Dissertations spirites
Le cardinal Wiseman
La Patrie du 18 mars 1865 relatait ce qui suit :
« Le cardinal Wiseman, qui vient de mourir en Angleterre, croyait au Spiritisme. C'est ce que prouve le fait suivant, qui est cité par le Spiritualist magazine.
Un évêque avait jeté l'interdit sur deux membres de son Eglise, à cause de leur tendance au Spiritisme. Le cardinal leva cet interdit et permit aux deux prêtres de poursuivre leurs études et de servir de médiums, en leur disant : « Je crois moi-même fermement au Spiritisme, et je ne pourrais être un bon membre de l'Église, si j'avais le moindre doute à cet égard. »
Cet article avait été lu et commenté dans une réunion spirite chez M. Delanne, mais on hésitait à faire l'évocation du cardinal, lorsqu'il s'est manifesté spontanément par les deux communications suivantes.
I
Votre désir de m'évoquer m'a amené vers vous, et je suis heureux de venir vous dire, mes frères bien-aimés, oui, sur la terre, j'étais Spirite convaincu. J'étais venu avec ces aspirations que je n'avais pu développer, mais que j'étais heureux de voir développer par d'autres. J'étais Spirite, parce que le Spiritisme est le chemin droit qui conduit au but véritable et à la perfection ; j'étais Spirite, parce que je reconnaissais dans le Spiritisme l'accomplissement de toutes les prophéties depuis le commencement du monde jusqu'à nos jours ; j'étais Spirite parce que cette doctrine est le développement de la religion, l'éclaircissement des mystères et la marche de l'humanité entière vers Dieu qui est l'unité ; j'étais Spirite parce que j'ai compris que cette révélation venait de Dieu et que tous les hommes sérieux devaient aider sa marche, afin de pouvoir un jour se tendre tous une main secourable ; j'étais Spirite enfin, parce que le Spiritisme ne lance l'anathème sur personne, et qu'à l'exemple de Christ, notre divin modèle, il tend les bras à tous, sans distinction de rang et de culte. Voilà pourquoi j'étais Spirite chrétien.
O mes frères bien-aimés ! quelle grâce immense le Seigneur accorde aux hommes en leur envoyant cette lumière divine qui leur ouvre les yeux, et leur fait voir d'une manière irrécusable qu'au-delà de la tombe existe bien une autre vie, et, qu'au lieu de craindre la mort, lorsqu'on a vécu selon les vues de Dieu, on doit la bénir lorsqu'elle vient délivrer l'un de nous des lourdes chaînes de la matière.
Oui, cette vie que l'on prêche constamment d'une manière si effrayante existe ; mais elle n'a rien de pénible pour les âmes qui, sur la terre, ont observé les lois du Seigneur. Oui, là, on retrouve ceux que l'on a aimés sur la terre ; c'est une mère bien aimée, une tendre mère qui vient vous féliciter et vous recevoir ; ce sont des amis qui viennent vous aider à vous reconnaître, dans votre véritable patrie, et qui vous montrent tous les charmes de la vie véritable dont ceux de la terre ne sont que les tristes images.
Persévérez, mes frères bien-aimés, à marcher dans la voie bénie du Spiritisme ; que pour vous ce ne soit pas un vain mot ; que les manifestations que vous recevez vous aident à gravir le rude calvaire de la vie, afin qu'arrivés au sommet, vous puissiez aller recueillir les fruits de vie que vous vous serez préparés.
C'est ce que je vous souhaite à vous tous qui m'écoutez et à tous mes frères en Dieu. Celui qui fut cardinal Wiseman.
(Médium madame Delanne).
II
Mes amis, pourquoi ne viendrais-je pas à vous ? Les sentiments exprimés quand j'étais sur votre terre et qui doivent être ceux de tous serviteurs de Dieu et de la vérité, doivent être pour tout Spirite convaincu, une assurance que j'userai de la grâce que le Seigneur m'accorde de venir instruire et guider mes frères.
