-à-dire que, dès ce moment, l'Esprit, sans être incarné, tient au corps par un lien fluidique qui va se resserrant de plus en plus jusqu'à la naissance ; l'incarnation n'est complète que lorsque l'enfant respire. (Voy. le
Livre des Esprits, n° 344 et suiv.)
[1]Mademoiselle Rachel, ayant été évoquée quelques jours auparavant par l'intermédiaire du même médium, se présenta instantanément. On lui fit, à ce sujet, les questions suivantes :
- Comment se fait-il que vous soyez venue si promptement, à l'instant même où nous vous avons évoquée ; on dirait que vous étiez toute prête ? -
Rép. Lorsque Ermance (le médium) nous appelle, nous venons vite.
- Vous avez donc beaucoup de sympathie pour mademoiselle Ermance ?
Rép. Il y a un lien entre elle et nous. Elle venait à nous ; nous venons à elle.
- Il n'y a cependant aucune similitude entre son caractère et le vôtre ; comment se fait-il alors qu'il y ait sympathie ? -
Rép. Elle n'a jamais quitté entièrement le monde des Esprits.