Oh ! oui, mes amis, c'est avec bonheur et reconnaissance pour celui à qui nous devons tout, que je viens vous exhorter, vous qui avez le bonheur d'être admis parmi les ouvriers du Seigneur, de persévérer dans la voie où vous êtes engagés ; c'est sinon la seule, au moins la meilleure, car si une partie de l'humanité peut faire son salut avec la foi aveugle sans tomber dans les embûches et les dangers qu'elle offre, à plus forte raison ceux dont la foi a pour base la raison et l'amour de Dieu, que nous vous faisons connaître tel qu'il est, doivent arriver à conquérir la vie éternelle dans le sein de ce même Dieu.
Enfants, inclinez-vous, courbez la tête, car votre Dieu, votre père vous bénit. Glorifiez-le et aimez-le dans l'éternité !
Prions ensemble.
Wiseman, assisté par saint Augustin.
(Médium. M. Erambert, d'Aix.)
Ces deux communications ont été dictées simultanément, ce qui explique l'assistance de saint Augustin pour la dernière. Tandis que Wiseman faisait écrire l'un des médiums, saint Augustin faisait écrire l'autre auquel il transmettait la pensée du cardinal. Souvent on voit des Esprits peu avancés, ou encore dans le trouble, ne pouvoir s'exprimer sans l'aide d'un Esprit plus élevé, mais ce n'est pas ici le même cas ; Wiseman est assez dégagé pour rendre lui-même ses idées.
Les deux communications ci-après ont été obtenues le 24 mars, dans la société de Paris, sans évocation, à la suite de la lecture des précédentes. La quatrième est une appréciation des faits ci-dessus par l'Esprit de Lamennais :
III
Je viens, mes amis, confirmer ma communication de lundi. Je suis heureux de venir dans un milieu où j'aurais beaucoup à dire et où je suis sûr d'être compris. Oh ! oui, ce sera un grand bonheur pour moi de voir se développer sous l'œil du maître les progrès de la doctrine sainte et régénératrice qui doit conduire le monde entier à sa destinée divine.
Amis, unissez vos efforts dans l'œuvre qui nous est confiée et soyez reconnaissants du rôle que le Créateur de toutes choses vous a départi. Vous ne pourriez jamais assez faire pour reconnaître la grâce qu'il vous fait ; mais il vous tiendra compte de votre bonne volonté, de votre foi, de votre charité et de votre amour pour vos frères. Bénissez-le ; aimez-le, et vous aurez la vie éternelle.
Prions ensemble, mes chers amis.
Wiseman.
(Méd., M. Erambert, d'Aix.)
IV
La religion spiritualiste est l'âme du christianisme ; il ne faut pas l'oublier. Au milieu du matérialisme, du culte protestant et catholique, le cardinal Wiseman a osé proclamer l'âme avant le corps, l'esprit avant la lettre. Ces sortes de hardiesses sont rares dans les deux clergés, et c'est un spectacle inaccoutumé, en effet, que l'acte de foi spirite du cardinal Wiseman. Il serait étrange, du reste, qu'un esprit aussi cultivé, aussi élevé que celui de l'éminent cardinal eût vu dans le Spiritisme une foi rebelle aux enseignements de la plus pure morale du christianisme ; nous ne saurions trop applaudir, nous Spirites, à cette confiance éloignée de tout respect humain, de tout scrupule mondain. N'est-ce pas un encouragement que la voix d'un mourant aussi distingué ? N'est-ce pas une annonce pour l'avenir ? Une promesse qu'avec la bonne volonté tant prêchée par l'Évangile, il n'y a qu'une vérité contenue dans la pratique de la charité et la croyance en l'immortalité de l'âme ? D'autres voix non moins sacrées proclament chaque jour notre immortelle vérité. C'est un hosannah sublime que chantent les hommes visités par l'Esprit, hosannah aussi pur, aussi enthousiaste que celui des âmes visitées par Jésus.
Nous-mêmes, âmes en souffrance, n'éloignons pas de nous le souvenir qui nous arrive, et dans le purgatoire que nous subissons, écoutons les voix de ceux qui nous font voir au delà.
Lamennais.
(Méd., M. A. Didier.)